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traires, et c’est pourquoi saint Thomas dit : De ralionc fidei est, ut Veritas Prima omnibus præferatur. » Opus theologicum, Rome, 1687, t. ii, q. cxxxix, p. 443. « La foi divine, si elle est vraiment ce qu’elle doit être, dit Kilber, est appretialiue super omnia divinæ auctoritali ac revelationi graviter opposita… Son assentiment présuppose une volonté efficace de captiver et de soumettre en tout l’intelligence à la divine autorité qui parle : soit parce que c’est nécessaire pour croire de tout cœur, Act., viii, 37, soit parce qu’une véritable et entière captivité de l’intelligence l’exige. II Cor., x, 5. » Dans la Theologia Wirceburgensis, De flde, n. 221 ; ou dans le Theologise cursus de Migne, t. vi, col. 594. « Tout acte de foi chrétienne, dit PJatel, implique du côté de la volonté un ferme propos de se soumettre en tout à la divine autorite suffisamment proposée… De là vient que l’acte de foi chrétienne, commandé par ni le pieuse affection dont la portée est universelle…, ne peut se trouver chez un hérétique formel (hérétique de mauvaise foi) qui nie un article quelconque de la foi. Bien qu’il ne nie pas l’infaillibilité de la révélation divine en général, mais seulement que tel article soit révélé…, il fait pourtant injure à la divine autorité : parce que sa négation ne se produit pas dans des circonstances quelconques, mais dans le cas précis où cet article lui a été suffisamment proposé. Par là il fait une grave injure à la divine autorité (non pas en la niant théoriquement elle-même, mais en éludant pratiquement le culte qu’il lui doit), comme il ferait injure au roi, s’il ne voulait pas se rendre au témoignage du roi absent (ou à son ordre), quand il lui serait suffisamment proposé (par un intermédiaire digne de foi, une pièce authentique, etc.). Aussi un tel acte (l’acte de foi d’un hérétique formel sur les articles qu’il lui a plu de conserver) ne peut procéder de cette pieuse volonté de rendre un culte suprême à la divine véracité, volonté requise pour l’assentiment surnaturel de foi chrétienne, et qui donne à l’acte de foi d'être ex loto corde et super omnia. » Synopsis cursus theol., Douai, 1706, part. III, n. 267 sq., p. 277. « On ne peut faire un acte de foi divine (salutaire et surnaturelle), avait déjà dit Lugo, qu’en vertu de la volonté universelle de soumettre son intelligence à la foi. C’est faute de cette volonté qu’il ne peut y avoir un acte de foi divine dans l’hérétique (formel) même sur les autres articles de foi qu’il croit. » Dispul., t. ii, De fide, disp. XX, n. 186, p. 50. Et c’est la raison pour laquelle cet hérétique perd la vertu infuse de foi, désormais inutilisée par sa faute.

4. Conséquences.

Ainsi notre manière d’entendre le super omnia rend bien compte de cette thèse communément admise en théologie, que l’hérétique formel ne peut faire de véritables actes de foi sur les dogmes mêmes qu’il a conservés et qu’il reconnaît comme révélés. Tant qu’il cherche à se persuader, contre la réclamation intime de sa conscience, que tel dogme pas révélé, il ne peut avoir sérieusement le ferme propos universel de soumettre son intelligence à ta révélation comme à sa règle suprême ; de même qu’un pécheur, attaché à un péché mortel, ne peut avoir sérieusement le repentir des autres ni le ferme propos universel d'éviter tout péché mortel. Cet élément de volonté défectueuse n’a pas échappé à saint Thomas, quand, traitant cette thèse, il dit de l’hérétique formel : Inheeret proprise viiluntati… Non est paratus sequi in omnibus doctrinam Ecclesise, Sum, theol., II « II', q. v, a. 3 ; el quand il distingue de cette mauvaise disposition la bonne volonté du fidèle, qui paratus est omnia credere. I.oc cit.. a. I, ad I » . Voilà

ne.li' déman ation nettement tique formel et le vrai fidèle. seul, (lit l’abbé Mérit, "> vrai fidèle accepte avec un filial empressement tonte parole de Dieu, disposé toujours…a faire « le la

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parole de Dieu l’unique règle de ses pensées, de ses sentiments et de toutes ses actions. » Cette vraie foi peut se trouver même chez les hérétiques matériels, « mutilée, mais vivante dans les âmes invinciblement trompées ; enfants ravis à l'Église, jetés et retenus de force hors de la maison de famille, mais que la bonne volonté lient unis, sans qu’ils le sachent, à la pensée, à l’amour de leur mère. » Si nous pouvions lire dans les cœurs, « partout ailleurs n’apparaîtraient que de vains simulacres de foi… La foi de tant d’hérétiques et schismatiques fameux, de tant d’arrangeurs de religions ! … Le monde entier atteste, eux-mêmes confessent, que leur credo d’aujourd’hui n’engage pas celui de demain.. Prétendre que ces penseurs sans frein ni règle ont la foi, une foi comparable à celle des vrais chrétiens, c’est se moquer ouvertement de Dieu, des hommes et de soi-même. Pour croire en chrétien, il faut soumettre entièrement et irrévocablement son intelligence à la parole de Dieu. » La foi, Paris, 1880, p. 44-46.

C’est cet élément essentiel de la foi, si l’on n’y prend pas garde, qui peut manquer à la conversion de certains intellectuels de l’anglicanisme, habitués à décider de tout suivant leurs vues personnelles ou leur caprice, et qui n’ont jamais compris, dans leur milieu particulier d’indépendance spéculative, ce que c’est qu’une règle de l’intelligence et une autorité doctrinale, même en Dieu. On en a vu qui, dégoûtés de leur secte, pris un jour d’une sorte d’engouement pour l'Église catholique parce qu’ils la trouvaient seule logique, se sont convertis en vertu d’une théorie personnelle, qui leur plaisait en tant que personnelle. Plus tard, la même mobilité de pensée et le même attachement à leurs idées du moment les a ramenés au protestantisme. Quelqu’un qui les connaissait bien, un illustre converti de l’anglicanisme, Mgr Croke Robinson, ancien fellow d’Oxford, écrit à leur sujet : « Ce ne sont pas des apostasies réelles… Ils n’avaient qu’une conviction intellectuelle. » C’est-à-dire qu’il leur manquait cette humble, entière et irrévocable disposition de la volonté, élément nécessaire de la foi. « Ces gens ne sont pas des apostats, car ils n’ont jamais eu la foi. » Roads lo Rome, collection de souvenirs personnels de plusieurs convertis, Londres, 1901, p. 221. C’est dans le même sens que nous partageons cette théorie du même auteur : « La conviction intellectuelle n’est pas la foi… Il y a des milliers de gens aujourd’hui qui sont intellectuellement convaincus que, de toutes les sociétés se prétendant chrétiennes, seule l'Église catholique est logique et inattaquable dans ses articles de foi. Mais ils ne deviennent pas et ne deviendront jamais catholiques, parce qu’ils n’ont pas la foi… Dieu seul peut donner la faculté de voir dans l’ordre de la grâce comme dans celui de la nature ; et jusqu'à ce qu’il la donne, personne ne peut l’atteindre par aucun procédé de raisonnement scientifique. » Loc. cit. Ce n’est pas que la grâce de la foi ne soit olïcrte à tous, mais l’orgueilleuse indépendance dont nous avons parlé lui oppose un obstacle absolu.

5. Remarques.

a) Quand nous disons que cette résolution de préférence » est un élément de la foi, nous ne prétendons pas qu’elle doive être renouvelée à chacun des odes <lr foi. Ce serait mettre à l’acte de foi une condition onéreuse et i esti active, qui diminuerait forcément le nombre de ces actes, appelés pourtant a être fréquents dans la vie du chrétien, comme nous le savons par la révélation, t 'n théologien

n’a pas le droit de poser de telles conditions, à moins d’y être forcé par la révélation même ou ses conséquences logiques. Or ici, rien ne nous force i I igcr, pour qu’il y ait vraiment ; n le de foi, un renomclle mini actuel de celle disposition d'âme, loties quottts. i ne disposition générale de la volonté ne peut elle

VI.

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