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divine. » Concile du Vatican, c. iii, Denzinger, n. 1790. Aussi, M. Brunschwicg a-t-il bien noté que la conception du miracle chez M. Le Roy, quoi qu’en dise celui-ci, diffère radicalement de la conception traditionnelle. Bulletin de la Société française de philosophie, mars 1912, p. 108 sq. Et M. Blondel, « que le système de M. Le Roy combine ensemble des thèses confuses et inexactes…, incompatibles les unes avec les autres au point de s’entre-détruire, délétères au point de détruire cela même qu’elles prétendent expliquer et maintenir (le miracle). » Ibid., p. 1.53.

b) Après avoir donné à la foi le rôle de « génératrice du miracle » le nouveau système lui donne encore celui de reconnaître le miracle, de le discerner. Ici revient, et plus manifestement, l'équivoque du mot < foi » : tellement que M. Le Roy, pressé par les objections du P. Laberthonnière, finit par déclarer qu’il parle de deux espèces de foi. En présentant la foi comme génératrice du miracle, « je prends, dit-il, le mot foi dans l’acception la plus large : ce n’est… ni forcément la foi chrétienne ou, en général, la foi religieuse, ni même une foi légitime et fondée… Mon attention ne se porte que sur son intensité, et sur l'éclair d’exaltation qui peut résulter pour elle de certaines circonstances… C’est un fait que la foi guérit… Ce n’est pas (de la foi chrétienne) particulièrement que je parle, mais de la foi-confiance en général… Quelle que soit la manière dont, ultérieurement et pour d’autres motifs, on qualifiera la foi génératrice, c’est toujours comme foi-confiance qu’elle engendre la matérialité du miracle, ou plus précisément du fait qui peut être miracle (car au point de vue de la pure matérialité, miracle et prestige ne font qu’un) ; et c’est pourquoi les faits extraordinaires dont nous parlons peuvent être acceptés par le savant… Venons maintenant au discernement du miracle. Cette fois, il s’agit bien de la foi chrétienne, puisque c’est du point de vue de cette foi que j’ai voulu indiquer comment peut se faire la discrimination du miracle et du prestige… N’e confondons pas foi-confiance et foi-croyance, foi psychologique et foi surnaturelle. » Bulletin, p. 151, 1°>2. Mais alors, si la foi génératrice n’a pas besoin d'être religieuse, ni même « légitime et fondée, » si « 'est une foi-confiance quelconque pourvu qu’elle ait i un éclair d’exaltation, » s’il ne faut pas « la confondre avec la loi surnaturelle, » comment a-t-on pu dire ailleurs que le miracle est surnaturel, parce que cette foi qui le produit « l’est elle-même ? » Annales…, loc. cil., p. 250. Comment a-t-on pu dire plus haut que cette foi est i une participation vécue à des réalités divines, e vivifiante et libératrice ? » Bulletin, p. 105. El si l’autre foi » , celle qui doit discerner le miracle, est la foi chrétienne, » alors le miracle n’est pas fait pour persuader ceux cpii ne l’ont pas, les infidèles : ce cru i

ontraire à la tradition des Pères et à saint Paul. I Cor., xiv, 22. M. I.e Roy cherche à éviter ce dernier inconvénient : « En disant que le miracle est un signe qui s’adresse à la foi et n’est entendu que de la foi, je parle d’une foi naissante, non parfaite, qui se cherche e, qui travaille à s'éprouver et à s’accroître. Voilà pourquoi le miracle peut jouer son rôle apologétique, peut concourir a la genèse de la foi qu'à un autre point de vue il rappose. il serait Indiscernable, il serait lettre moite pour qui ne posséderait aucun commencement ' ! > foi. Bulletin, p, 107, 108. '.et adoucissement n’en i > a s la contradiction avec l'Écriture ci in tradition. Ie n 'I lamaia que d’une croissance et d’un progrès, dit M. I.e Roy, non poinl d’une création <> nlhllo, qu’il s’agit au sujcl de la foi et de la grfli

'il. Saint Paul, lui, y voit une création : Dieu

qui a dit : Que la lumière brille du sein des téni

lui qui a fait luire sa chuté dans nos Cœurs, i II Cor., i.Nous sommes son ouvrage, ayant clé créés en

Jésus-Christ dans les bonnes œuvres. » Eph., Il, 10Aussi parle-t-il d’une « nouvelle création » . II Cor., v, 17. Les infidèles n’ont pas une foi chrétienne « qui travaille à s’accroître : » ils n’ont pas un atome de foi chrétienne. Tout ce qu’ils ont, c’est la loi naturelle « écrite dans leurs cœurs, » Rom., il, 15, c’est la raison qui, aidée au besoin d’une grâce facilitante, peut et doit leur donner certains préambules de la foi, nécessaires à la conception et au discernement du miracle, comme l’existence et la providence de Dieu, sa toutepuissance et la possibilité du miracle. Mais ne confondons pas la foi et ses préambules : de ce que certains de ses préambules sont nécessaires au discernement du miracle, ne concluons pas que la foi chrétienne elle-même lui soit nécessaire, et qu’il ne s’agisse pour i l’incroyant que d’augmenter cette foi.

Quant au cercle vicieux que M. Le Roy se propose S d'éviter, volontiers nous reconnaissons qu’il l'évite, en i n’exigeant qu’une foi « naissante » pour discerner le I miracle, et en réduisant le rôle apologétique du miracle à « accroître » la foi. On l'éviterait encore mieux, c’estj à-dire sans tomber dans d’autres inconvénients que nous avons signalés, si l’on disait que la foi proprement ' dite n’est requise à aucun degré pour reconnaître et discerner le miracle. A propos de cercle vicieux, nous devons signaler une autre objection de ce genre contre notre apologétique traditionnelle, contre la preuve de nos mystères par le miracle : « C’est un cercle vicieux, de prouver le surnaturel par le surnaturel. » Des erreurs opposées à l’extrême, le rationalisme allemand et le fidéisme de Bautain, ont fraternisé en nous faisant cette objection. Voir Hettinger, Théologie fondamentale, t. i, § 20, trad. franc., Paris, 1888, p. 282. — Réponse. — Le cercle vicieux revient à prouver une chose (qui a besoin de preuve) par elle-même : a par b et b par a, donc en définitive a par a. Mais dans notre cas, il n’y a que le mol de surnaturel qui soit identique des deux côtés, et qui donne une apparence de pétition de principe ou de cercle vicieux : ce mot couvre en réalité deux choses fort différentes. La première, le mystère, est inaccessible à notre expérience naturelle et à notre raison philosophique, mais peut se prouver par le témoignage divin, dont le fait se constate au moyen de signes miraculeux, si Dieu veut nous donner révélation et miracle, ce qui est pour nous une grâce extérieure ; et la preuve est valable, car le témoignage bien constaté d’un infaillible témoin est une source extrinsèque de certitude. La seconde chose, le miracle, avec la fait de la révélation dont il est le sif ; nc, pour surnaturel » qu’il soit appelé, tombe cependant sous l’expérience humaine et sous la raison naturelle, et est transmissible par le témoignage humain : c’est donc comme un pont jeté entre les mystères invisibles et nos facultés humaines ; pont de fabrication toute divine, mais ouvert à notre connaissance naturelle pour qu’elle y entre de plain-pied, quand il est gratuitement donné. Ainsi le surnaturel le plus caché se trouve relié à la connaissance rationnelle par un procédé logiquement cohérent. Lorsqu’elle aborde ce procédé, la raison humaine, d’une part, n’est pas laissée entièrement à ses seuls moyens naturels, puisqu’elle dépend alors de la grâce extérieure de la révélation ; mais, d’autre part, elle n’a pas besoin d’elle éle ce par une vertu infuse ni de recevoir ainsi de nouvelles forces intérieures, tant qu’elle ne fait encore que constater avec une certitude morale et naturelle le fait de cette

révélation, avant la certitude surnaturelle de L’acte

de loi, lequel peut d’ailleurs être différé ou même refusé. Voir Ce que nous BVOnS dil du suin.it tu et et du

naturel, col. 27n. Bien des erreurs contemporaines sur la révélation et i.i foi viennent de ce que l’on

n’a pas exactement saisi l’ensemble de ce prOCeMUS, qut

fait comme l’ossature <i< l’apologétique traditionnelle.