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contraire : c’est la faculté qui, bien que produisant son acte d’une activité immanente, dépend de son objet, qui est passive par rapport à lui, qui dans son acte est déterminée par lui. Le cardinal d’Aguirre, après avoir rappelé ce rapport inverse qu’a l’homme avec l’objet extérieur, quand il s’agit de le produire ou de le connaître, conclut : « Puisque la nature, considérée en soi, ne contient pas l’cffet surnaturel ou miraculeux, il s’ensuit qu’elle ne peut le produire par ses propres forces ; mais cela ne l’empêche pas d’en tirer une connaissance évidente, une fois qu’existe cet effet. Car l’intuition naturelle peut dépendre d’un objet miraculeux ou surnaturel existant, comme de sa cause formelle extrinsèque, ou qui termine la connaissance : il n’y a, en effet, aucune contradiction à ce qu’un être inférieur en ordre ou en dignité dépende d’un être supérieur, et le suppose existant ; tandis qu’il y a contradiction à ce qu’une cause efficiente produise un effet qu’elle ne contient pas du tout. » S. Anselmi Iheologia commeniariis illustrata, Rome, 1688, t. i, lisp. VIII, n. 25, p. 179.

Sans doute, il est une espèce d' « objet surnaturel » qui échapperait absolument à notre intelligence, si celle-ci n'était élevée par une grâce intérieure, par un habilus infus. C’est Dieu perçu en lui-même par la vision intuitive. Sans même parler de sa transcendance par rapport à toute créature, un tel objet échappe spécialement à la nature humaine, parce que, dans l’homme, la connaissance naturelle des choses suprasensibles est abstractive, c’est-à-dire tout l’opposé d’une intuition. Voilà donc un « objet surnaturel » auquel doit répondre une « faculté surnaturelle » , un habilus élevant l’intelligence, le lumen glorise des théologiens..Mais il y a un abîme entre Dieu lui-même vu lace à face, et un simple signe donné par lui ou un ensemble de signes, comme le miracle ou la révélation par laquelle il témoigne : signes adaptés à nos yeux de chair ou à nos oreilles, à nos concepts abstraits notre raisonnement naturel sur les données des sens ou sur les causes des phénomènes : en un mol, les à notre nature. Que des théologiens, par une synthèse tardive, aient étendu à ces signes (parce que nous ne pouvons ni les produire ni les exiger) le grand nom de i surnaturel » , tandis que d’autres auteurs, craignant quelque dangereuse confusion, préfèrent les classer dans un ordre à pari, le « préternaturcl » , aussi éloigné de l’ordre surnaturel de la vision intuitive que le l’ordre même de la nature, ce sont là des classifications qui, comme celles de la botanique, par exemple, n’ont de valeur qu’autant qu’elles se rapprochent le plus possible de la réalité des faits, et qu’on ne doit jamais prendre naïvement comme une vérité première, Comme un principe évident, devant lequel les faits eux-mêmes soient obligés de plier. On ne doit jamais nier ainsi : je range sous la même étiquette d’objet surnaturel non seulement Dieu vu en luimême, mais le miracle, la révélation, l'Église et ses charismes, etc. Donc, en vertu de cette classification, de même qu’il faut une faculté surnaturelle » pour

lieu, il en faudra ('gaiement une pour voir les . qu’il donne de la révélation, de la mission de Jésus ou de <ille de l'Église, en un mot, pour faire de l’apologétique raisonnable et légitimement certaine, i argumenter de la sorte serait subordonner le réel ; ï l’arbitraire, la chose, , l'étiquette. Non, c’esl chacun 'jets dénommés surnaturels qu’il faudra étu dler soigneusement et séparément, pour découvrir, d’après leur nature ou d’après la révélation, 'i Il Ues sont, i l'égard de chacun d’eux les conditions de notre

< "lin i l’obji l est isilde de sa nature,

<-. mime le mirade présent sous nos yeux, ou raconté

par une histoire authentique, la nature Intelligente, qui n’a pu le prévoir, ni le faire, ni l’exiger, pourra

cependant suffire à le constater quand il est donné. S’il est invisible, comme l’est pour nous actuellement le fait eschatologique de la vision intuitive de Dieu, alors, pour qu’il soit connu de nous comme certain dans l’avenir, entrevu de loin, sous nos concepts abstraits de « Dieu » et de « voir » , il y faut la grâce extérieure de la révélation, mais rien ne prouve, en outre, l’absolue nécessité d’une sorte de faculté nouvelle pour le saisir ainsi. De tels objets, dit le cardinal Billot, « étant une fois supposée la grâce extérieure de la révélation, peuvent être atteints par un acte naturel, c’est-à-dire produit par les seules forces de la nature… La vie éternelle elle-même, nous pouvons la connaître et la désirer par un acte purement naturel, sans aucun don intrinsèque élevant nos facultés. En effet, la béatitude surnaturelle consistant dans la vision de Dieu peut naturellement être représentée par un concept analogique, et être connue dans la réalité de son existence par le témoignage de la révélation confirmée par des signes suffisants. Elle peut semblablement être désirée de ce désir qu’on appelle appetitus elicitus, car ce désir naturel se porte sur tout ce qui est connu comme perfectionnant le sujet qui désire : serait-il sensé d’en excepter le bien de la vie éternelle ? » De virtutibus infusis, 2e édit., Rome, 1905, 1. 1, p. 68-70. SDdonc nous savons par ailleurs, par la tradition des Pères ou des docteurs basée sur les données de la révélation, qu’une grâce intérieure et surnaturelle doit d’une absolue nécessité coopérer aux actes de foi ou d’espérance par lesquels nous tendons méritoirement à cette béatitude surnaturelle, et qu'à cette grâce nécessaire appartiennent les vertus infuses, cette nécessité absolue de la grâce intérieure ne provient pas de ce qu’avec le seul secours extérieur de la révélation tout « objet surnaturel » échapperait absolument à notre faculté de con naissance naturelle, mais de ce que la faculté doit être élevée pour que l’acte ait dans son essence cette perfection intrinsèque spéciale qui le met en proportion avec la fin à atteindre, et le rend salutaire pour lajustification, méritoire pour le ciel. Aussi les conciles, continue Son Éminence, ont parlé avec une grande précaution, quand ils parlent de la nécessité absolue de la grâce pour faire les actes mêmes de foi, d’espérance et de charité ; ils ajoutent toujours cette limitation : pour faire ces actes sicut oporlct, sicut congruil ad justificationem et vitam œlrrnam ronsequendam. » Loc. cit., p. 70. Enfin, si nous nous transportons dans la patrie, s’il s’agit de notre vision intuitive non pas entrevue dès à présent et en énigme, mais un jour vraiment réalisée, c’est là qu’il faut absolument, pour atteindre Dieu en lui-même, pour cet objet surnaturel » au sens le plus élevé du mot, que la faculté soit élevée par un habilus infus, le lumen gloriee ; et jamais un tel objet ne pourrait être atteint d’une manière quelconque, pâlies forces de la nature.

Il serait surtout arbitraire d'établir une corrélation nécessaire et absolue entre cette : 4ràce extérieure du

miracle et de la révélation, que les pélagiens admettaient, que saint Augustin consentait a peine i appeler du nom de. grâce, et la grâce intérieure et proprement dite à laquelle appartient la vertu infuse de foi, liée int rinséqucment a la Justification, a la grâce sanctifiante, à la déification du chrétien. Pour établir une pareille corrélation, il n’y a pas entre ces deux termes la proportion voulue ; ils ne sont pas au même sens l.i grâce. te surnaturel.

Il y a là deux ordres différents de dons, qu’on

peut appeler l’ordre préternaturcl » et « l’ordre surnaturel. En sorte que le principe même de proportion qu’on invoque en le pressant trop : » Il faut

une communauté de nature entre le sujet et l’objet, » se retournerait plutôt contre cette thèse nouvelle

qui, lorsqu’il l’agll de constater simplement le lail