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et aussi fermement, qu’ils adhèrent maintenant à la religion catholique… On peut leur concéder qu’ils n’ont pas péché par cette croyance, mais non pas qu’ils aient été alors sans aucun doute, au moins habituel et en germe. Car ils n’avaient alors ni l’évidence méta physique, puisqu’elle est liée à la seule vérité, ni une certitude surnaturelle, puisque Dieu ne peut inspirer comme certaine une chose fausse, ni faire un miracle pour délivrer alors entièrement du doute. » Ils avaient donc au moins un germe de crainte, qui se serait développé s’ils avaient réfléchi. « Et même on peut ajouter comme plus probable que dans celui qui croit une erreur, il intervient nécessairement un doute actuel, au moins léger. » Loc. cit., n. 8-10, p. 202, 203. Toujours l’instrument de précision cher encore aujourd’hui à plus d’un philosophe catholique ! Et notons la théorie faussement supposée, que « l’évidence métaphysique » est indispensable pour avoir la fermeté d’adhésion, à moins de recourir au surnaturel et au miracle. Voir col. 217 sq. Pérez conclut qu’il ne faut pas facilement les excuser de péché, n. 14, p. 204, et qu’il ne faut pas ajouter foi à ces convertis, quand ils disent qu’ils ont cru aux hérétiques avec une adhésion aussi ferme, du côté de l’intelligence, que celle qu’ils éprouvent maintenant. Loc. cit., n. 11, p. 203. A tout cela voici la réponse d’un autre théologien espagnol, mais celui-ci connaissant mieux les hérétiques, parce qu’il enseignait à Prague, à la même époque : « Je réponds que cet auteur (Pérez, sans le nommer), qui, peut-être, n’a jamais traité avec un hérétique, montre bien peu d’expérience sur ce point… Les hérétiques sont aussi attachés à leur croyance, avec une erreur parfois invincible, ils chancellent aussi peu, souvent même ils doutent moins de leurs erreurs que les catholiques de la vérité. Dire que les convertis, quand ils attestent avoir cru jadis à l’hérésie avec la même fermeté, mentent ou s’illusionnent, c’est une affirmation bien hardie et qui étonne : quel meilleur témoignage pouvons-nous avoir que le leur sur l’état d’âme où ils étaient ?… Et quand même, à la première discussion avec des catholiques, les hérétiques vacilleraient dans leur croyance, il ne s’ensuivrait pas qu’ils n’aient pas eu auparavant un acte de croyance ferme, mais seulement qu’ils n’y ont pas persévéré » (la persévérance étant une autre question, à traiter ailleurs). Arriaga, Disput. theologicee, Anvers, 1649, t. v, dist. I, n. 41, p. 12. Ajoutons que le système de Pérez, s’il était généralement admis, pourrait servir a garantir toutes les erreurs. Puisque c’est un fait, que dans toute religion les enfants et les simples croient fermement sur la parole de leurs éducateurs, des ministres hérétiques, mahométans ou païens pourraient leur dire, en abusant de ce fait même : Vous croyez nos mystérieuses doctrines sans aucun doute, c’est un miracle et Dieu ne peut faire le miracle qu’en faveur de la vérité, i

Objections de Pérez. — i Si VOUS supposez que (les hérétiques de bonne foi) adhèrent à leurs erreurs tout comme nous aux articles vraiment révélés, ils feront un péché en allant écouter le prédicateur catholique et en doutant de leur secte. » Loc. cit., n. 11, p. 203. — Réponse. — Oui, il prul se faire que d’abord ils pèi lu ut en cela, surtout si ceux qui les instruisent (ce qui n’arrive pas toujours dans le protestantisme, à cause du libre examen) leur ont défendu d’écouter les catholiques, et dé douter : on pèche en résistant a sa COU nce invinciblement erronée. — Mais : ilors, ils

doivent confesser qu’ils ont péché i n se convertissant, qu’Us ont mal f ail d< se convertir : et pourtant ils voient clairement le contraire. » Loc. cil. — Krponsr. — En étudiant davantage la question religieuse, et la grâce aidant, vient un moment où leur erreur n’est plus in

vtncible, ou Ils reconnaissent qu’il est permis et même

I commandé d’en sortir. On en dirait autant du catho, lique à qui son curé aurait enseigné un faux article [ de fei, il finirait par voir que la doctrine de l’Église est différente, et qu’après tout le témoignage de son curé I n’a de valeur qu’autant qu’il représente l’Église. Il faut donc, pour le converti, distinguer deux temps : ses premiers doutes ont pu être une faute contre la conscience, mais des doutes ultérieurs, et la conversion qui s’en est suivie, ont été des actes de vertu et’de prudence et leur apparaissent définitivement comme tels. — « Vous voulez donc accorder à un ignorant, persuadé par un ministre hérétique, la même sécurité, la même fermeté que saint Paul admire et loue dans Abraham. » Loc. cit., n. 23, p. 205. — Réponse. — L’ignorant, même catholique, n’a pas un degré très haut de perfection dans la fermeté ; sa sécurité n’a pas autant de mérite (bien qu’elle suffise à l’acte de foi), parce qu’il ne voit pas les difficultés, que d’autres verraient. Ce que saint Paul fait ressortir dans la fermeté extraordinaire de la foi d’Abraham, c’est précisément qu’il a résisté aux difficultés et aux raisons de douter qui s’offraient à lui très vivement, puisqu’il s’agissait d’un fait personnel, absolument opposé aux lois de la nature, fait qu’il était depuis longtemps habitué à considérer comme impossible, et que tout à coup Dieu lui annonçait. Rom., iv, 18-21. — Enfin, une objection philosophique se devine au fond de la pensée de Pérez, quoiqu’il ne l’exprime pas clairement : c’est que l’on compromet la valeur de la raison humaine pour atteindre le vrai, la valeur de la certitude humaine en général, si l’on admet que notre raison peut se comporter de même, avoir la même adhésion ferme, en face du vrai et en face du faux : et cette idée, on la retrouverait encore aujourd’hui chez plusieurs. — Réponse. — De ce que la raison, dans certaines conditions défectueuses et dans des jugements dont les motifs ne sont pas contrôlés (comme c’est le cas des simples), adhère au faux comme au vrai, cela ne l’empêche pas de pouvoir, dans de mrilleures conditions, atteindre le vrai avec une évidence contrôlée, avec des motifs que l’on examine et dont on reconnail la valeur infaillible. De ce que la raison humaine est faillible per accidens, comme disent nos philosophes, cela ne l’empêche pas d’avoir normalement, per se. une certaine infaillibilité dans la possession du vrai. La certitude humaine n’est donc pas en danger d’une manière générale, quoique la raison éprouve des accidents et des imperfections que Pérez ne voulait pas reconnaître, de peur de tout ébranler.

2. Système de Pallavicini.

Il réfute d’abord son prédécesseur Pérez, par cette raison entre autres : La crédibilité doit précéder la volonté de croire, et la foi. Or, la grâce dont parL Pérez ne les précède pas, elle ne s’exerce qu’au moment précis de l’acte de foi, au moment où l’on arrive à croir.’fermement le mystère proposé ; c’est alors seulement que se ferait le discernement du vrai et du faux article, que l’enfant a tous deux essayé de croire, sur la parole du curé qui les a dits tous deux révélés. Cette grâce miraculeuse ne peut donc servir comme motif de crédibilité, comme prcu e du fait de la révélation, avant la foi : (die arrive trop tard. — A quoi Pérez. aurait pu répondre qu’il n’entendait pas faire de cette grâce miraculeuse un nouveau motif de crédibilité : que par (Ile il voulait si n lement obtenir de fait l’adhésion infaillible et ferme que ne pouvaient obtenir des motifs de crédibilité purement relatifs, et manquant d’infaillibilité j el qu’il expliquait ainsi la différence d’adhésion au vrai

et au faux article, différence qui lui semblait Qéceg Sain pour sauver la valeur de la raison et de la cerli tude en général. — Mais cet argument de Pallavicini nous fait bien voir son idée à lui : il Veut, lui, par une

miraculeuse, ajouter aux preuves du fait de la