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logiens qui admettent ce rôle l’ont entendu de deux manières différentes, qui, d’ailleurs, ne s’excluent pas, et que nous allons successivement examiner :

Ve manière : production directe du jugement de crédibilité (pratique) par la vertu de foi. — De même que i’habitus fidei, d’après la théorie commune, élevant notre intelligence, produit avec elle l’acte de foi, ce qui est sa fonction principale, de même ne pourrait-on pas supposer qu’il a pour fonction secondaire de produire (elicere) avec la même intelligence, avant l’acte de foi, le jugement de crédibilité pratique, acte surnaturel lui aussi comme nous le verrons plus bas, au sujet de la foi, vertu surnaturelle ? Ainsi expliqueraiton avec aisance et comment la surnaturalité nécessaire à ce jugement de crédibilité est réalisée, et comment par la vertu infuse de foi on voit que les mystères doivent être crus, esse credenda, d’après saint Thomas cité plus haut. Aussi, dans l'école thomiste, plusieurs ont-ils admis cette hypothèse, tandis que d’autres thomistes la rejettent, comme les théologiens de Salamanque, pour cette triple raison : la vertu infuse de foi a un caractère d’obscurité, donc elle ne peut produire un acte évident comme ce jugement de crédibilité ; elle a pour objet formel la révélation, donc elle ne peut produire un acte qui ne s’appuie pas sur la révélation mais simplement sur la raison, laquelle montre qu’il est raisonnable et obligatoire, si Dieu a parlé, de lui donner un très ferme assentiment ; enfin Yhabitus fidei est fait pour l’acte de foi, et ce jugement de crédibilité n’est pas l’acte de foi, mais le précède. Cursus theologiæ, 1879, t. xr, dist. I, n. 202, p. 93. Suarez avant eux avait déjà rejeté l’hypothèse pour cette même raison principale, qu’un liabitus ne peut pas agir en dehors de son objet formel qui spécifie son action. Opéra, 1858, t. xii, dist. IV, sect. vi, n. 2, p. 136. D’autres théologiens de la Compagnie de Jésus notent que la preuve de Suarez n’est pas décisive. Arriaga observe que cette limitation de la vertu infuse à une seule espèce d’actes reste incertaine : « Et comment savonsnous que notre vertu infuse n’a pas une double fonction ? Puisque cette évidence de crédibilité est de soi une disposition à l’acte de foi, on peut dire très probablement qu’elle procède de la même cause que cet acte : dans l’ordre physique, la cause qui a la fonction principale de produire la forme peut d’ordinaire produire aussi les dispositions à la forme… La question reste sans solution certaine, i Dispulaliones theologicæ, Anvers, 1619, t. v, disp. V, sect. v, p. 93, 94. Lugo, lin que suivant ici l’opinion de Suarez, est obligé pourtant de convenir qu’il ne faut pas trop argumenter des axiomes philosophiques sur la nature des liabitus, axiomes tirés uniquement de l’expérience des habitudes acquises ; que les vertus infuses ont une sphère plus étendue que les habitudes acquises. » Dispulaliones sclwlaslicæ, 1891, t. i, disp. V, n. 40, p. 328. Et ailleurs, il dit que la vertu infuse, participant de la nature d’une faculté, peut s'étendre à plusieurs espéces d’actes, et en quelque sorte avoir plusieurs objets formels subordonnes. Op. cil., disp. I, n. 230, 237, p. 115, 116. De nos jours, le cardinal Billot est de ceux qui attribuent à la vertu infuse de foi la production de jugement de crédibilité. De vtrtutibu » inftuis, 2e édit., Rome, 1905, thés, xvii, § 1, p. 301. Sans doute, comme ( < Jugement a un objet présenté par la raison naturelle, on aura peine à l’attribuer à la vertu infuse, si l’on admel cette autre théorie de Suarez et d’un bon nom bre de théologiens de son ordre et de l'école thomiste, que la surnaturalité d’un acte est toujours commandée par son objet, en d’autres termes, qu’une Vertu infuse ne peut jamais agir que sur un objet absolument Inaccessible à la simple nature ; et le cardinal bien, à propos de la question présente, toc. >ii., l’emb I théologiens atta< ni i ; cette thi

laquelle complique bien gratuitement et d’une manière parfois insoluble, une foule de questions sur les vertus et les actes surnaturels ; lui-même l’a réfutée. Op. cit., l’rolégomène, p. 64 sq.

2e manière : influence indirecte, ou disposilive, de la vertu de foi sur les jugements de crédibilité. — C’est plutôt ainsi, semblc-t-il, que saint Thomas entend l’influence de la vertu infuse, je ne dis pas sur l’acte de foi, mais sur le jugement de crédibilité. Pour ce qui est de l’acte de foi lui-même, il entend sans aucun doute que I’habitus fidei le produira directement : parlant de la foi non pas comme acte, mais comme habitus cognoscilivus, il dit : fîdes assenlit, Sum. theol., IIa-IIæ, q. I, a. 1 ; elle a son acte propre : fides, cum sit habitus quidam, débet definiri per proprium actum, actus autem fidei est credere, q. iv, a. 1 ; aussi est-elle dans l’intelligence : credere autem immédiate est actus intcllcclus, quia objectum hujus actus est verum… et ideo necesse est quod fides, quse est proprium principium hujus actus, sit in intellectu tanquam in subjecto, a. 2. Ce n’est donc pas en traitant directement de la production de l’acte de foi, mais en considérant les actes qu’il présuppose, que saint Thomas dit ailleurs : hic lamen habitus non movet per viam intellectus, sed magis per viam voluntatis ; cette vertu de foi ne vise pas à produire une évidence qui force l’assentiment, ce qui serait la perfection au point de vue intellectuel, mais à produire l’assentiment, avec l’intervention de la volonté : non facit videre Ma quse creduntur nec cogit ad assensum, sed facit voluntarie assenliri. Opusc. in Boelhium, q. ni. a. I, ad4" m. Nous comprendrons mieux tout cela, si nous nous rappelons qu’il y a des assentiments de l’intelligence qui dépendent des bonnes dispositions morales ; que tels sont, entre autres, les jugements de crédibilité et l’acte de foi ; qu'à l’accomplissement de tels actes intellectuels correspondent, en fait de principes permanents qui aident à les produire, non pas seulement une sorte de faculté infuse complétant notre intelligence pour les produire directement, ce qui est Yhabitus fidei au sens strict, mais encore une bonne disposition morale, surnaturelle, un habitus de la volonté, infus lui aussi, accompagnement nécessaire du premier : ideo oporlct quod tam in voluntate sit aliquis habitus, quam in intellectu, si debeat actus fidei esse perfectus, II 1 II » , q. iv, a. 2 ; enfin, que le nom (Yhabitus fidei peut s'étendre au groupe de ces deux habitus, ramenés à une véritable unité non pas physique mais morale, parce que subordonnés l’un à l’autre et tendant à une même fin. C’est en prenant Yhabitus fidei dans ce sens plus large et plus compréhensif, que saint Thomas, pour expliquer l’influence de la vertu infuse de foi sur la crédibilité, sur le discernement dis vérités révélées et dis erreurs qui leur sont contraires, a pu l’assimiler aux autres vertus qui ne sont pas dans l’intelligence mais dans la volonté (par exemple, la chasteté) < t à l’influence qu’elles ont pour repousser les objets qui leur sont contraires : i Y' habitus fidei a aussi cette puissance de retenir l’intelligence du Adèle et d’empêcher qu’elle ne donne son assentiment aux choses contraires à la foi, de même que la chasteté sert de frein pour empêcher d’aller à ce qui est contraire a la chasteté. » Quwsl. disp.. De vcrilatc, ([. xiv, a. 10, ad 10'"". (/est la vertu infuse de foi dans us plus large ctpluscomprchensif, qui inspiraitaux barbares Convertis cette haine vertueuse de l’erreur,

cette répugnance Instinctive au* hérésies, que loue en

eux saint Irénée : « Si quelqu’un, sachant leur langue, vient a leur annoncer les inventions des hérétiques, aussitôt, se bouchant les oreilles, ils s’enfuient, ne pouvant pas même supporter d’entendre ces paroles blasphématoires, i ('.ont. lurr., 1. III, c. iv, /'. <V., t. .

col. 855. Cependant, entre la vertu de loi. qui suppo » la révélation et qui. comme elle, pourrait ne pas