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lité, t. iii, col. 2238, 2239. Cf. Le Bachelct, loc. cil., col. 192. Observons comment au besoin les apôtres raisonnent avec les Juifs, pour maintenir aux yeux de la raison le caractère miraculeux des signes, et les défendre d’une fausse interprétation. Le jour de la Pentecôte, quand une partie des assistants attribue à une grossière ivresse l’enthousiasmeetles charismes des apôtres, Pierre rappelle que l’ivresse n’est pas vraisemblable à cette heure du jour, et les renvoie à leurs prophètes. Act., ii, 13, 15. Après un autre miracle, Pierre en explique au peuple la véritable portée : ce n’est pas par leur propre puissance, c’est par celle de Jésus, par la foi en son nom, que le miracle a été fait : c’est donc la foi en Jésus que ce miracle confirme. Act., m, 12, 16. Dans la synagogue de Thessalonique, Paul, la Bible en main, établit la messianité de Jésus, xvii, 2, 3. Il s’attache à l’argument des prophéties, spécialement adapté aux Juifs, puisqu’ils admettaient déjà la divine inspiration des prophètes. Nous avons déjà vu à quel examen critique des Écritures il provoque les Juifs de Bérée, xvii, 11, 12. Aux fidèles, il donne ses miracles comme signes de sa mission apostolique, que l’on avait contestée. II Cor., xii, 12.

5° Les Pères sont-ils favorables au fidéisme ? — Nous avons vu qu’en expliquant la nature de la foi, ils opposent la foi à la « démonstration » , à la « raison » , entendant par ces mots la preuve intrinsèque et philosophique, qui est la démonstration par excellence. Voir col. 114. Si c'était là être fîdéiste, nous le serions avec eux. Mais de ce que la foi n’est pas une connaissance intrinsèque, il ne s’ensuit pas que les préambules de la foi, eux, ne puissent être atteints par une connaissance intrinsèque ; et certes les Pères ont donné des preuves philosophiques de Yexislence et de la nature de Dieu. Voir Dieu (.S’a nature d’après les Pères), t. iv, col. 1029 (Aristide), 1032 (Athénagore), 1034 (S. Théophile d’Antioche), 1036 (S. Irénée), 1040 (Clément d’Alexandrie), 1046 (Origène), 1055 (Minucius Félix), 1056 (Tertullien), 1063 (Arnobe et Lactance), etc.

Quant au fait de la révélation, ils l’ont prouvé par l’argument qui lui est proportionné, les miracles et les prophéties, transmis jusqu'à nous par le témoignage historique. Ils ont même parfois étendu à cette preuve nistorique le nom de « démonstration » , comme nous le faisons souvent. Et ils regardent cette preuve préalable comme nécessaire à la foi. Sur toute cette question, voir Le Bachelet, loc. cit., col. 192-197, et sa bibliographie des ouvrages sur l’apologétique des Pères, col. 198, 199. Nous nous contenterons d’insister sur quelques textes, à notre point de vue de la controverse fidéiste.

1. Pères grecs.

Saint Justin, après avoir donné l’argument des prophéties messianiques : « En voilà assez, conclut-il, pour persuader ceux qui peuvent écouter et comprendre, et pour leur montrer que nous n’apportons pas des affirmations indémontrables, comme ces fables fabriquées sur les prétendus fils de Jupiter. Comment croirions-nous à un crucifié qui se déclare le Fils premier-né d’un Dieu non engendré et nous dit qu’il jugera le genre humain, si nous ne trouvions pas des prophéties faites sur lui bien avant sa venue, et si nous ne les voyions pus réalisées par I nement ? si nous ne voyions pas nous-mêmes la Judée devenue déserte, des hommes de toute nation conertis par les apôtres renonçant a leurs vieilles erreurs i-i transformanl leurs mœurs ' Apol., i, a. /'. '/.. f. vi. col. 105. Comment croire au Christ, si l’un ne Mut d’abord quelque preuve de sa mission.' le mol <le samt Thomas : Non enim crederet, nisi videret ea esse credenda vel propler evldentiam itgnorum, vel pr<>i>t<r aliquid hufusmodi. Sum. theol., Il 1 1'. q. i. a. I, ad 2'"". Saint Justin ajoute qu< dl telli - preuves sont de force à produire une fui raison nable, « la foi avec la raison, » jrcariv… u.îTa)ô- ; oj, col. 408. Au contraire, « ceux qui enseignent la mythologie imaginée par les poètes n’ont absolument aucune démonstration à donner aux jeunes gens qu’ils instruisent, » ce qu’ils racontent n’ayant aucune valeur historique. Loc. cit., n. 54. Aussi les chrétiens, en face du paganisme, ont seuls le privilège de la « démonstration » , [iôvoi U.ETJ i-0Σ ::; <.> :. Loc. cit., n. 20, col. 357. Voir d’autres textes de Justin dans Crédibilité, t. iii, col. 2240, 2241. Pour saint Théophile d’Antioche, saint Irénée, les Récognitions clémentines, Clément d’Alexandrie, Origène, Eusèbe, saint J. Chrysostome, voir Crédibilité, col. 2241-2247.

On a produit contre quelques-uns de ces Pères, surtout Clément d’Alexandrie, les accusations les plus contradictoires. Tantôt on leur a reproché de donner trop à la raison et même à la philosophie païenne comme préparation à la foi, voir Clément d’Alexandrie, t. iii, col. 169-170, tantôt, ce qui vient à notre sujet, on a voulu en faire des lidéistes, parce qu’ils disent que la foi, -tu :  ;  ;, précède la connaissance, yvûffiç. Or, par là, ils ne veulent pas mettre la foi divine au début ni à la base de toute connaissance religieuse, comme les fidéistes, mais seulement à la base d’une certaine connaissance religieuse, d’une connaissance de luxe qui n’est pas à la portée de tout le monde, et que l’on acquerra ensuite si l’on en a le loisir, après avoir commencé par le plus pressé, par le plus nécessaire au salut, par la foi. On sait que chez Clément le mot « gnose » est souvent réservé à une connaissance spéciale aux plus avancés, de même que le corrélatif « gnostique » , pris en bonne part, est réservé au chrétien parfait qui est en même temps un savant. Il est donc tout simple, qu’il fasse passer la foi avanl la « gnose » et qu’il en fasse le fondement de la « gnose. Slrom., VII, c. x, P. G., t. ix, col. 481. Cf. Freppel. Clément d’Alexandrie, p. 333 sq. Voir surtout Clément d’Alexandrie, t. iii, col. 188-191. Origène a le même fonds d’idées. Il montre qu’il est impossible à la grande majorité de laisser les affaires de la vie pour s’adonner aux loisirs de la philosophie, aussi h' Christ leur a-t-il donné par la révélation et la foi une voie plus courte pour arriver aux grandes vérités dont ils ont besoin ; voie qui suppose d’ailleurs des motifs de crédibilité, comme les miracles du Christ, la transformation admirable des mœurs. Voir l’endroit cité, col. 110. D’autre paît. Origène loue le chrétien qui peut à cette foi première ajouter la science. Voir COl. M. Sur les objections que les lidéistes ont tirées des Pères grecs, surtout de Clément d’Alexandrie cl d’Origène, voir aussi d’Alés, Dictionnaire apologétique de la foi catholique, t. ii, col. 58-60. Nous retrouvons plus tard cette même formule, dont abusent les lidéistes. dans d’autres Pères, comme saint Cyrille d’Alexandrie, et avec plus d’explications encore : i La science vient après la foi. Sur le fondement de la foi simple on bâtit ensuite la yvûciCi qui peu à peu nous élève a la mesure de la stature parfaite du Christ (Eph., iv, l.'i), et fait de nous des hommes parfaits et

spirituels. » In Joa., l. l, c. iv, /'. ( ;., t. lxxiii, col. 629. Par cette foi simple » , mise a la base. Cyrille n’entend pas (tailleurs une foi sans aucun exercice préalable de la raison : il vient de dire îles apôtres, modèles de nuire foi : Us n’ont pas été entraînés dans

la foi par légèreté ni trop facilement : mais ils s'étaient

convaincus loui d’abord que leur maître et initiateur était… l’introducteur de célestes doctrines, Loc, cit.,

col. 628. Quant a la gnose qui suit la foi, il la veut Lot. < il. i elle double assertion.

que la foi doit précéder, et que la gnose (pu la suit doit (ire modérée. Cyrille l’oppose aux hérétiques, gnostiques et manichéens, qui voulaient supprimer la foi, et promettaient une science religieuse sans Umlti s