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HILAIRE (SAINT)

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rement dans le sein d’Abraham : tempus vero mortis habet intérim unumquemque suis legibus, dum ad judicium unumquemque aut Abraham réservât, aut pœna ; per custodiam Domini fidèles omnes rescrvabuntur, in sinu scilicct intérim Abrahæ collocati. In ps. II, 48 ; cxx, 16, col. 290, 060. Mais ces textes s’opposent-ils réellement à la jouissance immédiate de la vision intuitive ? Parfois il est question des justes morts avant la venue de Notre-Seigneur, alors que l’entrée du ciel restait fermée aux enfants d’Adam ; ainsi en est-il probablement dans le texte objecté du Ps. cxx ; cf. cxviii, litt. xi, 3 ; cxxxviii, 22, col. 572 sq., 804. Le « sein d’Abraham » est une expression biblique dont le sens est large et varie nécessairement, suivant qu’on considère l’état des âmes avant ou après l’ascension du Sauveur. L’idée de réserve, appliquée aux âmes bienheureuses, s’explique aisément eu égard au jugement dernier, qui suppose la résurrection des corps et qui seul, par conséquent, amènera pour l’homme tout entier, corps et âme, l’état définitif de glorification, et peut, dans le même sens, s’appeler le jour où se fera l’éternelle rétribution de la béatitude ou du châtiment : judicii enim dies vel beatitudinis relribulio est œterna, vel pœnse. In ps. il, 48, col. 290. Aussi, dans la première série des textes objectés, ce n’est pas précisément de la vision de Dieu prise en elle-même qu’il s’agit, mais de la vision de Notre-Seigneur apparaissant dans son humanité glorieuse aux hommes ressuscites ou de la vision de Dieu consommée en tous ceux qui doivent en jouir pendant l’éternité. Coustant, Præf. gen., n. 210-218, col. 101 sq. ; Muratori, De paradiso, regnique cœlestis gloria non cxspectata corporum resurrectione, Vérone, 1738, c. xi, p. 98 sq. ; xii, p. 107 sq.

Résurrection.

Toute cette doctrine contient

évidemment celle de l’universelle résurrection des corps, fondée sur l’universelle rédemption : cum omnis caro redempla sil in Christo ul rcsurgal. In ps. LV, 7, col. 360. Résurrection très différente pour les justes et pour les pécheurs, comme l’enseigne saint Paul, I Cor., xv, 51 sq. : glorieuse pour les premiers, humiliante et douloureuse pour les autres, adeo ul confundantur ; resumplo ad pœnas cor pore puniendos. In ps.Lll, 16 sq. ; lv, 9, col. 334, 361. Il y aura restauration des mêmes corps qui auront préexisté : confracta reparabit, non ex alia aliqua, sed ex veteri atque ipsa originis suas maleri i. In ps. ii, 41 ; cf. lv, 12, col. 285 sq., 362. Quelle difficulté en cette restauration pour celui qui, au début, a pu former entièrement ces mêmes corps ? In Matth., x, 20, col. 974 ; In ps. LXill, 9 ; CXXII, 5, col. 411, 670. Les corps ressuscites auront la stature de l’homme parfait ; mais demander quels en seront la forme et le sexe, ou grâce à quels aliments ils demeureront éternels, c’est poser des questions non seulement oiseuses, mais injurieuses envers Dieu, dont la providence et la puissance sont également sans bornes. In Matth., v, 8-10 ; xxiii, 3-4, col. 946 sq., 1045.

Dernier avènement et jugement.

Après la résurrection

des corps, auront lieu le second avènement du Christ et le jugement dernier, l’un et l’autre rappelés ou décrits par l’évêque de Poitiers d’après les données évangéliques. In Matth., xxvi, 1, col. 1056 ; De Trinitate, III, 16, col. 85 ; In p s. cxviii, litt. xvii, 12, col. 619. Deux questions s’y rattachent, qui sont loin de présenter chez le docteur gaulois toute la netteté désirable. La première concerne ceux qui seront jugés. En plusieurs endroits, les hommes apparaissent partagés en deux groupes : d’un côté, les croyants et les incroyants, les fidèles et les infidèles, les pieux et les impies, en entendant par là ceux qui sont tels purement ou simplement ; de l’autre, ceux qui tiennent le milieu, où la foi et l’infidélité, la piété et l’impiété s’entremêlent : gui medii sint, ex utroque admixti,

| nculri tamen proprie. Hilaire semble affirmer que ces derniers seuls auront à subir un jugement : in eus

I ergo judicium est, quod jam et in incredulis aclum est, et in credentes non necessarium est ; intelligitur in eos reliquum esse judicium, qui pro gestorum qualitate inler peccala ftdemque sint judicandi. In ps. I, 16-17 ; lvii, 7, col. 259 sq., 373. Si, dans ces textes, il fallait entendre le jugement dans le sens ordinaire du mot, il s’ensuivrait que les justes et les impies seraient soustraits à tout jugement, soit particulier, soit universel, car les raisons alléguées ne valent pas moins contre l’un que contre l’autre ; nous serions en face d’une erreur grave, attribuée de fait à l’évêque de Poitiers, comme l’indique dom Co stant, n. 220, col. 106. Mais cette supposition introduit dans sa doctrine une réelleincohérence, : uisqu’il enseigne formellement, à plusieurs reprises, que tous comparaîtront devant le tribunal du Christ et seront jugés par lui : cum omnis caro redempla in Christo sil, et omnem assister ? anle tribunal ejus nece se sit ; judicalurus ipse de omnibus. In ps. LVi, l, col. 630 ; De Trinitate, VI, 3, col. 159. La conciliation est à chercher là où dom Coustant la place, n. 226, col. 108 sq., à savoir dans le sens spécial qu’Hilaire attache au mot et à l’idée de jugement, en partant du verset 5 du Ps. i, qu’il explique en ce passage : Proplerea non résurgent impii in judicium, et en s’inspirant aussi de Joa., iii, 18, qu’il cite, n. 15, col. 259 : Qui crédit in me, non judicatur ; qui autem non crédit, jam judicatus est. Par jugement, il n’entend pas ici une simple sentence, énonçant purement et simplement le salut ou la damnation par l’application d’une loi préexistante et contenant expressément le cas en question ; il entend une sentence précédée d’un examen qui porte sur un cas complexe, non contenu expressément dans la loi, où il y a du pour et du contre, et par conséquent sujet à discussion. Voici, en effet, la raison qu’il donne pour exclure le jugement dans le cas des croyants et des incroyants purement et simplement tels : Quid enim necesse est judi are credentem ? judicium enim ex ambiguis rébus existit, et ambiguilate adempta, judicii non desideratur examen : ex quo ne infidèles quidern necesse est judicari, quia ambiguilas, quin infidèles sint, non resedit, n. 17, col. 259. Le jugement est déjà porté dans l’Évangile, Joa., ni, 18 ; il s’agit seulement de constater le fait et d’appliquer la sentence. C’est dans le même sens qu’Hilaire dit de Notre-Seigneur, par allusion à Luc, xii, 9 : Negantes se non jam judicabit utique, sed negabit. De Trinitate, VI, 3, col. 159. Négation qui sera précisément la sentence de réprobation, le Nescio vos. Matth., xxv, 2. Et ceci fait dire au saint docteur que le juste est jugé dès ici-bas, puisque les anges le conduisent dans le sein d’Abraham : juslo tamen jam in terris, quia per angelos in Abrahse sinum deduclus sit, judicalo, secundum illud : Qui crédit in me, non judicatur, sed transit de morte in vitam ; qui autemnon crédit, jam judicatus est. Il s’agit évidemment, dans ce dernier cas, du jugement particulier. Coustant, n. 222, col. 107. Mais qu’est le jugement universel, sinon la manifestation et comme une sorte de ré, étition publique du jugement particulier ? Il n’es’donc pas nécessaire de supposer avec le même auteur, n. 228. col. 110, que le sort des hommes compris dans le groupe intermédiaire ne sera fixé qu’au second avènement du Sauveur. Cette assertion n’est pas de saint Hilaire ; il résulte seulement de ce qui précède que, d’après lui, ces hommes ne seront pas jugés de la même façon que les autres, soit immédiatement après leur mort, soit à la fin du monde.

L’autre question se rapporte à ce que saint Hilaire appelle « le feu du jugement » . Une première fois, il y fait allusion, en s’appuyant sur I Cor., ni, 15 : Mulli