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HILAIRE (SAINT)


Récemment on a rattaché à ces événements un écrit de saint Hilaire publié jusqu’ici sous le titre : Ad Constanliuni liber primus, P. L., t. x, col. 557. Comme on le dira plus loin, ce titre devrait être considéré désormais comme périmé ; l’écrit aurait été composé au lendemain du synode de Béziers, dans un but apologétique : soit qu’il faille y voir un fragment égaré de l’Opiis historicum, formant primitivement avec plusieurs autres la première partie du Liber adversus Valenlem et Ursacium, comme le veut dom Wilmart, Les fragments historiques et le synode de Béziers ; soit que l’écrit ait fait partie d’une Lettre adressée aux évêques gaulois, comme le conjecture dom Chapman, The contested lellers oj pipe Liberius, 3e art., p. 331.

3° Hilaire en Orient, 356-360. — La Phrygie fut le séjour habituel du saint docteur pendant les années de son exil. Comme il n’avait pas été déposé de son siïge, il demeurait dans une situation relativement favorable ; il put communiquer avec ses prêtres et, par leur entremise, garder la haute administration de son diocèse. Ad Conslanlium, II, 2, col. 564. Il resta également en rapports avec l’épiscopat gaulois, le renseignant et l’encourageant par ses lettres. Quelle importance il attachait à ce commerce épistolaire, on peut en juger par l’inquiétude que lui causa, pendant quelque temps, le silence de ses correspondants. De synodis, 1, col. 479. Personnellement, il employa ses loisirs forcés à composer, entièrement ou presque entièrement, son principal ouvrage : De Trinilate ; c’était encore une manière de prêcher, comme il le dit lui-même, X, 4, col. 346 : Loquemur enim exsuies per hos libros, et sermo Dei, quivinciri non potest, liber excurret. En même temps il profita de son séjour en Asie Mineure pour s’instruire à fond des affaires religieuses d’Orient. Les circonstances lui créèrent une situation privilégiée. Quand il arriva en exil, la coalition antinicéenne était triomphante : en Orient, tous les grands sièges épiscopaux étaient en son pouvoir ; en Occident, le pape et les membres les plus notables de l’épiscopat étaient bannis. Mais à ce moment même les germes des divisions cpii couvaient dans le parti, nullement homogène, des antinicéens, éclatèrent : il y eut fractionnement en trois groupes distincts et bientôt hostiles : le groupe extrême des ariens purs ou anoméens, ayant pour chefs Aétius et Eunomius, le groupe en apparence moins avancé, plus politique que doctrinal, des homéens, représenté en Orient par Acace de Césarée, en Occident par L T rsace et Valens ; enfin le groupe plus conservateur des homéousiens ou anciens eusébiens, qui se ralliaient autour de Basile d’Ancyre. Voir Arianismk, t. i, col. 1821 sq.

Fixé en Phrygie, mais ayant une grande liberté de mouvements, l’évêque de Poitiers se trouvait en contact avec ces divers groupes. Dans un esprit de zèle apostolique, il fit preuve à l’égard de tous d’une large condescendance : « Je n’ai pas considéré comme un crime, dira-t-il plus tard, d’avoir eu des entretiens avec eux, ou même, tout en leur refusant la communion, d’entrer dans leurs maisons de prière et el’espérer ce qu’on pouvait attendre d’eux pour le bien de la paix, alors que nous leur ouvrions une voie au rachat de leurs erreurs par la pénitence, un recours au Christ par l’abandon de l’Antéchrist. » Adv. Constant., 2, col. 579. Mais ses sympathies allaient naturellement aux homéousiens, d’autant plus qu’en dehors de ce groupe, il ne voyait guère el’intégrité ni de vraie piété. De synodis, 63, col. 522. Les événements augmentèrent encore ces sympathies et préparèrent les voies au rôle de conciliation que les antécédents du saint docteur, sa science et ses relations actuelles lui permettraient de jouer. Un grand synode tenu à Sirmium dans l’été de 357 s’était terminé par la rédaction et l’imposition d’une formule de foi, élite seconde de Sirmium ; formule posi tivement antinicéenne, traitée par Hilaire d’impiété blasphématoire. De synodis, 10, col. 486. L’année suivante, au synode d’Ancyre, présidé par Basile, évêque de cette ville, les homéousiens réagirent vigoureusement, en formulant une série d’anathèmes contre la doctrine anoméenne, et même contre l’homéenne. Voir t. i, col. 1823 sq. Il est vrai qu’à ces anathèmes ils en avaient ajouté d’autres, dirigés contre la doctrine sabellienne et contre les termes nicéens d’ûjvooûd’.ov % TauTOoôatov, consubstanticl ou étant de même substance. Si les homéousiens semblaient ainsi maintenir la vieille accusation de sabellianisme contre la foi de Nicée, il n’y avait pas moins de leur part répudiation formelle de l’arianisme pur et acheminement notable vers l’orthodoxie. Cette réaction acquérait, au jugement d’Hilaire, une valeur d’autant plus grande que Basile avait réussi à faire approuver les actes de son synode par Constance et que, possédant la faveur de ce prince, il paraissait maître de la situation. De synodis, 78, col. 530 sq.

C’est précisément vers cette époque, mars 358, que l’évêque de Poitiers reçut enfin un courrier des Gaules. Il apprit avec joie qu’en dépit des suggestions et des menaces de Saturnin, ses anciens collègues restaient fidèles à la saine doctrine ; de cette fie’.élité ils venaient de donner une preuve notable en anathômatisant la seconde formule de Sirmium. De synodis, 2, 3, col. 481 sq. En communiquant cette bonne nouvelle à l’exilé, les piélats gaulois lui demandaient de les renseigner sur les professions de foi, présentes et passées, des Orientaux. Ibid., 9, col. 483. Ce fut l’occasion du Liber de synodis, dont il sera plus amplement question dans la suite de cette étude. En composant cet écrit, Hilaire ne se proposa pas seulement de satisfaire à la demande de ses amis ; il profita encore de la circonstance pour essayer de dissiper les malentendus qu’il voyait exister des deux côtés et poursuivre ainsi l’œuvre de conciliation et d’apaisement déjà entreprise : « Pendant tout le temps de mon exil, dira-t-il bientôt, si j’ai tenu à ma résolution de ne céder en rien au sujet de la confession du Christ je n’ai pourtant voulu repousser aucun moyen honnête et acceptable de procurer l’unité. » Adv. Constant., 2, col. 579.

Hilaire garda la même attitude au concile qui s’ouvrit à Séleucie le 27 septembre 359. Convoqué d’office à cette assemblée, il y fut accueilli favorablement. Invité à exposer sa foi d’évêque gaulois, il le fit en professant la doctrine nicéenne, soigneusement dégagée de toute attache sabellienne ; aussi fut-il reçu par les Orientaux à la communion ecclésiastique et admis au concile. Sulpice Sévère, Historia sacra, ii, 42, P. L., t. xx, col. 153. Rien n’indique qu’il se soit mêlé activement aux discussions qui s’élevèrent entre la majorité homéousienne et la minorité homéenne, mais, dans Y Adversus Conslanlium, 12-14, col. 590 sq., il a laissé de ce qu’il vit et entendit un récit précieux pour la connaissance des partis et des idées qui se manifestèrent alors. Voir t. i, col. 1828. La profession de foi souscrite par la majorité fut la seconde formule élu synode d’Antioche, inencœniis, voir t. i, col. 1801 ; formule que le saint docteur juge avec indulgence, en y voyant une simple réaction contre le sabellianisme. De synodis, 32-35, col. 504 sq.

L’heure de l’apaisement n’était pas encore venue. Le groupe basilien manquait d’unité vraie ; à côté de membres sérieux et bien intentionnés, il en contenait d’autres qui n’étaient pas guidés par un amour sincère de la vérité ou qui professaient en réalité des doctrines absolument incompatibles avec la foi de Nicée. En outre, le succès de l’entreprise dépendait du mobile empereur qu’était Constance. Depuis plus d’un an, Ursace et Valens travaillaient à le ramener à leurs vues. Ils avaient obtenu la division de l’unique