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HIERARCHIE

2380’maison sans un fondement : toutes choses indiquant direction unique.

En outre, ce fait ressort des prérogatives conférées par le divin Maître a saint Pierre. Il lui déclare qu’il sera le fondement de son Église, le pasteur suprême, le gardien des clefs, le soutien de ses frères. Ces expressions écartent toute idée de pluralité de direction, de partage de pouvoir avec une aristocratie ou une démocratie quelconque.

2. Dans la tradition.

Les qualificatifs scripturaires que nous venons de produire se retrouvent dans les écrils des Pères, avec indication soit implicite, soit explicite du titre de monarchie. Citons simplement les déclarations les plus remarquables.

Le concile de Florence a promulgué le décret suivant : Definimus… pontificem romanum… verum Christi vicarium, lotiusque Ecclesiee capul et omnium christianoram paircm ce doclorem existere ; et ipsi in bcalo Pctro, pascendi, regendi ac gubernandi universalem Ecclesiam a Domino noslro Jesu Christo plénum potestatem traditam esse. Decrelum pro Greecis, Denzinger-Bannwart, n. 694. Saint Pierre est donc la tête, le père, le docteur, le dépositaire absolu de la magistrature suprême de l’Église ; donc il en est le véritable monarque, l’attribution qui lui est faite des prérogatives royales le démontre.

Le concile de Trente s’exprime de la même façon : Pontifices maximi, pro suprema auclorilale sibi in universa Ecclesia tredila, causas aliquas criminum gravions, suo poluerunt peculiari judicio reservare. Sess. XIX, c. vii, Denzinger-Bannwart. n.’.03. Comment l’autorité pontificale serait-elle suprême, apte à se réserver les causes majeures dans l’Église entière, si elle ne dominait tout par le pouvoir monarchique ?

La même conclusion ressort des décrets du concile du Vatican, entre autres, dans ces passages, const. Pastor œlernus : Bealum Petrum cseteris aposlolis prœponens, in ipso inslituit, ulriusque principium (fidei et communionis) ac visibile jundamentum… Docemus… primalum jurisdictionis in universam Dei Ecclesiam, immédiate et directe beato Pctro apostolo promissum atque collatum a Christo Domino fuisse : Unum enim cui jampridem dixerat.Tu vocaberisCephas… uni Simoni Petro, contulit Jésus, posl suam resurreclionem, summi pasloris et reeloris jurisdictionem. Denzinger-Bannwart, n. 1821.

Le saint-siège a, d’ailleurs, fait d’autres déclarations formelles sur ce point de doctrine.

La faculté de théologie de Paris avait censuré comme hérétique et schismalique l’enseignement de l’apostat Marc-Antoine de Dominis, affirmant que, dans l’Église, il n’y avait qu’un seul chef, un seul monarque, le Chris1 ; que la forme monarchique n’avait pas été établie par le Christ en son Église. La contradictoire de ces propositions, notées hérétiques et sehismatiqu.es, est que la forme monarchique est dogme de foi dans l’Église. Pie VI loua la censure portée par l’université de Paris. Bref Super soliditate du 23 i ovevibre 1786.

Dans ce même bref, le souverain pontife réprouva la proposition d’Eybel, disant que chaque évêque possédait dans son diocèse un pouvoir aussi étendu que le pape : il voulait que la forme républicaine ou la forme aristocratique fût l’idéal du divin fondateur sous la présidence d’honneur du souverain pontife. Or, le pape excluant ces systèmes, il résulte que la constitution monarchique reste la seule forme de l’Église.

Pour les raisons de convenance du choix de cette Sorme, voir Gouvernement ecclésiastique, t. vi, col. 1532-1533.

4° A cette démonstration on objecte : les textes scripturaires qui paraissent établir la parité absolue des apôtres : Quicumque non receperit vos, neque audierit sermoncs vestros…, Matth., x, 14 ; Ego rogabo

Palrem et alium Paraclilim dabit vobis, Joa., xiv, 16 ; Sicui me misit Pater et ego mitto vos… Accipile Spirilum Sanelum, Joa., xx, 21, 22 ; Data est mihi omnis potestas in cœlo et in terra : eunles ergo… Mat h., xxviii, 19. C’est donc à la collectivité, c’est-à-dire à l’ensemble des apôtres et non à la personne de Pierre, qu’ont été conférées les prérogatives de la puissance souveraine. Interpréter dans ce sens ces paroles sacrées, serait introduire une confusion extrême dans l’enseignement catholique ; ce serait mettre Jésus-Christ en contradiction avec lui-même. Comment, en effet, concilier ces conclusions avec les déclarations formelles adressées à Pierre et longuement citées dans les pages précédentes ? Il faut donc ne pas confondre ici le charisme de l’apostolat, communiqué à tous les apôtres sans distinction, avec la supême magistrature, le pouvoir soureriin, expressément délégué à saint Pierre, entérines catégoriques.

1. Les adversaires les plus acharnés de la suprématie pontificale ont été obligés de se rendre, en définitive, à cette évidence : tels, Marc-Antoine de Dominis, op. cit., 1. VI, n. 2 ; Quesnel, Idée générale du libelle, e’.c, 1705, p. 92 ; Dupin, De antiquæ Ecclesias disciplina, diss. IV, c. i, § 3. Bicher, De rclraclalione, déclare qu’il avait puisé l’erreur, contraire à la primauté apostolique, dans les œuvres infectes de Luther et Calvin : Hanc propositionem seu potius hseresim ex pulidis Luthcri et Calvini jontibus hausisse non diffiteor.

2. Les adversaires exploitent encore le passage de l’Écriture où il est prescrit de dénoncer à l’Église ceux qui se montrent réfractaires aux monitions fraternelles : Die Ecclesise. Matth., xviii, 17. Donc, affirment-ils, le tribunal souverain se trouve dans le corps de l’Église, non dans la personne de Pierre. Par suite, ce n’est pas la forme monarchique qui prédomine dans l’Église.

La procédure indiquée en ce passage prouve précisément le contraire. Il y est recommandé, en effet, de recourir au tribunal de l’Église, à son autorité suprême, à la suite des admonitions insl antes des hommes privés. Par conséquent, ce n’est pas en ces derniers, groupés ou séparés, que se trouve le pouvoir souverain, mais bien en celui qui concentre en ses mains la juridiction s’étendant à toute l’Église. Le texte ne fait allusion aux tentatives bien infructueuses des inférieurs de tout genre que pour mettre en relief la magistrature suprême destinée à trancher le débat.

3. Il est encore dit dans les Actes des apôtres, xv, 6, 22, que les apôtres et les anciens se réunirent en conseil : Conveneruntque apostoli et seniores videre de verbo hoc. Plus loin, il est déclaré que la décision fut adoptée avec l’agrément des apôtres, des anciens et de toute l’assemblée : Placuit apostolis et senioribus^ cum omni Ecclesia. Aux débuts de son existence, l’Église de Jérusalem n’était pas encore organisée en société parfaite et son chef n’exerçait pas encore ses pouvoirs souverains. Du reste, saint Pierre prend le premier la parole pour dirimer une longue contestation et quand il a parlé, chacun se tait.

On ne saurait nier non plus que le chef souverain dans l’Église, nonobstant l’assistance divine, est tenu de s’entourer de toutes les lumières humaines ; cela l’empèche-t-il d’être vraiment monarque, chef suprême ? On n’oserait le soutenir. L’assemblée de Jérusalem a longtemps passé pour avoir été le type des conciles œcuméniques, présidés par le pape ou ses délégués. Les souverains les plus absolus ont leurs conseils, leurs parlements, leurs députations provinciales, associés à l’administration générale. Ils restent néanmoins princes, rois ou empereurs. Ainsi en est-il dans le gouvernement ecclésiastique.

4. Puisque le Christ est le véritable chef de l’Église, le principe de son unité, la primauté du pape est pour