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HERMÈS — HERMIAS


Pie IX au prélat, où il confirmait, le 25 juillet 1847, la condamnation portée par son prédécesseur, ruina leur espérance, mais sans les persuader. Voir Denzinger-Bannwart, Enchiiidion, n. 1631-163’1. Les docteurs Braun et Achterfeid ne répudièrent jamais complètement leur’erreur. L’autorité ecclésiastique ne laissa pas cependant de les traiter avec beaucoup d’indulgence. Braun mourut en 18C3 et Achterfeid en 1877. Le concile du Vatican a porté le dernier coup à la théorie de Hermès sup la foi et à sa méthode du doute dans le c. m de la constitution Det Filius et dans les canons’2, 5 et 6 correspondants. Voir col. 117.

G. Esser, Denksclirift auf G. Hermès (panégyrique), Cologne, 1832 ; Droste-Hullohoft, dans Zeilschrift fur Philosophie unil katholische Théologie, 1832, p. 1-29 (éloge) ; Reusch, dans Allgemeine deutsche Biographie, t. xii, p. 192196 ; Kirchenlexikon, Fribourg-en-Brisgau, 1888, t., v, col. 1878-1899 ; Realenc’yclopàdie fur protestanlische Théologie und Kirche, Leipzig, 1899, t. vii, p. 750-756 ; Perrone, Delocis theologicis, part. III ; Id., Réflexions sur la méthode introduite par Georges Hermès dans la théologie catholique, dans les Démonstrations éoangéliques de Aligne, Montrouge, 1843, t. xiv, col. 945-1024 ; H. Reusch, Der Index der verboienen Bûcher, Bonn, 1885, t. ii, p. 1113 ; cf. p. 844 ; Werner, Geschichte der katholische Théologie, 2e édit., 1889, p. 405-406, 423-424 ; J.-M.-A. Vacant, Études théologiques sur les constitutions du concile du Vatican, Paris, Lyon, 1895, t. i, p. 120-128 ; t. ii, p. 67-70, 76, 196 ; Bruck, Geschichte der kalholischen Kirche in Deutschland, t. ii, p. 496-497 ; trad. franc., Paris, 1887, t. iii, p. 396-397 ; Hurter, Nomenclator, Inspruck, 1912, t. v, col. 899-906 ; Kirchliche Handlexikon de Buchberger, Munich, 1907, t. i, col. 1932-1933 ; The catholik encyclopedia, New York (1910), t. vii, p. 276279. Pour une bibliographie plus complète, voir Kirchenlexikon, t. v, col. 1898-1899 ; Gla, Repertorium der katholisch-theologischen Literatur, Paderborn, 1901, t. i b, p. 355370.

A. Thouvenin.

    1. HERMIAS##


1. HERMIAS, philosophe chrétien. — I. Sa personne. II. Son œuvre.

I. Sa personne.

A la suite des œuvres des apologistes du iie siècle, se trouve un tout petit traité en dix chapitres, de quelques pages à peine, sous ce titre : ’Ep[J.tou çiÀojfJcpou 81aauqj.ô ; tûv êÇii) cpiXoaoçptov, Hermiæ philosophi gentilium philosophorum irrisio. P. G., t. Vt, col. 1169-1180. Ce traité offre tant d’intérêt qu’on s’étonne qu’il ait été passé sous silence par les auteurs ecclésiastiques des premiers siècles. Il porte le nom d’Hermias. Mais quel est ce personnage ? où et quand a-t-il vécu ? Autant de questions insolubles dans l’état actuel de la littérature chrétienne de l’époque patristique, car les ren ; eignements font défaut et les critères internes se réduisent à bien peu de chose. On en est donc réduit’aux conjectures. Les uns ont voulu identifier cet Hermias avec -l’historien grec du v siècle, Hermias Sozoniène, niais la différence de style est trop caractéristique ; les autres. avec l’hérétique Hertnias, disciple d’Hermogène et chef de la secte des heEmiens, mais rien ne prouve qu’il ait été hétérodoxe. Aussi ces deux hypotbèjsw ont-elles été abandonnées. Cet. Hermias est qualifié de philosophe, et à juste titre, semble-t-il, si l’on entend par là la ; connaissance des philosophes grecs et de leurs systèmes. En les appelant ceux « du dehors » , il donne à entendre qu’il se distingue d’eux. Peutêtre mime, tout, comme saint Justin et Tatien, doiit il a certainement connu les écrits, a-t-il déserté leur camp poui embrasser la foi chrétienne ; en tout cas, il ne dit pas le moindre mot de « cette foi, ni de Jésus-Christ, ni de l’É^lpe Il montre du moins, et.cela dès les premières lignes, qu’il partageait la manière de voir de - 1’apgtre saint Paul, puisqu’il se propose de justifiercette parole, que la sagesse de ce monde est une folie tfux yeyx de Dieu : f, aoepia tou xdajj.ou toutou ; j/’)pia reapà tio Oêfii. 1 Cor., iii, 19. L’époque où il’a vécu est difficile à fixer. L’opinion commune, dit Bardenhewer, Les Pères

de l’Église, trad. franc., Paris, 1899, t. i, p. 191, le fait vivre a l’âge des apologistes, à la fin du iie siècle ou au commencement du m e. On se fonde, d’une part, sur le nom de philosophe donné à l’auteur dans le titre traditionnel des manuscrits, comme c’est aussi le cas pour saint Justin, pour Athénagore et pour d’autres apologistes ; et, d’autre part, sur diverses indications de l’opuscule lui-même : la vie et la chaleur du langage annoncent une époque de luttes, où les écoles des philosophes sont encore florissantes, où le christianisme n’a pas encore remporté la victoire. » Mais ce sont là des points de repère assez vagues ; et Diels, son dernier éditeur, le croit beaucoup plus récent, plutôt du v siècle, sinon du vi e. Doxographi græci, Berlin, 1879, p. 259-263. Le champ reste donc ouvert à la discussion.

Ce qui est certain, c’est que l’auteur s’adresse à des personnes qui lui sont chères, ses enfants, des disciples ou des fidèles : to àyaKT|Toi. Irrisio, 1, P. G., t. vi, col. 1169. Et c’est aussi qu’il peint d’un trait vif, acéré et mordant les philosophes païens et leurs opinions ; il rappelle le ton railleur de Lucien dans son Hermolime ou le Choix des sectes et les Secles à l’encan, avec cette différence qu’il appuie plus légèrement, qu’il ne manifeste pas une préférence pour le système d’Épicure et qu’il n’aboutit pas au scepticisme ; mais sa critique est tout aussi virulente et négative. Tandis qu’un saint Justin ou un Clément d’Alexandrie se gardaient de condamner en bloc toute philosophie, parce qu’on trouve partout des parcelles de vérité et que la philosophie a droit à être cultivée, Hermias avoue n’avoir qu’un but, celui de montrer que les philosophes sont en contradiction les uns avec les autres, que la recherche des choses se perd dans le vague et l’inconnu et que le résultat reste inexplicable et inutile, vu qu’il ne repose ni sur l’évidence, ni sur un enseignement certain : Pouao’[jl6vo ; 8êïÇai ttjv èv toi ; 80yij.aaiv ouaav aurtov èvavTtÔTr|Ta, y.al o>ç, sî ; axupov auTOÏ ; xat àci&iaTOv Jtpoeiaiv 7) ÇrjTTia’.ç twv ^paytiaToiv, zaî totÉXo ; auTàiv aTéziixpTov, xa !. ayprjOTOV, spyto [rr|6svi 7rpo8rjÀw xai Xôyu) aaçeï (k6atoô(j.Evov. Irrisio, 10, ibid., col. 1180. Pour un auteur chrétien, une telle conclusion est insuffisante et laisse une déception, quand il semblait si naturel d’indiquer, au moins d’un mot, sinon que l’impuissance de la raison démontre la nécessité relative d’un enseignement révélé, du moins que ce que la philosophie païenne n’avait pu atteindre était pleinement donné par la foi chrétienne. Hermias, comme d’autres aux origines du christianisme, croyait que la prétendue sagesse de ce monde provient des anges déchus et attribuait à cette origine suspecte son impuissance et ses contradictions. Irrisio, 1, ibid., col. 1169. Peut-être aussi, à l’exemple de Tertullien, affichait-il un superbe dédain pour toute curiosité ou recherche d’ordre philosophique et scientifique : nobis c iriosilate op <s rion est, posl Christiim Jesum ; nec inq.iisitione, post Evangelium. De præscripl., 7, P. L., t. il, col. 2. Il aurait fait partie, dans ce cas, du nombre de ces ennemis intransigeants de la philosophie, que Clément d’Alexandrie a cru pouvoir, non sans raison, censurer.

II. Son œuvre. — L’auteur, nous l’avons dit, prétend justiPer cette parole de saint Paul : la sagesse de ce monde ^esl i ne folie aux yeux de Die>. Quant : u mode de jùstiilc.ation, il s’estmanifestement inspiré de ce passage de Tatien : « Vous suivez les enseignements de Platon, mais voici qu’un sophiste de l’école d’Hpicure vous résiste ouvertemeut en face. Vous voulez vous attacher à Aristote, mais c’est alors un sectateur de Démocrite qui se moque de vous. » Adv. Grœros, 25, P. G., t. vi, col. 860. Et opposant philosophe à philosophe, opinion à opinion, sans se préoccuper le moins du monde de l’ordre chronologique, de la suite et de l’ensemble des doctrines dont il se moque, Hermias montre que ces doctrines sont con-