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HÉRÉSIE. HÉRÉTIQUE


Salmanticenses, Cursus theologiee moralis, tr. X, c. iv, n. 50 ; Tolet, Summa, 1. IV, c. ni, n. 4 ; Sanchez, Opus morale, 1. II, c. vii, n. 19-20 ; Bonacina, Opéra de morali theologia, Venise, 1683, De censuris, disp. II, q. v, p. i, n. 6 ; Azor, Instituliones morales, Lyon, 1625, part. I, 1. VIII, c. xix, q. vu ; Sayrus, Clavis regia, Venise, 1605, 1. II, c. ix, ii, 34, qui, dans sa Praxis de censuris ecclesiasticis, Venise, 1627, 1. III, c. iv, n. 15, a émis cependant, relativement à l’ignorance crasse, un sentiment opposé. Il faut noter toutefois, avec Suarez, loc. cit., n. 3, que quelques théologiens n’admettent pas l’excuse de l’ignorance, même simplement vincible. Suarez cite Soto, In IV Sent, 1. IV, dist. XXII, q. ii, a. 3 ; L. Lopez, Instruciorium conscienliæ, part. II, c. xx, tit. De excommunicationibus reservalis in bulla Ccense, cas. 1. — p.- En ce qui concerne l’ignorance affectée, plusieurs théologiens enseignent qu’elle n’excuse pas de l’hérésie formelle, Cano, De locis, 1. XII, c. vin ; Grégoire de Valencia, In II"’" 77 æ Sum. theol, q. xi, a. 1 ; Navarre, De ablatorum restitulione, Brescia, 1606, 1. II, c. iv, n. 208, et, parmi les modernes, l’auteur anonyme (M. Icard) des Prælectiones juris canonici de Saint-Sulpice, t. iii, n. 720, ad 2 unl. Mais la plupart des théologiens et canonistes enseignent que même l’ignorance affectée excuse du péché d’hérésie formelle (ce qui ne signifie pas qu’elle excuse de tout péché : le péché reste proportionné à la culpabilité de l’ignorance elle-même et c’est là ce qui différencie les hérétiques matériels qui sont dans l’ignorance vincible de ceux qui sont dans l’ignorance invincible et, partant, n’ont aucune faute à se reprocher). Voir Castropalao, Opus morale, Venise, 1721, tr. IV, disp. III, p. ii, n. 3 ; Azor, loc. cit., q. viii ; Pierre d’Aragon, In II am II&, Sum. theol., Salamanque, 1584, q. xi, a. 1 ; Farinacci, loc. cit., n. 52 ; Salmanticenses, loc. cit., n. 52 ; Coninck, op. cit., disp. XVIII, sect. iii, n. 18 ; Suarez, loc. cit., n. 18 ; Banez, In 77 am 77® Sum. theol, q. xi, a. 2. Ces trois derniers auteurs apportent une restriction à leur opinion : l’ignorance affectée excuse du péché formel d’hérésie à condition que le sujet soit prêt à obéir s’il venait à connaître la vérité. Comment concilier psychologiquement l’ignorance affectée avec une telle disposition, c’est ce qui semble à Banez à peine possible. Parmi les modernes, voir Scavini, Theologia moralis universa, Paris, 1853, t. iii, p. 247 ; cf. p. 283 ; Ballerini-Palmieri, loc. cit., n. 82 ; Mazzella, De virtutibus injusis, n. 231. Suarez ajoute une remarque importante pour l’interprétation exacte de saint Thomas, Quodl. III, a. 10. Cf. Tolet, Summa, 1. I, c. xix, n. 2. Saint Thomas semble affirmer que l’ignorance n’excuse pas en matière d’hérésie : rappelant la distinction formulée par saint Thomas lui-même, Sum. theol., P II*, q. vi, a. 8, entre l’ignorance antécédente qui est cause de l’acte en soi répréhensible et l’ignorance concomitante qui n’a pas d’influence sur les actions et les dispositions du pécheur, lequel, même instruit de son devoir, accomplirait néanmoins l’acte répréhensible, Suarez, loc. cit., n. 16-18, explique que l’hérésie formelle est excusée, même d’après saint Thomas, par l’ignorance antécédente dont elle est l’effet, quelle que soit la nature de cette ignorance, fût-elle l’ignorance affectée, mais qu’elle n’est pas excusée par l’ignorance concomitante. L’esprit de révolte contre le magistère de l’Église, élément formel de l’hérésie, existe, en effet, dans le cas de l’ignorance concomitante de l’acte d’hérésie. Cf. Dolhagaray, Commentaire de la bulle Apostolicee sedis, dans la Revue des sciences ecclésiastiques, t. Lin, p. 511519.

Par tout ce qui précède, on peut conclure qu’en soi, l’hérésie formelle et l’apostasie ne diffèrent pas spécifiquement entre elles. Voir Apostasie, 1. 1, col. 1603. On ne peut, en effet, concevoir l’hérésie formelle que chez celui qui a reconnu ou tout au moins soupçonné

que la règle de la foi véritable se trouve dans le magistère de l’Église catholique et qui délibérément a voulu s’en écarter. Toutefois, envisagées dans leurs sujets, l’hérésie et l’apostasie diffèrent notablement : on ne conçoit, comme capable d’apostasie, que le sujet baptisé qui a publiquement fait profession d’obéissance à l’Église catholique, voir Apostasie, t. I, col. 1603 ; on peut concevoir comme capable d’hérésie formelle un sujet baptisé dans une secte hérétique, lequel, ament par la réflexion, l’étude, la prédication des autres, la grâce de Dieu à une certaine connaissance de la véritable règle de la foi, refuse cependant de s’y soumettre Le premier, renonçant à l’obéissance qu’il avait publiquement promise à l’Église, règle de la foi, apparaît extérieurement comme coupable d’une défection totale, S. Thomas, Sum. theol., IP n » , q# X ii, a. 1 ; De Lugo, De fide, disp. XVIII, n. 95 ; le second, n’ayant jamais accepté le magistère de l’Église, semble ne commettre, à l’égard de la règle de foi, qu’une révolte partielle contre tel ou tel enseignement dogmatique. Au fond, la malice de l’un et de l’autre péché est identique. b) Quel acte de révolte requiert l’hérésie formelle ? — L’acte d’hérésie étant un jugement erroné de l’intelligence, il suffit donc, pour commettre le péché d’hérésie, d’émettre sciemment et volontairement ce jugement erroné, en opposition avec l’enseignement du magistère de l’Église. Dès l’instant qu’on connaît suffisamment l’existence de la règle de la foi dans l’Église et que, sur un point quelconque, pour un motif quelconque et sous n’importe quelle forme, on refuse de s’y soumettre, l’hérésie formelle est consommée. Cf. Thomas, Sum. theol., I a, q.xxxii, a.4 ; IP II » , q.xi, a. 2, ad 3°™, et les commentateurs de ce dernier texte, Cajetan, Banez, P. d’Aragon ; Alexandre de Aies, Summa, part. II, q. clxi, m. i ; Gabriel Biel, In IV Sent., 1. IV, dist. XIII, q. ii, a. 1, 3 ; Durand de Saint-Pourçain, ibid., q. v, a. 6 ; Pierre de la Palu, ibid., q. iii, a. 1, n. 3 ; A. de Castro, De justa hæreticorum punitione, 1. I, c. i, ix ; 1. II, c. cxviii ; Corduba, op. cit., 1. I, q. xvii, § 7 ; Vasquez, In 7 am 77 æ Sum. theol, disp. CXXVI, c. iii, n. 9 ; Driedo, De liberlale christiana, Louvain, 1546, c. xiv ; Sanchez, op. cit., 1. II, c. vii, n. 2 sq. ; Suarez, loc. cit., n. 8 ; Laymann, Theologia moralis, Venise, 1630, 1. II, tr. I, c. xiii, n. 1 ; Coninck, op. cit., De fide, disp. XVIII, dub. vii, n. 79, etc. Cette opposition voulue au magistère de l’Église constitue la perlinacité, que les auteurs requièrent pour qu’il y ait péché d’hérésie. S. Alphonse, op. cit., 1. II, tr. I, c. iv, dub. iv, n. 19. Il faut observer avec Cajetan’In 77 am 77*, q. xi, a. 2, et Suarez, loc. cit., n. 8, que cette pertinacité n’inclut pas nécessairement une longue obstination de la part de l’hérétique et des monitions de la part de l’Église. Autre est la condition du péché d’hérésie, autre est celle du délit, punissable par les lois canoniques, et il est très important d’en faire ici la remarque, afin de conserver, nonobstant les exigences d’une prudente procédure, la vraie notion théologique du péché d’hérésie, notion acceptée par tous les théologiens et inquisiteurs, à l’exception peut-être du seul juriste Alciato, dans ses gloses sur la clémentine De summa Trinitate. Citons le texte de Cajetan : Pertinacia quæ ponitur de ralione hæreseos non importai obdurationem scu obslinationem, ut distinguitur contra infirmitatem, passionem et transitorium consensum, sicut dicimus aliquem fornicari ex passione vel ex choiera consensisse in malum aliquod, et non pertinaciter. Sed sumitur pertinaciter, ut.equi valet vero consensui. prsesupposita nolitia quod sit error et quod sil in fide. Sive enim a passione, sive ex quacumque alia causa perveniatur ad verum consensum inassensum propositionis contrarias fidei, cum cognitione quod sit contraria fidei vera hseresis incurritur a christiano. Nam lalis ver’e pertinax pro tune est. Quand l’hérésie n’apparaît qu’in-