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GRÉGOIRE XIII - GRÉGOIRE XV

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secrétaire de la Chambre, Rudolf Bonfiglivolo, les droits de suzeraineté de la papauté. Une grande partie des châteaux et des biens des barons de l’État de l’Église lut dévolue au pape, les uns par extinction de la ligne réellement investie, les autres par défaut de versement du cens hypothéquant les fiefs. Le pape, sans doute, a été attaqué par Sixte-Quint, son successeur, pour avoir mangé une partie des revenus de son prédécesseur et de son successeur. L’histoire impartiale croit à l’excellence des mesures proposées par Grégoire XIII. Elles furent, c’est vrai, l’occasion d’un brigandage éhonté de la part des féodaux dépossédés. La vieillesse du pontife, sa trop grande élégance dans la répression des coupables furent les raisons de son impuissance finalement découragée. Mais il faut dire qu’un rappel à la hiérarchisation territoriale et censitaire soustrayait la papauté à la contingence pour lui donner la régularité des revenus et le prestige respecté d’une puissance étrangère aux agiotages des aliénations et des emprunts.

Dans ce domaine encore, Grégoire XIII n’était pas inférieur à lui-même. Il restait le pape du programme pesé et réfléchi. Si l’acte aisé et complet a toujours attesté chez lui la maîtrise de son époque et de son milieu, c’est qu’au fond l’intelligence et la piété surent donner au pontife la clairvoyance et le dévouement. Ce pontificat de treize ans a eu sa très grande efficacité pour la vie théologique de l’Église. Il constitue une époque dans la lignée des règnes féconds, réalisateurs du concile de Trente.

I. Sources.

Magnum biillarium romanuni de Clierubini, Luxembourg, 1742, t. ii, p. 387-526, moins complet que Cocquelines, Bullarium romanum, Rome, 1 754-1 758, 1. 1 v, p. 1-130 ; Notice préliminaire des papiers a" État du cardinal de Granvelle, publiée par Ch. Weiss, 9 in-4°, 1844-1852 (Documents inédits sur l’histoire de France) ; Poullet et Piot, Correspondance du cardinal de Granvelle, Bruxelles, 1878 sq. ; Gachard, Correspondance de Philippe II sur les affaires des Pays-Bas, Bruxelles, 1851. Voir la bibliographie de l’article Baius, t. ii, col. 62-63.

II. Ouvrages.

Steiïano Tucci, Oratio in exequiis Gregorii XIII, Paris, 1585 ; Ranke, Histoire de la papauté pendant les XVI’et XVIIe siècles, trad. Haiber, Paris, 1838, t. il (il cite de nombreux manuscrits contemporains) ; Linsenman, Michæl Baius, Tubingue, 1867 ; Ferrari, Il calendario gregoriano, Borne, 1882 ; Kaltenbrunner, Die Polemik iiber die Kalenderreform, Vienne, 1877 ; vicomte de Meaux, La Réforme et la politique française en Europe, Paris, 1889 ; Philippson, Les origines du catholicisme moderne, Bruxelles, 1884 ; Crétineau-Joly, Histoire religieuse, politique et littéraire de la Compagnie de Jésus, 6 vol., Paris, 18441851 ; Tempesti, Storia délia vilae geste di Sislo V, 1754 ; Schimberg, L’éducation morale dans les collèges de la Compagnie de Jésus en France sous l’ancien régime (xvi% xvii e et XVIIIe siècles), Paris, 1913 ; Maassen, Geschichle der Qucllen und der Literatur des kanonischen Rechts, Gratz, 1870 ; Tardif, Histoire des sources du droit canonique, Paris, 1887.

P. Moncelle.

14. GRÉGOIRE XIV, pape (1591). Nicolas Sfondrate, de Milan, appelé cardinal de Crémone, fut élu après Urbain VII et une vacance de deux mois et sept jours, le 5 décembre 1590, et couronné dans la fête de la Conception ; il prit le nom de Grégoire XIV. C’était un homme pieux et charitable, ennemi de l’hérésie ; il soutint la Ligue de son influence et de ses ressources ; il donna le chapeau rouge aux cardinaux réguliers. Mais il mourut au bout de dix mois et dix jours le 15 octobre 1591. Son successeur fut Innocent V.

Banke, Die rômische Pàpste, 6e édit., t. ii, p. 147 sq. ; Brosch, Geschichle des Kirchenstaats, 1886, t. i, p. 300 sq.

A. Clerval.

15. GRÉGOIRE XV, pape (9 février 1621-8 juillet 1023). Né à Bologne en 1554, Alexandre Ludovisio était fils du comte Pompeio. Il passa sa jeunesse à Rome où il fit ses humanités et sa philosophie au Collège romain, fondé par Grégoire XIII et dirigé par les Pères de la

Compagnie de Jésus. Revenu dans sa ville natale, l’étudiant s’y adonna à la science juridique, qu’il sut maîtriser assez pour être proclamé lauréat de l’université. Ses talents furent bientôt utilisés par la Curie romaine, Grégoire XIII le nomma premier juge au Capitole. Clément VIII en fit un référendaire de la Signature. Le même pape le créait dans la suite auditeur de Rote et l’envoyait à Bénévent en compagnie de Mapheo Barberino, clerc de la Chambre apostolique et futur pontife sous le nom d’Urbain VIII. Alexandre Ludovisio sut dans cette ville apaiser les difficultés entre ministres pontificaux et royaux napolitains. Cette, vie administrative avait eu d’autre part sa grande utilité pour lui. Sur de son expérience, il pouvait dès lors accepter, des mains de Paul V, le poste important d’archevêque de Bologne. Il était cardinal en 1616. En 1621, Paul V, frappé d’apoplexie pendant la procession célébrée à Rome en l’honneur de la soumission de la Bohême à la Montagne-Blanche, mourait d’une seconde attaque le 28 janvier. Labbe et Cossart, Sacrosancta concilia. Paris, 1672, t. xv, col. 1629-1630. Le Sacré-Collège avait été renouvelé presque en entier pendant ce pontificat de seize ans, à la longueur duquel on n’était plus fait. Le neveu du pape, le cardinal Borghèse, tenait dans sa main la plupart des cardinaux. Il dirigea leur choix sur l’archevêque de Bologne. Alexandre Ludovisio devenait pape, à soixante-sept ans, par acclamation, sous le nom de Grégoire XV, le 9 février 1621. « Le nouveau pape était un homme de petite taille, flegmatique, qui s’était acquis la réputation d’un négociateur habile et de savoir parvenir à son but sans bruit et sans éclat ; mais maintenant il était courbé par l’âge, débile et malade. » Ranke, Histoire de la papauté pendant les xrie et xiiie siècles, trad. Haiber, Paris, 1838, t. iv, p. 113.

Le pontife eut pourtant une forte carrière. On craignait qu’une santé éprouvée ne lui permît pas de dominer les lourds problèmes dont la solution s’imposait alors. Son neveu, Ludovico Ludovisio, un jeune homme de vingt-cinq ans, suppléa largement à l’impuissance physique qui aurait pu paralyser cet esprit lumineux et ferme dans ses réalisations catholiques. Très brillant, sympathique à ses amis et à sa famille qu’il sut ne pas oublier, bon vivant en somme, Ludovico sut garder en vue les intérêts capitaux de l’Église : « Ses ennemis même s’accordent à lui reconnaître un véritable talent pour la direction des affaires, un esprit juste et droit, trouvant toujours un expédient satisfaisant dans les complications les plus difficiles, et qui possédait tout le courage tranquille et nécessaire pour prévoir la probabilité d’un événement dans les ténèbres de l’avenir, et marcher droit sur cet événement. Si l’infirmité de son oncle, qui ne promettait pas une longue durée à son pouvoir, ne l’avait pas maintenu dans de justes bornes, aucune considération n’aurait été capable d’exercer de l’influence sur lui. » Cf. Ranke, op. cit., p. 114.

L’avènement de Grégoire XV marquait l’ère des conquêtes ; premier pape élève des jésuites, il devait par éducation préconiser l’expansion catholique. Au fait, depuis quanrante-huit ans déjà, l’Église romaine avait remis au point son arsenal théologique. Les pontificats qui avaient englobé le dernier tiers du xvi c siècle avaient su constituer dans le sens du concile de Trente. Pie V, Grégoire XIII, Sixte-Quint, Clément VIII avaient largement contribué à la théologie du De reli(jione et du De Ecclesia. Deux hommes comme Bellarmin dans la dialectique et Baronius dans les annales s’étaient alors faits les marteaux de l’hérésie. Ils démontrèrent l’unité, la sainteté, l’apostolicité, la catholicité de l’Église romaine dans l’histoire. Au début du xviie siècle, il fallait faire de ces marques des réalités présentement continuées. La brillante floraison des âmes institutrices et réformatrices au lendemain du