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GRÉGOIRE III

1788

et contre les erreurs des prêtres bretons, très déchus depuis Colomban. EpisL, xxxvi, xxxvii, Jaffé, op. cit.. p. 101, 103-104. D’autres points d’ordre pratique et doctrinal furent aussi fixés dans cette mission qu’on pourrait appeler une campagne.

La possibilité canonique du mariage entre gens unis par des liens spirituels fut mise au point. Boniface, soumis à la papauté, reconnaît l’existence d’un empêchement dirimant entre parrain et marraine d’une part et leur filleule ou filleul d’autre pari. Un cas bien pratique aussi était alors à examiner. Un parrain, après la mort du père de son filleul, peut-il épouser la mère de son filleul ? Le clergé romain et franc soutenait qu’un tel mariage était illicite. Epist., xxix. xxx, xxxi, Jafié, op. cit., p. 95, 96, 98. L’archevêque de Germanie donne son avis théologiquement autorisé : « Si un tel mariage est un péché, je l’ai toujours ignoré et je ne l’ai jamais appris, ni dans les anciens canons, ni dans les décrétâtes des papes, ni dans eCakulus peccalorum des apôtres. » Grégoire III ne l’en blâma point. La question de parenté revint encore en discussion. Depuis Grégoire II, elle semblait pourtant définitivement fixée. Son successeur fut plus rigoureux. La pratique barbare tolérait l’union à partir du second degré. D’après le vénérable Bède, Hist. eccles. Angl., 1. I, c. xxvii, n. 5, saint Grégoire le Grand, en prohibant le second degré dans ses lettres à saint Augustin de Cantorbéry, avait autorisé le troisième. La réponse de Grégoire II, défendant le quatrième inclusivement, a été exposée plus haut. En 732, Grégoire III tient pour illicites les mariages entre parents jusqu’à la septième génération. EpisL, xxviii, Jafié, op. cit., p. 93. La lettre xxviie était plus exclusive encore : Quamdiu se agnoseuni afpnitate propinquos. Jafié, op. cit., p. 89. Boniface ne se tint pas pour battu. Il allégua la réponse de Grégoire I er. La curie romaine lui répondit que l’article relatif à cette question manquait dans les manuscrits de saint Grégoire, classés dans les archives pontificales. Episl., xx. Boniface, peu satisfait de cet argument négatif, écrivit à l’archevêque Nothelm de Cantorbéry, lui demanda de lui envoyer le texte de la consultation de saint Grégoire le Grand, et le supplia de bien vouloir, par un examen minutieux, se convaincre de l’authenticité de l’article en question. On ne sait pas ce qu’il advint.

Il faut ajouter, à l’honneur de Grégoire III, qu’un appel à la vérité catholique fut toujours facile à ses subordonnés dans la hiérarchie ecclésiastique. Avec une franchise toute saxonne, Boniface lui demande compte des bruits relatifs aux saturnales célébrées dans la ville de Borne vers la fin de l’année 738. C’est un mauvais exemple pour les fidèles d’origine barbare encore si novices dans la foi. Epist., xi.ii, Jaffé, op. cit., p. 115, 116. Dans une autre lettre, la simonie est suspectée à Rome. Epist., il, Jafié, op. cit., p. 135. Et toujours le pape accepte l’inquisition qui lui est imposée sur le ton du justicier. Au fond, de part et d’autre, l’amour de la vérité veut triompher. Sans doute Grégoire III supplie son légat de ne plus lui tenir des propos aussi durs. Il honore sa franchise pourtant. En lui affirmant ses interdictions relativement aux saturnales, l’inexactitude des rapports surla simonie, le pape encourage l’archevêque de Germanie.

La controverse des iconoclastes.

Grégoire 111,

simultanément à la conquête de l’Allemagne transrhénane, s’était occupé dès les premiers jours de son pontificat de la controverse des images. En 731, un légat partit pourByzance afin de solliciter de l’empereur Léon l’Isaurien le retrait de l’édit contre les images ; le message de Grégoire III n’eut d’autre résultat que de faire condamner à l’exil celui qui en était chargé. Le pape avait montré les dernières preuves de patience. Ils

pouvait maintenant user de rigueur. En 732, un concile se réunit à Rome ; quatre-vingt-quinze évêques y assistèrent. Le culte des images y fut confirmé par décret apostolique ; l’anathème porté contre ses ennemis. Cf. Kirsch et Luksch, Geschichle der katholischen Kirche, Munich, p. 197, où l’on voit un fragment d’une inscription de l’année 732, contenant les décisions du concile en question. La solennité, la fermeté de la condamnation est frappante.

En plein orage d’ailleurs, Grégoire III restaurait la vieille basilique vaticane de Saint-Pierre ; il y élevait un oratoire enrichi d’or, d’argent, de pierres précieuses et d’ornements variés. Les reliques des apôtres et des martyrs, rassemblées avec soin dans tout l’univers chrétien, y furent exposées à la vénération des fidèles. Les statues de Notre-Seigneur Jésus-Christ, de la sainte Vierge et de différents saints ajoutèrent encore à la magnificence de cette chapelle dite de « Tous les Saints n.

La vengeance ne se fit pas attendre. En 734, Léon III l’Isaurien arma sa flotte pour réduire les Romains à l’obéissance ; une puissante arhiée devait débarquer en Italie. Le convoi fut dispersé par une tempête dans l’Adriatique. L’empereur ne s’arrêta point ; détachant l’Illyrie du patriarcat romain, il saisit les biens du Saint-Siège, situés dans l’Italie méridionale. La ville pontificale, fidèle à son pape, répondit brusquement. L’exarque de Ravenne était impuissant à faire prévaloir en Italie l’autorité impériale. Rome chassa son duc byzantin, et se donna, semhle-t-il, un gouvernement républicain. En fait, Grégoire III en inspirait les décisions, sans avoir jamais rompu par un acte officiel avec la cour de Constantinople. En dehors et au-dessus des partis, il voulait avant tout remplir sa mission spirituelle. La suite des événements lui imposait, pour atteindre son but, une tactique qu’il ne pouvait discuter.

L’ébauche du pouvoir temporel.

A la faveur du

naufrage de l’Adriatique, six années de calme s’étaient écoulées pour la papauté. Un fait allait remettre en question les difficultés lombardes. Les ducs de Spolète et de Bénévent se révoltaient vers 740 contre leur roi Liutprand. Grégoire, en leur donnant asile, allait provoquer les représailles du roi barbare. Pressé de tous côtés, le pape pensa sauver son Église et sa ville par un acte de souveraineté. Il se tourna vers Charles Martel, le puissant duc des Francs, qui avait déjà tant fait pour la papauté dans les missions de Germanie, et qui venait de sauver sa chrétienté en battant les Arabes à Poitiers (732) ; en lui envoyant une ambassade avec un souvenir du tombeau de saint Pierre, il lui demanda de descendre en Italie avec ses guerriers pour porter secours à l’Église apostolique.

Au nom de Dieu et de son jugement terrible, ne rejette point ma prière et ne ferme point l’oreille à ma demande et le prince des apôtres ne te fermera pas les royaumes célestes. » P. L., t. lxxxix, col. 582583 ; Jaffé, Rej. pont, rom., p. 180. La situation était fort délicate pour Charles Martel : barbare rusé et utilitaire, il employait alors son activité guerrière contre les Sarrasins qui occupaient la Septimanic et quelques villes de la Provence : Luitprand lui avait prêté son concours dans ces expéditions. Aussi ne se pressait-il pas de se brouiller avec un allié précieux. Il se décida pourtant à une intervention à l’amiable qui fit renoncer les Lombards à leur attaque contre Rome. Ils Lardaient quatre villes sur son territoire. On a conservé des lettres écrites par Grégoire III à Charles Martel. P. L., t. i.xxxix, col. 581 sq. Des historiens ont affirmé qu’après deux ambassades, qui n’avaient produit que des échanges de compliments et de préseuls, le pape n’avait obtenu la médiation du duc austrasien qu’en lui promettant de la part des Romains la répudiation de toute allégeance en-