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GÉORGIE


juridiction sur la Géorgie, vint à Tiflis vers la même époque et crut nécessaire d’y établir un vicaire épiscopal. Il choisit pour cela le P. Niccolo de Girgenti, des capucins, ce qui déplut au P. Claudio, préfet de la mission, alors en voyage en Europe. A son retour, le P. Claudio quitta la mission de Tiflis pour celle d’Akhaltzikhé, La querelle s’envenima à cause du manque d’esprit de conciliation dont fit preuve le P. Niccolo et de l’indépendance qu’il montra vis-à-vis du Père préfet. Rome essaya en vain de calmer les esprits. Archives de la Propagande, Lcltcrc dclla S. Congrcgazionc, t. clxxi, fol. 191 ; t. clxxiii, fol. 156. Les démarches tentées de 1742 à 1750 pour faire nommer un évêque latin à Tiflis n’aboutirent pas. En 1742, une partie de la Géorgie occidentale, Akhaltzikhé avec son district, alors sous la domination de la Turquie, fut détachée du diocèse d’Ispahan et confiée au délégué apostolique résidant à Constantinople. Archives de la Propagande, Scritlure non rifcrilc, Monte Caucaso, Giorgia, t. ii, n. 29 a. Cet expédient, imaginé pour remédier aux difficultés que présentait la visite de la Géorgie par l' évêque d’Ispahan, n’obtint point le succès qu’on en attendait. Les délégués apostoliques n’allèrent jamais au Caucase et ne purent pas mettre fin aux démêlés qui eurent lieu entre le clergé et les fidèles et au sein même du clergé. L’absence d’un évêque fut toujours funeste aux développements de la mission catholique. En 1757, les capucins obtinrent de Rome la permission de chanter en langue géorgienne l'épître, l'évangile, le Gloria et le Credo à la messe solennelle. En 1784, la même faveur fut étendue aux Géorgiens qui suivent le rite arménien.

Les frères Orbéliani, dont nous avons parlé plus haut, se faisant apôtres comme leur parent, le prince-moine Saba, portèrent la foi catholique dans l’Imérétie ou Géorgie occidentale, où ils convertirent le catholicos Bessarion, le roi Alexandre, le prince de Ratcha, Rostom, frère du catholicos, et d’autres personnages importants, Archives de la Propagande, Miscellanee varie. 1. 1, cahier xiii. Les capucins y établirent aussi une mission que les envoyés du patriarche grec réussirent à ruiner complètement. Archives de la Propagande, Scrillnre non riferite, Monte Caucaso, Giorgia, t. ii, n. 63. Les Arméniens essayèrent d’en faire autant à Tiflis, mais ils n’y parvinrent pas, même en promettant une somme de 51 000 écus au catholicos Antoine I er (1753). Archives de la Propagande, Scritlure non riferite, Monte Caucaso, t. ii, n. 69. Entre 1750 et 1755, le catholicisme prit à Tiflis une importance considérable. Le catholicos Antoine, plusieurs prêtres et religieux, une soixantaine de princes et un grand nombre de fidèles, étaient unis à Rome. Archives de la Propagande, ibid., n. 71. Les grecs et les Arméniens coalisés finirent cependant par obtenir du roi l’expulsion des capucins, vers 1757. Rome réussit par ses démarches auprès des gouvernements français, autrichien et ottoman à faire revenir les missionnaires à Tiflis, mais ils ne purent pas rentrer en possession de leur église. Archives de la Propagande, ibid., n. 76.

La Propagande forma alors le projet de fonder une nouvelle mission auprès des montagnards du Caucase et en confia la direction aux religieux de la congrégation de SaintJean-Baptiste, malgré l’opposition des capucins (1760). Archives de la Propagande, Lettcrc dclla S. Congrcgazione, t. exevi, fol. 433. Les nouveaux missionnaires, au nombre de cinq (trois religieux de la congrégation et deux prêtres géorgiens élèves de la Propagande), ne réussirent pas à atteindre leur destination et restèrent à Akhaltzikhé. Ils finirent par abandonner leur projet primitif pour se fixer dans cette nille où ils commencèrent leur apostolat. Ils n’y vemeurèrent du reste pas très longtemps. Les Armédiens ne désarmaient toujours pas. En 1769, ils

confisquèrent tous les biens ecelésiastiques de la mission et les mirent sous séquestre ; puis, ils emmenèrent les capucins en divers lieux où ils les retinrent prisonniers. Archives de la Propagande, Scritlure non riferite, Giorgia, t. iii, n. 1. L’intervention énergique de l’ambassadeur de France à Constantinople fit relâcher les missionnaires, mais les simples fidèles ne cessaient pas d'être molestés. La mission d’Imérétie, d’où les capucins avaient été chassés, reprenait vie, et le roi luimême, Salomon, s’y montrait favorable au catholicisme (1780). Pendant ce temps, le roi de Géorgie, Héraclius II, écoutant les mauvais conseils des Arméniens, persécutait cruellement les convertis (1775). Il en vint même à interdire à ses sujets de se faire catholiques, sous peine de deux mois de prison, de la bastonnade, de la confiscation et de l’exil. Archives de la Propagande, Scritlure non riferite, Giorgia, t. iii, n. 60. Héraclius, ayant fait alliance avec la Russie, les Persans dévastèrent la Géorgie en 1795 et détruisirent complètement la mission de Tiflis. Archives de la Propagande, Scritlure riferite, Giorgia, t. v, n. 16. L’annexion du pays à la Russie en 1800 porta le dernier coup à l'œuvre des capucins dans le Caucase. Ils avaient à compter dès lors avec le fanatisme moscovite qui interdisait de se faire catholique.

Les archevêques latins de Mohilev, probablement à l’instigation du gouvernement de Pétersbourg, prétendirent dès 1783 exercer leur juridiction sur la Géorgie, à cause du traité d’alliance conclu avec la Russie. Archives de la Propagande, Scriliure riferite, t. iv, n. 28. Tant que les capucins restèrent dans le pays, ils empêchèrent l’exécution de ce projet. En 1807, ils réussirent à rebâtir l'église de Tiflis, Archives de la Propagande, ibid., t. iv, n. 42, 46, puis ils en construisirent une autre à Gori. Ibid., n. 69. Si la persécution n'était plus autant à craindre, le manque de missionnaires menaçait de ruiner l'œuvre commencée. En 1813, il n’y avait plus que deux c apucins dans toute la Géorgie. On leur donna comme préfet un prêtre arménien, le pro-vicaire d' Akhaltzikhé. Archives de la Propagande, Letlere délia Sacra Congre gazione, t. ccxciv, 18 et 24 mai 1813 ; t. ccxv, fol. 70. Ils étaient trois en 1823. Quelques autres vinrent les aider plus tard, mais en nombre insuffisant. Comme on avait omis de former un clergé indigène, c'était à bref délai la ruine de la mission. Elle fut de plus violemment attaquée par un prêtre d' Akhaltzikhé, ancien élève de la Propagande, Paul Sciagulianti, qui fit cause commune avec les Arméniens contre les latins et s’appuya sur le gouvernement russe. Archives de la Propagande, Scriliure riferite, t. v, n. 66. Ce dernier profita des dissensions survenues entre le clergé arménien catholique et les capucins pour expulser ceux-ci. sous prétexte qu’ils étaient étrangers (février 1845). Tamarati, op. cit., p. 658. Les missionnaires, chassés brutalement de leurs diverses maisons, se réfugièrent à Trébizonde, d’où ils espéraient toujours pouvoir pénétrer en Géorgie. Ils n’ont jamais pu réaliser leur désir.

XXIV. Les catholiques géorgiens de 1845 a nos.tours. — Après le départ des capucins, les catholiques géorgiens restèrent plusieurs années sans autre prêtre qu’un ancien élève de la Propagande. L’intrigant Sciagulianti leur envoya en vain des prêtres arméniens catholiques, les fidèles déclarèrent qu’ils étaient de rite latin et qu’ils n’en suivraient pas d’autre. Le gouvernement russe dut lui-même demander des prêtres polonais qui administrèrent les églises sans connaître la langue du pays. Le Saint-Siège conclut en 1848 une convention avec le tsar Nicolas I er, en vertu de laquelle tous les catholiques de Géorgie, de rite latin et de rite arménien, furent soumis à l'évêque latin de Tiraspol, dont le siège venait d'être créé.