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son opposition au système contraire, qu’il fit écarter plus d’une expression dogmatique qu’il jugeait admissible en soi, mais dont il craignait que les adversaires ne pussent se prévaloir. Il ne tint pas à lui que le synode ne se prononçât formellement en faveur du supralapsarisme, qui regarde la chute d’Adam et la déchéance originelle de tout le genre humain comme une conséquence du décret de la prédestination. Mais s’il avait pu grouper autour de lui une poignée d’amis disposés à le suivre jusqu’à cette affirmation extrême de l’idée prédestinatienne, la plupart des membres du synode, et surtout les députés d’Angleterre et d’Allemagne, s’y refusèrent obstinément. Force lui fut donc de se contenter de formules qui proclamaient la toute-puissante efficacité de l’élection divine en reléguant parmi les questions d’école, librement discutables, le différend entre supralapsaires et inl’ralapsaires. Après 1619, il continua à s’adonner à ses travaux de théologie et d’exégèse, et, en 1633, il fut de ceux qui collaborèrent, à Leyde, à la revision de la version flamande de l’Ancien Testament, souvent citée sous le nom de Bible hollandaise. Il mourut, le Il janvier 1641, âgé, à quelques jours près, de soixante-dix-huil ans. Il avait été marié trois fois et avait eu la douleur de voir son unique fils le précéder dans la tombe.

Gomar fut un homme érudit et ardent au labeur studieux, presque aussi versé dans la connaissance de l’hébreu que dans les querelles les plus subtiles de la théologie ; mais, au jugement de ses coreligionnaires même, il manquait de critique, et l’ensemble de ses actes nous révèle en lui une âme opiniâtre jusqu’à l’entêtement, autoritaire et hautaine jusqu’à la raideur et à la dureté. Albert Réville, tout en plaidant pour lui les circonstances atténuantes, apprécie son rôle doctrinal avec assez de justesse et de profondeur : « Ce fut, dit-il, un caractère froidement et dogmatiquement passionné, intolérant, étroit, qui pour nous aujourd’hui n’a rien de sympathique, mais qu’il faut juger dans son cadre historique. Là il a sa grandeur imposante et sombre, et il est de ceux qui aident à comprendre le pouvoir étrange, ou plutôt le charme indicible qu’exerça sur des esprits profondément religieux, inaccessibles à tout autre intérêt que celui de la religion, le dogme calviniste de la prédestination. » Dans les œuvres qui nous restent de Gomar on peut, comme dans sa vie, faire deux parts : celle du théologicn-exégète doublé d’un hébraïsant ; celle du polémiste et du sectaire. Quelques-unes seulement avaient paru de son vivant. L’ensemble, publié d’abord en 1644 à Amsterdam, par les soins des trois gomaristes, Jean Vereem, Adolphe.Sibelius et Martin Ubbenius, fut réimprimé, au même lieu, dès 1664. Il est intitulé : Fr. Gomari opéra theologica oinnia, maximam partent posthuma, suprema aulhoris voluntate a discipulis edila. Cet énorme in-folio, qui embrasse la matière de plusieurs volumes ordinaires, a été distribué par les éditeurs en trois parties avec pagination distincte, dont deux principalement exégétiques, et la IIIe, de contenu fort mélangé. A la I re (in-folio de 500 pages) appartiennent : llluslrium ac selcctorum ex Evangelio Malthsei locorum explicatio ; Selcctorum Evangelii Lucæ (cap. i et n) locorum illustrât io ; Selcctorum Evangelii Joannis locorum illuslralio. Chacun de ces titres nous présente un commentaire étendu et approfondi d’un certain nombre de passages spécialement intéressants ou spécialement difficiles et discutables. Les explications de tel ou tel verset particulier sont parfois développées jusqu’à constituer une véritable dissertation. Mais on y retrouve trop souvent le polémiste et le calviniste sous l’exégète. Ainsi à Matthieu, xxiii, 37, est rattachée une longue étude, De gralia conversionis, où l’auteur s’est proposé de combattre cette assertion des « semipélagiens, des papistes et des novateurs : » Fidei origo

non est a solo Deo vocanle et régénérante, sed cliam a libero volunlaiis concursu. De même, à propos de Luc, i. 77, Gomar pose cette question : An remissio peecalorum sil lola fidelium coram Deo justificatio ad vitam œternam oblinendam, et sa réponse tend à prouver qu’aucune obligation de peine ou expiation temporelle ne survit au pardon de la faute.

Dans la IIe partie (in-folio de 544 pages) sont rangés les ouvrages suivants : Analysis et explicatio Epistolarum Pauli ; Explicatio Epistolæ Jacobi ; Explicatio lr Pétri ; Explicatio 1 lv Pétri ; Explicatio I Joannis ; Explicatio l y Joannis ; Explicatio Epistolæ Judæ ; Explicatio quinque priorum librorum Apocalypseos. Huit Épîtres seulement figurent sous le nom de saint Paul ; les lettres aux Corinthiens, aux Lphésiens, à Timothée et à Tite ne sont pas même mentionnées. Mais, qu’il s’agisse des écrits de saint Paul ou d’autres livres, les commentaires de cette série sont plus complets, plus suivis que ceux de la première, et toujours cependant entrecoupés de longs excursus tendancieux. On trouvera un nouvel échantillon de ces retours incessants au genre polémique dans l’annexe aux c. xi et xii de l’Épître aux Hébreux : De fidei per quam justificamur natura.

La IIP partie (in-folio de 467 pages), dans laquelle on a inséré des ouvrages ou opuscules déjà publiés à part antérieurement, se subdivise elle-même en deux sections, dont l’une est formée de Disputationes ou Discussions théologiques, et l’autre, de Traités théologiques. Les Disputationes, au sens qu’on a ici en vue, ne sont pas autre chose que des. suites, des nomenclatures de thèses ou de propositions plus ou moins explicites, qui se rapportent à différents points de croyance ou de controverse religieuse et qui ont été développées ou défendues par l’auteur « en diverses académies. » Elles sont au nombre de trente-neuf. Il y en a une De theologia, une autre De Scriptura sacra, plusieurs sur Dieu et les personnes divines, d’autres De œtemo Dei deercto ; De divina hominum prædeslinatione ; De creatione mundi ; De angelis ; De legis divinæ et pontifuiæ doctrinæ repugnanlia ; De morte Jcsu Christi ; De merilis Christi c jusque beneficiis erga nos ; De Pétri aposloli et papæ romani repugnanlia ; De fide salviftca ; De articulorum fidei aposlolicæ et fidei romanse Ecclesiæ repugnanlia ; De hominis coram Deo juslificatione ; De justificatione contra ponlificiorum errores ; De Ecclesia Dei ; De baplismi sacra ; Scripturæ et Ecclesiæ romanæ repugnanlia ; De cœnæ Domini doctrina, S. Scripturæ et Ecclesiæ Romæ repugnanlia ; De sacerdolio Christi et Melchisedech, et missifici sacerdotii cum ulroque repugnardia ; De cœnæ dominicæ et missæ repugnanlia ; De quinque falsis ponlificiorum sacramentis, etc. A la différence des Disputationes, les Tractatus theologici comportent une étude plus ou moins fouillée, un exposé plus ou moins complet de chaque sujet. Parmi les travaux les plus importants présentés sous ce dernier titre, nous notons : Conciliatio doctrinæ orthodoxæ de providenlia Dei, déjà imprimé à Leyde, in-8°, en 1597 ; Anticoslcri libri très. Dirigés contre l’Enchiridion controversiarum, l’œuvre maîtresse de Fr. Coster, ces trois livres traitent successivement : 1. De discrimine hæreticorum et calholicorum, partie déjà publiée in-8°, à Anvers, en 1599 ; 2. De sacra Scriptura, in-8°, Leyde, 1600 ; 3. De Ecclesia Christi, in-8°, Hanovre, 1603. Viennent ensuite : Examen conlroversiarum de genealogia Christi, in-8°, Groningue, 1631 ; Disserlatio de Evangelio Mallhœi, quanam ling.ua sit scriptum, in-8°, Groningue, 1632 ; et l’auteur opine pour la langue grecque, tout en avouant qu’il a contre lui le sentiment de la plupart des anciens ; Investigatio sententiæ et originis sabbedi ; Judicium de primo arliculo remonslrantium de clectione et reprobalionc ; Defensio doctrinæ de persevéranda sanctorum ; Davidis Lyra, seu nova hebrœa