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EUCHARISTIE AU XIP SIÈCLE EN OCCIDENT


menti la double manducation, duo modi manducandi, unus sacTamentalis…, aller spiriliialis, dist. IX ; c’est là qu’il s’en prend à l’erreur de ceux qui prétendaient que le corps et le sang du Christ ne sont reçus que par les bons et "^ qu’il explique quelques expressions difiiciles des écrivains ecclésiastiques. Par une transition toute naturelle, la distinction suivante, dist. X, passe à une erreur plus grave : celle des sacramentaires qui nient la vérité du corps du Christ dans l’euchîiristie ; ce chapitre sur la présence réelle est donc une réfutation. C’est ce qui explique pourquoi cette distinction, dont les conclusions sont présupposées dans tout ce qui précède, n’arrive qu’à cette place dans le cours du traité. C’est le même cas pour la Summa sententiarum, 1. VI, 5, P. L., t. clxxvi, col. 111-112 ; Roland, d’une allure toujours décidée, est peut-être le seul qui fasse exception en entamant le sujet sous forme de thèse, op. cit., p. 221 ; les autres se contentent de parler de ce dogme universellement reçu, en rejetant l’objection qui l’attaque. Ayant réfuté les adeptes de Bérenger par des textes qui affirment le changement de la substance du pain et du vin au corps et au sang de Jésus-Christ, le.l/ag’isffr passe logiquement à l’étude de cette conversio, dist.. XI, 1, 3 ; il y rattache une série de questions léguées par ses prédécesseurs : quarc sub alia specie sumatur, dist. XI, 5 ; qucire sub duplici, 6 ; quarc aqua misceatur, 7 ; qmde corpus dédit discipulis, 8. L’investigation philosophique, pour rudimentaire qu’elle fût, faisait tout de suite se dresser, en dehors même de l’exemple de ses modèles, le problème de la permanence des accidents. C’est l’objet de la dist. XII, qui ajoute, après les paragraphes sur la fraction des espèces, les textes classiques sur la signification des trois parties de l’hostie divisée, 6 ; l’auteur y rattache un paragraphe sur la réalité de l’immolation et du sacrifice de l’autel, dont la place peut se justifier ici. Les lignes suivantes, sur le but de l’institution de ce sacrement et sur la communion fréquente, 5, 8, devaient être placées ailleurs. Enfin, une dernière distinction, XIII, s’occupe des hérétiques et des exconnnuniés : écho des anciennes controverses sur les investitures qui ne devait pas s’éteindre encore. Pierre Lombard appartient à l’opinion sévère ; il ferme ce chapitre par une description de l’hérétique, empruntée à saint Augustin, à saint Jérôme et, d’après un texte ancien de son œuvre, à saint Grégoire. Aussitôt après vient le traité de la pénitence.

c) Après Pierre Lombard. — a. Théologiens. — Un des premiers commentateurs du Lombard, Pierre de Poitiers (avant 1175, puisqu’il dédie son œuvre à Guillaume aux Blanches-Mains, archevêque de Sens jusqu’à cette date), groupe toutes ses recherches, dont plusieurs abondent en subtilités dialectiques, autour de quelques questions relatives au sacramentum et à la res sacramenti, c. x ; à la forma, c’est-à-dire matière et forme, c. xi ; le mot Iranssubstantiatin, transsubstantiari revient au moins une douzaine de fois dans les trciis colonnes et demie que comprend ce chapitre ; à la conversion, c. xii ; c’est ici qu’il étudie les accidenlia, l’ubiquité du corps de Jésus-Christ, etc. ; à la ( : ouble iranducation p :  ; r les bons et’es méchants, c. xiii ; ici, interviennent, comme ailleurs en orcc’est le cas chez Pierre, quelques essais de casuistique. Tout cela est exposé avec netteté, concision, fermeté, sans l’abondance du Lombard et accuse chez le commentateur une longue gymnastique qui a accentué les mérites et les défauts d’une formation trop purement dialectique. Voir plus loin.’l’.obcrt de Melun (y ll()7), contcinporain de Pierre Lombard (ms. lat., B. N., NSSr, , Bruges, 191, etc.), n’a pas eu le lemjjs de donner dans sa Somme une place aux sacrements ; mais, à la manière dont il 1

s’attarde pour appliquer à l’incarnation, selon l’ancien vocabulaire du ive siècle, la définition du sacramentum, onpeut juger des développements qu’il aurait donnés à ce seul chapitre de l’eucharistie, qui attire l’attention de beaucoup de ses contemporains. Pierre le Chantre a quelques particularités dans son œuvre encore inédite. De sacramentis, etc., où il s’étend sur les parties non traitées par le Magisler Sententiarum (ms. lat., B. N., 1445, etc.).

Prévostin, généralement fort bref dans ses chapitres sur les sacrements, ouvre des échappées de vue intéressantes sur les avis de ses contemporains et de ses prédécesseurs : magistri nostri dicunl, secundum magislros nostros. Son chapitre sur la transsubstantiation (le mot revient sans cesse sous sa plume) est particulièrement développé : de verbis quibus fit (ranssubslantialio. C’est sous cette rubrique que le manuscrit de Bruges, n. 237, groupe presque la totalité des questions.

Vers la même époque, un théologien, plus original que la plupart de ceux qui figurent parmi les maîtres de Paris et dont on ne peut passer ici le nom sous silence, Alain de Lille, surnommé le docteur universel (y 1202), écrit des pages importantes sur l’eucharistie, surtout à propos de la transsubstantiation, dans son 1. I, De flde calholica contra hserelicos, c. LVii-Lxii, P.I, ., t. ccx, col. 359-365 ; lec. lvii aligne les principales objections des sectes dissidentes ; la suite, c. lviii-Lxii, expose la doctrine et répond aux attaques. Les Régulai theologicse, reg. 107-110, ibid., col. 677679, ne donnent pas beaucoup plus que le résumé ou la répétition de ce qui se trouve dans le Contra hserelicos, sur la transsubstantiation, la matière et la forme, etc.

Deux théologiens de la fi i du xiie siècle, Simon de Tournai, sur le compte duquel circulèrent des récits malveillants, plus ou moins légendaires, et Etienne Langton, qui devint archevêque de Cantorbéry (1208-1228), consacrent à l’eucharistie des l)ages intéressantes où se révèlent certains progrès de la terminologie. Le premier, s’écartant de la division du Lombard en quatre livres, parle de l’euchariste, le terlinm sacramentum s(dutare (il a une classification des sacrements qui tient compte, comme Hugues de SaintVictor et beaucoup de canonistes ^lossateurs du Décret, des diverses espèces de sacramentaux), dans la VIII » partie de sa Summa ou de ses fnstiluliones{ms. lat., B. N., 14886, îol.bH sq. ; Merton Collège, Oxford, 722, fol. 105, etc.). Il parle de la transsubslanlialio, ibid., fol. 47, tout comme dans ses Quxslioncs ou Dispulaliones (ms. ûe Bruges 193, disp. LXV). L’autre reste davantage fidèle au plan du Magisler dont il possède l’autographe ; mais en certaines parties il est beaucoup plus étendu (ms. de Bamberg, Patr. 136 ; Q. Vꝟ. 50). Il a aussi le mot de transsubstantiari, etc., fol. 68. L’une et l’autre œuvre encore inédite utilisent davantage les écrits d’Aristote et méritent une étude plus étendue que le manque de place empêche de développer ici. Signalons leur dissertation sur la valeur du sacrement en dehors de la dignité du ministre, question fort brûlante à ce moment.

Voisine des Rcgulæ d’Alain, auquel on l’a longtemps attribuée, est l’œuvre de Nicolas d’Amiens, De arte seu de arliculis catholico’fidei, sorte d’exposition en théorèmes » de la vraie doctrine, cf. iii, 13 ; la partie relative à l’eucharistie y est brève, iv, 3, P. L., t.ccx, col.fil3 Gll.Cf. Hauréau, .Vo/irc et extraits de quelques manuscrits de la Bibliothèque nationale, Paris, 1801, t. v, p. 74-76.

Par contre, les divers dictionnaires do théologie que voit surgir le dernier tiers du xii'e siècle et qu’il est instructif de consulter, comme les témoins d’une