Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 5.djvu/591

Cette page n’a pas encore été corrigée

EUCHARISTIE D’APRÈS LES PÈRES

1154

mais c’est le Seiffncur Jésus, ipse conviva et conviviiun, ipse comedens et qui comeditur. » Epist., cxx, c. ii, q. ii, (id Hedibiam, P. L., t. xxii, col. 986. Saint Jérôme nous répète que le pontife ou l’évêque consacre par sa bouche la cliair de l’agneau, carnes agni sacro ore conftciens, Epist., lxiv, 5, ad Fabiolam, col. 611 ; le corps du Christ, Chrisii corpus sacro ore conflciunl, Epist., XIV, 8, ad Ilcliodorum, col. 352 ; le corps et le sang du Christ, ad quorum prcccs Christi corpus sanguisque conficitur. Epist., cxlvi, 1, ad Evangetum, col. 1193. Vantant la charité de saint Exupère, évêque de Toulouse, qui avait tout donné, même les vases sacrés, il écrit : Corpus Domini canistro vimineo et sanguinem portât in vitro. Epist., cxxv, 20, col. 1085.

D’autre part, les relations qui existent entre l’Ancien et le Nouveau Testament, le premier étant l’ombre ou la figure du second, suggèrent à saint Jérôme une comparaison entre le pain et le viii, figures de l’eucharistie, et la réalité actuelle ; mais quelle différence 1 Tantum interesi inler propositionis panes et corpus Christi quantum inter umbram et corpus, inter imaginem et veritatem, inter exemplaria futurorum et ea quæ per ipsa exemplaria pnvfigurabantur. In Epist. ad TH., i, 8, 9, P. L., t. xxvi, col. 509. Le froment et le vin sont le type, de quo conficitur pani Domini, et sanguinis ejus impletur tijpus. In.1er., I. VI, c. XXXI, V. 10, P. L., t. XXIV, col. 875. Mclcliisedech qui jam tune in lijpo Christi pancm et vinum obtulit, et mijsterium cluistianum in Saluatoris sanguine et cm pore dedicavii. Epist., xlvi, 2, P. L., t. xxii, col. 484. Dans un passage il oppose l’eucharistie à deux anciennes figures, celle de l’agneau pascal et celle du sacrifice de Melchisédcch, non comme un symbole à d’autres symboles, mais comme la vérité ou la réalité à ce qui n’en était que la figure : de là, sous sa plume, le vieux terme de Tertullien, reprtrsentare, avec son sens étymologique de rendre présent, comme le prouve celui de præfiguratio auquel il l’oppose. Après avoir accompli la pâque figurative et mangé la chair de l’agneau avec ses apôtres, Jésus prend le pain qui fortifie le cœur de l’homme, et passe au vrai sacrement de la pâque, ut quomodo in pru’figurationc ejus Melcliisrdech, summi Dei sacerdos, pancm et rinum ofjcrcns feceral, ipse quoque in veritate (ou veritatem) sut corparis et sanguinis rcpra’seniaret. In Matth., 1. IV, 26, P. A., t. XXVI, col. 195.

Le Sauveur, à la dernière cène, a donné comme une image de sa passion, quod in lypum suæ passionis expressif, Adv. Jovin., II, 17, P. L., t. xxiii, col. 311, mais Il a donné aussi réellement, quoique spirituellement, son corps et son sang en nourrit ure. C’est, en effet, de deux manières qu’on peut entendre la chair et le sang du Christ, dit saint Jérôme : Vel spirituulis illa atquc divina, de qua ipse dixit : Caro mea vcre est ci bus, ri sanguis meus vere est potus ; nisi mandacavcrilis carnem Filii Iwminis, et biberitis ejus sanguinem, non haliebitis vitam in vobis ; vel caro et sanguis, quæcruciftxd est, et qui militis cousus est lancea. In Epist. ad Eph., I. I, c. I, 7, P.L., t. XXVI, col. 151. Serait-ce là une différence essentielle qu’établit saint Jérôme entre le corps du Sauveur dans l’eucharistie et son corps sur la croix, ainsi que l’a prétendu jadis du Plessis ? Nullement, mais une simple différcnce de mode ou de manière d’être, qui n’empêche point l’identité substantielle. Saint.Férôme, en effet, s’en explique : .luxta hanc divisionem, et in sanctis ejus diuersitas sanguinis et carnis accipitur, ut alia sil caro quæ visura est salutarc Dei, alia euro et sanguis quarrgnum Dei nrqucant possidere. La chair et le sang des saints, tels qu’ils sont ici-bas, c’est-à-dire à l’état passible et corruptible, ne peuvent point jjosséder le royaume de Dieu, mais n’en verront pas moins le salut de Dieu

mCT. DK TirÉOL. CATHOI, .

dès que, par la résurrection, ils posséderont les qualités des corps glorieux ; ils sont cdia, mais la différence de leur mode d’être n’empêche nullement l’identité substantielle des corps des saints auxquels cette chair et ce sang appartiennent. Et pareillement du corps du Christ dans l’eucharistie et sur la croix : c’est identiquement le même, mais dans un état différent : sur la croix, à l’état passible, mortel et corruptible ; dans l’eucharistie, à l’état glorieux, impassible et incorruptible. Cf. Duperron, L’eucharistie, p. 413416.

Comme tant d’autres Pères, saint Jérôme ne s’est pas livré à l’examen et à l’explication des mystères eucharistiques ; il s’est contenté, le cas échéant, d’affirmer l’essentiel, estimant peut-être qu’une analyse approfondie ne convenait point ou était superflue, le croyant ne devant pas, selon la pensée de saint Éphrem, scruter les mystères de Dieu.

3. Saint Gaudenlius de Brescia.

Avec le successeur de saint F’hilastrius sur le siège de Brescia, nous retrouvons des explications et des affirmations déjà connues. Saint Gaudentius n’innove pas : JI s’en tient à une tradition ferme et suffisante pour l’enseignement des néophytes. Il rappelle à ceux-ci l’usage des Juifs qui, pour célébrer la pâque, immolaient un agneau ; la réalité ayant remplacé la figure, un seul agneau est maintenant mort pour tous, et idem per singulas eccicsiarum domos, in mysterio panis ac vint, rrficil immolatus, vivifical credilus, consccrantes sanctiftcal consecratus. Hhe agni caro, hic sanguis est ; car le pain, c’est la chair, et le viii, c’est lesang./pse igiiur naturarum crcator et Dominus, qui producit de terra panem, de pane rursus, quia et potesi et promisit, efficit proprium corpus ; et qui de aqua vinum fecil, facil et de vino sanguinem suun-i. Scrm., ii, P. L., t. xx, col. 855. Voilà bien l’enseignement d’un catéchiste : l’autorité et la puissance de Dieu suffisent jiour faire admettre la vérité du mystère. Gaudentius a soin d’écarter toute idée de manducation grossière : neque crudam carnem crudumque sanguinem, sicut Judœus. putes. Il n’y a qu’à faire un acte de foi ; car lorsqu’il a présenté à ses disciples le pain et le vin consacrés, Jésus a dit : « Ceci est mon corps, ceci est mon sang. » Credamus, qu.’so, cui credidimus. Nescil mendaciiim verilas. Ibid., co !. 858-859. Notons, en passant, la double raison qu’il ilonnepour expliquer pourquoi le Seigneur a voulu que les sacramentu corporis sui et sanguinis fussent célébrés in specir panis et vint : c’est d’abord pour mettre à la portée de tous cette offrande sine uslione, sine sanguine, sine brodio, id est, jure carnium, ibid., col. 860 ; c’est ensuite pour représenter l’unité du corps mystique du Christ. Cette dernière raison était d’enseignement courant.

1. Saint Ambroise († 397). — La doctrine de l’évêque de Milan est claire et nette. Faisant allusion aux usages liturgiques, saint Ambroise avait dit à Théodose, après le massacre de Thessalonique : « Comment recevrez-vous le saint corps du Christ dans des mains toutes souillées (de sang) ? Comment porterez-vous son sang précieux à votre bouche, vous qui, poussé par la fureur, avez répandu tant de sang injustement ?^ Théodoret, II. E., v, 17, P. G., t. lxxxii, col. 1232. Il écrivait dans son commentaire du psaume cxviii : Citristus mihi cibiis, Christus mihi potus ; caro Dei cibus mihi, et Dei sanguis palus est mihi… Christus mihi quodidie minislratur. In ps..vi ; / ;, serm..xviii, 26, P. L., t. XV, col. 1161. Mais c’est surtout dans son De mgsteriis, véritable catéchèse inystagogique adressée aux nouveaux baptisés, qu’il donne son enseignement eucharistique : présence réelle, quoique invisible, du corps et du sang du Christ dans l’eucharistie, du corps et du sang que le Christ a reçus de la

V. - : (7