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ENFER D’APRÈS LES THEOLOGIENS

milif< ; iUon et suffrages, voir Mitigtion ; et inOiiic, après.Je ; m le Diacre (ix^siècle), délivrance de l’cnferj voir plus loin ; feu et ténèbres : est-ce que le feu de l’enfer éclaire, en sorte que les damnés puissent se voir ? est-ce qu’ils ^oient la gloire des bienheureux ? est-ce qu’ils conservent la mémoire et la science, la raison (folie) ? socii’té des démons et des damnés, horrible guerre perpétuelle, état des corps damnés, maladies, infirmités, laideurs, douleurs ititérieures, confusion, ennui, désespoir ; comment l’enfer est une mort perpétuelle ; réalisme ou symbolisme du vermis, du fleliis et sliidor denlium ; modes de distribuer les peines inégales d’après les espèces de péchés ; enfin les raisons de l’enfer éternel : raisons de finalité ; raison psychologique ex œternitate ciilpæ, le plus souvent. Cf. Index, t. ccxx de Migne, col. 214-247 : nombreuses citations pour cette époque. Signalons seulement quelques traités consacrés plus spécialement à la théologie de l’enfer. S. Isidore de Séville, Sent., 1. I, c. xxviii-xxix. De gehenna et de pcenis inipiornm ; 1. IIT, c. Lxii.Df exitii, P. L., t. i, xxxin. col. 597-.599, 73fi-738 ; S..Julien de Tolède (au viii’e siècle), Prognosiicon futuri saculi, le premier traité spécial De novissimis, assez bien ordonne et assez complet pour l’enfer, mais peu profond ; solutions surtout avec des textes de saint Augustin et de saint Grégoire, P. L., t. xcvi, col. 4C1-524 ; Taion de Saragosse, dans sa Somme, Sent., 1. V, c. xx, xxix-xxxiii, P. L., t. Lxxx, col. 974-990.

III. ENFER D’APRÈS LES THÉOLOGIENS. — On trouve de la théologie de l’enfer, dans les Pères, spécialement chez saint Augustin et saint Grégoire le Grand ; mais elle est fragmentaire et rudimentaire ou superficielle. En Occident, au xiie siècle, on commence à examiner plus profondément et plus méthodiquement les questions De novissimis. Cf. Schwane, op. cit., t. v, p. 221-228 ; Turmel, op. cit., p. 356 sq.

Hugues de Saint-Victor, le premier, introduit systématiquement dans sa synthèse théologique le De inferno. De sacram. fidei, l. II, part. XVI, De fine hominis, c. iii-v, De pœnis animarum ; De locis pœnarum ; De qualitate tormentorum gehennalium, P. L., t. clxxvi, col. 584 sq. D’ailleurs, à peu près rien de personnel et d’ajouté à la tradition ; à signaler quelques opinions, restes de vieilles obscurités : les damnati minus mali ne sont peut-être pas encore en enfer ; les démons peuvent avoir des corps éthérés pour souffrir du feu ; le théologien de Saint-Victor fait en général son possible pour retenir l’élan de l’investigation rationnelle sur les peines de l’enfer et pour ramener d’autres docteurs (ceux de Sainte-Geneviève sans doute, disciples d’Abélard) à la simplicitas credendi. Cf. part. XVIII, de statu futuri sæculi, c. ii, iii, v, vi, viii, xv, nouvelles questions sur l’enfer

Pierre Lombard reste encore, lui aussi, dans la ligne simplement traditionnelle et compilatrice de textes : Sent., l. IV, dist. XLIV-XLVII, XLIX-L, P. L., t. cxcii, col. 945 sq. ; il est incomplet et indécis sur plusieurs questions déclarées insolubles, sur les corps des âmes séparées, sur la mitigation, etc, comme saint Augustin.

Alexandre de Halès, Summa theol., part. IV, q. xv, m. iv, a. 4, § 4, rejette nettement toute dilation : les sentences, portées par Dieu au jugement dernier, concernent les corps ressuscités. De même, saint Bonaventure, In IV Sent., l. IV, dist. XLIV, p. ii. a. 1, q. i. Mais c’est Albert le Grand, In IV Sent., l. IV, dist. XLIV, qui a eu surtout le mérite de briser les vieux cadres imparfaits du De inferno et de dessiner le premier la synthèse complète de ce traité en y introduisant sa méthode rationnelle, loc. cit., a. 33-42, Opera, Lyon, 1651, 20 in-fol., t. xvi, p. 855 sq. Si, sur ce point, Albert est l’initiateur, saint Thomas conduit le traité à son achèvement ; dans la synthèse théologique, nous citerons assez souvent le docteur angélique. Au point de vue de la systématisation, saint Thomas traite séparément de l’enfer des anges, Sum. theol., Ia, q. lxiv, et de l’enfer des hommes, IIIæ Supplem., q. lxix sq., tiré comme l’on sait de l’In IV Sent., l. IV, dist. XLIV sq. C’est pourquoi tant de théologiens postérieurs, commentant saint Thomas, traitent surtout de l’enfer dans le De angelis, par exemple, Suarez, les Salmanticenses, Billuart, etc., de même Petau ; au xixe siècle, Perrone, Mazzella ajoutent le De inferno au De Deo creante, de homine. Mais, en général, les théologiens récents ont enfui détaché eu traité spécial tout le De novissimis, avec son De inferno, pour en faire le dernier traité de la théologie.

Après saint Thomas, les opinions ne diffèrent guère que sur trois points au sujet de l’enfer : le mode de l’action du feu de l’enfer, la raison de l’éternité du supplice et de l’obstination des damnés dans le mal, la mitigation, dont il sera question dans trois articles spéciaux. Voir Feu, Mitigation, Obstination.

Sur le reste de la doctrine, il n’y a rien de spécial à signaler, et, pour éviter d’inutiles répétitions, on trouvera dans la synthèse théologique les principales opinions et les principaux auteurs qui ont contribué à développer la théologie intégrale de l’enfer.

IV. ENFER D’APRÈS LES OPINIONS ERRONÉES. —

Il ne s’agit ici que des erreurs répandues dans le monde chrétien. Pour plus de simplicité, nous les rangerons suivant l’ordre logique.

Contre l’existence de l’enfer éternel.

1. Bien que la négation de l’enfer ait été souvent, et soit maintenant de plus en plus répandue sous l’une ou l’autre de ses formes générales, nous n’avons pas à exposer ici l’évolution du pessimisme absolu, ni du monisme matérialiste, ou panthéiste, ni du scepticisme subjectiviste, phénoménistc, etc. (théories générales et destinées). Voir Mal. Henri Martin, op. cit., p. 234-287, a fait une étude développée et très suggestive de ces erreurs modernes au point de vue eschatologiquc. Notons seulement ce que Kant croyait tirer de sa raison pratique au sujet de l’enfer. Cette raison postule l’immortalité pour que l’âme (autre postulat de la raison pratique) reçoive de Dieu récompense ou punition. Mais la question de la nature de cette sanction est puérile, car qui peut penser les conditions de la liberté dans l’autre vie ? D’ailleurs, la morale ne postule pas ici-bas cette éternité ; la crainte de persévérer dans le même état de perversité durant la vie future doit suffire pour détourner du mal. La religion dans les limites rfeZaro/son, trad. Trullard.p. 101-104, 104-108, note.

Depuis Kant, ce qu’on veut, surtout, c’est l’au/onomie ahsolue de l’hoinme en face d’un Dieu indifférent ou trop bon, ou plutôt l’autonomie de l’homme divinisé, sans Être au-dessus de lui, pour qu’il soit sans responsabilité future, sans enfer à redouter. On en arrive là par le panthéisme ou l’idéalisme ou le matérialisme évolutionniste, ou par les trois à la fois : c’est toute la philosophie moderne incrédule dans son fonds, et c’est la mentalité qu’on tend maintenant à propager dans le peuple. « Le peuple français (les autres suivront), proclame-t-on partout, ne prie idIus, ne croit plus, ne craint nul cltâtinient. ne désire ni même n’accepte aucune récompense après la mort, et s’attribuele droit d’user de la vie en toute indépendance. —. Cf. L’Univers, 9 juin 1910. L’école philosophique spiritualiste a pris, en face de ces négations, différentes positions : croyance de l’école écossaise et doute du déisme français qui n’arriva pas à une conviction ferme contre l’enfer