Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 5.djvu/483

Cette page n’a pas encore été corrigée
937
938
ETHIOPIE (ÉGLISE D’)


fait au moins reconnaître par le prélcvenient d’une dîme de tous les bénéfices.

2 » Vituliic et fécondité. — 1. Accroissement et essaimage des com^cnts. — Indépendamment de cette attribution déjà disproportionnée, la dévotion généreuse ou vaniteuse des princes dota encore les monastères ou les sanctuaires qnelleprétérait, defiefs et de benc-Jices qui mirent aux mains des moines les meilleures terres, les oasis formés par les sources, c’est-à-dire la richesse foncière du pays. Les conventuels exploitent eux-mêmes, ou bien ils afferment les vastes champs <lont ils sont les maîtres. Ces privilèges et les avantages qui en résultent en faveur du clergé furent, on le conçoit, de féconds générateurs de vocations dans les deux ordres, ecclésiastiques, le monacal et le lévitique. Dabra-Libanob devint une vraie fourmilière de religieux qui. bieiUôt, se comptèrent par centaines « t par milliers. De cette ruche, partirent de si nom-Jjreux essaims qu"il< prirent les proportions d’un événement historique, consigné en détail dans les chroniques impériales ( Tarika-Xagasl, Ik uno Amlak). Ils se dispersèrent eu tous sens à la recherche des solitudes dans les provinces les plus écartées du centre, soit vers le nord aux extrémités du Tigré, soit vers l’orient et le midi au delà du (^hoa. Et partout, la présence de ces pléia/ies continuait l’évangélisation de ces contrées, où l’on comptait encore beaucoup de païens et où il en reste encore jusqu’aujourd’hui. Takla-haymanot’eut des disciples et des émules dont les noms ont aussi leur célébrité dans les fastes de l’Église éthiopienne : Eustatios de Allélô et son disciple Philippe de Da’ura-Bisân ; Libanos, qui serait venu d’Italie ; il fit ruche sur le plateau de Bur (Tigré), et Lalibala lui dédia une de ses chapelles monolithes ; ce fait lui assure une antériorité séculaire ;.Mercurios, dont le nom est resté au monastère qu’il fonda dans le Scrawé ; Gabra-Mant’as-Kedus, légendaire surtout dans le Choa, sous le surnom vénéré devbbo, sans que l’on sache rien de sa vie religieuse, etc.

2. Réveil de foi et irnaissance scolasliqiie.

Dans l’abandon où gisait le christianisme, durant les six derniers siècles, le peuple, routinièrement attaché à l’enseignement traditionnel, sans conviction personnalle éclairée, s’en rapportait uniquement aux Mamtierdn et aux Likâiint’des écoles fondées par les > : >adekàn-romrtwi(’.n déj.t en exercice fécond sous (jabra Maskal. La période sans trêve et sans fin des souffnvnces intestines n’a pas laissé le loisir aux querelles doctrinales. Les abonnas jacobites avaient été par ailleurs trop affairés pour ouvrir des débats théologiques. Les lettrés restaient en possession des vérités ancestrales recueillies de la bouche de leurs maîtres, de siècle en siècle, jusfju’à l’actuelle renaissance politique et religieuse. Cette hérédité scolaire et traditionnelle est encore sacrée parmi les initiés universitaires. D’Kalla-<, iior. ::is.

Le xiii’siècle vit une réforme s’opérer dans les couvents coptes en É^îyple, et une élite d’érudits y fit refleurir les études ecclésiastiques, la théologie, le droit canonique, la liturgie, l’hagiographie, etc. Ce courant s étendit de la Haute-Egypte en Ethiopie, imprima un essor inconnu à la vie studieuse et à la littérature sacrée, par l ; i traduction en gheiz de divers ouvrages arabes, traité- homilétiquesel dogmatiques « les Pères, décrets et interprétations des conciles, et surtout la correction du Nouveau Testament. De celle émulation scohistique naquirent les débats lhéologiques qui prendront de plus en plus d’extension juscju’à dégénérer en des discussions qui agiteront et troubleront le royaume aussi bien que l’Église i d’Ethiopie.’3 » Tentative de rompre la barrière copie et de se relier avec r Église catholique : mission des frères prêcheurs, !

— La révélation ^l’un événement de la poussière de l’oubli et du silence dont Us chroniques éthiopiennes sont coutumières, nous signale une cause — la plus puissante, quoique jusqu’ici insoupçonnée — du remuement des esprits sous le nouveau régime inauguré par Ikouno-Amlâket le grand moine réformateur. Dans la détresse des coptes sous les excès des malversations musulmanes et, d’autre part, grâce aux réconforts du séjour et des bienfaits de saint Louis en Palestine, l’Abyssinie, c’est-à-dire le roi et son tuteur, évincés par les refus de Bibars au Caire, eurent recours à Jérusalem. Le patriarche était réconcilié avec l’Église romaine (voir plus h ; iul) ; il envoya un évêque syrien, abba Yub (Job), en Ethiopie. Son nom est resté mémorable dans leTigré. Des vases sacrés lui ayant appartenu se retrouvent à Dabra-Damo.Il y fut suivi d’un groupe de frères prêcheurs qui s’établirent non loin du couvent deDabra-Damo, sur le plateau de Gola-Makâdâ. Le synchronisme est indubitable.

D’après une lettre de Yagbâ-Sion, fils et successeur de Ikouno-Ainlâk, adressée au patriarche du Caire, le séjour de l’abonna syrien en Abyssinieæu lieu vers la fin du règne de son père (1268-1283) ; et la mission dominicaine remonte à la même époque (fin du xiii’^ siècle). Or, d’après les reproches que Ya, yba-Sion fait à la politique de son père, l’abonna Yub a été i envoyé sur sa demande, et concomitamment. l’expédition dominicaine. De plus, Yagba-Sion déplore les I agissements de l’abouna syrien, parce qu’il n’élail pas ! partisan des jacobites. Tout un mystère historique émerge de ces mots révélateurs. Une tentative de retour de l’Église d’Ethiopie sous Ikouno-Amlâk est ofliciellement dénoncée par son (ils et successeur auprès du patriarcat copte et du califat du Caire. Ce prince en fait honteusement amende honorable et prend le contrepied de la politique de son père, qu’il accuse d’avoir été fauteur de dissensions ruineuses l)our la croyance d’Alexandrie par son recours à un ! patriarche chalcédonien, et prescripteur des nuisul-I mans par les représailles contre ceux qui trafiquaient en Abyssinie et par la chasse contre les bédouins des tril)US.(lalites.^Iakrisy, Kebabel selah, l. i, mss arabes de Paris, p. 372-373 ; vie de Kalaoun, mss de Saint-Germain de Paris, 118. Les missionnaires avaient obtenu de grands succès auprès des princes et de leurs féaux dans toute la région qui était alors domaine de la maison royale, comme l’atteste son nom : « Gola-Makâda » . Mais ce fut éphémère. Les faits correspondent aux paroles de Yagbâ-Sion ; son régne fut un règne de trahison contre l’État en face de l’islamisme et de persécution contre l’Église. Il commença par expulser l’abouna Yub, et les fidèles catholiques, à la suite des missionnaires dominicains, subirent une cruelle persécution dont le souvenir est conservé par les ossements des martyrs dans plusieurs sanctuaires de (.ier’âlta, .krân, Tasné, Baraknéà, voisins de la résidence des pères dominicains à Néëbi (Fak’âda), où ils furent massacrés. Ant. d’Abbadie, Annales dominicaines et tradition locale.

4° Réaction et émulation dans l’enseignement et les obscrnances cultuelles. Pharisaisme et immoralité. — l’ne réaction religieuse était inévitable ; le patriarche copte se vengea, l’n moine remarquable par son érudition et sa combalivité, l’abonna Salâma II, fut accordé à Yagba-Sion, oomme métropolitain (fin du xiii’siècle). Il mit tout en œuvre pour rehausser la croyance des jacobites et, grâce à ce zèle, l’Église d’Ethiopie lui doit le relèvement des éludes et l’entrain des travaux d’où sortit la bibliothèque de sa littérature sacrée. Guidi, Dict. d’histoire, t. i, col. 224.

Une nouvelle tentative d’un des successeurs de Yagbà-Sion, Wadeni-Ha’âd, par une ambassade près