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une Bcfulatio acciisaloris anomimi damnalas ab Innoccntio XI proposiliones adscribenlis ordinum religiosoruni theologis ac præcipiic Societatis Jesu, in-12, Rlaycnce, 1679. Cet opuscule, qu’il avait signé d’un pseudonyme, Wilbr.lnnis Sandœiis, a été condamné par le Saint-OHice, le 7 février 1679. Une édition en français fut également mise à l’index, le 18 juin 1680, mais, cetle fois, avec la publication que Sanda-us prétendait réfuter et qui était prohibée propter annolediones adjecias. Sommervogel indique encore d’autres écrits anonymes ou pseudonymes, attribués à ce théologien belliqueux. A Rome, devenu secrétaire du général et de la Compagnie, i ! aida de toutes ses forces le P. Gonzalez à emporter la publication de son fameux Fundamentum theologix moralis, dirigé contre le probabilisme. Dans les derniers mois de sa vie, il essaya de condenser la doctrine de ce livre en une sorte de démonstration mathématique. Ce travail fut publié après sa mort, sous le titre : Logistica probabiliiatum. .. cum adjunctn difficiiltatis potissima : explanatione, in-12, Rome, 1695 ; il a été souvent réédité. Le P. Estrix mourut à Rome, le 23 avril 1694.

De Jiacier-SotnmeT-oge, Biblioihcque de la C" de Jésus, t. iii, col. 466-174 ; Hurter, A’omenclator, t. iv, col. 328331 ; Bibliograplde nationale (belge), t. v ; DôUinger-Reusch, Geschichte der Moralstreiligkeilen, t. i, p. 140, 173, etc. ; Reusch, Der Index, t. ii, p. 519 s(i. ; Doclrimiiheologica pcr Belijiuni manans ex Academia Lovaniensi ab anno 1644 usqiic ad annuni 1677 in parles seii specimina quatuor diijesta pcr theologos Belgas fidei orlhodoxæ et apostolicarum constitulionum sludiosos, in-4°, Mayence, 1681.

J. Brucker.

1. ÉTAT.

I. Nature de l’État. II. Relations juridiques de l’État.

I. Nature de l’État. — I. L’iirAT-soriÉTÉ. — 1° Définition.

L’État^ considéré d’une manière générale

comme société, c’est-à-dire la société civile, peut se défuiir : « Une société humaine, juridique et universelle, qui a pour but de conduire ses membres à leur plus grande perfection dans l’ordre matériel et temporel. » L’État est d’abord une « société humaine 1-, c’est-à-dire l’union de plusieurs hommes orientés vers une même fm qui doit être atteinte par des moyens communs. Pluralité des membres, accord des intelligences et union des volontés, unité de fin, communauté des moyens, tels sont, en effet, les éléments constitutifs de l’être social. L’État est, en outre, une « société juridique » , c’est-à-dire une société dans laquelle le lien social qui unit les membres de la communauté est une obligation de justice proprement dite, et le principe intelligent qui régit cfficacement toutes les intelligences et imprime la même tendance à toutes les volontés est l’autorité ou le pouvoir public. « L’autorité, ou le pouvoir d’obliger les libres volontés de tous les membres, est donc un élément nécessaire à la société juridique ; elle est pour la société ce que l’âme est pour l’être animé, ce que la force est pour le corps : un principe essentiel, un principe d’unité, de tendance et de conservation, et la société juridique ne peut exister sans l’autorité qui lui donne sa vitalité et sa cohésion. » E. Valton, Droit social, Paris, 1906, p. 7. Enfin, l’État est une « société universelle » , c’est-à-dire une société qui recherche comme but immédiat un bien complet et universel dans son genre, et non pas seulement un bien partiel qui soit compris dans un plus grand bien de même nature. Or, quel est ce bien que l’État doit procurer et garantir à ses membres ? C’est la paix et la prospérité publiques ; c’est le bonheur matériel de tous les membres ; c’est, en un mot, « la plus grande perfection sociale » possible de tous les citoyens, dans l’ordre temporel ou l’ordre de la vie présente.

Mais il faut se mettre en garde contre deux erreurs touchant la nature de l’État.

La première, qui repose sur de fausses comparaisoris physiologiques, considère l’État « comme étant au corps social ce qu’est le cerveau au corps humain. » Telle est la formule adoptée par SchœfTe, Eau und Leben des socialen Kôrpers, et en voici le développement. La société est un organisme, un ensemble de fonctions d’organes, d’unités vivantes ; l’unité, la cellule sociale, ou pour parler un langage plus scientifique, le proloplasma, est ici l’homme. Or, on retrouve dans la société les mêmes distinctions que dans l’individu, en ce qui concerne les fondions, les organes et l’appareil d’organes ; ce que le cerveau est pour l’organisme individuel, l’État l’est pour la société, un appareil de coordination, de direction, de dépense, alimenté par des organes de nutrition.

Cette comparaison « qui représente l’État comme le cerveau du corps social est non seulement fausse, , mais nuisible ; elle est un non-sens ; elle conduirait à une subordination absolue des individus à l’État… L’État est sans doute un appareil régulateur et de coercition pour certaines fonctions essentielles ; mais ce n’est pas dans la société l’organe unique, ni même l’organe principal et supérieur, de la pensée et du mouvement. » Leroy-Beaulieu, L’État moderne et ses fonctions, Paris, 1890, p. 28, 30.

Une autre erreur consiste à confondre l’État avec la société, quoique ces deux termes soient loin d’être synonymes. On oppose absolument l’État à l’individu, comme s’il n’y avait, entre ces deux forces, aucune organisation intermédiaire. Or, la nature, aussi bien que l’histoire, comme nous allons le dire bientôt en traitant des origines de l’État, et même le présent autant que le passé, contredisent nettement cette thèse. « Il ne faut pas confondre le milieu social ambiant, l’air libre, la société se mouvant spontanément, créant sans cesse avec une fécondité inépuisable des combinaisons diverses, et cet appareil de coercition qui s’appelle l’État. La société et l’État sont choses différentes. Il n’y a pas seulement dans la société l’État, d’une part, et l’individu, de l’autre : il est puéril d’opposer l’action de celui-là à la seule action de celui-ci. On trouve d’abord la famille qui est un premier groupe, ayant une existence bien caractérisée et qui dépasse celle de l’individu. On rencontre, en outre, un nombre illimité d’autres groupements ; les uns stables, les autres variables, les uns formés par la nature ou la coutume, d’autres constitués par un concert établi ; d’autres encore dus au hasard des rencontres. A côté de la force collective organisée politiquement, procédant par injonction et par contrainte qui est l’État, il surgit de toutes parts d’autres forces collectives spontanées, chacune faite en vue d’un but précis, chacune agissant avec des degrés variables, quelquefois très intenses, d’énergie en dehors de toute coercition. Ces forces collectives, ce sont les diverses associations qui répondent à un sentiment ou à un intérêt, à un besoin ou à une illusion, les associations religieuses, les associations philanthropiques, les sociétés civiles, commerciales, financières. »

A ces explications de M. Leroy-Beaulieu, op. cit., p. 31, qui sont vraies et fécondes dans leur principe, nous ajouterons deux observations nécessaires pour avoir de l’État une notion exacte et complète d’après le droit social chrétien : c’est que, d’abord, parmi les formes sociales distinctes de l’État, qui font qu’on ne saurait confondre celui-ci avec la société en général, il existe une société juridique parfaite et indépendante qui est l’Église ; en outre, il ne faudrait pas insister sur l’idée de coercition et de contrainte que renferme la notion de l’État, considéré surtout comme État-pouvoir, au point de dénier à celui-ci toute autorité morale et directrice qui puisse atteindre et lier les-