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ESTHER (LIVRE D’)


p. 472, 480, ne reconnaît à Hesicr qu’une autorité moyenne en tant que « plusieurs » seulement l’ajoutent aux liTes historiques canoniques avec Par., Job, Tob., Judith, Mac. : opinion toute personnelle, sans attache aux idées sur les Livres saints qui avaient cours au V siècle en Orient et en Occident. Dépendent simplement d’Athanase : le catalogue de Nicéphore, P. G., t. c, col. 1056 ; la Synopse du pseudo-Athanase, P. G., t. xxviii, col. 283 ; de Jérôme : Walalrid Strabon, qui ne commenta point les fragments ; Rupert deDeutz, Z)e viclor. verhi Dci, VIII, 1, P. L., t. ci.xix, col. 1379, qui ne reconnaît « vérité d’Écriture’qu’à la partie hébraïque ; Nicolas de Lyre, qui néglige aussi de commenter les additions ; Denys le Chartreux, Enanalio in librum Esther, dans Opéra omnia, Montreuil, 1898, t. v, p. 173, et Cajetan, Commentarii, t. ii, p. 400 ; de Théodore de Mopsueste ; Léonce de Byzance, De scctis, act. II, 1-4, P. G., t. Lxxxvi, col. 1200 ; Notker, De inierpretibus div. Script., c. iii, P. L., t. cxxxi, col. 997. Depuis le concile de Trente qui reçoit Esther au >< catalogue (les saints LivTCS " — tout entier, comme le contient l’ancienne Vulgale latine — seuls parmi les catholiques, Sixte de Sienne, Bibliotlicca sancta, 44, etEllics Dupin, Bibliothèque des auteurs ecclés., t. i, p. 127-130 ; Dissert, prêlim. ou prolécj. sur la Bible, t. i, p. 52-53, ont souscrit encore au jugement de saint Jérôme. Cf..7. Langen, Die deuterocanonisehen Stiieke des Bûches Esther, Fribourg-en-Brisgau, 1862, p. 3-11 ; Vieusse, La Bible mutilée par les protestants, p. 203-210.

Luther rejeta le livre entier d’Esther, lui trouvant couleur trop judaisante et païenne, et le jugeant digne plus que tout autre d’être mis hors du canon. Tischrcden, dans Werhe, Erlangen, t. i.xii, p. 131 ; De sert’o arbitrio, ibid., t. vii, p. 195. Ses premiers disciples se contentèrent de rejeter seulement les fragments additionnels. Beaucoup d’auteurs critiques, enfin, ont regardé ce livre comme indigne de figurer dans le recueil sacré, à raison de son caractère estime profane, haineux et cruel. Voir ci-après. On sait que l’Église anglicane fait usage de nombre de deutérocanoniqucs, voir W. II. Daubncy, The use of the apocrijpha in the Christian Church, Londres, 1900, p. 50 sq. ; une collecte de Prai/cr book fait allusion à Est., XIV, 16 (Vulg.) ; les Hornilies, p. 291, citent les additions comme’< Scripture » . Daubney, p. 66, 68.

III. Caractère historique.

La critique moderne a contesté et nie le caractère historique du livre d’Esther pour de multiples raisons ayant rapport aux invraisemblances et impossibilités que renfermerait le récit, comme aussi aux difficultés historiques qu’il soulève. Le livre d’Esther serait un roman imaginé pour rendre raison de la fête des Purim et de son institution ; et l’origine de cette fête devrait, par suite, être cherchée ailleurs que dans le corps des faits imaginaires du conte juif. On exposera ici la thèse critique, l)uis la réfutation qu’en ont donnée les auteurs et savants catholiques.

I. EXl’O^li nE I.A TIIKSE rniTKjlIC liE I.A SOy-lllfyTDni I iTi : m : i.ivnE h’estiieh. — l’Eu égard aux invraisemblances et impossibilités du récit. — 1. Il est inouï dans riiistoirn qu’un festin tel que celui d’Assuérus, i, 3-4, ait pu durer une demi-année, 180 jours (Davidson).

— 2. Il est incroyable qu’une reine, Vnsthi, ait refusé, . comme il est dit, i, 12, d’obtempérer à l’ordre du roi, son mari. — 3. Il est contradictoire qu’Assuérus ail pris conseil des sages, i, 13 sq., pour répudier Vasthi et se soit dispensé de cette consultation coulunilôrc aux rois de Perse, dans leurs affaires, à l’occasion de l’édit de persécution, iii, 13. — 4. D’après M, 6, au moment où commencent à se dérouler les événements rapportés dans le livre, Mardochée aurait eu pour le moins 120 ans et Esther 90 ; est il admissible

que cette dernière ait pu charmer, à cet âge, Assuérus par sa beauté ? — 5. La parenté d’Esther et du juif Mardochée étant bien connue du roi et des gens de la cour. II, 8, 11, 22 ; iv, 4-7, comment cette reine put-elle dissimuler son origine et sa nationalité ? Comment, du reste, une reine pourrait-elle garder un tel secret ? (De Wette-Schrader, Reuss, Bleek, Driver). — 6. Est-il vraisemblable que, pour se présenter au roi son époux sans avoir été mandée, une reine encoure la mort, et qu’Esther ait pu croire, pour avoir été délaissée trente jours durant, ne devoir pas être mandée durant onze mois, iv, 10 sq. ? — 7. Il est impossible que le roi de Perse ait voué à la mort tout un peuple sans plus d’explications que celles fournies parvman, iii, 8sq. — 8. Il n’est pas croyable qu’Aman ait divulgué dans toutes les provinces de l’empire ses intentions homicides à l’égard des Juifs, onze mois avant le jour fixé pour leur exécution, et que les Juifs soient supposés avoir dû attendre la mort dans l’inaction complète (Bleek-Wellhausen). — 9. Plus incroyable encore que, deux jours durant, la l)opulation de tout un empire se soit laissé décimer l)ar une poignée d’immigrants étrangers, et que 75 000 hommes aient ainsi péri sans secours ou vengeance, sans qu’un seul ait succombé du côté des agresseurs (Bleek-Wellhausen).

2° Eu égard aux difficultés historiques soulevées par le récit. — 1. Il est surprenant que ni les histoires, ou sources historiques, grecques et persanes, ni les livres hébreux d’Esdras et de Néhémie, qui traitent pourtant de faits concernant le peuple juif arrivés sous les Achéménides, ni les livres de l’Ecclésiastique et le P des Machiibées ne font la moindre allusion à l’extrême danger couru par les Juifs au temps de Xerxès (Assuérus), non plus qu’à l’intervention si opportune et si efficace d’Esther et de Mardochée en cette conjoncture. — 2. Les données géographiques du livre concernant l’empire perse sont en contradiction avec l’histoire : il parle de 127 régions, alors qu’Hérodote, sous Artaxcrxès, ne connaît pas plus de 20 satrapies. — - 3. Les mœurs de la cour qu’il décrit ne correspondent point non plus à la réalité historique.

— 4. Contrairement à ce qu’il avance, les renseignements que nous tenons des classiques nous apprennent que, seule, une femme issue des Achéménides pouvait être élevée au rang de reine ; et précisément, les auteurs anciens indiquent Amestris comme femme d’Assuérus (Xerxès) pour l’époque où est censée régner Esther. — 5. Nous savons enfin positivement par l’histoire que, durant la domination persane tout entière, les Juifs l)urent vivre en paix partout dans les limites de l’empire.

3° Eu égard à l’origine plus probablement étrangère de la fête des Purim. — La fête des Purim, ou des sorts, se justifiant par le contenu du livre d’Esther, III, 7 ; IX, 24, 26, 28-32, mais l’historicité de ce contenu se trouvant ainsi révoquée en doute, il ne restait plus aux critiques d’autre moyen d’expliquer la fête célébrée par tous les Juifs à l’époque de Josèphe, AnL jud., XI, VI, 13, et de l’auteur du 11’^ livre des Machabées, XV, 36-37, que d’en chercher l’origine dans un des événements historiques dont on n’avait plus mémoire au temps où fut composé le livre, ou dont la nature païenne et étrangère, n’osant être avouée, exigeait qu’elle fût dissimulée sous le roman juif d’Esther.

Nombreuses sont les hypothèses émises par les savants : 1. Les Perses fêlaient en mars le nouvel an. C’était chez eux la fête du printemps : ils faisaient ripaille, s’envoyaient mutuellement des présents et distribuaient de l’argent aux pauvres. Cf. Esth., ix, 17, 19, 22. (xtle fêle, qui s’appelait Nauroz, fut adoptée par les.luifs vivant dans l’empire perse et par eux gardée toujours. Ne pouvant l’abolir, les rabbins,