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ESPRIT-SAINT


la génération du Verbe et de la procession du Samt-Esprit par Dieu le Père. Op. cit., p. 43, 44. Lorsque saint Jean Damascène affirme que le Père produit le Saint-Esprit, it’YioO, il nous montre qu’il produit le Saint-Esprit au même moment où il engendre le Verbe, et il le produit de telle manière que le Saint-Esprit demeure dans le Verbe engendré. Ibid., p. 45, 46. Cette interprétation, dit-il, est confirmée par des textes très explicites de saint Jean Damascène. En effet, le saint docteur déclare que le Père engendre le Fils et produit le Saint-Esprit en même temps, ay.a, De fide orthodoxa, i, 8, col. 824 ; il déclare que le Père, par la même force, vertu, produit le Fils et le Saint-Esprit. Exposilio fidei, P. G., t. xcv, col. 421, 422.

Ces textes, nous n’avons pas besoin de le dire, ne ; nous donnent pas la vraie signification de la formule a, Pâtre per Filium. Si l’interprétation orthodoxe était vraie, il aurait suffi de dire que le Saint-Esprit procède du Père, de même que le Fils est engendré par le Père. Mais en disant que le Saint-Esprit procède du Père par le Fils, les Pères grecs marquent bien que le 1 Fils n’est pas étranger à la procession du Saint-Esprit. Les latins sont d’accord avec les grecs lorsque ceux-ci déclarent quela préposition Sti, per, n’exprime pas une priorité de temps dans l’ordre des processions divines ; mais ils n’admettent pas avec eux que cette préposition exclut même une priorité logique. Supprimer cette priorité, ce serait supprimer l’ordre des processions divines, l’a/.oÀrvjfjt’a y.yzk Tiï’.v de saint Basile, et identifier le Père avecle Fils. Si on refusait d’admettre cette priorité logiciue, on ne comprendrait plus cette mitoyenneté du Fils entre le Père et le Saint-Esprit, par laquelle le Saint-Esprit procède bien du Père, j mais par l’entremise du Fils.

Les tiiéologiens orthodoxes donnent à la prépositit n 61à le sens de simiil. C’est là une interprétation arbitraire. La préposition 5tà indique la cause, l’instruj ment par lequel on opère.’IvI. et Sti, d’après les Pères grecs, ont la même signification. Par Dieu et de Dieu ne diffèrent pas, quant au sens, dit saint Basile. De Spiritu Sancto, v, P. G., t. xxxii, col. 77-86. Allatius cite de nombreux textes des Pères qui affirment cette identité de signification entre les deux prépositions. Vindiciie synodi Epitesinæ, p. 381-391. Voir Hugues Etherianus, J)e haresibus f/nvcorum, ni, 20, P. L., t. ccii, col. 389-303 ; Joseph de Méthone, Krfulalio Mfirci Ephesini, P. G., t. clix, col. 1072-1073 ; Id., De Spiritu Sancto, ibid., col. 1123-11.34. « Si la formule per Filium, argumente Allatius, ne signifiait pas ex Filio.H y aurait un intervalle de temps entre les processions divines. A moins d’itre liérétique, personne ne nie que le Fils et le Saint-Esprit proviennent en même temps du Père. Les saints Pères ont fait usage de l.i formule per Filium non pas pour établir entre le Fils et le Saint-Espritun intervalle de temps, mais pour exprimer la mitoyenneté essentielle du Fils dans la subsistance du Saint-Esprit par le Père. On n’offense donc pas la piété si on allirnic que le Saint-Esprit procède du Père en même temps que le Fils, parce que le Fils est en même temps que le Père, bien qu’il dérive du Père. Le Fils subsiste simul avec le l’ère et procède du Père, de même ri : sprit subsiste simul avec le Fils et il est du Père par le Fils, sans intervalle de temps. Le Fils est simul avec le Père et cependant il présuppose le Père par la relation d’origine, parce qu’il provient du Père. De même le Saint-Esprit est simul avec le Fils eu sortant du Père, et cependant il présuppose le Fils par la relation d’origine, parce que le Saint-I^sprit procède du Père par le Fils. » Vindiciæ synodi ephesinie, p. 391, 392.

Il n’y a donc pas de différence, quant au sens, entre les deux formules grecque et latine, l^lles expriment le uiênic concept, mais d’une manière diverse, plus

compréhensive chez les grecs, plus imprécise chez les latins. « Les latins, remarque le cardinal Bessarion, se sont attachés de préférence à marquer l’identité de la puissance productrice du Saint-Esprit dans le Père et le Fils, en d’autres termes, l’unité de la spiration divine. Les s-.recs, à leur tour, ont eu à cœur de bien mettre en relief l’ordre suivant lequel le Saint-Esprit procède du Père et du Fils. La préposition o : â indique que, par rapport à la procession du Saint-Esprit, le Fils est le coopérateur du Père, et non réciproquement. Pour donner un exemple, toutes les créatures proviennent du Fils, iv. -oO YWZ, mais les Pères grecs n’emploient pas cette expression. Ils préfèrent la formule Stà ToO Vio :. Ils visent l’ordre avant tout, et cet ordre est bien établi par la préposition cii. » jDc processione Spiritus Sancli, P. G., t. ci.xi, col. 400.

Loin donc d’exclure la formule latine, la formule grecque et à tg-j l’îoO la complète, ainsi que le remarque Scheeben, « parce qu’elle présente le Père et le Fils comme deux principes agissant l’un dans l’autre et non à côté l’un de l’autre ou séparés. Elle fait ressortir la position spéciale qu’occupent le Père et le Fils à l’égard du Saint-Esprit. Le Fils ne paraît que comme principium de principio, tandis que le Père figure comme principe sans principe et produit le Saint-Esprit comme prineipium principii. Ce que la formule ex Paire et Filio ne contient que matériellement et ce que les latins ont dû compléter par ces mots : tanquam ab uno principio, et licet pariter ab utroque, a Pcdre principaliter, eUe le dit d’elle-même. » La dogmatique, n. 876, t. ii, p. 594. Cf. Bilz, op. cit., p. 164-166, 168-171.

b) Ces explications données, nous pouvons répondre à la deuxième question et comprendre pourquoi les Pères grecs, et saint Jean Damascène en particulier, réservent exclusivement au Père les épithétes d’aîrla, ip/Y, , TtriYv « Nous avons, dit saint Jean Damascène, un seul principe, une seule cause physique du Fils et du Saint-Esprit. » Diuloqus contra manichivos, 4, P. G., t. xciv, col. 1512. Le Fils et le Saint-Esprit se rapportent au Père comme à leur cause. De hymno trisagio, 7, 1 P. G., t. xcv, col. 40. D’après les théologiens orthodoxes, ces textes prouveraient que le Fils et le Saint-Esprit dépendent du Père quant ; leur origine et que l’opération immanente ciui communique l’être au Saint-Esprit s’attribue au Père seul. Bogorodsky, op. cit., p. 123, 121. Cette conclusion est absolument fausse et elle trouve sa meilleure réfutation dans l’emploi, fait par saint Jean Damascène, de la formule grecque a Paire per Filium. Les théologiens orthodoxes ne veulent pas entendre parler d’une cause primordiale. Mais cette expression n’est pas latine par son origine. Nous la trouvons employée par saint Basile : Tioo/.aTao/.Tixr, (xiria, de même que nous trouvons ciiez les Pères grecs du iv » siècle que le Père est un principe sans principe. Saint Jean Damascène donne aux mots grecs 7Tr, -.v% iy/y., a’.Tiov, le même sens qu’ils I ont dans la théologie grecque du iVe siècle. Les grecs, I déclare-t-il, ne disent pas que le Saint-Esprit soit du Fils, c’est-à-dire n’emploient pas cette manière de s’exprimer. Mais, ajoutc-t-il, le Saint-Esprit est l’Esprit du Fils, c’est-à-dire il dépend du Fils quant à son origine, l^n d’autres termes, il ne renonce pas à la terminologie traditionnelle grecque, mais il ne nie pas la dépendance d’origine du Saint-Esprit par rapport au Fils. Bilz, op. cit., p. 158, 159.

Comme cause primordiale des processions divines, le Père est réellement le seul principe, la seule cause du Fils et du Saint-t-^sprit, de même qu’il est appelé la seule al-t’x de la création, bien que le Fils et le Saint-Esprit y coopèrent, comme une seule cause avec lui.

De ce que nous avons dit, il résulte que le langage théologique de saint Jean Damascène est exact et