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ENFER D’APRÈS LES PÈRES


452, 456 sq., avec l’étemité des peines pour les hommes damnés, on voit insinuée la restauration future des démons. Cf. Atzbergcr, op. cit., p. 189 sq., 197, 513.

2. Les systèmes gnosliqiies proprement dits bouleversaient tous, de (liiïcrentes manières, l’eschatologie orthodoxe : sous forme panthéiste avec Valentin, Carpocrate, sous forme dualiste avec Saturnin, Basilide, etc., ils s’accordaient à distinguer dans le genre humain, d’après les parcelles de vie divine tombées directement du Dieu suprême dans l’œuvre mauvaise du démiurge, les pjieumatiqucs en qui l’élément divin domine et qui seront nécessairement tous sauvés ; les psychiques en qui l’élément divin est en lutte avec le principe matériel mauvais et qui, seuls, sont libres de se perdre ou de se sauver (salutparticulier), d’après le principe qui triomphera ; enfin les hyliques, tous matériels, c’est à-dire mauvais, tous nécessairement perdus. Le salut étant le retour au Père Suprême de l’élément divin, la damnation est d’abord la privation de ce bonheur et puis, ordinairement, la destruction. Ainsi, d’après Valentin, le feu consumera un jour l’univers matériel avec tous les hyliques et les psychiques ayant perdu le salut. Héracléon, son disciple, pensait de même. Cf. Origène, In Joa., tom. xiii, 19, P. G., t. XIV, col. 429 ; S. Irénée, Contrahivr., I, vii ; II, XXIX, 3, P. G., t. VII, col. 512 sq., 814. Marcion avait un système spécial : les hommes, créés mauvais par le démiurge, ont été rachetés par Dieu dans le Christ-Celui-ci, descendu aux enfers pour annoncer ce salut, se voit repoussé par les justes, Abcl, Noé, etc., qui croient avoir encore à faire au démiurge trompeur et restent ainsi en enfer, pendant que les méchants, Caïn, les sodomites, croient et sont sauvés. Cf. S. Irénée, Cont. hær., I, xxvii, 3, P. G., t. vii, col. 609 ; Ilnmil. clément., y.x, 2, 4, 9, P.G., t. ii, col. 418, 452, 457. Il admettait donc une restauration au moins iiartielle du mal après la mort. Les incrédules, à la fin des temps^ seront non pas jugés par le Dieu bon, cf. Tertullicn, AdiK Marcion., 1. I, c. xxvi-xxviii ; 1. II, c. xi-xiv, mais abandonnés par lui au démiurge qui les châtiera par le feu. Cf. S. Irénée, Cont. hær., I, xxvii, 3, P. G., t. VIT, col. 689.

3. Le manichéisme (iii’^-iv’e siècles), dualiste lui aussi, admit une notion du salut très semblable à celle du gnosticisme : délivrance des éléments de lumière qui sont dans l’iiomme, le reste étant abandonné aux ténèbres éternelles, d’où il venait. Cependant l’homme est libre de réaliser cette délivrance ou non ; les incrédules et les pécheurs erreront, après leur mort, jusqu’il la fin du monde, puis seront jetés dans un enfer éternel. Cf. Tixeronl, op. cit., p. 437.

5° Pères conlroi’ersistes des il" et iile siècles. — Saint Irénée et saint Mippolyte sont avec Tertullicn les principaux dont les ouvrages nous soient parvenus. 1. Saint Irénée.

Il rejjroduit l’enseignement traditionnel, énonce plusieurs lions principes de théologie et adopte l’opinion du délai de l’enfer. Il est même probable que celle-ci a passé par lui des millénaristes asiates, à l’Occident, à’l’crtullien et à ceux qui les ont suivis. Cf..tzbcrger, op. cit., p. 217 sq.

n) Enfer éternel et éléments de théodicée. — Les textes très nombreux du Contra hwrcses ne fournissent que de simples affirmalions, parfois avec référence scripturalre, j. II, c. xxviii, n. 7 ; c. xxxiii, n. 5 ; I. III, c. xxiii, n. 3, 4 ; c. xxv, n. 2 5, P. G., t. VII, col. 809, 833, 962, 968 sq. Dans sa réponse à Marcion, il ébauche la théodicée développée par Tcrtulllen, I. IV, c. XXVII, n. 2-4, col. 1058 sci-, et prouve l’enfer par une accinnulation des textes des l’Aangiles et de saint Paul. Dans le c. xxviii. Il ajjpliquc spécialement aux liérétifques la peine éternelle dont Jésus a menacé les maudits, col. 1061 sq. La damnation de ces impies sert au saint des justes, comme.Jésus Christ est, par sa mort, le salut des uns et la damnation des autres (de ses meurtriers). Dans tous ces passages, saint Irénée se dit le simple écho de l’enseignement des anciens. Cf. encore 1. IV, c. xxxiii, n. 1, 11, 13 ; c. XXXVI, n. 3-5 ; c. xxxix, n. 4, col. 1072, 1079 sq., 1092 sq., 1109 sq. : Dieu a préparé aux méchants cjui ont abusé de la liberté de mal faire : congriicntes lumini adversantibus… tenchras, … convenienlem pœnam-Ils en sont cause responsable ; ceux qui fuient la lumière ici-bas se plongent par le fait dans les ténèbres, sic fcternum Dei qui fugiiinl lumen, quod continet in se omnia bona, ipsi sibi causa sunt ut œternas inhabilent tenebras, destituli omnibus bonis, sihimetipsis causa hujusmodi habilaiionis facti. Cependant, xl, col. 11Il sq.. Dieu prépare, de son côté, le feu éternel et les ténèbres, et il punira ceux qui se retirent de lui. Saint Irénée accumule de nouveau ici les textes script uraires pour montrer contre Marcion que le même Dieu récompense les bons et condamne les méchants au feu éternel. L. V, c. ix-xi, col. 1144 sq., saint Irénée prouve ex pro/esso par les textes de saint Paul que l’homme, esclave des œuvres de la chair, ne possédera pas le royaume de Dieu. Finalement, les c. xxvi-x.xxvi, résument l’eschatologie catholique-Au c. XXVI, 2, col. 1194, il affirme de nouveau le feu éternel préparé pour le diable et pour tous les apost : its qui persévèrent dans leur apostasie ; au c. xxvii, n.2, après plusieurs textes de l’Écriture, il approuve l’argument théologique tiré du péché qui sépare de Dieu, col. 1196, 1197, et il déclare de nouveau que ce n’est ]ias Dieu qui est responsable du châtiment, mais le pécheur qui separavil semetipsum a Deo voluntaria sententia, comme l’explique Notrc-Seigneur, , Ioa., iii, 18 sq., qui male agit, odit lumen. Il développe cette idée et cite l’Apocalypse, c.xxviii, 1, 2, col. 1197sq. ; enfin c. xxxv, 2, col. 1220 sq., il explique ce qu’est la seconde mort : missi sunt in stagnum ignis. secundam mortem. Hoc autem est quod gehenna, quod Dominus dixil ignem œtennim.

b) Opinion sur le délai des supplices de l’enfer. — Elle est clairement enseignée par saint Irénée, 1. V, c. XXVI, 2 ; c. XXXI, xxxv, col. 1194 sq., 1208 sq., 1218 sq. Dans le premier texte, saint Justin est loué d’avoir dit que le diable ignorait sa condamnation, jusqu’à la révélation de Jésus-Christ. Depuis qu’il sait que le feu éternel est préparé pour lui et pour tous ses sectateurs, le diable s’est mis à blasphéiner Dieu, son juste juge, ce qu’il n’avait jias osé faire auparavant. Wnr t. iv, col. 3 15. Tous les hommes, sauf peut-être les martyrs quel’fî.i<, he pnvmittit ad Patrem, 1. IV, c. xxxiii, 9, col. 1078, doivent d’abord descendre dans l’hadès pour y attendre la résurrection, à l’excniple du Christ qui n’a jias voulu ressusciter de la croix oh il est mort, mais après un séjour en enfer. Si saint Irénée affirme que les justes ressuscites régneront sur terre))endant mille ans, il ne spécifie nulle part quel sera l’état des méchants depuis la première jusqu’à la seconde résurrection..Mais au jugement dernier, ils seront jugés et missi in stagnum ignis. Apec, XX, 12-14. On peut conjecturer qu’avant d’être précipités dans cet enfer de feu, les pécheurs sont, pour saint Irénée, dans les ténèbres et la privation de Dieu (la peine du dam), onformément aux principes exposés plus haut.

c) Pas plus que chez snint Justin, Dial.cum Trgph., 5, il n’y a pas de condilionalisme jiour saint Irénée, Cont. hær., I. II, c. xxxiv, 3, col. S36, omnia quæ. facta sunt… persévérant qnoadusque ca Dcus et esse et perscvcrarc volucrit… Pâtre… douante et in strculum sœculi pcrscveranliam his qui salri fiunt, Ps. cxi.viii, 5, 6 ; c. XX, 4, qui autem… ingralus exslileril faclori… ipse se privai in sxculum siveuli perset’crantia. Dieu conserve tant qu’il veut ce qu’il a créé ; Il conservera les