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ESPAGNE (ÉGLISE D’), LES SCIENCES SACREES


Loiiis-des-Frcmçais à Madrid. Résumé historique de la fondation. Situation actuelle ; N. Roure, La vida y las obras de Balmès, Madrid et Gerona, 1910 (avec une bibliographie) ; A. Lugan, Balniés, Paris, 1911. Les principales revues ecclésiastiques sont la C.iudad de Bios, publiée par les augustins d’Espagne ; Espaha y America, publiée par les augustins des Philippines ; Estudios franciscanos, publiés à Barcelone ; Razon y fé, publiée par les jésuites. Depuis un an, les dominicains espagnols publient aussi une revue, bien documentée. Ajoutons aRcuiie de clergé espagnol, qui paraît à Valladolid, et (non spécialement catholique) la Cultura espanola, qui a malheureusement cessé sa publication en 1910.

On trouvera une abondante bibliographie dans le Diccionario gênerai de bibliografia espanola de D. Dionisio Hidalgo, 7 vol., Madrid, 1802-1882 ; le vii= vol., qui contient l’index, a 76 pages consacrées à la théologie ; le droit canon, l’histoire, etc., sont compris dans les sections juridiques, etc. Pour la période récente, voir les bibliographies de la Cultura espafiola, méthodiques et bien faites.

Conclusion. — Nous pouvons maintenant apprécier sans injustice l’état de l’Église d’Espagne. Dans ce pays où rien n’est médiocre, ce sont souvent les défauts qui apparaissent d’abord à l’observateur : et l’on n’a pas manqué, même chez les catholiques, d’adresser plus d’un reproche à l’Église d’Espagne. Si, pris en eux-mêmes, les défauts signalés sont souvent exacts, ce qui l’est moins, c’est l’explication qu’on en donne ; et surtout on oublie trop de montrer les immenses qualités qui les compensent.

Une longue suite de désastres nationaux ont accablé cette Église nationale ; un siècle de révolutions a désemparé cette Église d’État ; tant de catastrophes l’ont laissée pauvre et par suite l’ont gênée dans son apostolat pour l’aniélioralion sociale, et, mais surtout, l’ont privée de participer suflisamment aux très grands progrès de la culture en notre temps.

En revanche, ce même passé qui l’a grevée de si lourdes charges lui a laissé, aussi, un prestige, et un rang que l’État même ne peut pas lui ravir, tel enfin qu’un échec définitif pour l’Église serait un échec définitif pour la nation : cette solidarité, qui doit être sentie de mieux en mieux, est un principe de force incomparable. L’Église d’Espagne a pour elle une population (surtout rurale) naturellement disposée à la pratique de quelques-unes des vertus les plus nobles, les plus essentielles du christianisme ; elle a pour elle une armée de prêtres pour qui l’habitude du sacrifice est une seconde nature et qui sont admirables de sens démocratique et chrétien ; elle a des évêques jeunes, actifs, populaires, qui sont de véritables chefs ; elle peut compter sur la meilleure partie de son clergé séculier pour faire rayonner au dehors le plus pur de son génie religieux.

Aujourd’hui que l’ère des révolutions est sans doute close, il n’j^ a p ; » s de raison pour qu’elle ne reprenne pas, î bref délai, le rôle si glorieux qu’elle a longtemps joué dans le passé, et pour lecpiol toute son histoire la désigne.

M. I.iîGExiinE.

II. ESPAGNE (ÉGLISE D’). LES SCIENCES SA-CRÉES. — I. Moyen ; ’igf. ILTcmiis miidornes : aperçu général. III. Travaux scripturaires. IV. Théologie dogmatique et polémique. V. Théologie morale et casuistique. VI. Théologie ascétique et mystique.

I. MoYF.N AGE. — Dès l’aurore du moyen â, ’» e les sciences sacrées semblent vouloir prendre un essor merveilleux. Ramenée de l’arianisme au catholicisme par le soin de ses grands évêques, l’Église d’Espagne aura son docteur et son guide dans la personne de saint Isidore de.Séville. Isidore naquit à Carlhagène dans la seconde moitié du vi<’siècle. Formé à l’école de saint Léandre, son frère, il travaill i d’abord avec lui à ramener les flofhs ; ’i la religion catholique. Il entreprit ensuite surtout par les célèlires conciles

de Tolède, dont il fut l’âme, de leur donner une solide organisation ; de les élever et de les instruire dans les sciences divines et dans les sciences humaines, et il devint ainsi le père et le promoteur d’un grand mouvement scientifique. Il ne se contenta pas d’un enseignement oral, il composa encore des ouvrages encyclopédiques, dont le plus célèbre est celui des É/ymologics. Il forma ainsi d’illustres disciples qui, à leur tour, créèrent ou vivifièrent de nouvelles écoles et leur donnèrent une impulsion telle qu’elles survécurent aux invasions musulmanes plusieurs fois séculaires. Le mouvement isidorien se perpétua surtout dans les écoles de Séville, Tolède et Saragosse où brillèrent les Ildephonsc, les Julien, les Braulion, les Tajon, etc. Bref, Isidore fut pour l’Espagne ce que furent à cette même époque ou un peu plus tard, Cassiodore et Boèce pour l’Italie, Bède pour l’Angleterre, Alcuin et Mamert Claudien pour la France et l’Allemagne, et il doit être rangé parmi les grands instituteurs de l’Occident.

Les invasions des disciples du Coran paralj’sèrent ce beau mouvement. Le clergé fit de grands efforts pour conserver la tradition scientifique ; mais que pouvait la meilleure bonne volonté au milieu de tant de ruines et de tant de calamités ! Néanmoins les études ne furent pas abandonnées ; et c’est en Espagne que le fameux Gerbcrt vint se faire initier aux secrets de la science. Par ailleurs, la vie intellectuelle prit un grand développement chez les musulmans de Cordoue, et les catholiques espagnols ne furent pas sans subir rinfiuence de leurs dominateurs. Aussi, à mesure qu’ils réussirent à se libérer du joug étranger, ils établirent partout des écoles qui furent le berceau des brillantes universités de l’âge d’or. Plusieurs de ces écoles commencèrent à avoir une certaine importance dès le xiiii= et le xiv<e siècle ; au xve siècle, l’université de Salamanque tenait un rang à part, et sa réputation commençait à s’étendre au delà de la Péninsule.

Durant la dernière période du moyen âge, l’Espagne donna le jour à un homme de génie, Raymond Lulle, cet homme prodigieux qui a créé de toutes pièces une philosophie nouvelle, et qui à lui seul représente tout un mouvement. Doué de vues larges et élevées, ce philosophe osa prétendre convertir tout un monde au moyen d’une science merveilleuse dont il était l’auteur. Il laissa après lui des disciples enthousiastes qui perpétuèrent sa doctrine. Ceux ci firent entendre leur voix dans plusieurs universités et répandirent les enseignements de leur maître dans la Catalogne, l’Aragon et le royaume de Valence. Au conmiencement du xvie siècle, le grand Ximénès avait formé le projet d’établir des chaires pour expliquer le lullisme dans toutes les universités de la Péninsule. De nos jours, Lulle a encore des disciples et sa doctrine continue à être enseignée et défendue par des hommes de jirofond savoir.

Au cours de cette même période, l’Espagne compte, en outre, des écrivains qui ne sont pas sans mérite. Au xiiie siècle, saint Raymond de Pcnnafort laissa des travaux de premier ordre sur le droit canon et la morale. Au connnenccment du xiv siècle, le franciscain Antoine.

drea, aragoTiais. un des plus fidèles disciples de Scol, écrivit d’excellents commentaires sur les Sentences de Pierre Lombard. ers l’an 1 l’Ki, le Père François Ximénès, également franciscain et patriarche de.lérusalem, composait un grand nombre d’ouvrages qui eurent, plus tard, l’homieur de nombreuses éditions..u xv siècle, le dominicain Jean de Torqucmada écrivit un traité de l’Église fort remar<|ual)Ie, pendant qu’Alphonse Tostat, évêque d’.Xvila, se faisait un nom célèbre parmi les commentateurs de l’Écriture sainte. D’une fécondité prodigicuse, il