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ESCLAVAGE


{Vaillcurs le motif de foi qui les a clictt^cs s’; iffirine à plusieurs reprises : Pcrfectis nobis omnibus bonis a magno Deo diilis, cxistimavimus oporlcre et ipsas servoriim liberlales… cis omnino paras et infucatas et perfcclas efficcre. Nov., LXXVIIII. Les affranchissements peuvent se faire à l’Église ; ils y auront pleine valeur juridique, et l’on ne doute pas que l’esprit cJirétien choisira ce procédé : Qui religiosa mente in ecclesiæ yrcmio senmtis suis mcritam concesserint libeitalem… Code théodosien, IV, vii, 1. (Un texte de 316, porte déjà : jamdudum placuit, ut in Ecclesia catholica liberlalem domini suis famutis præslnre possint. Code Justinien, I, xiii, 1.) Les condamnés au cirque ou aux mines ne seront plus marqués : quo facics quec ad similitndinem putchritudinis cselestis est fig.rata, minime maculetur. Code théodosien, IX, xl, 2. Aussi comprend-on sans peine que ces lois indiquent comme motif d’affranchissement, l’élévation à l’épiscopat. Assurément, l’esclavage n’est pas aboli ; mais l’estime due à l’âme immortelle, et surtout baptisée, s’étend jusqu’à l’esclave ; et de ces préoccupations, inouïes jusque-là chez le législateur, c’est un résumé bien elliptique que de se borner à dire, comme l’ont fait nombre de jurisconsultes : « Les empereurs chrétiejis n’apportèrent aucun adoucissement nouveau au soit des esclaves. » G. May, Éléments de droit romain, p. 53. Cf. Ch. Maynz, Droit romain, t. iii, p. 114.

En regard de ces détails de législation civile, il faut noter brièvement, sauf à anticiper un peu sur l’ordre chronologique, comment fut assuré aux esclaves l’accès aux plus grands faits de la vie ou de la société chrétienne : l’ordination sacerdotale, l’entrée dans la vie religieuse, le mariage.

1. La condition servile est une irrégularité vis-à-vis de l’ordination sacerdotale. Dist. LIV, c. 21, S. Léon ; dist. LIV, c. 12, S. Gélase ; Grégoire IX, Décrétâtes, 1. I, tit. XVIII, c. I. A l’insu de leurs maîtres, les esclaves ne peuvent être ordonnés. Si les maîtres consentent, il y a affranchissement ipso facto. Si l’ordination a lieu à l’insu ou contre le gré du maître, l’évêque, ou ceux qui l’ont renseigné, doivent remplacer le nouveau prêtre par deux esclaves. Dist. LIV, c. 19. Si l’évêque a été trompé par l’esclave ; à ce dernier de se faire remplacer, ou il sera déposé, s’il n’est que diacre. S’il est prêtre, il compensera son maître, à tout le moins en étant à son service spirituel.

2. La Novelle V, 2, qui règle l’accès à la vie religieuse, suscite moins de difficultés, eo quod omncs similiier divina susceperit gratia. Hommes libres ou esclaves sont astreints seulement à trois ans d’essai. Sive servi, penitus non inquielari, migrantes ad communem omnium (dicimus autem ceelesiem) dominum, et arripiantur in libertatem. Nam si mullis casibus ex lege hoc fît et talis quædam liberias datur, quomodo non prœvalebit divina gratia talibus eos absolvcre vinculis ? Si le maître réclame l’esclave en prétextant qu’il a volé, ou le fait est vrai, et alors qu’il reprenne son esclave après avoir juré de ne point le maltraiter ; ou le fait est inexact, et dès lors que le fugitif ne soit plus inquiété. Si l’esclave fuit le monastère et cherche à vivre ailleurs, son ancien maître peut le reprendre : non enim infuriam patictur tantum ad verum servitium tractas, quantum ipse infuriatus est Dei cultnram refugiens.

Le seul fait du séjour au monastère dans le dessein d’y entrer suspend la servitude. Code justinien, I, III, 38. Un concile de Rome, sous saint Grégoire le Grand, constate le grand nombre des candidats à la vie religieuse, et établit sagement une probation pour établir la sincérité de leurs désirs. D’opposition systématique, il ne peut pas être question : si vero festinantes ab omnipotentis Dei servilio incaute relinemus, illi invenimur negare quædam qui dédit omnia. Mansi,

t. IX. col. 1227. Les difficultés pratiques pouvaient êlre considérables ; saint Basile s’en préoccupe. Reg. Jusius tract., XI, P. G., t. xxxi, col. 948. Il y a des cas où, devant la mauvaise volonté du maître, il faudra préparer l’esclave à la patience ; d’autres fois, celui qui aura reçu ce fugitif devra obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes. On conçoit l’influence que devait avoir l’exemple de cette vie que riches et pauvres venaient partager pour servir Dieu..loseph de Maistre l’a exprimé en termes forts et exacts : « Qu’est-ce cjue l’état religieux dans les contrées catholiques ? C’est l’esclavage ennobli… Au lieu d’avilir l’homme, le vœu de religion le sanctifie. Au lieu de l’asservir aux vices d’autrui, il l’en affranchit. En le soumettant à une personne de choix, il le déclare libre envers les autres avec qui il n’aura plus rien à démêler. » Du pape, Lyon, 1884, p. 346. On a revu depuis ce qu’avaient vu les âges passés. M. A. Cochin écrit, en parlant de l’ile de la Réunion : « Les filles de Marie sont un ordre fondé depuis 1848 ; les sœurs sont blanches ou noires, et l’on a vu d’anciennes esclaves devenues supérieures des filles de leurs anciennes maîtresses. » De l’abolition de l’esclavage, t. i, p. 320.

3. Quant au mariage, le droit canon s’occupe à plusieurs reprises de la condition servile. Elle annule un mariage contracté sans connaître cet état ; elle le laisse valide, si cette condition était connue des contractants, 1. IV, tit. IX. Hadrien IV proclame de nouveau la valeur du mariage contracté contre le gré du maître, mais l’esclave continuera à servir celui-ci. Q. II, c. 29, les mêmes décisions sont énoncées. S’il y a eu partiellement quelques décisions de conciles exigeant le consentement des maîtres, on en conçoit le but : prévenir toute contrainte de séparation après le mariage. Voir col. 453-455.

III. Le SERVAGE.

Entre l’esclavage et la liberté, la première étape fut le colonat, et la seconde le servage. On conçoit assez qu’il est impossible de dater les phases d’une pareille transformation, dont Aug. Thierry affirmait : « La réduction de l’esclavage anticjue au servage de la glèbe, très avancée au ixe siècle, s’a< ; heva au x^. Le point de départ avait été le colonat : un esclave, un homme libre, un barbare accueilli par l’État, étaient fixés au sol et donnaient, comme redevance, une part des fruits de leur travail. L’irruption des bai’bares, la compénétration des coutumes de provenance diverse, l’élaboration du monde féodal avaient successivement modifié cet état. Quelle part a prise l’Église à ce mouven^ent ?

Les conciles.

Les mesures édictées par les

conciles nous permettent de mieux connaître cette société. Rigueurs d’un paganisme encore récent : concile d’Elvire (305), c. 5 : Si qua domina, furore zeli accensa, flagris verberaverit ancillam suam, lia ut in tcrtiam dicm cmimamcumcruciatu cfjundat…, sept ans de pénitence, si l’homicide est volontaire ; cinq ans, si c’est par imprudence. Le christianisme ne constitue pas par lui-même un affranchissement : concile de Gangres (324 ?), c. 3 : Si quis scrvum pra ?textu divini cultus docecd dominum contem.nere proprium, ut disceded ab ejus obsequio, nec ei cum bencvoleniia et omni honore deservicd, anathema sit. Nécessité d’opposer une peine canonique à l’homicide arbitraire commis sur un esclave : concile d’.gde (506), c. 62 : Si guis scrvum proprium sine conscientia judicis occiderit, exeommunicatione vel pxiiilenlia bicnnii rcatum sanguinis emundabit. Renouvelé par le concile d’Épaon (517), c. 31, et par le concile de orms(868), c. 38. La liberté accordée est maintenue parla loi ecclésiastique : concile d’Orléans (549), c. 7 : … quia plurimorum suggestione comperimus, eos qui in ccclesiis ju.vta patrioticam consuetudinem a servilio fuerint absoluti, pro libito quorumcumque iterum ad scrvitium revocaii.