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ESCLAVAGE

()4 « Mets plutôt à profit cette circonstance d’avoir ('té appelé étant esclave, et reste volontiers dans cette condition qui est une école d’humilité et de patience. » D’autres : Si cependant tu peux devenir libre, profite de l’occasion qui s’offre à toi. La première interprétation paraît plus conforme h la pensée générale de l’apôtre, 17-20, et à la lettre même du texte. De plus, j elle s’accorde mieux avec le verset suivant. » Crampon. Saint.Jean Clirysostome l’interprète ainsi, P. G., t. lxi, col. 156 : Taùrae ! ç tï)v itictiv o’jôèv (Tuvt£).cÏ, tffini')Ti Toivuv çi).ovE ; y.ei i.r, oi ôop’jêoC ; ï) yàp Jiiari ; Trivra liigz).£ TaOto'. Ces distinctions n’ont rien à faire avec la foi, dit l’apôtre : point de contention, point de (rouble ; pour la foi, tout cela ne compte pas. Voir J.-A. Monod, Saint Paul et l’esclavage, Toulouse, 1866 ; F. Godet, Commentaire sur la première Épîlre aux Corinthiens, Neuchâtel, 1886, t. i, p. 325-331 ; Mgr Le Camus, L'œuvre des apôtres, Paris, 1905, t. iii, p. 95-96 ; C. Toussaint, Épîlrcs de saint Paul, Paris, 1910, t. I, p. 317-318 ; J. Yeiss, »r crsle Korinlhebrie/, Gœttingue, 1910, p. 187-191. Saint Paul nomme en passant, I Tim., i, 10, les plagiaires, c’est-à-dire ceux qui volaient des hommes libres pour en faire des esclaves, parmi les différentes espèces d’impies, fjécheurs et scélérats, contre lesquels la loi a été instituée. L'Épître de l’apôtre à Philémon, si brève qu’elle soit, est des plus significatives : là se montre cet esprit du christianisme cjui « sans modifier les conditions extérieures de la vie, en a pénétré toutes les relations d’un esprit nouveau » (Dobschûtz). L’apôtre plaide ave ? une délicatesse tout apostolique en faveur d’Onésime esclave, naguère encore païen, et qui avait abuse de la bonté de son maître. La loi donnait à Philémon tous les droits ; les fugitifs rendus au maître étaient d’ordinaire si maltraités que beaucoup s’offraient aux comijats du cirque ; mais, celui qui écrit en faveur d’Onésime, aurait droit de commander, 8, et aime mieux intercéder ; c’est Paul, aujourd’hui vieillard, et actuellement prisonnier de Jésus-Christ, 9 ; et il intercède pour un converti, pour un enfant de sa captivité, 10. Le coupable est renvoyé à son maître, pour lui procurer l’utilité que son nom promet, et qu’il a déjà réalisée en faveur de saint Paul ; il est renvoyé pour laisser à Philémon le mérite et la joie de le bien traiter. Ses torts sont rappelés par deux litotes : Onésime est fugitif, forsilan enim ideo discessil ad horam a te, 15 ; peut-être Onésime a-t-il volé, s ; autem aliquid nccuit tibi aut débet, 18..Mais l’apôtre, en concluant, interpose encore l’amour qu’on lui porte, si ergo habes nw socinm, suscipe illum sicut me, 17 : et l’autorité dont il jouit, lui qui avait amené Philémon à la vraie foi : Confidens in obedientia tua scripsi tibi : sciens quoniam et super id qnod dico, faciès, 19, 21. Voir F. Prat, La théologie de saint Paul, Paris, 1908, t. I, p. 381-389.

Saint Pierre parle un même langage aux esclaves, tout en prévoyant que leurs maîtres pourront être fâcheux et leurs souffrances injustes, I Pet., ii, 18, 19 : quia sic est voluntas Dei, ut bencjacientes obmuiescerc Jaciatis imprudentium hominum ignoranliam : quasi liberi, et non quasi velamen habentes malitiæ liberledem, sed sicut servi Dei.

2° Des temps apostoliques au iiie siècle. — Dans les temps qui suivent l'âge apostolique, les textes qui font mention des esclaves nous montrent l’action du christianisme fidèle à cette première impulsion donnée par les textes des apôtres. Il n’est pas absolument question de réclamer une émancipation des esclaves. Dobschûtz, Die urchristliche Gemeinden, 1902, p. 89. Mais il y eut^ sans doute des cas particuliers dans lesquels la servitude plus rigoureuse ou plus dangereuse, ou jm motif spécial de rachat, déterminèrent un chrétien ou la communauté des fidèles à se

charger de cet affranchissement. Acta S. Pionii cl soc, n. 9, rachat de sainte Sabine que sa maîtresse avait fait enchaîner et reléguer dans les montagnes. Les textes suivants, antérieurs à la paix de l'Église, font connaître les sentiments et la pratique des prcmieis chrétiens dans cette question. Saint Clément, / Cor., Lv, 2, Funk, Patres apostolici, 2e édit., t. i, p. 168 : " Nous connaissons beaucoup des nôtres qui se sont livrés aux fers pour racheter leurs frères. Beaucoup se sont réduits eux-mêmes en servitude, et du prix qu’ils avaient reçu ont nourri leurs frères. » Saint Ignace avait écrit, .4rf Po/j/-., iv, 3, Funk, ibid., t. I, p. 290 : 1 Ne méprise pas les serviteurs et les servantes ; eux non plus n’ont pas à s’enorgueillir ; pour la gloire de Dieu qu’ils servent davantage, afin de trouver auprès de Dieu une meilleure liberté. Qu’ils ne désirent point être affranchis aux frais de la communauté, dans la crainte de devenir par là esclaves de leur amour-propre. « Dans le i’as/eur d’Hermas, yiand., VIII, 10, Funk, ibid., t. i, p. 494, on lit : « Écoute ce dont il ne faut pas s’abstenir, mais ce qu’il faut faire..- racheter les serviteurs de Dieu dans la nécessité? iCfSini., I, VIII, Funk, ibid., p. 520. U Apologie d’Aristide dans le tableau qu’elle fait des mœurs des chrétiens, xv, édit. Robinson, p. 111, sans mentionner les esclaves, permet de conclure qu’ils sont traités avec ime nuance de bonté. Tatien exprime l’indifférence recommandée par saint Paul : « Si je suis esclave, je supporte la servitude, si je suis libre, je ne m’enorgueillis pas de ma condition. » Adv. Grœcos, xi, édit. Schwartz, p. 11-12. L'Épître à Barnabe, xix, 7, Funk, t. i, p. 92, fait au maître cette recommandation : « Ne commande pas avec dureté à ton esclave ni à ta servante qui espèrent dans le même Dieu, de peur qu’ils ne craignent plus ce Dieu qui est audessus de tous, et qui n’est pas venu appeler les hommes suivant leur condition, mais ceux que l’Esprit a préparés. »

Minucius Félîx lui fait écho : Omnes tamen pari sorte nascimur, sola virtute distinguinmr, c. xxxvii, P. L., t. III, col. 351. L'Épître à Diogiiète nous fournit ce trait qui formulerait bien la conduite des chrétiens dans toute cette matière : « Ils obéissent aux lois établies, mais leur vie dépasse toutes les lois, » v, 10, Funk, t. I, p. 398. Les apocryphes de différentes époques mentionnent les esclaves sans que ces citations soient toujours bien caractéristiques. Dans les Acta Pétri et Andréa ?, édit. Bonnet, p. 126, Onésiphore affranchit ses esclaves, dans l’intention d’obtenir le pouvoir de faire un miracle, comme saint Pierre vient d’en faire un sous ses yeux. Dans les Acta Thomæ, édit. Lipsius, p. 101, lorsque Hireos converti revient, ceux qui l’attendaient furent surpris de ce qu’il n'était plus entouré, comme naguère, de tout un cortège, mais deux esclaves seulement l’accompagnaient. Saint Irénée, Cont. hær., IV, xxi, 3, P. G., t. vii, col. 1046, rappelle que devant la rédemption, il n’y a point de difFcrcnce parmi les hommes : signifteans quonicmi secundum carriem ex libcris et e.x servis, Christus statueret’filios Dei, similiter omnibus dans munus Spiriius vivificantis nos. Dans le IIli^ livre du Pédagogue, à plusieurs reprises, Clément d’Alexandrie donne les règles et les motifs d’une conduite toute chrétienne vis-à-vis des esclaves. Il consacre un long chapitre à blâmer ex professa le grand nombre d’esclaves. P. G., t. VIII, col. 592. Il y revient plus loin, et indique comment réduire ce grand nombre, col. 609 : H faut aussi rejeter… cette foule de serviteurs. Du Pédagogue nous recevons une belle et vénérable escorte, l’activité personnelle et la modération des désirs. » Aussi blâme-t-il l’usage des litières, col. 050, et recommande-t-il d’empêcher toute manière d'être I inconvenante chez les esclaves, car il rappelle le pro-