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EPITRES

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visitées ou ; des Églises sur lesquelles il avait des rcnscigneinciits plus ou moins étendus. Elles ont été provoquées par des circonstances spéciales, nettement définies et concrètes, pour résoudre des difficultés, des cas de conscience, des points de doctrine, qui intéressaient particidièrement, hic. et nunc, les correspondants de l’apôtre et l’apôtre lui-même. Elles remplacent une conversation que l’éloignement rend impossible. Absent de corps, Paul est présent d’esprit au milieu des communautés, avec qui il converse de loin. Ce ne sont pas, comme le prétend Van Manen, art. Paul, dans YEncyclopœdia biblica de Cheyne, Londres, 1902, t. iii, col. 3626, des traités rédigés en forme de lettres, dans lesquels l’apôtre expose sa doctrine et résout d’autorité des sujets de dogme ou de morale. Elles répondaient à des c]uestions du moment, parfois à des consultations, adressées à saint Paul. S’il recommande un échange de ses lettres entre deux Églises voisines, Col., iv, 16, ce n’est pas en vue de la publicité, mais pour parer aux mêmes dangers. Voir col. 179. Quand il s’adresse à des Églises qu’il ne connaît pas, c’est, ou bien pour préparer sa visite prochaine, comme lorsqu’il écrit aux Romains, ou bien par mesure préventive, pour les mettre en garde contre des erreurs qui les menacent, comme dans la circulaire dite l’Épître aux Éphésiens. Voir col. 180. Saint Paul n’écrit pas pour le public chrétien de son temps ; il s’adresse à une communauté, ou à un groupe déterminé d’Églises, ou à des particuliers. Il ne vise pas davantage les générations chrétiennes futures, et quoique le contenu de ses lettres ait servi déjà et servira toujours à l’instruction des chrétiens de tous les temps, par les principes qui y sont posés et par les vérités générales qui y sont exposées, il n’a eu directement en vue que ses correspondants immédiats, à qui il adressait de véritables lettres. Les Églises à qui elles étaient destinées les ont sans doute conservées pieusement, elles les ont communiquées à d’autres Églises. On a copié, recueilli, groupé, publié, ces lettres en raison de leur contenu, de leur intérêt universel et durable, comme on a assemblé et édité, dans l’antiquité profane, les lettres d’Aristote, d’Isocrate, d’Épicure, de Cicéron, par exemple. Elle sont deveinies de la littérature sacrée et canonique. Voir Canon DES Livres saints, t. ii, col. 1583, 1581. Mais rien ne montre que saint Paul ait prévu et voulu pour ses lettres ces hautes destinées ; il a écrit de simples lettres qui, dans l’intention du Saint-Esprit qui l’inspirait, devaient servir à l’instruction et à l’édification de toutes les générations chrétiennes.

Leur caractère général de lettres privées apparaît l)lus clairement encore si on les examine chacune en particulier. Le billet à Philémonest évidemment une lettre, et, selon le mot de M. Deissmann, il n’y a qu’un pédant, incapable de distinguer les couleurs, qui puisse y découvrir un traité sur l’attitude du christianisme en face de l’esclavage. Il en est de même du c. XVI de l’Épître aux Romains, si on le considère comme une lettre de saint Paul aux Éphésiens. Les deux Épîtres aux Corinthiens supposent un échange de lettres entre cettecommunauté et l’apôtre ; la pt^est une réponse, et si la II « est pour nous difïicile à comprendre, c’est qu’elle est pleine d’allusions à des faits que connaissaient bien les Corinthiens, mais que nous ne connaissons pas. Il en est de même des deux Épîtres aux Thessaloniciens. La lettre aux Galates est une lettre de discussion, une apologie personnelle ; elle n’est ni un pamphlet contre les judaïsants ni un traité De Lege et Evemgelio. Bien qu’adressées à des Églises que Paul ne connaissait pas, les lettres aux Colossiens et aux Éphésiens roulent sans doute sur le même thème et ont un ton plus impersonnel que les lettres envoyées à des destinataires connus. Mais elles sont

contemporaines, destinées à des Églises voisines, et elles restent des lettres et ne sont pas des traités sur le même sujet ; un seul eût suffi. L’Épître aux Philippiens donne l’impression d’une simple lettre écrite à une Église que Paul aimait d’un amour particulier. La lettre aux Romains, de prime abord, pourrait passer pour une Épître proprement dite. Cependant saint Paul ne se propose pas de donner un compendium de sa dogmatique et de sa morale ; il veut préparer Son voyage, en exposant d’avance son Évangile. Quoique longue, sa lettre n’a rien du genre épistolaire, et s’il y met moins de sa personnalité, c’est qu’il ne connaissait les chrétiens de Rome que par ouï-dire ; il était cependant bien renseigné sur l’état de la communauté, et sa missive n’est qu’une anticipation de ses conversations prochaines. Les lettres pastorales, dont ne parle pas M. Deissmann, quoiqu’elles soient, à un certain point de vue, des lettres d’administration, s’adressent à des particuliers, Timothée et Tite, et sont remplies de détails intimes et personnels.

Toutestestcttres desaintPaul sontdoncde simples lettres, sans caractère littéraire, et l’apôtre, en les écrivant, n’a pas été un littérateur, composant pour la galerie. Or, leur caractère primitif de lettres garantit leur authenticité. Ce sont les produits qui nous restent de l’activité missionnaire de l’apôtre des gentils. Écrites pour des occasions particulières, elles contiennent le moins possible de systématisation doctrinale. Œuvres d’une personnalité très ardente, elles manifestent la psychologie de leur auteur. Un faussaire n’aurait pas pu les fabriquer. Saint Paul les a écrites « avec le sang de son cœur. » Elles nous font connaître ses pensées, ses sentiments, son enseignement, donné au gré des circonstances ; elles ne nous livrent pas, comme des Épîtres l’auraient fait, un système théologique, ce qu’on a appelé le paulinisme. Leur caractère de simples lettres rend très problématique ce paulinisme-là.

b) Autres lettres. — Pour M. Deissmann, la II « et la III*^ Épître de saint Jean sont aussi de véritables lettres. La IIP est un billet envoyé à un particulier. Quoique moins personnelle, la IP est aussi adressée à une particulière, femme ou Église. Toutes deux sont écrites dans le style des lettres missives du temps.

2. Épîtres.

Les Épîtres catholiques de saint Jacques, de saint Pierre et de saint Jude sont de véritables Épîtres et non des lettres privées. La tradition ecclésiastique les a regardées comme des circulaires, des encycliques, expédiées, leur nom le dit, à l’Église universelle, à la catholicité entière. Leurs adresses indiquent d’ailleurs ce caractère général et universel. On peut donc les considérer comme des œuvres littéraires, traitant des sujets d’intérêt commun, sans détails particuliers et personnels. La forme épistolaire est seulement de stj’le, et quels que soient leurs auteurs, que ce soient les apôtres dont elles portent les noms, ou des écrivains chrétiens qui prennent ces noms (voir les articles spéciaux), elles restent des écrits littéraires, rentrant dans la littérature populaire de l’Église chrétienne.

L’Épître aux Hébreux, quelque part que saint Paul ait eue à sa composition, est une Épître proprement dite. Elle n’a pas d’adresse et la finale, xtii, 22-25, n’est ajoutée que pour sauvegarder la forme extérieure de lettre. C’est un document littéraire et non une lettre privée. Voir Hébreux {É pitre aux).

La I"= Épître de saint Jean n’a rien d’essentiellement épistolaire, ni adresse, ni salutation. On a pu la regarder comme la préface du quatrième Évangile. Elle peut rentrer cependant dans le genre littéraire de l’Épître strictement dite, bien qu’elle n’en ait pas la forme extérieure.

L’Apocalypse, au contraire, hormis le titre et le