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ÉPICLÈSE EUCHARISTIQUE


clèse proprement dite, dans les liturgies occidentales, bien avant la séparation des deux Églises d’Orient et d’Occident, prouve tout au moins que l’épiclèse, au sens strict du mot, n’est pas nécessaire pour la consécration. Cf. Maltzew, Z)ie Sacramente der orlhodox-katholischen Kircliedes Morgenlandes, Berlin, 1898, Introduction, p. 160-161. Les noms de Post myslcrium, Post sécréta, donnés en Occident à l’oraison qui correspond à l’épiclèse orientale, indiquent d’ailleurs que le mystère était considéré comme accompli au moment où le prêtre récitait ces fornuiles. Le même sens est suggéré par l’expression nujslcriian fidei qui, primitivement prononcée sans doute à haute voix par le diacre pour avertir les fidèles du moment de la consécration, est restée enclavée dans la forme romaine de la consécration du calice comme une perpétuelle attestation de la croyance antique. De ^Vaal, Archàolor/ische Erôrterungen : ii cinif/cn Stiictccn im Canon der lieiligen Messe. IIJ, Die Worte Mij^tcriuni fidci, dans Der Kedholitt, 1896, p. 392 395.

Ces raisons suffiraient à exclure les opinions extrêmes des théologiens orientaux, ainsi que celles des quelques théologiens d’Occident qui se sont plus on moins rapproches d’eux : Catliarin, Ciiristoplie de Cheffontaines, Rcnaudot, Touttée, Le Brun, Schell, etc. Elles ne peuvent i) ! us se soutenir, après les documents conciliaires et pontificaux que nous avons cités au cours de ce travail. Mais ces opinions étant éliminées, il reste h donner à l’épiclèse une interprétation autre que celle de fornuile consécratoire que lui ont, plus ou moins complètement, attribuée ces auteurs. El ici, il)’a encore place pour une grande diversité d’opinions, au moins en apparence, car, en réalité, on le verra, la plupart ne se distinguent guère entre elles que par de légères nuances.

VI. Les diverses k.xi-ucatiovs de l’épiclèse. — Sans prétendre faire ici une énumération absolument complète des nombreuses explications de l’épiclése fournies depuis que la question s’est posée à l’attention des tliéologlens, essayons cependant d’en dresser une sorte de catalogue, afin d’acheer l’orientation du lecteur dans l’étude du sujet. Cf. IIoi)pe, op. cit., p. 2Il sq. : Markovitch, op. cit., p. 296 sq.

1°> Inutile de discuter longuement l’explication donnée par certains auteurs dont parle Arcudius en les critiquant. De concordiu Ecclesiie occid. et orient., Paris, 1672, 1. III, c. xxvii, p. 2.55. Bcssarion aurait lui-même songé un moment à cette explication. Il>id. Les liturgies orientales, déclarent-ils tout uniment, avaient autrefois l’épiclèse avant le récit de l’inslilulion et les paroles de Jésus-Christ, comme la liturgie latine. Nous avons dit, en indiquant les principales données liturgiques, qu’on ne pouvait pas, tl’unc manière générale, se contenter d’une explication aussi sinqiliste. Le fait, fût-il démontré pour la liturgie romaine, ce c|ue nous ne croyons pas. ne saurait l’être pour les liturgies orientales. J’ai exiirimé ailleurs ma pensée sur le prétendu « fait nouveau (le fragment de Deir Balyzeh) ipii a incliné des liturgistes éniinents, comme (loin I’. de Puniet et doni Cahrol, art. cit., de la Reime des sciences pl>il. et tliéol., 1909, t. iii, p. 509, 510, à rejirendre dans une certaine mesure cette explication. Tout ce que l’on jjeut et doit reconnaître, c’est l’existence d’une double épiclèse en maintes anapliores ou en niainis canons, l’une avant le récit de rinslitullon, l’autre après ce récit. Mais cette dernière reste toujours un fait, dont la présence à cette jjlace exige explication.

2° Explication de Jean’l’orquemada au concile de Florence, d’ArcudIus, op. cit., I. III. c. xxxiii, p. 251 sq., et d’Allalius, fn Roberli Chrcip/liloni Apparatum, exercit. xxv, p. 517 ; De Eccl. o<cid. et orient, perp. consens., I. III, c. xv, adoptée par beaucoup de

théologiens, tels que de Lugo, Vasquez, Billuart, Bellarmin, Suarez, etc. CL Hoppe, op. cit., p. 212 sq. ; Markovitch, op. cit., p. 296 sq. Par répiclèsc, disent ces auteurs, on ne demande pas que le Suint-Esprit opère la transsubstantiation, mais qu’il fasse que les futèles soient vrainient le corps mystique du Christ en tirant profit du sacrement. Oratio ilta non est ut conflciatur quod confeclum est, sed ut consequamur effectum sacramenti : telle est la formule par laquelle Torquemada résume sa doctrine. Hardouin, Concil., t. ix, col. 978. Le texte même de l’épiclèse devrait, au dire de ces auteurs, être littéralement traduit en ce sens. En renvoyant, ici encore, le lecteur aux données liturgiques fournies plus haut, bornons nous à déclarer que c’est là une interprétation tout à fait contredite par la grammaire, aussi bien pour les épiclèses grecques que pour celles des autres liturgies orientales. C’est par cette entorse à la construction gramnuiticale de la fornuil ? d’épiclèse, que la présente explication diffère en réalité très notablement de la suivante, bien que l’idée d’application des effets du sacrement se retrouve chez toutes deux. De Lugo a clairement formulé cette opinion, quoiqu’il s’efforce un peu subtilement d’y distinguer deux nuances : Sexta solutio et mayis communis est ibi non peti quod ille punis fiai corpus Clirisli nuturale sed corpus Christi nujsticum ; … iluque débet intelligi fiai nobis corpus mysticum seu facial nos esse unum corpus mysticum Ctiristi. Hanc solulionem refert etiam ex Bessarione P. Salmeron, . et eam videtur probare : in eademque conquiescit Suarez. Sed rêvera non satisfæit quia detorquet verba clara ad sensum valde improprium.et lied de corpore utrunique possel tolerari, de sanguine non videtur, nisi improl >riissime, quomodo pelatur caliccm illum fieri s(utguinrm prcliosum Christi, si de veio Christi sanguine non loquatur. hugo. De veneiabili euchar. satrr m., disp. XI, sect. I, n. 9. La critique est juste. Mais voici l’opinion de Lugo lui-même, où le lecteur n’aura pas de peine à voir qu’elle n’échappe point à une critique semblable : … S’on peti ullo modo illum panem fieri corpus, et e(dicem sanguinem Christi, … sed sensum esse illum panem, iioc est cniipis, et illum calicem, iior EST sA.r, ui.EM ciiiiisTi, fieri nobis in salutem et remissionem peccatorum ; ila ut xb corpus ci sanguis non sint ex parte prtvdicati, sed ex parte subjecti seu apposilivc. ut dicunt grammatici. Ibid., n. 10 ; cL n. 11.

Comparer l’iiiteriirétation de Sci))ion Maffei, Epist. ail., contre Pfafï, dans S. Ireniei Opéra, édit. Slieren, t. M, p. 112 (cf..llatius, loc. cit.). Cet auteur construit ainsi la formule grecque :..-/.al iTOfr, (rr| tov |jikv à’iTov ToC-ov (tm}.x oiyio’j TciC XpiitoC (Tou) xai tô noT ; ^fiov toOto (al’ua T(|j.iov xoû Xpto-ToO (to-j), ïva yiviriTai Kirsi Toï ; èÇ a’Jtfôv p.s-aXajxôoîvouiiv Et ; açsdiv â|jiapT((i)v. Iloppe, o/j. cit., p. 213 214. Les disciples de Pfafï avaient raison de répondre à Mafîei : ffipe sane posuissc est refutas.se. Dissert, apolog., dans Stieren, op. cit., p. 145.

3 » Par l’épiclèse on demande à Dieu d’envoyer le Saint-ICsprit non point jiour opérer pureiiieiit et simiilement l ? changement, qui a déjà eu lieu, mais pour opérer le changement de manière à ce que le sacrifice soit profitable (ni corps mystique du Christ, et sjjécialement aux communiants. On demande que le Saint-I-sprit vienne accom|)Iir sa mission sanctificatrice. C’est l’oxplication cpie donnèrent les Arméniens au synode de Sis (1311 1315). Mansi, t. xxv, col. 1342 1343. et les Crées à Florence. Mansi, t. xxxi, col. 16 « 6 1687. Bcssarion la relate également dans son traité, /’. (i., t. r.i.xi.col. 493 s(|. I->lle se distingue de la précédente en ce qu’elle ne nie pas la demande de Iranssubslantlation contenue dans l’épiclèse : clic se contente de l’inlerprétcr dans le sens de la