Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 5.djvu/148

Cette page n’a pas encore été corrigée
271
272
ÉPICLÈSE EUCHARISTIQUE


dicittir qiiod sola virtiite Spirilus Siincii fit hiijusmodi conversio, non cxciuditur riiiiis insliumentalis, quæ est in verbis prtemissis. In IV Sent., 1. IV, dist. VIII, q. ii, a. 3, ad 1°". En d’autres termes, c’est bien la vertu du Saint-Esprit qui accomplit la transsubstantiation, mais cette vertu divine agit par le moyen des paroles de l’institution que prononce le prêtre. Voir, dans le même sens, Siim. theoL, III^, q. lxxviii, a. 4, ad l’" » .

Un autre article de la Somme nous remet en présence de la doctrine concernant l’opération du Saint-Esprit. Saint Thomas s’y pose cette question : Utrum malus sacerdos eiicharisliam consecrare possit ? A la deuxième objection, il cite encore saint Jean Damascène, De fide orlhodoxa, 1. IV, c. xin : punis et vinum per adventum Sancli Spirilus supernaluialiler transit in corpus et sanguinem Domini ; puis, sous le nom de saint Grégoire, le texte de la lettre de saint Gélase à Elpidius : Quomodo ad divini myslerii consecraiionem cselestis Spirilus invocalus adveniet, si sacerdos, gui eum adesse depreccdur, rriminosis plenus actionibus reprobetur ? Le Sed contra n’est autre qu’un passage de saint Paschase Radbert attribué par erreur à saint Augustin : Sed contra est quod Auguslinus (lisez : Paschasius) dicil in Lib. de corp. Dom., c. xii, vid. c. LXXVIII, q. I : Intra Ecclesiam ccdholicam in myslerio corporis et sanguinis Domini nihil a bono majus, nihil a malo minus perftcitur sacerdolc, quia non in mérita consecrantis sed in verbo perftcitur creatoris et virtuie Spirilus Sancli. he docteur angéliquc n’a point de peine à tirer de ce texte une complète réponse à la question posée et aux objections soulevées. Citons seulement l’ad 2°", qui nous fournira encore une formule des plus suggestives… Dicendum quod cmle illa vcrba (les paroles citées de saint Gélase) Grcgorius papa (lisez : Gelasius) prxmillil : sacrosa uta religio, quse calholicam conlinel disciplinam, lanlam sibi reverenliam vindical, ut ad eam quilibcl nisi pura conscienlia non audeal pcrvenire. Ex quo manifeste apparel e/us intenlioncm esse quod peccator sacerdos non délicat ad hoc sacrcmjentum accedere. IJnde per hoc quod su bdit : quomodo cœlestis Spirilus invocedus adveniet ? intelligi oportel quod non advenil ex merilo sacerdotis, sed EX vimvTE cnniSTi, cujvs vebba profert sacerdos-Ibid. , ad 2°"". Voir encore l’art. 6 de la même question, où saint Thomas transcrit un autre texte, attribue à saint Grégoire, concernant encore l’opération du Saint-Esprit. Dicit enim Grcgorius in Registr., Decr., Multi sœcularem, I, q. i : Heu, in quam magnum laqueum incidunt qui divina et occulta mysteria plus ab aliis sanctificata passe fieri crcdunt : cum unus idemqae Spirilus Sanclus ea mysteria occulte atque invisibililer operando sancti ficct !

Enfin, nous ne pouvons quitter le docteur angélique sans signaler la division qu’il donne des prières du canon, laquelle devra, en fin de compte, nous servir de base théologique pour une explication de l’épiclèse. Illa autem pars [missie] quæ perfectionem sacramenti conlinel, in Ires dividitur, sccundum tria quse sunt de inlegritale hujus sacramenti : scilicet aliquid quod est sacramentum lantum ; aliquid quod est res et sacramentum ; aliquid quod est res lantum. In IV Seul., l. IV, dist.VIII, q.ii, a.4. Et le saint docteur fait ensuite l’application de cette triple division aux diverses oraisons qui composent le canon.

On le voit, saint Thomas nous fournit tous les éléments de solution pour la question de l’épiclèse. Mais cette question, dans les termes où elle se pose à notre esprit, lui était inconnue. Aussi se contente-t-il de signaler la doctrine patristique de la vertu eucharistique du Saint-Esprit, d’affirmer sa couL-iliation avec l’efficacité des paroles du Christ, sans insibter davantage et sans chercher de plus amples explications. Quand on lit les quelques lignes consacrée.

incidemment par le docteur angélique à cette proposition dogmatique de la tradition, l’on se prend à regretter vivement que le prince de la spéculation théologique n’ait pas appliqué son génie au développement de cette donnée traditioimelle. Il n’aurait pas manqué de jeter une grande lumière sur toute la question.

La pensée de Duns Scot († 1308) serait intéressante à rapprocher de celle de saint Thomas. Le docteur subtil tient pour essentiels, dans la consécration du pain, ces seuls mois : Hoc est corpus meum, In IV Sent., 1. IV, dist. VIII, q. ii, n. 4 ; et, dans la consécration du viii, ces autres : Hic est calix sanguinis mei. Ibid., n. 6-9. Toutefois, pour que les pronoms meum et mei aient une signification exacte, et afin de bien marquer que le prêtre parle in pcrsona Christi, il croit nécessaires les paroles du canon qui précédent : Qui pridie quam paterelur…, ibid., n. i, ou autres semblables. Les paroles consécratrices ne doivent pas être prononcées quasi materialiler et dicla a Christo, c’est-à-dire seulement avec une signification historique et narrative, mais bien lanqucmi operaliva el activa, c’est-à-dire en tant que douées de l’efficacité consécratoire. Reporleda, 1. IV, n. 8, 1^. Voir Duns Scot, t. iv, col. 1916. Comme le nom de Scot sera mis en avant par plusieurs tenants occidentaux de théories quelque peu analogues à l’opinion grecque de l’épiclèse, il n’était pas inutile de noter sa pensée véritabl’.

Ajoutons que, en relation avec l’idée que nous venons de lui voir émettre au sujet de la nécessité du Qui pridie, il faisait remarquer l’étroite et intime connexion qui rattache les unes aux autres les oraisons du canon de la messe : Unde non sine causa Ecclesia ila connexit lotum canonem missæ quod ab illo loco COMMVMCANIES, usque ad illuni locum posl consccrationem : Supplices te rogamus, omnipolens Deus, non est aliqua orcdio quæ non necessario connectedur cum prœcedenle. In IV Sent, loc. cil. Un peu plus loin, traitant au point de vue pratique la question de savoir à quelle formule le prêtre doit fixer son intention, le docteur subtil s’exprime en ces termes : Quod ergo consilium’l Dico quod sacerdos intendens fctcere quod facil Ecclesia, legens distincte verba canonis a principio usque ad finem, vere conficil. Ncc est lutum (dicui se repulcue valde peritum de scienlia sua et dicere : Volo uli prtvcise islis verbis pro consecratione sanguinis ; sed securior est simplicilas : Volo isla verba proferre sub ea intentione, sub qua Christus instituil ea esse profcrenda, ut quæ ex Christi instilutione sunl de forma, dico ul de forma, et quæ ad reverenliam, ad reverenliam. Sed quid si cmle omnia verba prolala conlingerel mori sacerdolem, numquid habendus essel sanguis lanquam vere consecratus ? Dico hic, sicut in quodam casu superius præmisso, si quis sacerdos inciperei sic loqui : Hoc est corpus meum, non prædicens verba præmissa tolaliter, quod omnibus ialibus non est adorandum nisi sub conditione si vere consetralum est. Opéra, Paris, 1891-1895, t. xvii, p. 51-52. Christophe de Cheft’ontaines, au xviie siècle, se réclame de Duns Scot et de quelques autres scolastiques de même opinion. Voir Richard Simon, Fides Ecclesiæ orienlalis seu Gabrielis metropolitæ Philadclphicnsis opuscula, Paris. 1671, p. 169.

Quoi qu’il en soit de ces discussions de détail, tous les scolastiques sont unanimes à professer que les paroles de l’institution, dites par le prêtre in pcrsona Christi, constituent la forme de l’eucharistie. Et eu cela ils ne font que traduire en style de l’école l’enseignement constant de la tradition, qui va d’ailleurs être canonisé par les conciles et les documents pontificaux.

Est-ce à dire que l’on ait, pour autant, perdu de