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ÉPICLESE EUCHARISTIQUE

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cise (le la croyance commune à la vertu consécraloire des paroles du (Christ. Isidore lui-même fut amené l)ar la vit, ’oureuse argumentation du cardinal au véritable point de vue dogniaticpie, puiscju’il faisait partie de la commission des six orientaux qui, le 26 juin 1439, lirent devant le pape et l’empereur la déclaration suivante : … Sumiis parati publiée confiieri quod nos lenenuis sicut vos qiiod in ncrhis SOLIS dominicis confieiiur…

Il semjjle bien que c’est à la lumineuse précision lliéologique de Torquemada que les g-ecs durent de se rendre compte que la doctrine catliolitiue était conforme à la tradition, sans préjudice, d’ailleurs pour l’usage liturgique de l’épiclèse. Ils s’en rendirent si bien compte qu’ils affirmèrent n’avoir januiis cru autre chose et demandèrent que cet article ne fût pas inséré dans le décret d’union, afin de ne pas faire penser qu’on en eût jamais douté. Confessi sunl, ouditis lalionibus nostris, quod semper ienuerunt quod salis verbis dominicis conficereiur. Fuit inslifuluni ul hoc poneretur in di/finitione. Dixcrunt quod hoc non erot ncccssarinm : imo si poneretur, Ecclesia ipsorum reeipercl ignominiaw, ac si huelenus tennissent oliud. Unde cum semper fuerinins concordes, in hoc difflnitio non débet fieri nisi de dubiis… Unde Sanctissinnis dominus noster Iwe audito obtemperavil, ut non deduceretur in dubium quod numquam fuit. On accepta donc de ne pas insérer cet article dans le décret d’union, à condition que, avant la séance où ce décret devait être promulgué, les grecs formulassent, dans une assemblée générale, la profession de foi énoncée par leurs six délégués en séance privée.

I.a condition fut réalisée par la déclaration solennelle lue par Bessarion au nom de tous les grecs à la séance plénière du, 5 juillet et que nous avons citée au début de cet article. Pour souligner l’importance d’une telle déclaration, le pape se contenta d’ajouter ces paroles : Intelleximus quse per venerabilem jratrem noslrum Nicœnum dicta sunt ; et qucmwis in mente noslra non esset aliud, tamen gratum fuit audisse quee ore releda sunt, quia ista est doclrina S. Joannis Chrijsoslomi et aliorum sanctorum qui præcesserunt et postea scculi sunt et hanc doctrinam secuta est et semper sequetur Ecclesia romana, et gratum fuit audire ul qui aliud exislimassent sint cerli de vestra bona opinionc. Orsi, op. cit., p. 150-172.

Ainsi l’Église grecque reconnaissait, à Florence, la doctrine de saint Jean Chrysostome comme la véritable doctrine traditionnelle, à la défense de laquelle Bessarion consacre, peu après, son traité spécial Desacraniento eucharistiæ, P. G., t. ci.xi, col. 494525. Marc Eugenikos, métropolite d’Éphèse, paraît avoir été le seul à protester contre cette profession de foi. Fougueux adversaire an l’union proclamée à Florence, il publia peu après le concile un petit traité contre lequel fut dirigé celui de Bessarion, et dont le titre suffit à résumer la doctrine : "0-t oO (jl(5vov àirb TÎ5 ; çwvrjç Tfôv SeiTTiOTixâiv pyifjLâTtov àXiaÇovTat ta. 6eïa 8(3pa, àXX’ex TÎjç [ierà Taûta EÙx^’i ? ^° 6’jXoT’« î toi Upéco ; 5uvd(|j.£i toO kyiox) IIveijfjiaToç. P. G., t. CLX, col. 1080-1089. Il y reprend contre les latins la thèse de Cabasilas, mais d’une manière plus exclusive encore et sur un ton où l’on ne peut s’empêcher de voir l’effet d’une évidente mauvaise foi.

C’est ainsi qu’après avoir dit que « la parole du Seigneur n’opère pas sans prêtre, ni sans autel, » et que de même « elle a besoin de prières, de l’invocation, de la bénédiction, en vertu desquelles descend le Saint-Esprit qui accomplit tous les sacrements, » col. 1088, il établit un parallèle à sa façon entre les rites de la messe orientale et ceux de la messe latine. La description qu’il fait de ces derniers donnera une idée de sa sincérité : « Chez les latins, lo prêtre rap pelle, lui aussi, sous forme de récit (61r, Yy, ixzTi/.à) ;), les paroles du Seigneur, et que lui-même a donne ce commandement : Prenez et mangez. Buvez-en tous. Faites cela en mémoire de moi. Il ne fait aucun rite sacré de plus, mais pense que ce récit des paroles suffit pour la consécration et le sacrifice. Puis, ce pain azyme, … il le prend par un côté quelconque, l’élève, en rompt une parcelle et la jette dans le calice ; le reste, ill’met dans sa bouche ; et ayant bu de même tout le calice, il demande le baiser de paix aux diacres qui l’assistent, sans rien donner <à personne, lui qui se glorifie des paroles : Prenez et mangez, tous. Buvez-en tous. Cela ne trahit-il pas une contradiction manifeste avec les explications des liturgies qui nous ont été transmises, avec les paroles du Seigneur et avec les propres paroles de ces gens-là ? Et après cela, ils auront l’audace de nous reprocher nos usages, qui sont si conformes aux enseignements des saints, de s’y ingérer et de les interpréter ? » Col. 1089. Puis il explique de la même manière que Cabasilas, c’est-à-dire en faussant comme lui le sens obvie du passage visé, la doctrine de saint Jean Chrysostome, et il termine en s’écriant : « Si ces raisons ne persuadent pas ces hommes d’humeur querelleuse, c’est qu’ils seraient dignes de pitié pour leur double ignorance et pour leur profond endurcissement. » Col. 1089.

Ces citations sont utiles à noter pour avoir « ne idée du chemin parcouru depuis saint Jean Damascène, et même depuis Nicolas Cabasilas ou Simcon de Thessalo nique. La dé’iation de la doctrine traditionnelle, longtemps demeurée en quelque sorte i iconsciente, est maintenant devenue un prétexte liturgique et théologique de plus pour maintenir ia séparation de l’Église byzantine, par rapport à l’Église romaine.

Cette position une fois prise, on s’y tiendra généralement. Nous nous bornerons à signaler les documents officiels ou confessions de foi. La doctrine de la consécration par l’épiclèse se trouve formulée dans les lettres du patriarche Jécémie II aux luthériens allemands (1576-1581), Resp., I, c. x, édit. de Gédéon de Chypre, Leipzig, 1758, p. 49 ; cf. Mesoloras, Sv|j.êo).ixTi, Athènes, 1883, t. i, p. 147 ; dans la confession de foi de Pierre IVIoghila (1642), q. cvii, Michalcescu, D/e Bekenntnisse und die wichtigsten Glaubemzeugnisse der griechisch-orientalischen Kirche, Leipzig, 1904, p. 72, du moins dans la traduction grecque de ce document — car l’original latin rédigé par le célèbre métropolite de Kiev énonçait nettement la doctrine catholique. Échos d’Orient, 1909, t. XII, p. 25 ; E. de Hurmuzaki, Documente privilôre la isloria Romanilor, Bucarest, 1882, t. iv, p. 668, professée alors en Petite-Russie ; dans la déclaration des Grecs au marquis de Nointel, en 1671, Covel, Some Account of the présent greek Church, p. 44 ; dans les actes du synode de Jérusalem, en 1672, Mansi, t. xxxiv, col. 1714 ; Michalcescu, p. 153 ; dans la confession de foi de Denys IV, patriarche de Constantinople (1672), Mansi, ibid., col. 1780 ; dans celle du jiatriarche Chrj-santhe, acceptée par le synode de Constantinople de 1727, Mansi-Petit, t. xxxvii, col. 899 ; enfin, dans la réponse patriarcale et synodale de l’Église de Constantinople à l’encyclique de Léon XIII, sur l’union en 1894. Citons ce dernier document pour montrer sous quel angle l’Église orthodoxe actuelle envisage la question : « L’Église des sept conciles’rcuméniques, une. sainte, catholique, et apostolique, admettait que les oblations sacrées sont consacrées après la prièrc d’invocation au Saint-Esprit, par la bénédiction du prêtre, comme l’attestent les anciens rituels de Rome et des Gaules..Mais en cela aussi