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ÉPICLÈSE EUCHARISTIQUE


mort., P. G., t. L, col. 432 ; Homil. in Pentcc, i, P. G., t. L, col. 458-459 ; In Joa., homil. xlv, P. G., t. lix, col. 253 ; 7n/ Cor., homil. xxiv, P. G., t. lxi, col. 204. Citons un de ces passages qui tiendra lieu de tous les autres : « Que fais-tu, chrétien ? Quoi ! au moment où le prêtre se tient devant l’autel, tendant les mains vers le ciel, appelant l’Esprit-Saint pour qu’il vienne et touche les oblalions ; lorsque, dans le plus profond recueillement et le plus grand silence, l’Esprit donne sa vertu, lorsqu’il touche les oblations, lorsque tu vois l’Agneau immolé et consommé, c’est alors que tu excites du trouble, du tumulte, des querelles, des injures ?… » De coem. etcruce, 3. A lire de telles expressions, l’on pourrait être tenté de croire que saint Jean Chrysostome attribuait réellement la consécration à l’épiclèse et non point aux paroles de l’institution. Il n’en est rien cependant, puisque le même docteur affirme en termes formels et à plusieurs reprises que le prêtre, à l’autel, représente le Christ ; qu’il répète, au nom et en la personne du Christ, les paroles dites au cénacle : « Ceci est mon corps, ceci est mon sang, » et que ces paroles opèrent la transsubstantiation. " Ce n’est pas l’homme qui fait que les oblations deviennent corps et sang du Christ, mais bien le Christ lui-même, crucifié pour nous. Le prêtre est là qui le représente et prononce les paroles, mais la puissance et la grâce sont de Dieu. Ceci est mon corps, dit-il (le prêtre au nom du Cl^rist). Cette parole transforme les oblations. » To-jto (io-j âort tô ffcôiia, çïjijt. l’ovTo TÔ p’iii.a jxerappuÔjxfÇEi ta Tipoxô((i.Eva. De prod. Judæ homil. i, ii, n. 6, P. G., t. xlix, col. 380, 389.

Les théologiens des Églises orientales non catholiques ont cherché à épiloguer sur ce qui fait suite à ce texte dans l’homélie en question. L’orateur y établit une comparaison entre la vertu de la parole : « Croissez et multipliez-vous, « dite par Dieu à l’origine de l’humanité, et celle de la parole ; « Ceci est mon corps, " dite par le Christ au cénacle : "La parole : Crois.srrc/m » ////)/i>r-(wi(s, … bien qu’elle n’ait été dite qu’une fois, continue d’exercer son efficacité et vous donne le pouvoir de procréer des enfants ; il en est de même de la parole : Ceci est mon corps. Prononcée une fois, elle donne, et cela jusqu’à la fin du monde, à tous les sacrifices leur existence et leur vertu. » Ibid. Cependant, il est facile de voir, et le contexte le montre pleinement, que la comparaison ne porte que sur un point, à savoir la vertu conférée à l’homme par une parole divine. Mais pour l’eucharistie, le Christ répète cette parole par le prêtre ; Chrysostome vient de le déclarer expressément, et il y revient plusieurs fois ailleurs, prouvant ainsi préremploircment que l’attribution de la consécration aux paroles du Christ constitue chez lui un enseignement très ferme contre lequel l’ingéniosité même d’un Cabasilas ou d’un Marc d’Éphèse est entièrement impuissante. Il répète, en effet, avec insistance, que la cène de l’autel est la même que celle du cénacle. « C’est le même Christ qui fait l’une et l’autre… Ne l’entendez-vous pas parler lui-même à l’autel par la bouche des évangélistes ? » /nA/a///i., homil. L, 3, /’. G., t. i.viii, col. 507. " Jésus Christ, qui opéra autrefois ces merveilles dans la cène qu’il fit avec ses apôtres, est le même qui les accomplit encore maintenant..N’ous, nous tenons lieu de ministres, mais c’est lui qui sanctifie les oflraiides et qui les transforme. " In Maltli.. homil. lxxxi, 5, ibid., col. 741.’Les paroles que Dieu prononça alors sont les mêmes que celles que le prêtre prononce encore maintenant ; l’obiation est donc aussi la même… In II Tim., homil. ii, 4, P. G., t. lxii, col. 612. Voir f : cho.i d’Orient. 1908, t. XI, p. 101-112 ; 1910, t. xiii, p. 321-322, où j’ai proposé de voir dans la doctrine rhrvsoslomicnne le trait d’union entre lesdeuxl-’glif es

orientale et occidentale actuellement séparées sur la question qui nous occupe. De fait, cette double affirmation, si précise et si nette, de l’efficacité absolue des paroles du Christ et de la vertu consécratrice du Saint-Esprit, me paraît pouvoir suffire, à elle seule, pour imposer et motiver la solution catholique de l’épiclèse.

Il est légitime d’en conclure que l’efficacité des paroles du Sauveur doit se concilier avec la vertu transsubstantiatrice du Saint-Esprit, non seulement dans la pensée de saint Jean Chrysostome, mais aussi dans celle d’un grand nombre d’autres écrivains orientaux dont nous n’avons que des textes attribuant, sans plus, la consécration à la troisième personne de la Trinité. Ainsi en est-il pour saint Éphrem, Adv. scrutatores, serm. x et xl, dans Opéra omnia si/r.-lal., t. III, p. 23, 72 ; pour Pierre d’Alexandrie (t380), dansThéodoret, //.£., IV, 19, P. G., t. lxxxii, col. 169 ; pour Théophile d’Alexandrie, Lettre pascale de l’an 402 traduite par S. Jérôme, P. L., t. xxii, col. 801 ; pour S. Nil († 430), Episl. ad Phil. schol., i, 44, P. G., t. Lxxix, col. 104 ; pour S. Isidore de Péluse (t vers 434), Epist., i, n. 109, 313, P. G., t. lxxviii, col. 256, 364, cf. col. 405 ; pour S. Proclus de Constantinople (t vers 447), De trad. div. liturg., P. G., t. lxv, col. 851 ; pour Eusèbe d’Alexandrie (vers 560), P. G., t. xcvi, col. 300-301 ; pourvnastase le Sinaïte (f après 700), Oral, de sacra synaxi, P. G., t. lxxxix, col. 297 ; voir aussi Narr. Anastasii, n- xliii, dans F. Nau, Le texte grec des récils utiles à l’âme, d’Anastase, p. 8 ; pour Jean Moscinis (f vers 620), Prat. spiril., XXV, cl, P. G., t. lxxxvii, col. 2869-2872, 3016 ; pour l’auteur des Miracula Virg. Khozib., n. 5, dansA/io/cf/a bollandiana. t. vii, p. 366-367, etc.

Les deux affirmations parallèles, également explicites, de saint Jean Chrysostome, nous permettent, croyons-nous, de ne voir dans tous ces passages qu’un des éléments signales par lui, la vertu du Saint-Esprit, mais sans exclure l’autre, à savoir l’efficacité des paroles du Christ. Elles nous autorisent à penser qui", en ce qui concerne la forme essentielle du sacrement de l’eucharistie, la tradition, Hirnîf c/i Or(c/i/, est constituée non point par deux courants parallèles (l’un favorable à l’épiclèse, l’autre aux paroles de l’institution), mais bien par un courant unique dont Ciirjsostome nous »ermet de synthétiser, coordonner et préciser les éléments épars. Dom Touttée, l’éditeur bénédictin des œuvres de saint Cyrille de Jérusalem, faisait déjà une remarque analogue, quand il écrivait ; .S’( ea tantum Chry.’iostomi opéra liaberenms, in quibus salins invocationis tanquam conserrationis causæ meniinit, … nullam eum evanqelicis verbis efflcaciani rcliquisse suspicaremur. Sed his quic diserte dicit, serm. -V.v.v De prod. Juda’, ne ita de eo seiitiamus prohibenmr. Uæcque ostendunt utramque sententiam optime cornponi, … Christo et Spirilii Snncto una operantibus. De dodr.S. Cj/n//i, diss. III, n. 94, /’. G., t. xxxiii, col. 279.

La doctrine de saint Jean Chrysostome doit servir à expliquer, entre autres, la pensée de saint Cyrille de Jérusalem qui, en 348, commentant aux néophytes les rites de la messe, passait directement du.Sanctns à la consécration par la simple phrase suivante où l’on aurait tort, à notre avis, de ne voir seulement qu’une difficulté contre la thèse catholique :.près nous être sanctifiés nous-mêmes par ces hymnes spirituels (le Sanclus), nous supplions le bon Dieu d’envoyer le Saint Ivsprit pour qu’il fasse du pain le corps du (Jirist et du vin le sang du Christ. Car absolument tout ce que touche le Saint-I-’sprit, se trouve sanctifié et changé. " Cat., xxiii, n. 7, /’. G., t. xxxiii. col. 11131116 ; Kirch, Enchiridion hisl., n. 481. ICn dépit de toutes les opinions contraires, je crois que ce texte