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ÉPICLÈSE EUCHARISTIQUE


lepsc d'épiclèsc, le récit de la cène et r ; inainnèsc ; mais lu suite n’a pas 6lé trouvée. Que cette suite renfermât l'épiclèse proprement dite, la chose ne me paraît pas douteuse, étant donné l’analogie que présente la nouvelle anaphore avec les autres liturgies égyptiennes déjà connues. Voir Échos d’Orient, novembre 1909, t. XII, p. 329-33, "), où j’ai exposé les raisons de ce jugement, contrairement aux vues de dom P. de Puniet, qui a publié le manuscrit de Deir Balyzeh à l’occasion du Congrès eueharistique international de Westminster en 1908. Voir aussi dans le même sens un article de Mgr Batifïol dans la Reinie du clergé franfais, 1° décembre 1909, p. 328-350. La seule différence que présente le fragment de Deir Balyzeh, c’est que la prolepse de l'épiclèse y est plus explicite que dans les autres anaphorcs égyptiennes. Voici ce qu’on y lit comme paraphrase du Pleni siinl cœli : « Remplissez-nous, nous aussi, de la gloire qui vient de vous, et daignez envoyer votre Saint-Esprit sur ces créatures, et faites du pain le corps de notre Seignoir et Sauveur Jésus-Christ, du calice le sang de la nouvelle alliance. Car lui-même, Notre-Seigneur Jésus-Christ, la nuit oCi il fut livré, prit du pain… « P. de Puniet, Fragments inédits d’une liturgie égyptienne écrits sur papyrus, dans Tlic Eucharistie Congress, Londres, 1909, p. 382. Ci. Rerue bénédictine, janYior 1909, t. xxvi, p. 46.

2. Les lacunes de certains manuscrits liturgiques. — Ainsi donc, l’universalité liturgique de l'épiclèse, comme formule venant après le récit de l’institution, est certaine pour l’Orient. Le cardinal Orsi ne fait pas difficulté de le reconnaître, op. cit., p. 87-88. Il ajoute même, et avec raison : " Il faut repousser et tenir pour non avenue la conjecture de certains scolastiques qui, pour se tirer plus facilement d’embarras, ont imaginé qu’une interversion se serait produite dans les liturgies : primitivement, l'épiclèse aurait précédé le récit de la cène ; puis, un beau jour, elle se serait trouvée le suivre. » Ibid. L’universalité de l'épiclèse en Orient, telle que nous lavons rapidement indiquée, suffit à renverser cette hypothèse entièrement gratuite.

On ne saurait, d’autre part, prendre pour une exception les deux anaphores éthiopiennes (sur les quatorze publiées par le P. Chaîne), qui, d’après des manuscrits du xvii'^ ou du nviiiie siècle, n’ont pas de formule d'épiclèse, alors que toutes les autres la contiennent très explicitement après le récit de l’institution. Ce sont les anaphores dites de la sainte Vierge et de saint Grégoire d’Alexandrie. Chaîne, La consécration et l'épiclèse dans le missel éthiopien, Rome, 1910, p. 14-17, 22-25. Outre que l'âge récent des manuscrits en question ne peut laisser grande valeur à de tels documents sur le point qui nous occupe, l’absence de l'épiclèse dans ces deux anaphores doit être attribuée à la trop grande liberté que les Éthiopiens se sont depuis longtemps accoutumés à prendre à l'égard des formules les plus sacrées du canon de la messe.

Il nous faut signaler, comme preuves de cette excessive et déplorable liberté, les changements importants qu’ils se permettent dans la formule même du récit de la cène et dans les paroles du Sauveur. Ces paroles sacramentelles peuvent se ramener, d’après les divers manuscrits du Qeddase ou missel éthiopien, aux types suivants, dont quelques-uns présentent de notables altérations.. 1. Hic panis est corpus meum ; 2- Hoc est corpus meum ; 3. Hic est particeps corporis mei ; 4. Hic calix est scmguis meus ; 5. Hic est sanguis meus ; 6. Hic calix e.'it particeps sanguinis mei ; 7. Hic panis (est) cibus justitiæ verus ; 8. Hic calix (est) potus vitæ rerus..'^joutons que l’anaphore dite de Jacques de Saroug a une formule unique pour la

consécration du pain et du viii, et sous forme déprécatoire : le prêtre s’adresse directement à JésusChrist, lui rappelant les actes accomplis par lui à la cène, et lui demande de les renouveler, mais sans toutefois prononcer les paroles dites au cénacle. Vu l’importance tliéologique d’un pareil usage, nous croyons utile de transcrire ici cette formule, d’après la traduction latine du P. Chaîne, op. cit., p. 6, 29-31. Accepisti panem in manus tuas sanctas ut dures apostolis tuis sanctis. Tu qui tune cum gratiarum actione benedixisti, benedic nunc hune panem ; tu qui lune cum benedictione fregisti, frange nunc hune panem. Similiter calicem vino et aqua miscuisti ut dares apostolis tuis puris. Tu qui tune sanetificasti, sanctifica nunc hune calicem ; tu qui tune pnebuisti, præbe nunc hune calicem ; tu qui tune con/unxisti, conjunge nunc hune panem cum hoc ecdiee, sint corpus luum et sanguis tuus. Cette oraison correspond au récit de l’institution et elle est suivie, selon le procédé ordinaire, de l'épiclèse. Mais cette dernière revêt, elle aussi, comme, d’ailleurs plusieurs autres du missel éthiopien, uniforme assez curieuse. Nous la donnons encore comme exemple typique : Reveletur ostium lueis, aperiantur portée glorise, exuatur velamen a fæie Palris et descendat Agnus Dei, considat super hanc mensam sacerdotaleni ante me senmm tuum peccatorem prseparcdam et miltetur « melos » (ce mot melos doit désigner, d’après une explication que je dois au P. Chaîne, un nom de pierre précieuse) gladius igneus terribilis ; ajtpareat super hune panem et calicem qui franget islam oblationem. Chaîne, op. cit., p. 31. Notons encore, dans le même ordre d’anomalies regrettables, que l’anaphore dite de Notre Seigneur a, dans le récit de la cène, la consécration du pain, suivant la formule 1 et la consécration du vin comme il suit : Simililer postquam vinum in calicem miscuisti, gratias agens benedixisti etsanetiricasti dedisiique eis (apostolis) vcruni hune sanguinem tuum qui pro peceatis nostris effusus est. Ibid., p. 29.

Ces exemples font bien voir, au point de vue dogmatique, la nécessité d’un magistère s’exerçant sur les liturgies, et le danger très grave qu’il y a à livrer à la fantaisie des formules d’une telle importance. Mais la date récente de ces altérations, ainsi que leur caractère local et très restreint, ne leur donne pas un grand poids contre l’ensemble des autres documents liturgiques beaucoup plus anciens et universellement répandus. Nairon et Richard Simon ont voulu attribuer plus d’importance à quelques manuscrits de certaines liturgies syriaques (cinq sur plus d’une cinquantaine de ces liturgies : celles qui portent les noms de saint Pierre, du pape saint Sixte, de Mathieu Pastor, de Thomas d’Héraclée et de Denys Bar Salibi), manuscrits où les paroles de Notre-Seigneur se trouvent omises. Ils en ont conclu que les jacobites, plaçant l’essentiel de la consécration dans l'épiclèse, n’avaient pas fait difficulte de supprimer ou d’eflacer les paroles de l’institution. Mais Simon Asséniani, Bibliothecxi orient., t. ii, p. 199, a prouvé que, pour quelques rares manuscrits de ces anaphores qui sont dans ce cas, il en est plusieurs autres qui contiennent ces paroles. Du reste, Renaudot et Assémani ont donné de cette omission des explications très satisfaisantes. A cause de la grande ressemblance qui règne entre toutes les anaphores sjriaques, certains manuscrits renvoient à d’autres pour plusieurs parties communes. Il n’est pas impossible que ce soit le cas ici, mais que, pour une raison ou pour une autre, la référence ait été omise, soit en supposant que le prêtre savait par coeur le passage en question, soit que le copiste se proposât, par exemple, de l’ajouter après coup pour l'écrire à l’encre rouge. Il existe, au surplus, plusieurs commentaires de la messe syriaque, de diverses époques, .