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EUCHITES


d’avoir pactise avec elle ne seraient point admis à gouverner des monastères. On anathematisa aussi le livre Ascétique et tout écrit qui contiendrait quoi que ce fût de la doctrine condamnée. Concile d’Éphèse, act. VII, Hardouin, t. i, col. 1627 ; Mansi, t. iv, col. 1447.

Timothée de Constantinople nous fait connaître un détail que négligea plus tard Photius, à savoir que saint Cyrille d’Alexandrie avait combattu les massaliens. Ceci ne peut Cire qu’une allusion à un synode tenu à Alexandrie, dont le décret du concile d’Éphèse nous révèle d’ailleurs l’existence, et à la lettre à Calosyrius, qui sert de préface au traité contre les anthropomorphites, et où il réfute certains moines qui, refusant de travailler, se faisaient de la piété un manteau de paresse. De recepl. Iieer., P. G., t. lxxxvi, col. 47. D’autre part, nous savons par Photius, /oc. cit., col. 89, que Jean, successeur de Théodose sur le siège d’Antioche, continuant la tradition de ses prédécesseurs, avait écrit à Nestorius au sujet des massaliens ; que quelques années plus tard, vers 440, Héraclidas de Nysse publia deux lettres contre ces sectaires, et que, vers la même époque, Archélaùs de Césarée en Cappadoce condamna vingt-quatre propositions dans lesquelles se résumait leur doctrine.

Seconde moitié du’siècle.

Il en fut de ces lettres

et de ces décrets ce qui en avait été des précédents ; même appuyés d’une loi impériale, ils n’eurent pas raison de la secte. Une trentaine d’années, en effet, après le concile d’Éphèse, l’un de ses membres les plus influents, nommé Lampétius, avait réussi à surprendre la bonne foi d’Alypius, évêque de Césarée en Cappadoce, et, s’étant fait ordonner prêtre par lui, avait été propager son erreur dans le Pont. Mais il n’échappa point à la vigilance de Gérontius, archimandrite de Glitis, qui dénonça sa conduite équivoque et indécente, ses propos abominables tels que celui-ci, 9£p£ (jLi’av y.oprjv ufô ? £|j.à v.où.r^v xal 6et|o) <To ; àYio)T-jV(-jV, ainsi que ses railleries contre la psalmodie chrétienne. Alypius chargea Hormizas, évêque de Gomane, d’instruire l’affaire et de prononcer la sentence. Hormizas le fit, et Lampétius, convaincu de culpabiUté tant par des témoins que par ses propres aveux, fut condamné à être déposé de la prêtrise. L’archevêque de Césarée ratifia la sentence. Or, ce Lampétius avait mis dans un ouvrage de sa main, intitulé A ; aOr|7.r, , Testament, tout le venin de son impiété ; et ce livre fut plus tard l’objet d’une réfutation de la part du monophysite Sévère, futur patriarche d’Antioche. Malgré sa condamnation, Lampétius ne garda pas moins une grande influence sur beaucoup de massaliens, qui prirent son nom et furent appelés lampétiens. Il trouva même des défenseurs juscpi’au fond de l’Egypte parmi les orthodoxes : l’évêque de Rhinocorura, un certain’A'/.-fzîoç, écrivit sur son compte comme s’il n’avait rien dit ou fait de ce qu’on lui reprochait. Mais, quoique son écrit n’eût rien de mauvais en lui-même, Alfius fut déposé comme coupable des mêmes erreurs que Lampétius. Un prêtre alexandrin, nommé Alflus comme l’évêque, fut également déposé pour avoir soutenu le même hérétique, ainsi qu’on l’apprend d’un rapport adressé à Timothée d’Alexandrie, vraisemblablement celui qui est connu sous le surnom de Salifaciole (460-482), par l’évêque Ptolémée, le successeur d’Alfius sur le siège de Rhinocorura. Photius, toc. cit., col. 92.

6 » Du VI’siècle au x". — Sur l’histoire de la secte à partir du vie siècle, nous sommes moins bien renseignés. C’est à peine si l’on relève quelques traits épars sauvés de l’oubli, mais qui témoignent qu’elle continuait à vivre en dépit de tout et à faire toujours parler d’elle sous des noms nouveaux. Il est question alors d’eus tathiens, du nom d’un des chefs, Eustathe d’Édesse, et de marcianiles, du nom d’un certain Marcien, banquier du temps de Justinien (527-565), et de Justin II (565-578). Timothée, De recepI. hseret., P. G., t. lxxxvi, col. 45. « En Arménie aussi, dit Mgr Duchesne, Histoire ancienne de l’Église, Paris, 1910, t. iii, p. 305, les massaliens firent scandale et encoururent des condamnations ecclésiastiques. » Voir là-dessus, écrit-il en note, Ter-Mkrttschian, Die Paulikianer, Leipzig, 1903, p. 39 sq. Il est possible que le Malpat dont il est question dans une lettre d’Isaac de Ninive, Mai, Nova Palnim bibliotlxeca, t. viii, p. 184, soit en rapport avec un épisode édessénien de l’histoire de cette secte. On a rapproché Malpat de Lampétius.

Il est certain qu’en Orient on ne cessa jamais d’avoirles yeux sur ces sectaires et que, le cas échéant, on appliqua à certains d’entre eux les pénalités indiquées par le concile d’Éphèse. C’est ce qui arriva notamment, en 595, pour un prêtre de Chalcédoine, nommé Jean, qui fut condamné comme marcianite. Sur appel fait au pape, saint Grégoire le Grand voulut en connaître ; il instruisit donc l’affaire. Informations prises, il fait part au comte Narsès qu’il ne trouvait pas dans les actes du concile d’Éphèse la condamnation d’Adelphius, de Sava (Sabas) et des autres hérétiques. Episl., 1. VI, epist. xiv, P.L., t. lxxvii, col. 806. Ignorant d’autre part ce que l’on entendait par un marcianite et n’ayant pas même pu l’apprendre des accusateurs de Jean, il proclama l’orthodoxie de ce dernier et le renvoya indemne. Ibid., epist. xv, col. 807-808. Il est à croire que l’accusation ne tenait pas debout et que la preuve ne put être faite, car les Orientaux connaissaient à n’en pas douter l’hérésie des massaliens, quel que fût le nom qu’on lui donnât. Les catholiques savaient pertinemment à quoi s’en tenir. Dès le commencement du viie siècle, Timothée de Constantinoplc, dans son traité sur la manière de recevoir les hérétiques, s’occupe assez longuement d’eux, sans les ranger toutefois par ordre chronologique, puisqu’il cite dans l’ordre suivant les marcianites, les massaliens, les euchites, les enthousiastes, les choreutes, les lampétiens, les adelphiens et les eustathiens. Un peu plus tard, saint Maxime le Confesseur ([- 662), dans son commentaire sur le pseudo-Denys, De ecrl. hier., vi, P. G., t. iii, col. 548, rapporte, toujours sans ordre chronologique, que les lampétiens, massaliens, adelphiens ou marcianites, ce qui est tout un, exigeaient de leurs adeptes trois ans d’abstinence, après lesquels tout leur était permis, même les actes de luxure, puisqu’ils s’étaient ainsi rendus indemnes.

Mais les catholiques n’étaient pas les seuls à poursuivre les massaliens ; les hétérodoxes eux-mêmes les avaient en horreur. Déjà, nous l’avons noté, au commencement du vie siècle, le monophysite Sévère, avant de devenir évêque d’Antioche, avait réfuté le Testament de Lampétius. Son œuvre est perdue ; mais, ainsi que l’afllrme l’auteur de l’article consacré aux euchites dans le Dictionary of Christian biography, un fragment en serait conservé dans une chaîne de New Collège d’Oxford, avec le passage d’un autre ouvrage du même Sévère contre ces hérétiques tiré d’une lettre à l’évêque Solon. D’autre part, Assémani, dans son récit du schisme des nestoriens de Syrie, a noté, d’après des sources orientales, qui vont de 577 à 694, les efforts des nestoriens contre les massaliens, où mention est faite de l’aversion de ces sectaires pour l’usage de l’eucharistie, du jeûne et de la psalmodie. Bibliotheca orientalis, t. iii, p. 172.

Si, dans la suite, avant et après Photius jusqu’à la fin du XIe siècle et au commencement du xiiS les documents se taisent, ce n’est nullement une preuve que la secte ait disparu. Elle continuait à vivre, au contraire, sans grand éclat sans doute, mais offrant un