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FILS DE DIEU


voir surtout ce sens du diceré), mais dans le diccre en tant qu’exprimant un verbe distinct, ayant ainsi une origine réelle et étant une image de soi consubstantielle. Jbid., m. ii. Le Verbe est image par le mode même de son origine, origo ex natura, à la différeiicc de l’amour, origo ex voluntate ; le Fils est encore l’image du Père, dans la spiration active, tr. VIII, m. ii. Mais être image et verbe exprimé semble pour Albert être plutôt concomitant à la génération (communication de nature) que constitutif formel du la génération du Fils de Dieu, q. xxx, m. ii ; q. xxxv, m. ii, a. 2. Avec saint Thomas, nous arrivons enfm à la pleine lumière possible sur le mystère de la Trinité ; on n’a vraiment rien ajouté après lui. Nous allons exposer systématiquement sa doctrine sur la théologie du Fils de Dieu, en notant toutefois quelques détails intéressants de l’histoire ultérieure de ce dogme.

S. Thomas, Sam. Iheol., !, q. xxii, a. 1, 2 (la rrjcession du Fils) ; q. xxxiv, xx.w (le Fils Verbe, imago) ; Conl. g ?iiles, !. IV, c. i-xiv (étude polémique de la divinilé et de la génération du Fils de Dieu) ; De poleiUia, q. iti, x (la puissance genéralive, les processions) ; De verilate, q. i-iv(le Verbe) ; Compendiitm iheoL, c. xxxvii-XLiv ; Suarez, De Trinilate, Paris, t. i, 1. I, c. v-vii (procession) et 1. IX (la peisor.n ? du Fils) ; Salmant.censes. t. iii, tr. VI, disp. I, II, XII, XIII, et tous les manuels de théologie : Franzclin, Salolli, Pesoh, .lanssens, Solesmenses, etc., parmi lesquels il faut signaler le De Deo iino trino de Billot, 3e édit., Rome, 1897.

III. Théologie du dogme de la filiation divine. — I. ExisiEM-E DU fir.s DE DIEU. — 1° Fausses preuves. — 1. La conception du Fils de Dieu dépend évidemment de la conception générale de la Trinité, que nous supposons connue. En Dieu, aucune distinction réelle n’est possible dans l’ordre absolu ; cela est évident pour qui comprend la simplicité divine. Il faut donc écarter d’abord toutes ces expressions des anciens, surtout des grecs, qui donnaient au Fils, non comme appropriation, mais comme propriétés constitutives, les attributs absolus eux-mêmes : sagesse, vérité, intelligence, puissance. Des distinctions réelles ne sont possibles dans la divinité que selon Tordre relatij. C’est là une vérité de foi catholique ; voir le concile de Florence et le XP concile de Tolède, etc., Enchiridion, n. 703, 280 ; et il est clair qu’il n’y a pas de milieu entre l’absolu (ad se) et le relatif (ad aliud). Qu’il y ait, de fait, des relations réelles en Dieu et distinctes et ainsi des réels distincts subsistant dans la nature divine, la foi seule peut nous le dire ; tous les essais de preuve a priori en cette matière sont absolument sans valeur. En particulier, nul ne peut dire si la génération (qui, en Dieu, ne pourrait être qu’immanente) est une perfection mixte ou simple et ainsi est réalisée ou même si elle est possible (positivement) dans l’Etre infini ; ceci vaut contre Albert le Grand, Alexandre de Halès, Richard de SaintVictor, etc.

2. Semblablement, il est évident qu’il y a, en Dieu, action intellecluelle, connaissant et chose connue, idée. Que cette idée puisse être conçue comme parlée en quelque sorte, exprimée et verbe intérieur ; qu’on dise que Dieu en se contemplant se forme l’idée de lui-même et se parle à lui-même, ce sont là des métaphores admissibles, mais, pour la raison, ce ne sont que des métaphores. En effet, tout ce que ces expressions, ces actes divins enferment d’absolu, de perfection positive, tout cela s’identifie en Dieu avec sa substance, sans aucune distinction réelle ; l’Etre divin est Être, agir, connaître (connaissant, objet connu, etc. par identité. Dieu n’exprime donc pas d’idée, de Verbe au sens propre, si on entend par idée et verbe la réalité absolue représentative qui fait connaître. Or notre raison naturelle ne sait en Dieu que cette idée, ce

verbe. Outre ces perfections absolues (Vintelligens et û'intellcclum, qu’il y ait dans Vinielligerc divimim une modalité mystérieuse (absolue) faisant que intelligens et intcllectum soient, de fait, encore dicens Verbuin et Verbum dictum, que, conséquennnent à cette réalité intime mystérieuse, non comme fondement, mais simplement comme exigence, il y ; iit en Dieu des relations réelles opposées, des relatifs, correspondant à dicens Verbum et à Verbum dicUun, la raison ne le voit pas par elle-même ; ce n’est enfermé ni dans la notion d’intelleclion, ni pour nous dans la notion d’intellection divine ou infinie. Et si on objecte qu’en nous l’intellection ne se fait pas sans l’expression réelle d’un verbe ; qu’on peut démontrer la même chose des anges, Co/ ! I. génies, 1. IV, c. xi ; que, d’autre part, notre âme est l’image de la Trinité et que, finalement, on peut établir comme principe absolu que toute intellectîon exprime un verbe, Sum. tlteol., I", q. xxvii, a. 1, il faut réjjondre que la raison de la production d’un verbe dans toute intelkction créée est précisément tirée de l’imperfection de celle-ci (en puissance d’agir accidentel) ; notre âme est une certaine image de Dieu, mais qu’elle soit l’image de la Trinité, même en ce qui est chez elle effet d’impei fiction, on peut le dire après la révélation, pas avant. Saint Anselme avait (ïonc exagéré la portée des considérations augustiniennes en les transformant en raliones neeessca-iw. Saint Thomas n’a jamais suivi là-dessus le docte abbé. Cf. Sum. theol., I-', q. xxxii, a. 1. C’est certainement mal l’entendre que de prendre ses réflexions sur le Verbe divin, comme des arguments a priori, même de simple convenance. Cf. A. Tanquerey, Synopsis, 12e édit., 1909, De Trinilate, n. 112 sq., p. 228 sq. Saint Thomas ne fait pas alors d’argument, mais la révélation étant supposée, il étudie des analogies. La phra-c de la Somme théologique, I", q. xxvii, a. 1 : Quieumquc intelligil ex hoc ipso quod intelligit, procéda aliquid inlra Ipsum, n’est pas, d’après le contexte, un principe universel (même seulement de fait) ; c’est un principe de psychologie humaine, de cette psychologie immanente où il faut chercher l’image des processions divines, à la diflerence de Sabellius et d’Arius qui la cherchaient tous deu.x dans les processions ad extra. Voir Tli. Pègues, Commentaire de la Somme Ihéologiquc, t. ii (1908), p. 31-56, qui, contre la tradition générale tl.omiste (Cajetan, Salmanticcnses, Gonet, etc.j, au prix de subtilités diverses, veut donner une valeur métaphysique à l’affirmation de saint Tl.omas.

3. A fortiori, toutes les considérations mystiques de Richard de Saint-Victor ou de saint Bonaventure n’ont pas de force démonstrative ; mais, radiée posila, Sum. theol., P, q. xxxii, a. 1, ad 2°"', peuvent nous aider à mieux nous représenter cette vie « familiale » divine des trois inellables, que l'étude formelle de saint Thomas pourrait faire concevoir trop abstraitement.

2° La révélation seule peut donc nous faire connaître le F Is de Dieu, son existence et explicitement ou implicitement ce que nous devons savoir ici-bas de sa nature. Nous avons longuement étudié cette révélation, puis les premiers travaux aboutissant à la formuler en dogmes. L’existence en consubstantialité numérique parfaite avec le Père, c’est-à-dire en Dieu, le Dieu du monotliéisme absolu, d’une hypostase ou personne qui est vraiment Fils de Dieu, procédant et engendrée de Dieu le Père, est au centre lumineux de hi révélation chrétienne, comme en un sens elle était au centre obscur, voilé, figuratif de la révélation judaïque. Les Juifs ne reconnurent pas le Dieu qui réconciliait le monde avec son Père, parce que leurs ambitions voulaient un conquérant national. Des sectes parmi les chrétiens essayèrent, même par la force,