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FILS DE DIEU


Filium cui Pater essct ; et ob hoc Filium de Pâtre natum sine initio confitemur. Nec eumden Filium Dei pro eo quod de Pâtre sit genilus, desectæ natviric porliuiiculam nominamus ; sod perfecluin Patreni perfcctum Filium sine diminutione, sine descclione genuissc asseriinus quia solius divinitatis est in ; î(jiialem Filium non habere. Hic etiam Filius Uei natura est Filius, non adoptione (contre les b ;)nosiens qui mettaient l’adoption dans la nature divine elle-même du l’ils, cf. Gcimade, De eccles. dogm., 52), quem Deus Pater nec voluntate nec necessitate genuisse credendus est ; quia nec uUa in Deo nécessitas cadit nec voluntas sapienliam pnevenit.

Les répétitions de ce document tendent à atteindre directement quantité d’erreurs ou de conceptions imparfaites admises autrefois. Le travail qui aboutit à ces belles formules s’accomplit surtout autour de Lérins : saint Vincent, saint Ccsaire d’Arles († 543), etc., et dans les écoles théologiques d’Espagne (saint Isidore de Séville († 636), saint Julien de Tolède (p 690), etc. ; en Afrique saint Fulgence († 533) parscs traités contre les ariens y contribua aussi ; pour l’Italie, on ne peut citer que Boèce. D’ailleurs, même les théologiens espagnols et provençaux ne font que répéter et condenser la doctrine de saint Augustin, et même tous ne se tiennent pas toujours à la hauteur et à la précision de cette doctrine ; il est inutile d'étudier ces fluctuations sans importance. Comme exemple typique, on peut signaler lu discussion soulevée par la formule de saint Julien de Tolède : Voluntas gentil Voluntatcin sicut Sapieniia Sapienliam. Le pape Benoît II ayant demandé des explications, saint Julien répondit au XV concile de Tolède (688), P. L., t. xcvi, col. 525-528 ; le concile suivant de Tolède (XV I", 693) répéta ces explications : Palcr volunlas {qui est volunlas) gentil Filium voluntatem (qui est voluntas). Enchiridion, n. 294-296. Les deux assemblées avaient concédé que cette formule n’est exacte que si on parle directement de la réalité divine, mais reconnu qu’elle était fausse si on considère la similitude psychologique humaine qui ne rapporte pas la volonté au Fils, mais au Saint-Esprit. Même relativement à l’essence divine, l’expression est imparfaite et sera rejetée au IV concile de Latran ; elle est vraie avec l’addition ou le sous-entendu voluntas ou essentiaPater gentil. Saint Augustin avait donc bien fait de ne l’admettre qu’avec réserve. De Trinilale, XV, xx, P. L., t. xLii, col. 1087.

2. Sans parler des commentaires du Vénérable Bède († 735), des traités sur la Trinité d’Alcuin († 804), voir Alcuin, t. I, col. 689, des premiers chapitres du De uniuerso de Raban Maur († 856), des spéculations, à saveur rationaliste et panthéiste, de Scot Ériugène ' (f vers 880), voir ÉmcÈNE, col. 414-415, et après la nuit du x<e siècle, nous arrivons aux débuts de la théologie scolastique.

a) Celle-ci se fia trop d’abord à la dialectique, spécialement au sujet de la Trinité. Sans nous arrêter au trithéisme de Roscelin, nous voyons saint Anselme, son adversaire († 1109), pousser à fond l’analyse du verbe mental pour en démontrer rationnellement l’existence en Dieu : Dieu se comprend, donc il se dit, donc il a un Verbe éternel, consubstantiel, etc. Son analyse reprend la tradition de la forte tliéologie ; elle est plus précise et plus systématique que celle de saint Augustin, et elle est vraiment géniale, bien que lui ajoutant peu pour le fond. Voir surtout le Monologium, c. xxix-xlviii, P. L., t. clviii, col. 182-200. Anselme entrevoit en particulier que le Verbe est engendré, parce qu’il est in simililudine naturæ d’une façon spéciale, c. xxxix-xlii, col. 192-193, à la diŒrence de l’amour, c. lv-lvi, col. 202-204, qui ne dit pas si clairement et immédiatement qu’il possède la similitude de ceux dont il procède ; mais cette différence de clarté dans l’argumentalion n’est pas en core le précis insimililudinem naturæ. On jugera de la pénétration du dogme par l’abbé du Bec à sa solution de cette difficulté : toute perfection absolue, par conséquent l’intelligence, est commune à la Trinité ; donc cette intelligence, qui dit le Verbe dans le Père, doit le dire aussi dans le Fils et le Saint-Esprit et ainsi il y a un Verbe de celui-ci comme du Père, c. lxii, col. 207208. La réponse est celle-ci, c. Lxiii, col. 208-210 : en Dieu tout est commun numériquement, il n’y a qu’une intelligence, donc il n’y a qu’un diccns, donc un seul Verbum diclum. Mais Anselme admet ce principe : inlclligerc non est aliud quam diccre (c’est par lui qu’il a démontré rationnellement le Verbe divin) ; il s’ensuit que, essentiellement, même dans le Saint-Esprit, l’intclligcre divinum est un diccre verbum et que, s’il n’y a pas très dicentes, cependant Ires simul dicunt ; le Verbe dès lors doit procéder du Saint-Esprit ; le docteur voit la difficulté, il la repousse, mais il ne la résout pas : in quo mirum quiddam et inexplicabile video et au c. lxiv, il recourt à la foi qui seule peut croire ce mystère. On voit ainsi la force, le progrès et aussi l’imperfection de la théologie du Fils de Dieu chez saint Anselme. Voir Anselme, t. i, col. 13351336, 1346 ; bibhographie, col. 1349-1350 ; domL. Janssens, De Deo Irino, Fribourg-en-Brisgau, 1900, passim. b) Au pôle opposé du grand archevêque de Cantorbéry, Abélard voulut aussi démontrer la Trinité ; mais n’arrivant pas, lui, par la raison, aux personnes distinctes, il les identifia avec les attributs absolus : puissance, sagesse, bénignité. La sagesse est dite engendrée, parce qu’elle est de la nature de la puissance, comme une espèce dans le genre, ce qui n’est pas vrai de la bénignité, Theol. christ., 1. I, c. i, ii, IV, P. L., t. cLxxviii, col. 1123-1125, 1129-1133 : existence du Fils de Dieu, Dieu et Sagesse, c’est-àdire la sagesse absolue, par la raison, la révélation et dans l’interminable c. v, col. 1133-1166, par les philosophes. Cf. Inlroductio ad theologium, 1. I, vii-xii, col. 989-998 ; sur la « génération » de la sagesse, ibid.. 1. II, xiii-xv, col. 1069-1072 ; Tlieol. christ., 1. IV, col. 1289-1291. Voir Abél.rd, t. i, col. 38-43 (bibliographie), 43-46 (erreurs et condamnation). Abélard créa une véritable école où Guillaume de Couches, entre autres, reprit ses erreurs trinitaires. Voir Guillaume de Saint-Tliierry, De crroribus Guil. de Conchis, P. L., t. cLxxx, col. 333-334 ; Abélard {École d'), t. i, col. 50-51 ; de Rcgnon, op. cit., t. ii, p. 65-87 ; E. Vacandard, Vie de saint Bernard, 3e édit., 1902, t. II, p. 120-142. Saint Bernard eut le mérite de défendre vigoureusement et savamment aussi le dogme trinitaire contre Abélard, comme plus tard contre Gilbert de la Porrée ; mais sa science est dogmatique ; il n’a pas le temps ni le désir de faire de la spéculation théologique qu’il croit plutôt dangereuse. Voir E. Vacandard, ibid., p. 72-73, 146 sq., 345 sq. ; Bernard (Saint), t. ii, col. 759-761, 763-764.

c) Une discussion semblable à celle qu’avait provoquée saint Julien de Tolède s'éleva à la fin du xii'e siècle sur la formule : Substantia divina non est generans neque genila. Richard de Saint -Victor, De Trinilale, 1. VI, c. xxii-xxiii, qui la combattit ; mais P. Lombard, Senl., 1. I, dist. V, la défendit ; là-dessus, l’abbé Joachim de Flore ayant attaqué le Maître Pierre, le l’V<' concile de Latran (1215) canonisa l’opinion du Lombard, Dcnzinger, Enchiridion, n. 431-433 ; voir Petau, Theol. dogm., 1. VI, c. x, xii ; de Régnon, op. cit., t. II, p. 252-266 ; ainsi fut écartée une façon de parler ancienne, mais imprécise. Les deux auteurs cités voulaient défendre, non seulement la doctrine, mais l’expression même des anciens ; ils avaient tort, car la nature peut être dite communiquée, etc., mais non engendrant, ni engendrée, ce qui ne convient proprement qu'à la personne du Père et du Fils.