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FILS DE DIEU


apparu récemment, n’est pas cependant récent comme les mille dieux du paganisme, mais qu’il est la plus ancienne des œuvres du démiurge, upEcrêv-raTov uâvxwv Toiv Sï-, [j.iojpy/iiJ.iT(ov ; mais le superlatif a sans doute un sens simplement comparatif : il est plus ancien que… n en va autrement de Periarch., I, iii, 5, t. xi, col. 150, texte qui a toujours été si fort reproché à Origène, puisqu’il étend l’action du Père à tous les êtres, celle du Fils, « inférieur au Père » , aux seuls ao^ix- ;., et celle du Saint-Esprit, encore inférieur au Fils, aux seuls justes. Le texte a déjà été expliqué. Voir Esprit-Saint, col. 710. Il s’agit, dans l’unité de l’action divine indivisée, de considérer la part spéciale attribuée aux personnes ; Origène parlerait ici comme nous quand nous disons : le Père créateur, le Fils rédempteur (des hommes), l’Esprit sanctificateur (des justes) ; Huet, qui est sévère pour Origène, excuse ce texte. Loc. cit., t. XVII, col. 786-790.

En définitive, pour la doctrine de la divinité du Fils, qui est certainement orthodoxe, dans sa substance, mais même dans sa partie secondaire, Origène semble être arrivé au plein consubstantiel sans véritable subordinatianisme : on peut rester d’accord à ce propos avec Pamphile, Athanase, Basile, contre les adversaires de l’origénisme (et non plus d’Origène), Épiphane, Jérôme, Théophile d’Alexandrie. Sa langue, subissant l’influence traditionnelle, excgétique ou théologique, reste cependant çà et là subordinatienne ; et sa pensée même, pensée grecque qui n’aperçoit pas assez la nature et trop exclusivement les personnes, n’est pas parfaitement cclaircie au sujet de la consubstantialité, entrevue tout entière, quoique confusément. La consubstantialité ne sera complètement claire qu’après les travaux de saint Augustin et de la scolastique.

F. Prat, Origène, le Ihéologien et Vexégèle, Paris, 1907, p. xx-xxviii, 29-68 (cf. Éludes, 1905, t. cv, p. 585-592) ; J. Tixeront, op. cit., t. i, p. 284-290 ; Harnack, Dogmengeschichte, 4e édit., 1909, t. i, p. 650-697 ; J.Schwane, op. ei(., t. I, p. 179-187 ; Freppel, Origène, 2 in-S » , Paris, 1868, leç. XTi et XIII, t. I, p. 254-302 ; Huet, Origeniana, P. G., t. xvii, col. 709-796 ; A. Vincenzi, In S. Gregorii Nijsseni et Origenis scripta et doctrinam nova recensio, 4 iii-8°, Rome, 1864, t. II, c. VIII -XIII, et les ouvrages de Redepen’iing, Ch. Bigg, etc., indiqués dans la bibliograpliie générale de l’art. Alexandrie (École d'), t. i, col. 823-824, et mieux à Tari. Origène du Dictionnaire de la Bible, t. iv, col. 1888-1889.

4° Le sabellianisme et le subordinatianisme en Orient et leur élimination. — Origène eut plusieurs fois à réfuter le modalisme ; malheureusement il le fit en excédant dans le sens opposé, quant à l’expression du moins, sinon quant à la doctrine d’un subordinatianisme mitigé. Ce sont les deux erreurs à étudier en Orient après lui jusqu'à la controverse arienne, en constatant, en même temps, le progrès de la doctrine orthodoxe.

1. Sabellius était libyen, de Ptolémaïs ; après sa condamnation à Rome, il revint peut-être dans son pays ; en tout cas, son hérésie, dans la première moitié du iiie siècle, y fit de grands ravages dans toute la Pentapole et de là se répandit en Egypte et même en Arabie. Origène fut même appelé (vers 244) dans ce dernier pays pour y combattre l'évêque de Bostra, Bérylle, qui niait la préexistence du Christ et le déclarait Dieu de la divinité du Père renfermée en lui (patripassianisme ou adoptianisme). Eusèbe, H. E., vi, 33, n. 1. Origène le convertit. Quoi qu’il en soit, l’hérésie libyenne était bien du modahsme. S. Athanase, De sent. Dionys., 5 ; Exposit. fidei, 2 ; Oral. cent, aricm., iii, 36 ; iv, 2, 3, 9, 13, 15, 17, 25 ; S. Hilaire, De Trinitate, iv, 12 ; S. Épiphane, Hær., lxii. Au fond, t'était le principe unitarien prêché à Rome, mais avec des exphcations trinilaires spéciales qui substituaient

le modalisme proprement dit, plus simple, au patripassianisme ; ces modifications, dernière phase de l’enseignement de Sabellius, expliquent que le modalisme ait été appelé sabellianisme. Dieu est donc en lui-même simple monade personnelle ; mais il se révèle au dehors sous des aspects divers : créateur, législateur ancien, il est Père ; incarné et rédempteur, il est Fils, . ; î(.)7ràTW5 ; sanctificateur, il est Saint-Esprit ; ce ne sont que des aspects, des modalités, des rôles, uf.ocroj7ra, d’une même réalité, èv p.iy.-jTroo-TotTïi ; npùrniino'/, employé à Rome par saint Hippolyte dans le sens latin de personne civile distincte, fut donc employé par Sabellius dans le sens grec de personnage, et cet emploi lui donna en Orient une couleur originelle hérétique qui le rendit longtemps suspect. Ces trois modalités divines ne sont même que transitoires, bien que strictement divines, à la différence du dualisme patripassicn Dieu et Fils-homme, aspects de l’action divine qui se répand en quelque sorte et se dilate, puis se concentre à nouveau. Voir J. Tixeront, op. cit., t. i, p. 406-408.

2. Les docteurs alexandrins, disciples et successeurs d’Origène, surtout les patriarches de ce « diocèse » d’Alexandrie où se répandait l’erreur, continuèrent la lutte contre elle. Tel fut bientôt le cas de saint Denys le Grand (entre 248 et 264), qui fut cause d’une manifestation importante dans l’histoire du dogme du Fils de Dieu.

Denys avait écrit plusieurs fois contre les sabelliens ; une lettre entre autres à Syxte II (257), Eusèbe, H. E., Yn, 5, sur les ravages de leur hérésie, avec une copie de sa réfutation. Vers 259, il écrivit une nouvelle lettre à deux évêques de la Pentapole libyenne, Ammonius et Euphranor, qui choqua quelques esprits et le fit dénoncer au pape saint Denys, son homonyme. Celui-ci, après avoir pris une délibération synodale, expédia deux lettres en Egypte, une pubhque exposant la doctrine orthodoxe, une privée au patriarche lui demandant des exphcations. Le patriarche répondit par un premier message, puis plus longuement par un traité en quatre livres, "lO.syzo ; xai 'ATtoXoyîa, où il se justifia pleinement. Les faits ont été conservés par saint Athanase, De sentent. Diomjsii ; De decretis nicœn. syn, 26, et par saint Basile, Epist., ix, 2 ; De Spiritu Sando, xxix, 72, P. L., t. v, col. 117-128. On avait reproché à l'évêque d’Alexandrie de nier l'éternité du Fils, de le séparer du Père en ne faisant pas le Christ ôu.oojtrco ; T(o 08W, et d’en faire une créature, Tcor^jj-a, qui n'était pas avant d'être faite, étrangère au Père dans son essence, %ax' o’jma., comme le vigneron et sa vigne, le charpentier et sa barque : c'était déjà de l’arianisme, à peine le dithéisme d’Hippolyte. Comme Calixte, qu'à trente ans de distance il continue et développe manifestement, saint Denys de Rome, en face de pareilles propositions, établit la doctrine orthodoxe, en condamnant d’abord le modahsme et le subordinatianisme rigide qui conduit au trithéisme : on ne peut admettre en Dieu « trois hypostases divisées, étrangères l’une à l’autre, c’est-à-dire trois divinités ; » puis en affirmant le consubstiuitiaUsme : il faut, au contraire, concevoir la Trinité « comme au sommet de tout, unifiée, ramassée, rassemblée en un seul, le Dieu créateur. » Et par conséquent « il est intolérable de dire que le Fils est une chose faite et qu’il est devenu après n’avoir pas été, car il est éternellement engendre, éternellement dans le Père, » comme son Verbe, sa sagesse, sa puissance. Le texte de Prov., viii, 22, signifie : le Seigneur m’a préposé (i-Éjrotjs) sur toutes ses œuvres. Comme conclusion, « il ne faut pas diviser en trois divinités l’admirable et divine monade m diminuer par le mot de création la dignité et l’immensité du Seigneur ; mais il faut croire en Dieu le Père tout-puissant, et en Jésus-Christ, et au Saint-Esprit, et à