Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 5.2.djvu/546

Cette page n’a pas encore été corrigée
2391
2392
FILS DE DIEU


dans le désert : « Si lu es le fils de Dieu, » Matth., IV, 3, 6 ; Luc, iv, 3, 9 ; les démons par la bouche des possédés à Gadara, Matth., viii, 29 ; Marc, v, 7 ; Luc, VIII, 28, et d’une façon générale, Marc, iii, 12 ; Luc, IV, 41 : (I les esprits impurs en le voyant se jetaient à ses pieds et criaient : Tu es le fils de Dieu ; » puis parmi les hommes, les ennemis de Jésus pour l’inlcrroger (Caïphe, voir plus loin), pour l’accuser devant Pilate, Joa., xix, 7, ou pour le railler, Matlh., XXVII, 40, 43 ; le centurion sur le Calvaire déclare, d’après Matth., xxvii, 54 ; Marc, xv, 39 : « Cet homme était fils de Dieu » (sans article), et d’après Luc, XXIII, 47 : « C'était un liomme juste ; » le précurseur, le premier sans doute en public, avait, d’après Joa., I, 34, découvert en Jésus « le Fils de Dieu ; » à sa première rencontre avec le Messie, Nathanaël subjugué dit, Joa., I, 49 : « Tu es le fils de Dieu, tu es le roi d’Israël ; » un groupe de disciples s'écria dans la barque après la tempête si majestueusement apaisée : « Vraiment tu es fils de Dieu, » Matth., xiv, 33 ; enfin saint Pierre, dans cette scène capitale de Césarée de Philippe, d’après Matth., xvi, 16, répondit à Jésus : « Tu es le Christ, le fils du Dieu vivant, » tandis que les passages parallèles, Marc, viii, 29 ; Luc, IX, 20, ont simplement : « Vous êtes le Christ ; le Christ de Dieu, » cf. Joa., vi, 70 ; avant les hommes et les démons, l’ange de l’annonciation avait appelé l’enfant de la Vierge « Fils de Dieu, Fils du Très-Haut, » Luc, I, 32, 35 ; enfin, pour laisser à part Jésus luimême, le Père céleste répéta au baptême, Matth., 111, 17 ; Marc, i, 11 ; Luc, iii, 22, et à la transfiguration, Matth., XVII, 5 ; Marc, ix, 7 ; Luc, ix, 35 ; cf. II Pet., I, 17 : « C’est lui, mon fils bien -aimé, » àyaTi/iTÔ :, c’est-à-dire unique. Cf. J. Lebreton, op. cit., p. 244, n. 2.

(J. Mais nous devons spécialement faire attention aux attestations personnelles de Jésus à cause de leur nombre et de leur importance. En cinq circonstances au moins, Jésus s’est déclaré cxplicilcrnent Fils de Dieu, et puis en beaucoup d’autres implicitement, à ne considérer que les Synoptiques. Dans la remarquable glorification du Père, relatée Matth., XI, 25-27 ; Luc, x, 21-22 : « Je te loue, Père… Tout m’a été confié par mon Père et personne ne connaît le Fils si ce n’est le Père ; personne non plus ne connaît le Père si ce n’est le Fils et celui à qui le Fils veut le révéler. » Dans la parabole des vignerons homicides, Marc, xii, 1-9 ; Matth., xxi, 33-41 ; Luc, XX, 9-16, le maître de la vigne, après avoir en vain envoyé divers serviteurs aux vignerons rebelles, avait encore « un fils b : en-aimé ; » il l’envoya le dernier vers eux « en se disant : ils respecteront mon fils, » mais ces vignerons le voyant se dirent entre eux : « C’est l’héritier ; allons, tuons-le et l’héritage sera pour nous… » Dans cette annonce du jugement déjà étudiée : « Ce jour, nul ne le connaît, ni les anges, ni le Fils, si ce n’est le Père. » Marc, xiii, 32. Devant le sanhédrin, en cet instant solennel du jugement qui devait conduire Jésus à la mort, le grand-prêtre demande : « Es-tu le Christ, le Fils du (Dieu) Béni ? » Jésus lui dit : « Je le suis, et vous verrez le Fils de l’homme assis à la droite de la puissance venant avec les nuées du ciel. » Marc, xiv, 61-62. De même en saint Matthieu, xxvi, 63-64 : « Je t’adjure par le Dieu vivant de nous dire si tu es le Clirist, le Fils de Dieu ; » Jésus répondit : « Tu l’as dit, et de plus je vous le déclare : vous verrez…, etc. » Saint Luc, xxii, 66-71, distingue plus nettement deux questions ; on dit d’abord au Christ : « Si tu es le Christ, dis-lenous ; » Jésus répond : « Si je vous le dis, vous ne me croirez pas, etc., mais désormais le Fils de l’homme sera assis à la droite de la puissance de Dieu, » et tous de répliquer : « Tu es donc le Fils de Dieu ? »

et lui leur dit : « Vous le dites, je le suis. » Cf. Joa.,

XIX, 7 ; Matth., xxvii, 40, 43. Enfin après sa résurrection, dans la formule baptismale, Jésus fait régénérer les hommes « au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. » Matth., xxviii, 19.

y. Ces quelques textes explicites ne doivent pas être isolés d’une foule d’autres à sens implicite très suggestif. D’abord, Jésus s’est déclaré fils d’un autre que David, Marc, xii, 35-37 ; Matth., xxii, 42-48 ; Luc, XX, 41-44, c’est-à-dire fils de Dieu. Voir Lepin, op. cit., p. 304-307. Puis nous pouvons faire état de tous les textes où Jésus parle de son Père : il le fait très souvent et toujours avec un accent spécial. Luc, II, 49 ; Matth., xi, 25-27, et Luc, x, 21-22 ; Matth., XII, 50 (cf. Marc, iii, 35, et Luc, viii, 21, qui mettent Dieu au lieu du Père) ; Matth., xviii, 10 ;

XX, 23 ; XXV, 34 ; xxvi, 29 (cf. Luc, xxii, 18) ; Matlh., XXVI, 39, et Marc, xiv, 36, et Luc, xxii, 42 ; Matth., XXVI, 53 ; XVI, 27, et Marc, viir, 38, et Luc, ix, 26 ; Matth., XV, 13 ; xviii, 35 ; vii, 21 ; x, 32-33 (cf. Luc,

XII, 8) ; xvi, 17 ; xviii. 10, 19 ; xxiv, 36, et Marc,

XIII, 32 ; Luc, xxii, 29 ; xxiii, 46 ; xxiv, 49 ; Mattli., xxviii, 19.

On remarquera que le premier Évangile met plusieurs fols « Père » là où les deux autres ont Dieu, aussi nous ne ferons pas argument de ces textes Isolés, cf. J. Lebreton, op. cit., p. 212, n. 1 ; mais en dehors d’eux, il y en a assez pour établir que Jésus parle souvent de « son Père » et, avec un accent tout spécial, car il distingue toujours nettement la façon dont Dieu est son Père et celle dont il est le Père de tous les autres hommes ; il ne dit jam.iis avec eux « notre Père » , bien qu’il leur enseigne à eux à le dire, Matth., vi, 9 ; Luc, xi, 2 ; mais Il dit « votre Père » , Matth., vii, 11, et Luc., xi, 13 ; Matth., vi, 32 ; « mon Père vous donnera… » Luc, xxii, 29 ; xxiv, 49 ; Marc, VIII, 38 ; Matth., x, 33 ; xxv, 34 ; xxvi, 29. Sur l’authenticité de ces différentes expressions, contestées par N. Schmidt, art. Son of God, dans Ëncyctopedia biblica, col. 4696, voir Dalman, Die Worte Jesu, p. 158, 230. Enfin on notera que Jésus recommande à ses disciples de devenir des fils du Père céleste, Matth., v, 44-45, et même plusieurs fois il insinue qu’ils ne seront vraiment fils que dans le roj’aume descieux, Matth., v, 9 ; Luc, xx, 36, tandis que lui est le Fils absolument et comme par nature.

b. Critique de ces Icxles. — Jésus s’est déclaré et a été déclaré Fils de Dieu certainement d’une façon suréuilnente, unique : il suffit de lire les textes pour en être convaincu et tout le monde eu convient. Mais, bien que suréminente, sa filiation reste-t-elle dans l’ordre de nos filiations adoptives, à nous, simples créatures, ou bien est-elle d’un ordre tout différent et donc strictement divin, une filiation naturelle divine ?

<x. Pour décider cette question, il nous faut d’abord résoudre ce qui nous semble une vraie antinomie qui trouble la cohérence de beaucoup de dissertations sur le même sujet. Voici l’antinomie : d’après nos études sur l’Ancien Testament et la théologie judaïque, il a fallu conclure qu’au temps évangélique, le titre n Fils de Dieu » n'était pour personne, et pas seulement pour Jésus-Christ, un titre, un nom courant, un synonyme de Messie ; on s’accorde de plus en plus à le dire, cf. F. Prat, op. cit., t. ii, p. 209-210, et l’histoire évangélique confirme cette conclusion, car le peuple, même lorsqu’il acclame Jésus comme son Messie, jamais ne le nomme Fils de Dieu (pour les deux ou trois textes discutés, voir plus loin) ; ainsi que l’histoire contemporaine, car de tant de faux Messies qui se levèrent jusqu’au ii'e siècle, pas un ne s’avisa de s’appeler Fils de Dieu, jusqu'à Bar Kocheba le Fils de l'étoile, que soutint le grand rabbi Alviba. Et cependant personne ne défend plus la