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FILS DE DIEU


raît déjà dans Osée, bien qu’il soit impossible de lui assigner des dates fixes ; le travail de remaniements n'était pas achevé lors de la traduction des Septante, qui mirent plusieurs fois ange dans ? leur grec, alors que l’hébreu disait Jahvé.

Sans entrer ici en aucune discussion, nous préférons l’explication de M. Touzard, La religion d’Israël, dans Où en est l’iiisloire des religions ? t. ii, p. 46-47. Les anges apparaissaient et Dieu apparaissait aussi, fréquemment, sous forme sensible, dans l’Ancien Testament ; ordinairement, c'était sous forme humaine avec cjuelque cliose sans doute de céleste. On savait bien que cette forme éphémère n'était pas Dieu lui-même, et cependant c'était l’apparition de Dieu ; comment appeler cette forme, cette apparence, à la fois Dieu et distincte de Dieu ? Une même appellation male'âk, ange, à cause sans doute de la plus grande fréquence des apparitions angéliques, désigna toute apparition d'être céleste. Mais pour les apparitions de Dieu, on dit male'âk Jahvé ou male'âk Elohim. Les médiations d’anges proprement dits, qui se multiplient après l’exil, n’ont rien à voir avec les apparitions du male'âk Jahvé. Pour celui-ci, tout au plus, en certains cas, insista-t-on pour attribuer à Dieu directement les actes plus spirituels et à son male'âk su forme humano-angélique d’apparition, les actes plus matériels, par exemple, épisode de l'âncssc de Balaam. Num., XXII, 21-35. Concluons cependant avec saint Thomas, qui donne bien la raison providentielle de toutes ces apparitions angéliques et surtout divines, Siim. Iheol., I » , q. li, a. 2, ad 1° '", fiiil quoddam figurale indiciiim qnod Verbiim Dei assumplunim essel corpus humanum. Omnes enim npparitiones Veteris Testamenti ad illam apparilioncm ordinaiæ fuerunl, qua Filius Dei apparuit in carne. Cf. la belle élévation de Bossuet, Élévalions sur les mystères, x « semaine, vi « élévation, bien que plus inspirée des Pères apologistes que de saint Tliomas.

Pour l'étude des textes, J.-M. Lagrangc, L’a/ije de Jalwé, dans la Revue biblique, 1903, p. 212-22.5 ; 1908, note, p. 497499 ; A. B. Davidson, art. Angel, dans Diclionanj of Ihe Bible, t, I, p. 91 ; M. Hetzenauer, Theologia biblica, Fribourg-en-Brisgau, 1908, t. i, p. 469-472 ; A. Vacant, art. An(jc. dans I3 Dictionnaire de la Bible, t. i, oui. 586-587 ; M. Lepin, Jésus Messie et Fils de Dieu, Paris, 1906, p. 49 sq. ; W. P., Bcilrâye zur JMiung der Maleach-Jahve Fraye, dans Der Katholik, 1882, t. 11, p. 149-170 ; J. Touzard, La religion d’Israël, dans Où en est l’histoire des religions ? t. 11, p. 46, 47. 118 ; P. IMantagne, Revue biblique, 1894, p. 232 sq. — Pour l'étude théologiquo, Franzelin, De Deo trino. th. vi, n. 2, p. 99-106 ; J. Souben, Xouvelle théologie dogmatique, t. ii, Les personnes divines, p. 13-14 ; Vandenbrœclc, Dissertatio theologica de iheophaniis Veteris Testamenti, Louvain, 1851 ; M. J. Scheeben, La dogmatique, Irad. Belet, Paris, 1880, t. II, p. 535-537. — Pour les interprétations patristiqucs, Petau, De Trinilale, 1. VIII, c. 11 ; d, >ni Legeay, L’ange et les théophanies dans la S. Écriture d’après la doctrine des Pères, dans la Revue thomiste, t. x (1902), p. 138-158, 405-424 ; t. XI (1903), p. 46-69, 125-154 ; François de Paule Blaclière, S. Augustin et les théophairies de l’Ancien 2'estament, dans la Revue ajigustinienne, t. I (1902), p. 595-613 ; de Régnon, fjiules de théologie ponlive sur la sainte Trinilé. 4 In-S » , Paris, 1892-1898, t. iii, p. 88-101, 1.35-1 : 19 (Pères grecs) ; enfia de bons chapitres dans Giiioulhiac, Histoire du dogme catholique, 2 iii-S", Parii, 1832, t. i, p. 506-522 ; t. II, p. 2 : 9 313.

3° Le Messie, Fils de Dieu. — Le Messie, c’est réellement de fait la seconde personne de la sainte Trinité. Mais nous avons dit que formellement ces deux notions ne sont pas identiques ; Jésus Fils de Dieu ne signifie pas simplement Jésus-Clirist. A rencontre de beaucoup d’exégètes rationalistes, nous le mettrons peu à peu en lumière en étudiant l’Ancien Testament, la théologie judaïque, puis le Nouveau Testament.

On sait l’importance capitale du messianisme dans l’histoire du peuple juif. Nous avons à voir ici seulement si les conceptions du Messie ont influé, oui ou non, et de quelle manière, sur le développement de la doctrine des personnes divines. « Nous devrons reconnaître d’ailleurs que cette action a été peu étendue ; c’est par la doctrine de la Sagesse, beaucoup plus que par le messianisme, que le peuple juif a été préparé à la révélation de la Trinité. » J. Lebreton, op. cit., p. 120.

1. La filiation divine du Messie.

Les textes sont assez rares dans lesquels Dieu appelle le Messie son fils ; nulle part, l’expression technique « fils de Dieu » ne lui est directement appliquée.

a) Les anges sont excellemment et sans restriction des fils de Dieu. Ps. xxviii, 1 ; Job, i, 6 ; ii, 1 ; xxxviii, 7. Parmi les hommes, la qualité de fils de Dieu fut d’abord attribuée, dans l’Ancien Testament, à la nation israélite qui, comme telle, avait été adopté..' et même créée par Jahvé ; ainsi tous les Juifs étaient des fils de Dieu, bien que parfois très indignes. Exod., IV, 22-23 ; Deut., xiv, 1-2 ; xxxii, 6-20 ; Ose., XI, 1-4 ; Is., I, 4 ; xxx, 9 ; xliii, 6 ; xlv, 11 ; lxiii, 8, 16 ; Lxiv, 8 ; Jer., iii, 4, 14, 19, 22 ; xxxi, 9, 20 ; Ps. cm, 13-14 ; Mal., i, 6 ; 11, 10. Après les divisions causées par l’influence grecque, seuls les justes furent vraiment des fils de Dieu. Eccli., xxiii, 1-4 ; li, 10 (d’après le texte original, fragment hébreu) ; Sap., Il, 13-18 ; V, 5 ; cf. xiv, 3 ; xviii, 4.

Mais longtemps auparavant, David et sa race avaient été élevés par Jahvé à une filiation divine toute spéciale, qui nous conduit à la filiation messianique. II Sam., VII, 14 : Ego ero ei in Palrem et ipse eril mild in filium, avec les textes parallèles de I Par., XVII, 11-14 ; XXII, 10 ; xxviii, 6 ; Ps. lx.xxviii, 20-30. Évidemment, il s’agit d’une filiation à part, qui n’est ni celle de la nation juive, ni celle d’un juste quelco)ique. Littéralement, les textes l’attribuent à David et à SalomDU, puis en quelque manière à leur race, mais il n’y a pas de doute que ces personnages ne soient des types du Messie, et que ces textes ne doivent donc aussi s’entendre du fils de David par excellence, du Messie. C’est l’interprétation autorisée de Heb., i, 5 ; de plus cette filiation ne fut pas de fait accordée à tous les descendants de David ; ce n'était donc pas un équivalent de la dignité roj’ale, ce fut plutôt un privilège personnel de David, puis de Saloiuon, et de leur race en tant que, à la fois, littéralement davidique et typologiquement messianique. Voir J. Lagrangc, loc. cil. Ainsi on ne peut guère ici rapprocher de ce titre de David et de sa race, encore moins de la filiation divine toute messianique que nous allons étudier, les titres de fils de Dieu, accordés à leurs rois par les Sémites en général et les Assyriens, et il est impossible de les identifier. Voir J. Touzard. L’argument prophétique, dans la Revue pratique d’apologétique, 1908, t. vii, p. 102 ; Dalman, 0/). cit., p. 2'23 sq.

b) Le Messie, comme fils de David, devait excellemment être tenu par Dieu comme son fils ; un texte très important, sur lequel il faut nous arrêter un peu, parle directement de cette filiation divine du Messie ; directement, disons-nous, car il faut, à peu près certainement, tenir pour littéralement et totalement messianique le Ps. 11, où se trouve ce texte. Cf. J. Corluy, loc. cit. Voir Act., iv, 25-28 ; xiii, 33 ; Heb., i, 5 ; V, 5 ; Apoc, xii, 5 ; xix, 15, etc. Pour la tradition judaïque, voir Reinke, Messianisclie Psalmen ; Edersheim, The life and limes of Jésus liic Messiah, t. 11, p. 716 sq. ; pour la tradition patristique. voir Patrizi, Cenio salmi Iradoltie commentali. Home, 1875. Ce psaume décrit la lutte et le triomphe du Messie contre les rois de la terre ligués contre lui ;