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EUCHARISTIQUES (ACCIDENTS]


et hœc est sententia apostoli, doclorum antiquorum et sanctorum et in ista materia doctores novelli vel conlradicunt inter se, vel non dant su/Jicientem hujus sacramenti descriptionem. Ibid., p. 54. Quand l'évêque de Lincoln voulut user de rigueur contre le prédicateur, il dut reculer devant la populace qui prit ouvertement parti pour 'e tribun wycliliste. 1 ! fallait sévir de peur de voir le mal s'étendre davantage.

Guillaume de Courtenay, après avoir pris conseil de ses suffragants et s'être aidé des lumièi-es de quelques professeurs de théologie, condamna donc une première série de dix propositions de Wyclif : damnatis, dit Walsingham, prsediclis conclusionibus hserelicis et crroneis, ibid.. p. 60 ; ce sont, à part quelques légères différences dans l’expression, les dix premières propositions, condamnées au concile de Constance, dans la session VIII, à la date du 4 mai 1415. Les trois premières concernent le dogme de l’eucharistie ; la seconde concerne spécialement les accidents eucharistiques. La première et la troisième avaient. déjà été censurées par Guillaume Berton, chancelier de l’université d’Oxford, sur le conseil de douze professeurs des facultés de théologie et de droit canon, dont la plupart appartenaient au clergé régulier. Ant. de "Wood, Hist. et antiq. univ. Oxoniensis, }. I, an. 1381. Berton les avait notées comme erroneas atque determinationibus Ecclesise répugnantes, il déclarait leurs contradictoires veritates catholicas et ex dictis sanctorum et determinationibus Ecclesise manifeste sequentes. Fasciculi zizaniorum, p. 111. Lui et ses collègues songeaient évidemment au décret Firmiter du IV" concile de Latran. La condamnation du chanceher avait été proclamée en présence de Wyclif, pendant une leçon qu’il donnait au collège des augustins ; troublé, il s'était contenté de dire que ni le chancelier ni ses complices ne le feraient changer d’avis. En vrai hérétique, il fit appel à la puissance séculière et comme le duc de Lancastre, cette fois, ne le soutint que mollement, il fit une rétractation longue et embarrassée, qui, en réalité, ne pouvait tromper personne et ne faisait que révéler davantage l’esprit retors et obstiné qui le guidait. Fasciculi zizaniorum, p. 115. Cette rétractation est probablement celle dont Henri de Knyghton a inséré une sorte d’abrégé en im anglais aux allures archaïques dans le V « livre de son De evenlibus Anglise. Twysden, Hist. anglic. scriptores, Londres, 1652, t. x, col. 1240. Elle aurait eu lieu à Oxford, à une date que le chroniqueur n’indique pas. En prenant pour une rétractation ce qui n’est qu’une affirmation renouvelée des mêmes écarts doctrinaux, le bon chanoine de Leycester donne la mesure de sa naïveté. Thomas Nctter juge bien mieux le factum de l’hérésiarque, quand il écrit : Incepit confessionem quamdam facere, in qua continebaiur omnis error pristinus, et il montre une vraie connaissance des œuvres de Wyclif quand il ajoute : Sed velut hærelicus perlinux refulavit omnes doctores de secundo millenario in materia de sacramento alturis et dixil omnes illos errasse, præter Berengarium cujus opinio damnatur. De consecratione, dist. II, Ego Berengarius. C’est bien cela ; pour Wyclif, les grands docteurs scolastiques du xiiie siècle sont inexistants ; ni le Lombard, ni Thomas, ni Bonaventure ne méritent la moindre considération. L'Église romaine est dans l’erreur, depuis certaine interprétation de l’abjuration deBérenger ; Innocent III et Raymond (Wyclif désigne sans doute le canoniste saint Raymond de Pennafort) ont prévalu sur l'Évangile. Fasciculi, p. 13 !. De son point de vue, Wyclif avait raison ; l’inllucnce du grand pape et du théologien, nourri des doctrines de l’université de Paris, que fut Innocent III, contrbua à faire définir le dogme de Ui transsubstantiation et à faire régner dans les écoles la théorie des accidenlia sine subjecio, exposée dans son De mysteriis

missæ, qui devint très tôt un argument d’autorité en faveur de la doctrine commune.

Dans un concile provincial, réuni à Londres le 19 mai 1382, par les soins de Courtenay, et connu dans l’histoire sous le nom de concile du Tremblement de terre, vingt-quatre propositions extraites des œuvres de Wyclif, dont les trois premières reparaîtront en ordre pareil à Constance, furent condamnées, quelquesunes comme hérétiques, d’autres comme erronées et en opposition avec les déterminations de l'Église. La lettre de Guillaume au carme Pierre Stokys ne spécifie pas la censure méritée par chaque proposition en particulier. Fasciculi, p. 275. Quand, un peu plus haut, dans la pièce officielle que l’archevêque communique à Stokys, il appelle les conclusions condamnées hxrelicas alque falsas, olim ab Ecclesia condemnatas (allusion sans doute à la condamnation de Bérenger) et determinationibus Ecclesiæ répugnantes il faut entendre ces prédicats dans le sens disjonctif pour l’ensemble des propositions. On remarquera l’insistance avec laquelle revient la note : determinationibus Ecclesiæ répugnantes. Ce qui frappe surtout les autorités religieuses et les défenseurs de l’orthodoxie, c’est l’opposition des doctrines eucharistiques de Wyclif avec les décrétales et les définitions conciliaires. Quand Nicolas de Hereford et Philippe Repyngdon, les chefs du parti lollard, à Oxford, furent forcés, sur l’ordre de l’archevêque de Cantorbéry, de se prononcer nettement touchant les trois propositions de Wyclif, ils le firent en usant de distinctions, qui, toutes, se référaient à des décisions doctrinales, émanées des autorités enseignantes de l'Église romaine. Ces décisions évidemment les gênaient, bien qu’ils essayassent de s’en servir pour voiler leurs nouveautés. Touchant la proposition qui niait les accidents sans sujet, ils déclarèrent : Ad sensum contrarium un decretali Cum Marfhse, concedimus quod est hæresis. Fasciculi, p. 320. Mais, interrogés sur le point de savoir quel était ce sens et invités à répondre à la question : An illa accidenlia corporalia quse ante consecrationem formaliter inhærebant substantiæ panis aut vini, post consecrationem inhsereanl eidem pani aut vino, vel in alla substantia subjectentur, ils refusèrent entièrement de répondre. Sur quoi, les docteurs présents, omnes et singuli, jugèrent quod eorum responsio erat hæretica, erronea et dolosa et polius cavillatorium subterfugium quam declaralio fidei suée plena. Ibid., p. 329. Ce concile eut lieu à Londres, dans la maison des frères prêcheurs, le 21 mai 1382. I ! réunissa t dix évêques, dix-sept docteurs en théologie, seize docteurs en droit civil et canonique et pluribus aliis bachulariis, dit Knyghton, tam theologiæ quam etiam juris. Op. cit., col. 2651 ; Fasciculi, p. 286-287. Oxford reçut défense d’enseigner les propositions condamnées et l’archevêque de Cantorbéry envoya à l'évêque de Londres et à ses autres suffragants une lettre défendant d’enseigner ou de prêcher les propositions suspectes sous peine d’excommunication. Knyghton, col. 2653.

La mort de Wychf, arrivée le 31 décembre 1384, ne mit pas fin à la secte. Au témoignage de Knyghton, elle se multiplia au point que vix duos videres in via, quin aller eorum Wijl<clevi discipulus lueril. Op. cit., col. 2666. En 1389, d’après Knyghton, en 1387, d’après d’Argentré, Colleclio judiciorum, t. i, p. 19, un édit du roi Richard II ordonna de rechercher les écrits, libelles, cedulus et quaternos de Wyclif, Nicolas de Hereford et Jean Ashton. En 1395, à la date du 18 juillet, nouvel édit du roi ordonnant au chancelier de l’université d’Oxford de procéder à un examen doctrinal rigoureux du Trialogus, que Wyclif avait écrit dans sa retraite de Lutterworth, après sa condamnation de 1382, et dont la lecture continuait à répandre l’hérésie en silence, mieux que les sermons des prédi-