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FILIOQUE


    1. FILIOQUE##


FILIOQUE. — I. Histoire du Filioqiie. IL Légitimiti ; ’cK’l’iiiserlioii du Filioqac iiu symbole. III. Caractère dogmatique du F iliaque.

I. Histoire du filioque.

1° Voiiyine espagnole du Filioque. — Les Pères grecs et latins du ive siècle énoncent avec la plus grande clarté la procession du Saint-Esprit du Père et du Fils. Voir t. iv, col. 776-805. Cependant les professions de foi officielles de l’Église grecque et latine ne mentionnent pas, à la même époque, cette vérité dogmatique. La crainte de soulever de nouvelles hérésies et la vénération qu’on professait pour le symbole de Nicée poussèrent les conciles à ne point toucher à une question si abstruse de la théologie trinitaire, d’autant plus que les hérétiques du iV siècle ne s’étaient pas encore avisés de troubler, sur ce point, la doctrine de l’Église universelle. Toutefois, la croyance dogmatique à la procession du Saint-Esprit du Fils est consignée dans plusieurs professions de foi privées et publiques du iV et du Ve siècle, et plus tard, à une date inconnue, elle pénétra dans le symbole de Constantinople.

1. Professions de foi privées.

La profession de foi la plus ancienne qui mentionne la procession du Saint-Esprit du Fils est’n Fides Danuisi. Nous y lisons : Credimus… Spiritum Sanctum de Pcdre el Filio procedenlem. Hahn, Bibliolhek der Symbole, 4’= édit., Brestau, 1897, p. 276 ; K. Kiinstle, Antipriscilliana, Fribourg-en-Brisgau, 1905, p. 47-49. Cette formule n’est pas, d’après Kiinstle, l’œuvre de saint Damase. C’est la profession de foi d’un synode antipriscillianiste, tenu à Saragosse, en 380. Ibid., p. 47-51. Saint Damase se serait borné à lui donner son approbation. E. Mangenot, L’origine espagnole du Filioque, dans la Revue de l’Orient ehrétien, t. xi, p. 20. Une formule de foi, éditée par Jacobi, et attribuée par celui-ci à la seconde moitié du vie siècle, déclare que le Saint-Esprit e.r Pâtre et Filio processil. Hahn, op. eil., p. 350 ; Ivittenbusch, Das apostolische Symbol, Leipzig, 1891, t. i, p. 181-182. Mais Kiinstle est d’avis qu’elle appartient à la théologie espagnole et antipriscillianiste du ve siècle. Op. cit., p. 88-89.

Une Expositio fîdei eatholieæ, publiée par Caspari, d’après un codex très ancien de l’abbaye deBobbio, et reportée au v*^ ou au vie siècle, Kirchenhistorisehe Aneedota, Christiania, 1896, t. i, p. 304-308, exprime la procession du Saint-Esprit par une locution tirée de l’Évangile, et employée souvent par les Pères grecs : Spiritus Sanctus processil a Pâtre et accipit de Filio. Hahn, op. cit., p. 332 ; voir plus haut, t. iv, col. 765767. Cette Exposition serait aussi, d’après Kiinstle, d’origine espagnole et antipriscillianiste. Op. cit., p. 89-93.

En 1881, Caspari édita la profession de foi du pseudo-Gennade de Marseille. Cette pièce a été rééditée par le même érudit en 1896. Op. cit., p. 301-304. On y mentionne le Saint-Esprit comme procedens ex Pâtre et Filio œqualiter. Hahn, op. cit., p. 353. L’auteur de cette pièce serait aussi un théologien espagnol de la moitié du v siècle. Kiinstle, p. 102-106.

La procession du Saint-Esprit du Fils est aiïirmée aussi par une profession de foi, attribuée à saint Grégoire le Grand. On y lit : Spiritum Sanctum… de Pâtre et Filio procedentem. Hahn, op. cit., p. 337. Kiinstle range cette pièce au nombre des documents de la théologie espagnole et antipriscillianiste du ve siècle. Op. cil., p. 113-116. La profession de foi de Phébade d’Agen n’affirme pas d’une manière explicite la procession du Saint-Esprit du Père et du Fils ; mais on y trouve une formule équivalente : le Saint-Esprit est l’Esprit du Père et du Fils. Hahn, op. cit., p. 259 ; Kiinstle, op. cit., p. 55. La profession de foi de Victrice de Rouen (390-409) déclare ouvertement : Spiri tus Sanctus de Pâtre et Filio. Hahn, op. cit., p. 628. Presque toutes ces professions de foi, nous n’avons pas besoin de le dire, sont d’origine espagnole. Elles expriment en des termes divers la même vérité et nous attestent que dès la fin du ive siècle la doctrine du Filioque était assez répandue en Espagne pour qu’elle fût insérée dans les formules de foi privées.

2. Professions de foi conciliaires.

Ce sont aussi des conciles particuliers tenus en Espagne qui ont promulgué les premières professions de foi favorables au Filioque. Mais l’authenticité de ces formules, jusqu’ici admise sans conteste par les théologiens catholiques, a été plusieurs fois révoquée en doute pour de bonnes raisons.

La croyance dogmatique de l’Église latine est tout d’abord consignée dans une profession de foi du P’concile tenu à Tolède l’an 400. On y lit : Credimus. .. in Spiritum quoque Paracletnm… ex Pâtre Filioque procedentem. Hahn, op. cit., p. 210 ; Kiinstle, op. cit., p. 43. Cette profession de foi a été aussi attribuée au synode de Tolède de l’an 447. Hefele, Histoire des conciles, trad. Leclercq, t. ii, p. 483. Dom Morin croit qu’elle n’appartient ni à l’un ni à l’autre de ces deux conciles. Elle serait l’œuvre de Pastor, évêque de Galice, et remonterait à l’an 433. Revue bénédictine, 1893, p. 385 sq. Cf. Kunstle, op. cit., p. 40-45 ; E. Mangenot, Zoc. cî7., p. 94. Nous n’aurions donc pas le droit de considérer cette pièce comme une pièce conciliaire.

La profession de foi, attribuée au 1V’= concile de Tolède (633), énonce aussi la procession du Saint-Esprit du Fils : Spiritum Sanctum procedentem ex Pâtre et Filio profitemur. Hahn, op. cit., p. 235 ; Kiinstle, op. cit., p. 68. Mais elle aussi ne serait pas authentique, d’après Kiinstle, et remonterait à l’an 400. Op. cit., p. 67-70 ; Mangenot, toc. cit., p. 98. Il en est de même de la profession de foi du VP concile de Tolède (638), qui affirme la procession du Saint-Esprit du Fils : Credimus et confitemur… Spiritum Sanctum de Pcdre Filioque procedentem… unus ab utroque procedit. Hahn, op. cit., p. 237 ; Kiinstle, op. cit., p. 71. Elle est empruntée à une source plus ancienne, bien que l’on ne soit pas à même de fixer la date de celle-ci. Quelle que soit cependant la valeur de ces pièces, d’une authenticité douteuse, le P. de Régnon remarque avec raison qu’elles sont particulièrement intéressantes pour l’histoire du dogme, car leur forme, leur langage, la suite de leurs déductions, tout fait conclure à une doctrine puisée beaucoup plus chez les grecs que dans les écrits de saint Augustin. Éludes de théologie positive, t. iii, p. 186.

3. L’addition du Filioque au symbole de Consl<mtinople en Espagne. — Si l’on s’était borné en Espagne à insérer le Filioque dans les formules de foi privées, ou dans les professions de foi des conciles particuliers, les grecs n’en auraient pas tiré un prétexte pour rompre l’unité de l’Église et se soustraire à la juridiction universelle des papes. Il aurait été facile, en elïet, de leur répondre que ces professions de foi n’engageaient nullement la responsabilité de l’Église romaine et qu’elles avaient une valeur doctrinale relative, c’est-à-dire la valeur d’une opinion théologique. .Mais les conciles espagnols, semble-t-il, après avoir proposé la croyance au Filioque dans leurs professions de foi, jugèrent bon de lui donner une plus grande diffusion en l’insérant dans le symbole de Constantinople.

Quelques théologiens catholiques afiirment que l’insertion du Filioque dans le symbole de Constantinople a été faite en 447, par un concile tenu à Tolède, et que tous les catholiques d’Espagne et des Gaules approuvèrent cette décision. Gaume, Traité du SaiiU-Esprit, Paris, 1890, t. ii, p. 70. Mais cette