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FIANÇAILLES


flançuilles ne semient valides que si elles sont ratifiées par les parties, après l’obtention de la dispense. La logique des choses rendra ces fiançailles conditionnelles de plus en plus rares sous la nouvelle discipline. Mentionnons enfin avec les canonistes les fiançailles siib modo, indiquant une obligation qui pèsera ensuite sur l’un des contractants : afin que vous me procuriez tel ou tel avantage ; suh causa, signalant le motif pour lequel on a contracté (et ce motif rentrera parfois, en dépit de son apparence, dans la catégorie des conditions proprement dites) : beauté, richesse, etc. ; sub demonsiialione, indiquant une qualité spéciale et caractéristique de la personne : vous, qui êtes le fils ou la fille d’un tel. Ces modes divers n’ont une répercussion sur la valeur des fiançailles que dans la mesure où ils sont une forme détournée de la condition.

2. Effet des fiançailles.

Les fiançailles valides produisent deux elTets qu’il convient d’exposer, une obligation de justice, et un empêchement ecclésiastique.

Le premier est l’obligation de contracter plus tard le mariage promis. C’est ime obligation de justice, celle qui résulte de toute convention mutuelle librement faite et librement acceptée. Cette obligation est grave de sa nature, parce que l’engagement assumé est grave. Mais elle ne donne pas aux parties le droit d’exiger autre chose que le passage des fiançailles au mariage. Par suite de cette convention, et tant qu’elle dure, il est interdit à l’une ou à l’autre des parties de contracter avec une autre un mariage ou de nouvelles fiançailles, de faire à un tiers l’abandon de son cœur ou de son corps. C’est la base de l’empêchement prohibitif désigné parfois sous le nom de Nihil iranseat. Enfin l’une des parties n’a pas le droit, sans le consentement de l’autre, de remettre à trop tard ou au delà du temps convenu l’accomplissement de la promesse, c’est-à-dire la célébration du mariage. L’esprit de l'Église est de ne pas faire durer le temps des fiançailles au delà d’une année, hors certains cas particuliers.

L'Église a sanctionné de son autorité, par l’empêchement prohibitif de Nihil (ranscal, cette obligation de justice. Toutefois, quand il se présente des difficultés d’ordre pratique, par exemple, quand une des parties refuse d’accomplir sa promesse, le juge d'Église mis en demeure d’intervenir pourrait-il contraindre le fiancé récalcitrant à remplir ses obligations ? Pourrait-il recourir dans ce dessein aux censures ecclésiastiques ? Quoi qu’il en ait pu être de la pratique ancienne, il ne semble pas quc les tendances présentes soient favorables à cette forme de contrainte.

Le second effet des fiançailles résulte siinplement. du droit ecclésiastique. C’est l’empêcliement dirimant d’honnêteté publique. La législation de Boniface VIll le faisait résulter de toutes fiançailles, pourvu qu’elles ne fussent pas nulles e.v defectu consensus. C. luiic, De sponsalibus, dans le Scxle. Le concile de Trente a restreint l’empêchement aux seules fiançailles valides : .Juslitiæ publicæ honestalis imiieditnentum, ubi sponsalia quacumque rationc valida non erunl, sancta sijnodus prorsus tollit ; ubi autem valida fuerint, primuni gradum non excédant… Sess. XXIV, De rcj. niatvimonii, c. III. Comme on le voit, cet empêchement n’interdit le mariage postérieur de l’un des fiancés qu’avec les parents de l’autre au premier degré.

A ces effets universels la libre volonté des parties en ajoute parfois d’autres, par la stipulation d’arrhes ou de peines comme sanction des fiançailles. Un plus grand éloignement pour tout ce qui pourrait léser la pleine liberté des fiancés écarte de plus en plus de la pratique moderne ces stipulations annexes. D’autre part, la règle admise par tous les moralistes est que les arrhes sont dues sans doute par celui qui refuse sans

DICT. DE THÉOL. CATllOL.

motif légitime de compléter les fiançailles par le mariage, mais que le coupable peut attendre jusqu'à ce qu’il y soit condamné par le juge. Quant à l’obligation de subir la peine, de bons auteurs affirment que le droit canonique ne suit pas sur ce point les décisions sévères du droit romain.

3. Rupture des fiançailles.

Les fiançaifies ne sont pas indissolubles, c’est-à-dire que l’obligation résultant des fiançailles en vue du futur mariage et le droit qui en découle pour les fiancés l’un sur l’autre, peut cesser lîour diverses causes. Marquons dès maintenant que, même après la rupture, l’empêchement d’honnêteté publique une fois contracté subsiste. C’est l’obligation de justice et le Nihil Iranseat qui cessent. Notons en second lieu que la rupture du lien ne préjuge rien quant à l’obligation qui pourrait peser sur l’une des parties de réparer les dommages que, par une faute, elle aurait causés à l’autre.

Voici, brièvement énoncées, les principales causes pouvant amener la rupture des fiançailles : a) Le consentement mutuel. — Selon la règle du droit : omnis res per quascumquc causas nasciiur, per easdem et dissolvitur, X, reg. 1 juris. L’engagement contracté par consentement mutuel cesse par les mêmes moyens. Il n’importe que les fiançailles aient été confirmées par serment, celui-ci, accessoire, suit le principal, le contrat. Toutefois, s’il s’agit de fiançailles entre pubère et impubère, il faudra attendre la puberté de celui-ci, c. De mis, X, De desponsat, impuber. ; s’il s’agit de fiançailles entre deux impubères, le premier parvenu à la puberté peut demander la rupture. — b) La violation de la foi donnée cuix fiançailles. — C’est encore une règle du droit que frustra sibi fidem quis postulat ab eo servari, cui fidem a se pra’stitam servare récusai, Reg. 7.5 juris. dans le Sexte, on est mal venu d’exiger de quelqu’un le respect d’une convention mutuelle que soi-même on n’a pas respectée. Cf. le texte d’Innocent iii, c. 25, Quemadmodum, X, De jurejurando, où est posée la règle générale. Le fait peut se réaliser en mainte circonstance, par exemple, refus de procéder au mariage à l'échéance convenue, fiançailles nouvelles, promesse de mariage, mariage avec un autre, abandon de sou corps à un tiers, familiarités compromettantes, apostasie, etc. — c) Fait nouveau ou nouvellement connu amenant un tel changement de situation que les fiançailles dans ce cas n’auraient pas été contractées. — Ce fait nouveau ne suppose pas nécessairement une culpabilité quelconque chez l’une des parties, mais sa conséquence n’en est pas moins une modification notable dans leur situation respective. C’est, par exemple, une maladie ou une infirmité grave qui rend l’un ou l’autre inapte ou moins apte aux devoirs du mariage ; un accident fâcheux pour l’honneur de la fiancée ; un appauvrissement qui change l'égalité des situations au point que, si le fait s'était produit plus tôt, les fiançailles n’auraient pas eu lieu ; des inimitiés surgissant entre les deux familles, etc. Il n’est même pas nécessaire que le changement soit certain, une probabilité sérieuse sufiit. Ce qui est vrai du changement réel survenu l’est aussi quand la réalité diffère notablement de ce que l’autre partie croyait, et que c’est l’opinion erronée qui avait été motif déterminant du contrat ou si, le fait étant connu préalablement, les fiançailles n’auraient pas été engagées, par exemple, quand l’un des fiancés appreiul tardivement la mauvaise conduite ou la déplorable santé de l’autre. — d) L’entrée dans un état de vie plus parfait. — C’est une condition toujours sous-entendue dans les fiançailles, à moins que l’une des parties n’ait, à l’occasion des fiançailles, causé à l’autre un dommage qui ne se puisse réparer que par le mariage. L'état plus parfait serait, par exemple, l’entrée dans un ordre ou dans une congrégation reli V. - 72