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FEU DE L’ENFER


textes les plus affirmatifs d’Origène sont les suivants : De principiis, 1. II, c. x, n. 4, 5, P. G., t. xi, col. 236 ; In Niim., homil. xxvii, n. 8, P. G., t. xii, col. 789 ; In Malth. comment, séries, n. 75, P. G., t. xiii, col. 1715 ; Conl. Celsnm, 1. VI, n. 71, P.O., t. x, col 1405. Voir Mgr Freppel, Oiigène, t. ii, xxii’leçon ; Atzberger, op. cit., p. 407-408. Origène a eu de nombreux disciples. Rien d’étonnant que la doctrine du feu métaphorique ait rencontré, parmi ces disciples, des partisans, dont les noms nous sont d’ailleurs inconnus. Saint Jérôme nous assure le fait : hjnis qui non extinguitur a PLEniSQVE conscientia accipitur peccatorum, quse lorqiiet in suppliciis constitiitos. In Is., 1. XVIII, c. lxvi, n. 24, P. L., t. XXIV, col. G76. Mais de là à pouvoir affirmer que cette opinion a prédominé dans l’Église grecque, il y a loin. Les seuls noms qu’on puisse citer sont, en effet, ceux de saint Grégoire de Xysse.de Victor d’Antioclie, de saint Jean Damascène etdeThcophylacte, auxquels il faut ajouter les noms des Pères latins Lactance et saint Ambroise. On a voulu attribuer cette opinion à saint Grégoire de Nazianze, voirTurmel, Histoire de la théologie positive depuis l’origine jusqu’au concile de Trente, 3e édit., Paris, p. 157 ; mais cette thèse a déjà été réfutée à l’art. Enfer, col. 69. De même, saint Jean Chrysostome, quoiqu’il place l’enfer hors de notre monde terrestre. In Epist. ad Rom., homil. xxxi, P. G., t. xlvi, col. 67, n’admet pas pour autant un feu spirituel ou métaphorique. Voir Enfer, col. 67.

b. Saint Grégoire de Nijsse est-il tombé dans l’origénisme ? On a donné la réponse à cette question à l’art. Enfer, col. 70. Le seul problème qui reste à résoudre ici concerne la pensée de ce Père, touchant la réalité du feu de l’enfer. Carie, Du dogme catholique sur l’enfer, Paris, 1842, p. 377 sq., place saint Grégoire de Nysse parmi les adversaires du feu réel, et les textes qu’on apporte généralement pour appuyer cette affirmation sont les suivants : Oral, calech., c. XL, P. G., t. XLV, col. 105 ; Oral., iii, de resurrectione Domini, P. G., t. XLVI, col. 680 ; De anima et resurrectione, P. G., t. XLVI, col. 68 sq.

Le texte de VOralio catechetica ne nie pas la réalité du feu de l’enfer, mais simplement, ce qui est très différent, son identité avec le feu terrestre. Parce qu’il est inextinguible, le feu de l’enfer renfermera des éléments étrangers au feu terrestre et, par là, en différera : Ilùp -j-àp àxrj-jwv, à'>, >.o Ti mxpa. toOto vosÎv ioiôiyjii) ;, £/. ToO TrpoxEÏTOat xi t<ô Ti’jpi £x£iv(t) rj èv TOijrfo o-jx é’dTt.

Que cette différence respecte néanmoins la réalité matérielle du feu infernal, c’est ce qui ressort clairement du second texte. Oral., iii, de resurrectione. « L’Écriture nous apprend, dit en substance le saint docteur, que les damnés seront affligés de justes tourments, qui sont le feu, les ténèbres, le ver rongeur, tous supplices propres-cni.v corps, composés d’éléments matériels. L’âme, parce qu’elle est spirituelle, ne pourra jamais être atteinte par le feu. Comment les ténèbres pourraient-elles l’inconunoder, elle qui n’a point d’organe de la vue ? Quel tourment lui infligerait le ver rongeur, qui peut s’attaquer aux corps, mais non aux esprits ? Aussi, ajoute-t-il par manière de conclusion, toutes ces considérations et ces arguments nous contraignent-ils d’affirmer la résurrection des morts. » Saint Grégoire de Nysse se trompe lorsqu’il affirme que le feu de l’enfer ne peut atteindre la substance spirituelle, et peut-être de cette affirmation serait-on en droit de conclure que le supplice du feu, pour les démons, ne peut s’entendre qu’au sens métaphorique. Mais c’est là une erreur sur le mode d’action du feu et non sur sa réalité : saint Grégoire affirme la réalité du feu d’une manière si expresse, qu’il en déduit la nécessité de la résurrection des corps.

Du troisième texte, extrait du De anima et resurre ctione, il faut simplement dire qu’il n’est pas ad rem. L’enfer y est affirmé comme quelque cliosc d’« obscur » etd’« invisible » , à£tSè ; xai à : pav£ ;, ce qui équivaut, dit-on, à la négation du feu réel. Mais il est évident qu’en ce texte, la signification du mot « enfer » n’est pas si rigoureuse qu’on doive y voir nécessairement l’enfer des damnés. Tout le contexte, l’assimilation de l’enfer et de Vorcus des anciens, les dissertations de l’auteur sur la forme de la terre et sur ses deux parties inférieure et supérieure, indiquent qu’il s’agit ici simplement du passage de cette vie dans l’autre monde ei ; TÔ àeiSèsxa’t àcpavé ;, sans qu’on doive se préoccuper de préciser si le séjour des âmes séparées sera sur ou sous la terre, puisque, étant incorporelles, elles n’ont aucune nécessité de se trouver attachées à un lieu déterminé. Voir P. G., lac. cit., col. 79.

c. Victor d’Antioche n’est pas un Père de l’Église, mais un simple compilateur qui, au ve siècle, a recueilli, en forme de chaîne, des textes de Pères sur l’Évangile de saint Marc. Dans le commentaire du c. v, 8, il s’exprime ainsi parlant du feu qui dévorait les démons en présence du Christ : Ka yàp è(ja<TTiîovTo àopâTù) ; 7riiJ.7TpaiJ.evot xa’t Ta a’j’rj/.ECJTa Trid/ovic ; aTtô tt, ; 71apo-j-CTtaç âxEivïj ;. Cf. Possin, Catena græcorum Pcdrum in Evangelium secundum Marcum, in-fol., Rome, 1673, p. 103 ; J. A. Cramer, Catenæ græcorum Patrum in Novum Testamentum, Oxford, 1844, t. x, p. 315. Il ne s’agit que du feu intérieur dont les démons étaient tourmentés invisiblement par la présence du Christ. Une fausse interprétation de ce texte, voir Petau, De angelis, 1. III, c. iv.n.lO, y fait voir mention d’un feu invisible, c’est-à-dire d’un feu métaphorique. Mais, en admettant même qu’ici Victor d’Antioche ait voulu parler d’un feu métaphorique, il ne s’ensuit pas qu’il ait nié la réalité du feu de l’enfer. Il justifie, en effet, les tourments invisibles que les démons de Gérasa éprouvaient en présence de Jésus parla crainte qu’ils avaient d’être précipités aussitôt, et avant le temps fixé, dans l’enfer et d’y subir le dernier supplice. C’est pourquoi ils disent : « Es-tu venu nous tourmenter avant le temps ? » Victor d’Antioche, sur le verset 10 du même chapitre, ne parle pas du feu de l’enfer ; il ne parle que de l’abîme souterrain et des ténèbres extérieures préparées au diable et à ses anges.

(I. Saint Jean Damascène se sert d’une formule assez vague ; il enseigne. De fide orth., 1. IV, c. xxvii, P. G., t. xciv, col. 878, que le feu de l’enfer n’est pas matériel comme le nôtre, mais que Dieu seul en connaît la nature : o-jy JXtxdv, olov tô Trap’r ; |j. ! v’à>, ), ’oiov s’.oetv) 6 Weôç. C’est sur ce texte, jeté comme en passant à la fin du De fide orth., et sur un passage, moins clair encore, du Dial. contra manicheeos, n. 75, P. G., t. xciv, col. 1574, que l’on s’appuie pour répéter que saint Jean Damascène est un partisan du feu métaphorique. Rappelons que concevoir le feu de l’enfer comme différent de notre feu terrestre, n’est pas nier sa réalité : « Le sentiment de Damascène, dit Petau, op. cit., 1. III, c. v, n. 3, peut se concilier avec l’opinion commune des théologiens, qui pensent, eux aussi, que le feu de l’enfer ne ressemble pas au feu terrestre, qui est un feu épais, grossier, plein de fumée et qui a besoin d’être sans cesse entretenu par de nouveaux aliments. » Quant au texte du Dialogue, où les damnés sont représentés tanqucun igné et verme corrosi, parce qu’endurcis dans le péché qui les ronge, il se rapporte évidemment à la peine du dam et n’est pas exclusif d’une peine causée par un feu réel.

e. Théophijlacte, au contraire, parle d’une façon tellement précise que sa pensée ne laisse prise à aucune équivoque. Il adopte, Enarr. in Evang. JMarci, c. ix, P. G., t. cxxiii, col. 593, le sentiment tl’Origène : « Le feu et le ver dont il est parlé dans l’Écriture sont la conscience du pécheur, se remémorant les actes hon-