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FAREL


srribo(25 août 1541). Ibid., t. vii, p. 224. Il rend témoignage à son indomptable ténacité : « tant que vivray ce qu’ay proposer veulx tenir et maintenir jusqu’à la dernière goutte de mon sang » (8 novembre 1538). Ibid., t. V, p 175. Il le fit voir à Neuchâtel, en s’opposant aux désordres d’une personne de la famille du gouverneur : et les pasteurs de Neuchâtel le louent en 1554 1’employer les pénitences publiques pour maintenir la discipline. Bayle, art. Farci, remarque E.

Quant au succès final de Farel, quant à la qualité de ce qu’il a voulu édifier, ses lettres nous renseignent avec mélancolie. En parlant de ses collègues, il écrit à Fabri : Crcde mihi, malos habcinus ncbulones cl insit/nes / rodilorcs, qui si aliiid non possunl, niinam <iuam procurabuni. Hœc noslro supercrunt labori{6 septembre 1537). Herminjard, t. iv, p. 297. Cf. ibid., t. iv, p. 351-352 ; t. v, p. 149-156 ; t. vi, p. 98. Qiiam siinl pestilentes tam ambiliosi ncbulones qui Deum abnogarcnl millics quam scmel se palcrcnhir in ordincm redigi (5 février 1539). Ibid., t. v, p. 236.

Le 4 mai 1876, une statue a été érigée à Farel, sur la place de Neuchâtel, près de la Collégiale. Bullelin de la Société de l’hisloire du proteskmlisme français, t. XXV, p. 334.

II. DocTuiNE.

« Guillaume Farel, renommé pour sa doctrine et piété, » dit Bèze. II. E., t. i, p. 14. Mais Farel, plus modeste et plus véridique, parle autrejnent : infclici ncdus sœculo, et infclicius educatus, mcee mihi conscius ignorantin’(28 mars 1544). Herminjard, t. IX, p. 191. Novi hoc mihi et amicis obessc plurinuim, dum non intelligor, cum exislimem me o/ïuh’o (ipcrlissime indicasse (23 novembre 1544). Ibid., t. ix, p. 367. Etsi nnllius plane sum lilleralurœ… nullusque habeor inier theologos (de Bellay, septembre 1535). Ibid., t. III, p. 358. Ni les thèses qu’il soutint dans les disputes puljliques, ni ses ouvrages ne contiennent rien de remarquable.

Dès 1524 à Bâie, ibid., t. i, p. 194, il formule les lieux comnmns de la controverse protestante : l’Écriture sans la tradition, pas de célibat, pas d’abstinence, pas d’offices ecclésiastiques ; dans les thèses de la dispute de i’erne (1528) que Farel avait traduites en français, se trouvent les négations classiques : pas de messe, pas d’invocation des saints, pas de purgatoire, pas <rimages. Ibid., t. ii, p. 59. Mais Farel n’a aucune importance dogmatique ; la longue liste de ses ouvrages peut se lire dans la France protestanle. Il suffit de signaler : la lettre « à tous seigneurs et peuples » (1530), récit de son passage au protestantisme ; la Confession de la foij, laquelle tous bourgeois et habitants de Genève et subjects du pays doibvent jurer de garder ri tenir (1534) ; le Sommaire (1524), réédité par Bauni (1867).

On rencontre d’ailleurs çà et là quelques phrases très peu logicjues sur les lèvres d’un protestant ; ainsi Farel exhorte les Genevois : « Vous humblement jetiez devant Dieu en jeusnes, prières et oraysons de grande instance et affection » (8 novembre 1538). Herminjard, t. v, p. 175. « Farel abandonnait le mérite <les œuvres en 1517. » Douen, Bulletin de la Société de l’histoire du protestantisme français, t. xli, p. 127. Ailleurs il regrette les institutions de l’Église catholique : Quod cupis clewium usum, quo contineatur Fcclesia rcvocari, hoc faxil Christus (à Capiton, 5 mai 1537). Herminjard, t. v, p. 441.

I.e conseil de Berne visait Farel et Calvin quand il s’alarmait de l’orthodoxie de ses prédicants : « Nous somes esté advertis… que cherchés tousjours de leurs inculquer vostre intention et opinion de la nullité des inoetz trinité et personne, pour yceux jà dicts prédicants dévier de la costume et manière de parlé de la Trinité recejihue de l’Église catholique » (13 août 1537). Ibid., t. IV, p. 275.

Il avait pour la prédication un admirable organe ; au dire de Bue r, sa voix fut à Metz assez forte lour dominer le bruit de la cloche (6 octobre 1542). Ibid., t. viii, p. 148. A l’en croire, sa parole était aussi persuasive que sa voix était sonore : Hubui orationent de pace et caritale, de non insultando fratri, nequc perdendo cdiqun, de omnium eedificcdionc. Cum minime mihi plæcam, el nulli minus cjuam mihi satisfaciam, tamen hic non tantum aliorum judieio, verum etiam meu experius sum ex Domino prodiisse oratiotuni, quse saxa debebed pcrmoverc (23 novembre 1544). Ibid., t. ix p. 368.

Dans ses écrits polémiques, il s’exprime avec verve, et d’une façon pressante, par exemple, dans sa réponse au défi de Caroli (21 mai 1543). Ibid., t. viir, p. 369. Mais le fond manquait à ses discours : « Le dit Farel, rapporte Pierrefieur…, preschait par jour deux fois le jour, et chascun sermon tenait deux heures, et tous ses sermons estoyent tous semblables l’un à l’autre, sans avoir grand’difïérence. Le plus de ses sermons n’estoit sinon de appeler aux prestres et à toutes gens d’égfise, disant : « ces brigands, ces larrons, ces meurtriers ; » et quand il avait achevé, il tournait toujours à son propos, » p. 36. Le pasteur Heyer, art. Farel, dans V Encyclopédie des sciences religieuses, t. iv, p. 680, reconnaît les défauts de Farel : « II avait d’ailleurs peu de g ût pour un travail de plume lent et réfléchi… ; sa plume est embarrassée et souvent peu claire. » Nous avons vu Farel nous dire la même chose ; en somme, toute la phraséologie pieuse dont ses lettres sont parfois surchargées, ressemble à un vêtement d’emprunt, cela ne lui va pas, et quelquefois cela prête à sourire. Non pas que la vigueur ni l’émotion ne soient réelles en certains endroits : voir, par exemple, la Forme d’oraison pour denmnder à Dieu la sainte prédication de l’Évangile et le vrai et droit usage des sacrements. Bulletin de la Société de l’histoire du protestantisn ^e français, t. xiv, p. 356 sq. Les emprunts aux souvenirs et au vocabulaire de la Bible sont très nombreux ; la prolixité est incontestable ; la suite des idées est remplacée par une série d’apostrophes ou d’invocations parfois pressantes ; le tout est empreint de ce mysticisme si déchirant et si funeste chez tous ceux qui se sont séparés de la véritable Église. C’est ce que Bèze traduisait en ces paroles trop flatteuses : E.vcellebat quadiun aninii magnit’idine Farellus, cujus vel audirc absque tremorc lonitrua, vel cwdentissimas preces perciperc nemo posset, quin in ipsuin pêne cadum subvclicretur. J. Ccdvini vilæ, dans Opéra, Genève, 1582, t. iii, p. 370.

III. Ministère.

Farel avait pris pour cachet : un glaive entouré de fiammes, et la devise : Quid vola nisi ut ardcal ? Cette impétuosité et cette violence le caractérisent. Il a été l’homme d’action du protestantisme en Suisse. S’il n’est que pasteur de Neuchâtel de 1538 à sa mort, il a été le chef de la Réforme en Suisse et en France, jusqu’à ce que l’ascendant de Calvin ait prévalu. Sa fougue a réussi, malgré l’attachement du peuple à la foi catholique, mais grâce à la lourde main de Messieurs de Berne, à établir la soi-disant Réforme.

Tous les pasteurs sont unanimes à le caractériser. Bédrot, pasteur à Strasbourg : Acerbitas hominis intempestivior et nobis displicet (octohrc 1541). Herminjard, t. IX, p. 299. Bucer, de Strasbourg : viri, ut Christo loto pcctore cu-dentis ita in causa Christi sempcr vehementis (octobre 1541). Ibid., t. ix, p. 300. Myconius, de Bâle : Ego quidem jeun tango lemporc novi severitatem Farclli (24 octobre 1541). Ibid., t. ix, p. 296. Toussain, de Montbéliard, à Farel : Quorumdctm de vobis judicium est, quod in colloquiis et epistolis vestris promptiores silis ad convitiandum fratribus (12 novembre 1537). Ibid., t. IV, p. 312.

Calvi 1 reproche à Farci, (omme un manque de