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EXTRKME ONCTION DU 1° AU IX' SIÈCLE

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miraculeux, ordonne par définition, donc exclusivement, au recouvrement de la santé corporelle : c’est le charisme des guérisons dont parle saint Paul. I Cor., XII, 9. Puisque les cures opérées par les grands thaumaturges des premiers siècles sont rares, exceptionnelles, prodigieuses, puisque la vertu de les accomplir est présentée comme un privilège personnel, indépendant de la qualité de membre de la hiérarchie, lié d’une certaine manière à la sainteté de la personne, destine surtout à l'édification de l'Église ; les actions éclatantes de saint Martin ou des antiques solitaires sont des manifestations de ce pouvoir miraculeux que le Christ a exercé le premier sur toute maladie ou infirmité et qu’il a légué à ses apôtres, puis à quelquesuns de ses serviteurs. Il s’agit de charisme et non de sacrement. Les liturgies l’ont compris : dans beaucoup d’entre elles, anciennes ou modernes (le pontifical et le rituel romains, par exemple), on trouve la bénédiction de la matière de l’extrême onction et celle de l’huile exorcisée, puis remise aux fidèles pour qu’ils en usent comme d’un des riteî aujourd’hui connus sous le nom de sacranientaiix. Cf. Kern, op. cit., p. 30 ; Pcsch, op. cit., p. 258.

Les liturgies.

Les Canons dits de saint Hippolyte, « antérieurs au iv<e siècle, » Cabrol, Introduction

aux éludes liturgiques, Paris, 1907, p. 11-1'2, au moins pour l’ensemble, Duchesne, Origines du culte chrétien, 3e édit., Paris, 1903, appendice vi, p. 524, contiennent quelques renseignements intéressants sur le soin des malades. Un diacre doit accompagner l'évêque et les lui faire connaître tous, can. 199. « Car c’est une grande chose que la visite des malades par le chef des prêtres ; ils se relèvent de leur mal quand l'évêque vient à eux, surtout s’il prie sur eux, » can. 200. Nous désirerions avoir de plus amples renseignements. Le texte cité nous apprend pourtant qu’en dehors de la visite quotidienne faite au malade par le y.l-f, ç, ', :, can. 218, il y en a une autre d’une importance capitale, celle de l'évêque. Que fait-il ? Le cérémonial de la visite ne nous est pas rapporté. Mais l’expression employée est empruntée à l'Épître de saint Jacques. L'évêque « prie sur le malade, » la locution semble donc indiquer que le chef des prêtres suit le rituel dont l’apôtre a dessiné les linéaments, cju’il fait l’onction (le can. 222 parle des vases nécessaires pour les malades et que l'évêque d nt remettre au procureur). Les elïcts de cette bonne visite ne sont pas mentionnés explicitement. On rappelle que l’ombre de Pierre avait une vertu curative ; la santé était donc un fruit espéré. Mais, puisque tous les malades ne reviennent pas à la vie, puisque tous néanmoins doivent être signalés par le diacre afin d'être visités, puisque le chef des prêtres n’est pas nécessairement un saint doté du pouvoir d’accomplir des miracles, puisque sa présence est pourtant une grande chose, il est permis, sinon nécessaire, de conclure que l'évêque ne vient pas seulement apporter santé ou convalescence, mais d’autres dons non moins précieux. L’esprit du lecteur pense à l’extrême onction catholique : si c’est d’elle qu’il s’agit, le langage des C’ano/is est très juste, tout s’explique. Voir les textes cités dans Duchesne, toc. cit., p. 538-510.

A la même époque remonte un témoignage beaucoup plus précis et de première valeur. Il émane du recueil de prières attribuées à Sérapion de Thmuis, ami et correspondant de saint Athanase. On trouve dans cet eucologe deux oraisons sur l’huile. La première ne vise pas la matière de l’extrême onction. Il est néanmoins nécessaire de la citer, afin de pouvoir la comparer à la seconde pour établir le vrai caractèi’c de cette dernière.

Le recueil contient un certain nombre de prières empruntées certainement à la liturgie du sacrifice. Il s’ouvre par Vanaphore de l'évêque Sérapion. Wob hermin, Altehristliehe liturgische StucLe «  « .s der Kirche 'Egijptens nebst einem dogmatischen Brief des Bischofs Sérapion von Tlimuis, dans Texte und Unlersuehungen, 2° série, t. ii, fasc. 3 b, p. 4-6. Suivent cinq prières, l’une était dite à la fraction, op. cit., p. G ; l’autre était récitée sur le peuple après la conmiunion des clercs, o/j. cit., p. 7 ; la troisième est une action de grâces qui était prononcée après que lesfidèles avaient reçu l’eucharistie, op. cit., p. 7 ; puis vient une oraison sur l’huile et l’eau présentées comme offrandes, op. cit.^ p. 7-8 ; enfin avait lieu ta bénédiction de l’assemblée.

Ainsi la place de ces prières n’est pas discutable, elles font partie de la messe. Le texte de l’oraison sur l’eau et l’huile n’est pas moins significatif : « Nous bénissons au nom de votre Fils unique Jésus-Christ ces créatures ; que le nom de celui qui a soulïert, a été crucifié et est ressuscité et est assis à la droite de Dieu inengendré [soit| sur cette eau et sur cette huile. Donnez une puissance curative à ces créatures afin que toule fièvre et tout démon et toute maladie disparaissent par ce breuvage et cette onction et afin que devienne un remède de guérison et un remède de complète santé l’usage de ces créatures au nom de votre Fils unique Jésus-Christ par lequel à vous appartiennent la gloire et la puissance dans le Saint-Esprit, pour tous les siècles des siècles. Amen. »

Aucun doute n’est possible. Les fidèles offrent à la messe, avec le pain et le viii, de l’eau et de l’huile ; avant la bénédiction finale, le célébrant bénit ces objets et les leur rend. Le peuple les emporte et s’en sert contre la maladie : la guérison du corps et l'éloignement du démon sont les seules grâces sollicitées ; de la rémission des péchés il n’est pas question ; l’eau et l’huile sont mises sur le même rang, opèrent les mêmes effets, grâce à la même oraison. Comme nous recevons après la comnmnion le pain bénit, comme nous usons de l’eau bénite, ainsi les chrétiens de Thmuis se servaient au ive siècle d’eau et d’huile bénites contre la fièvre, le démon, la maladie. C'étaient « des phylactères pour l’usage privé. » Duchesne, op. cit., p. 78 ; Kern, op. cit., p. 55.

En Syrie, on agissait sans doute de même. Le c. XXIX du 1. VIII des Constitutions apostoliques, P. G., t. I, col. 1125, le prouve : « Que l'évêque, est-il dit, bénisse l’huile ou l’eau…, qu’il parle de cette manière : Seigneur Sabaoth, Dieu des vertus, créateur des eaux et dispensateur de l’huile, miséricordieux et ami des hommes, qui as donné l’eau pour breuvage et ablution, l’huile pour que nos visages s'égayeni dans l’exaltation de la joie, sanctifie en ce moment cette eau et cette huile par le Christ, au nom de celui qui les a offertes et accorde [à ces éléments] la force de produire ta santé, de chasser la maladie, de faire fuir les démons, de repousser toute embûche par le Christ notre espérance. »

Tout autre est la seconde prière sur l’huile que contient l’eucologe de Sérapion. Sa place, son contenu surtout obligent à lui assigner une signification spéciale : « Prière sur l’IniHf des malades ou sur le pain ou sur l’eau. »

Nous vous invoquons, vous qui avez toute autorité et puissance, Sauveur de tous les liommes, Père de Notre-Seigneur et Sauveur Jésus-Clirist et nous vous prions d’envoyer une force curative du liaut des cieux du l’ils unique sur celle luiile afin que do tous ceux qui sont oints ou qui participent à V)s créatures ici présentes, elle éloigne toute maladie et toute infirmité, qu’elle leur serve d’antidote contre tout démon, qu’elle expulse d’eux tout esprit impur, en bamiisse tout esprit mauvais, en chasse toute fièvre et froid et toute maladie, qu’elle leur accorde bonne grâce cl rémission des péchés, qu’elle soit pour eu.v un remède de vie et de salut, leur apporte santé et intégrité de l'âme, du corps, de