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EXODE

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Moïse devait frapper l’eau de sa verge, taudis qu’A arou ne fait qu'étendre sa main (tenant la verge) sur les eaux de l’Egypte. Or, frapper dit plus que l’acte symbolique d'étendre la verge ; cet acte suppose une percussion physique. Moïse tantôt étend sa main ou sa verge, ix, 22, 23 ; x, 13 ; xiv, 16, tantôt il frappe, xvii, 6 ; Aaron aussi ou bien étend sa main, viii, 5, 6, ou bien l'étend et frappe de sa verge la poussière de la terre, 16, 17. Puisqu’il n’a fait qu'étendre sa main sur les eaux, il faudrait seulement en conclure que ri’xécutiori a été un peu différente de la menace, si, de fait, Aaron n’avait élevé sa verge et n’en avait frappé l’eau du Nil sous les yeux du Pharaon, 20. Le verset 19 ne fait qu’expliquer l’expression « l’eau du lleuve » , en énumérant les bras du fleuve, les canaux et les étangs formés par le Nil, par conséquent, non pas toutes les eaux de l’Egypte, mais seulement celles du lleuve dans leurs états différents, de telle sorte que toutes les eaux du Nil étaient changées en sang, que les Égyptiens ne pouvaient plus en boire et qu’ils durent creuser des puits pour avoir de l’eau à boire. F. Vigouroux, La Bible et les décoiwerles modernes, G<-- édit, Paris, 1896, t. iv, p. 321, note 3 ; F. de Hummelauer, Exodus et Leuilieus, Paris, 1897, p. 89-90. Il en est de même pour la plaie des grenouilles. La menace, faite par Moïse au Pharaon, ne parle que du fleuve ; l’exécution, accomplie par Aaron et sa main étendue, porte sur tous les courants, les canaux et les étangs du Nil. Il n’y a pas de trace de deux traditions différentes.

La loi du pain azyme à manger à la première Pâque a été pronmlguée par Dieu avant le 10 de nisan, xii, 3, en prévision de la hâte avec laquelle la sortie d’Egypte devait s’opérer, 8, et elle a été établie en souvenir de cette hâte. Elle n’est donc pas en contradiction avec le fait, raconté plus loin, 34, 39. Le législateur voulant que la première Pâque, qu’il instituait, fût accomplie comme elle devait l'être toujours, en régla les dispositions d’après l'événement qu’il connaissait d’avance, et cette réglementation n'était pas inutile pour que les Israélites, n’ayant pas de pain levé, se décident à manger l’agneau pascal avec du pain azyme. F. de Mummelauer, op. cit., p. 118, 130.

Quant aux deux itinéraires vers la mer Rouge, ils ne sont pas contradictoires. Le premier n’indique que la direction générale. F. de Hummelauer, op. cit., p. 140. Le chemin direct vers le pays des Philistins était sans doute dans la direction de la mer Rouge, el les Israélites purent le suivre jusqu'à Étham ; mais là, pour obéir aux ordres de Dieu, xiv, 2-4, ils durent le quitter et se rendre directement sur les bords de la mer Rouge. C’est là que commence la voie détournée que Dieu fit prendre à son peuple : ils devaient aller dans la direction du Sinaï, marcher vers le sud et non vers le nord. F. Vigouroux, lac. cit., p. 408-409. Il y eut donc un changement de direction. Pharaon qui croyait que leur dessein était seulement d’aller au désert, quand il les sut campés du côté de la mer Rouge, leur ferma au nord le chemin du désert. F. Vigouroux, ibid., p. 411-414. Dans les deux cas, Dieu réglait la nuirche d’Israël pour le faire échapper aux poursuites du roi d’Egypte. Loin donc de faire double emploi, les deux itinéraires se succèdent et se complètent.

b) Doubles lois. — Bæntsch, op. cit., p. vi, signale une double institution de la première Pâque. xii, 1-13, et 21-27 ; une double loi sur l’offrande du preinier-né, xiii, 1, 2, et 11-16 ; xxii, 29 b, et xxxiv, 28 ; l’ordre de paraître trois fois par an devant Jéhovah, xxiii, 17, et xxxiv, 24 ; la répétition de solenniser la fête des prémices et la fête [de la moisson, xxiii, 16, et xx.xiv, 22 ; la double défense d’oftrir du pain fermenté, .xxiii, 18, et XXXIV, 25 ; la double loi des pré mices et la double défense de faire cuire le chevreau dans le lait de sa mère, xxiii, 19, et xxxiv, 26. Au sujet de la première Pâque, le texte ne présente pas deux ordres différents de célébration.' On y lit d’abord l’ordonnance détaillée, donnée par Dieu à Moïse et à Aaron, puis la communication que Moïse en fait aux anciens d’Israël. Celle-ci reproduit l’ordonnance précédente, en la résumant, en omettant quelques détails et en ajoutant de nouvelles dispositions ; ce n’est qu’une partie du discours : l’auteur, qui vient de reproduire le précepte de Dieu, ne le répète pas en entier ; il y fait allusion à ce qui est déjà connu et il donne de nouvelles explications ; c’est un procédé de rédaction pour éviter des répétitions textuelles. Cf. F. de Hummelauer, op. cit., p. 122-123. Pour la loi de l’offrande du premier-né, il y a aussi l’ordre donné directement par Dieu à Moïse et la promulgation qui en est faite par Moïse au peuple. Cette loi, publiée séparément, est renouvelée dans de petits codes postérieurs. Les autres prescriptions doubles appartiennent aux deux codes de l’alliance, xx, 22 XXIII, 33 ; xxxiv, 1-28, que les critiques rationalistes rapportent, le premier au document élohiste, le second au document jéhoviste. Le texte de l’Exode présente le premier comme le code de l’alliance, solennellement conclue entre Dieu et Israël au pied du Sinaï, et le second comme celui du renouvellement de l’alliance rompue par l’adoration du veau d’or. Le second code n’est qu’un résumé du premier : il contient le Décalogue sous une nouvelle forme, voir t. iv, col. 162-164, et le rappel des principales lois religieuses de la première alliance. Il n’est pas étonnant dès lors qu’il y ait des répétitions. Les critiques attribuent cette distinction au rédacteur qui aurait combiné les documents élohiste et jéhoviste et ils rapportent le fond du second code à la rédaction jéhoviste de l’alliance faite au Sinaï. Bæntsch, op. cit., p. 280. Mais puisque, selon eux, des traits du renouvellement de l’alliance sont empruntés au document élohiste, il en ressort que le rédacteur, s’il a existé, n’a pas inventé ce renouvellement. Que le code reproduit à cette occasion, xxxiv, 10-27, soit le Décalogue jéhoviste complété par quelques lois sinaïtiques, c’est une pure supposition, fondée sur une distinction arbitraire de documents et sur une reconstitution a priori de la religion d’Israël. Voir t. iv, col. 162-164.

c) Contradictions et inconséquences. — B. Bæntsch, loc. cit., en relève quelques-unes dans le livre de l’Exode. Moïse, qui a du mal à parler, obtient de Dieu que son frère Aaron parle en son nom, iv, 10-16, et cependant Dieu envoie Moïse à Pharaon et le charge de parler directement au roi, vii, 14-18. Dans les récits concernant les plaies d’Egypte, c’est tantôt Mo’ise, tantôt Aaron, qui agit ; les événements sont présentés soit comme des maux infligés par représailles, soit comme des miracles ; les Israélites enfin sont représentés comme habitant au milieu des Égyptiens ou bien à part dans la terre de Gessen. La manne est décrite deux fois, xvi, 14, 31. L’existence du tabernacle et de l’arche est supposée, xvi, 34, quoique leur construction ne soit racontée que beaucoup plus loin. Les secondes tables de la loi, xxxiv, 1-10, contiennent un texte difl'érent de celui des premières,

XXIV, 12, quoique, d’après xxxiv, 1, le Décalogue doive être le même que celui du c. xx. Moïse est sur la montagne avec Jahvé, xx, 21 - xxiii, 33, et cependant il y est rappelé, xxiv, 1 ; le même désaccord se remarque, XXIV, 9, 12. Le c. xviii, dans lequel il est parlé d’une question juridique, n’est pas à sa place, puisque Moïse ne commence à recevoir de Dieu des dispositions législatives qu'à partir du c. xx.

Ces objections sont d’une faiblesse extraordinaire