Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 5.2.djvu/226

Cette page n’a pas encore été corrigée
1751
1752
EXODE


rait qu’il n’y ait à retenir que les faits de la sortie d'Égj’pte et de l’entrée d’Israël dans la péninsule du Sinaï. Valeton, dans le Manuel des religions de Chantepie de la Saussaye, trad. franc., Paris, 1894, p. 190-191.

Cependant, on se rend bien compte du silence des documents égyptiens. La caravane des fils de Jacob ne s'élevait, à son arrivée en Egypte, qu’au nombre peu important de 70 hommes. Exod., i, 5 ; Gen., XLVi, 8-27. L’installation de ces nomades dans la terre de Gessen, proposée par Joseph, a bien pu passer inaperçue dans l’administration du Pharaon, qui était lui-même un roi pasteur, puisque cette terre était alors un pays inculte et qu’elle ne devint un district administré comme les autres parties de l’Egypte, que sous Rarasès IL F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6^ édit., Paris, 1896, t. II, p. 219-220. D’autre part, les Pharaons n’avaient pas l’habitude de relater sur leurs stèles les événements défavorables qui se produisaient sous leur règne. On s’explique donc aisément que le Pharaon de l’Exode n’ait pas inscrit sur ses monumentsle souvenir des plaies d’Egypte, de la fuite des Hébreux et de la destruction de son armée dans la mer Rouge. Ces faits, qui étaient à la base de l’histoire d’Israël, ne constituaient qu’un épisode peu glorieux pour les Égyptiens, qui n’en ont pas gardé le souvenir. Spiegelberg, Der Aufenthalt Isracls in JEgyplen, 4'= édit., Strasbourg, 1904, p. 15-20 ; J. Nikel, Das Allé Testament im Lichte der orientalischen Forschungen. IL Moses und sein Werk, Munster, 1909, p. 14. « Après avoir longtemps joui, non sans un large profit, de l’hospitalité libérale des Égyptiens sur le sol de Gessen, le clan des patriarches hébreux se trouva réduit soudain à une condition plus dure. Pharaon fit peser sur ses hôtes, dont la richesse et l’accroissement étaient vus probablement d’assez mauvais œil par ses sujets, le poids des impôts et de la corvée. » H. Vincent, Canaan, Paris, 1907, p. 456. Il s'était produit un changement de dynastie, et le nouveau roi n’avait pas connu Joseph. Exod., i, 8. C'était Séti I", le fondateur de la XIX « dynastie égyptienne. Sous son fils Ramsès II, « le joug s’alourdit brusquement : il fallait créer en hâte des villes grandes et fortes : Ramsès et Pithom, et les exacteurs pharaoniques se firent si rudes pour les Israélites réduits au même servage que des prisonniers de guerre, qu'à la première occasion ils prirent la fuite. » H. Vincent, ibid. Une des villes bâties par les Hébreux est nommée Ramsès et elle a pris son nom de Ramsès II, son fondateur ; ses ruines ont révélé les travaux de ce prince. F. Vigouroux, loc. cit., p. 221-222, 236-250 ; Dictionnaire de la Bible, art. Pithom, t. v, col. 323324 ; Ramsès II, ibid., col. 971-974.

Suivant l’interprétation la plus répandue et la mieux appuyée, l’exode des Hébreux eut lieu sous le règne de Ménephtah P', au xiiie siècle avant JésusChrist. Or, il se rencontre que les Israélites sont nommés pour la prem-ière fois sur la stèle de ce roi, découverte en 1895 par M. Flinders Pétrie, dans les ruines de l’Amenophium de Thèbes. Ce Pharaon raconte ses victoires, la pacification de son empire, la punition des Chananéens révoltés et il dit qu' « Israël est déraciné et n’a pas de graine. » Il s’agit des Israélites réfugiés sur les bords du Nil plutôt que d’un clan Israélite, demeuré au pays de Chanaan, comme l’avait pensé M. Pétrie. « Après une vaine tentative pour entraver leur fuite, Pliaraon.qui a vu les Israélites s’enfoncer au désert, estime superflu de les y poursuivre, soit que d’autres soucis l’appellent ailleurs, soit qu’il juge assurée la ruine des fuyards ; en tout cas pour lui, leur race n’est plus. » H. Vincent, op. cit., p. 457. CL F. Vigouroux, La Bible et les

découvertes modernes, t. iv, p. 677-683 ; G. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, Paris, 1897, t. ii, p. 436, 443-444 ; A. Deiber, dans la Revue biblique, 1899, p. 267-277 ; Ph. Virey, ibid., 1900, p. 578-58& ; Dictionnaire de la Bible, art. Ménephtali /", t. v, col. 965-967. M. K. Miketta, Der Pharao des Auszuges, dans Biblische Studicn, Fribourgen-Brisgau, 1903, t. viii, fasc. 2, a tenté de reporter l’exode à une date antérieure et de la placer sous le règne d’Aménophis II, entre 1461 et 1436. Sa conclusion a été adoptée par J. Selbst, Handbucli zur BiblischenGeschichte, 6^ édit., Fribourg-en-Brisgau, 1910, t. I, p. 435.

Les objections tirées des miracles qui ont accompagné et suivi la sortie d’Egypte contre le caractère historique de cet exode, ne peuvent nous arrêter longtemps ici. Ces miracles « sont attestés par la croyance de toute une nation, croyance appuyée ellemême sur des usages immémoriaux, tels que la fête de Pâque, sur des monuments visibles, comme l’arche et le tabernacle. La croyance à ces miracles n’est pas pour le peuple d’Israël une sorte d'épopée nationale, comme le récit de la guerre de Troie pour les Grecs. C’est une croyance ferme, nette, précise, ayant des conséquences pratiques, » qui ont fait d’Israël le seul peuple monothéiste. Abbé de Broglie, Questions bibliques, p. 232. En outre, ces faits miraculeux s’unissent aux faits naturels et les expliquent au point qu’il faut rejeter comme non historique le récit de l’Exode tout entier, ou accorder aux miracles euxmêmes un caractère historique. Enfin, ces miracles présentent des circonstances qui conviennent au milieu historique où ils se sont produits, comme M. Vigouroux l’a clairement établi pour les plaies d’Egypte. La Bible et les découvertes modernes, t. ii, p. 305-349.

L’itinéraire suivi par les Israélites pour aboutir au Sina’i peut créer de graves difficultés exégétiques. Sa direction générale se justifie aisément. S’acheminer directement vers le pays de Canaan, c'était s’exposer à une ruine irrémédiable. « Informé de la fuite de cette immense et précieuse légion d’esclaves. Pharaon ne manquerait pas de se lancer à sa poursuite. D’ailleurs on se heurterait sans faute à la résistance des peuples de Canaan avant d’y être assez préparé. Un ordre divin ramène les fugitifs dans les solitudes austères et grandioses du Sina’i. On y prendra le temps nécessaire à l’organisation nationale qui fait encore défaut. La lutte avec les tribus rencontrées dans les vallées de pâturage et autour des puits aura pour résultat d’aguerrir le peuple pour les combats plus redoutables qu’exigera la conquête de Canaan. » H. Vincent, op. cit., p. 457. Sur les détails de cet itinéraire, voir F. Vigouroux, op. cit., t. ii, p. 350-489 ; J. Lagrange, dans la Revue biblique, 1900, p. 63-86.

On a remarqué que les plus anciens prophètes écrivains, Amos et Osée, connaissaient des faits racontés dans l’Exode. Amos parle de l’extermination des Amorrhéens, de la sortie d’Egypte et du séjour des Israélites pendant quarante ans au désert, ii, 9, 10 ; iii, 1 ; il dit cependant que les Israélites n’ont pas offert à Dieu de victimes et de sacrifices, v, 25, peutêtre de victimes et de sacrifices qui aient étéagréables au Seigneur. Osée mentionne aussi la sortie d’Egypte, opérée par l’intermédiaire d’un prophète, xl, 1 ; XII, 9, 13 ; mais il place les Israélites du désert audessus de ses contemporains relativement à leur conduite envers Dieu, ix, 10. Le séjour des Israélites en Egypte comme étrangers est rappelé encore par Isa’ie, LU, 4, et la sortie d’Egypte est mentionnée par les autres prophètes, ainsi que le séjour dans le désert. Jer., II, 2.

2° Moïse, législateur des Hébreux au Sinaï. — Les critiques rationalistes, qui reconnaissent en Mo’isj le