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EX CATHEDRA — EXCOMMUNICATION


avec toute l’autorité du successeur tic Pierre, pasteur et fondement de l'Église.

Les théologiens ont de plus en plus analysé le contenu de cette idée ; le résultat de leurs études est la phrase d’une merveilleuse précision, dans laquelle le concile du Vatican a énuméré les conditions de l’infaiUibilité et épuisé ainsi le sens de la formule : « Nous enseignons et définissons que c’est un dogme révélé de Dieu que le pontife romain, en vertu de l’assistance divine à lui promise en la personne de saint Pierre, est infaillible comme l'Église elle-même, lorsqu’il parle ex cathedra, c’est-à-dire lorsque, s’acquittant de sa charge de pasteur et de docteur de tous les chrétiens, il définit, par sa suprême autorité apostolique, comme devant être tenue par l'Église tout entière, une vérité concernant la foi ou les mœurs. » Denzinger-Bannwart, Enchiridion, n. 1839. Conformément à cette définition, on indique d’ordinaire quatre conditions pour que le pape parle ex cathedra. — 1° Il faut qu’il parle comme docteur et pasteur suprême, omnium christianonim pastoris et doctoris miinere fungens. L’infaillibilité est attachée, non à la science personnelle du pontife romain, mais à sa fonction, à son magistère public et officiel ; c’est lorsqu’il enseigne du haut de la chaire de Pierre, c’est-à-dire avec l’autorité promise à Pierre et transmise de lui à ses successeurs, comme maitre souverain de la vérité religieuse, que l’assistance divine lui a été garantie. — 2° Il faut qu’il s’agisse d’une doctrine concernant la foi ou les mœurs, doctrinam de fide vel moribus. Le terrain doctrinal de la chaire de Pierre est celui des choses divines ; Pierre est établi docteur de l'Église pour nous apprendre les vérités ou les devoirs nécessaires au salut ; il ne peut donc parler ex cathedra que sur le dogme ou la morale. Dans les questions humaines et profanes, l’autorité du pape pourra être celle d’un savant écouté pour sa compétence ; en ce qui regarde le gouvernement de l'Église, elle sera celle d’un chef à qui l’on obéit par discipline ; elle ne sera celle d’un maître dont l’enseignement est garanti par Dieu que s’il s’agit de choses religieuses ou morales. — 3° Il faut qu’il veuille trancher une question et fixer une vérité d’une manière définitive, pro siiprema sua apostolica aucloritate… définit. Le pape peut, en effet, exposer un point de la doctrine ou de la morale, le discuter, donner son avis autorisé ou ses directions, rappeler les principes catholiques et prévenir les écarts, sans pour cela trancher un débat et fixer la vérité d’une manière irrévocable ; il use ainsi d’un droit et remplit un devoir d’enseigner qui lui appartient comme à tous ceux qui sont établis par Dieu chefs dans l'Église. L’expression ex cathedra suppose, au contraire, l’exercice d’un pouvoir qui n’appartient qu'à Pierre, celui de rendre toute discussion et toute hésitation dans la foi impossible, de conserver l’unité dans la foi obligatoire en afiirmant la vérité avec une infaillible certitude, en la fixant irrévocablement par une décision divinement garantie. C’est pourquoi dans les documents e.v cathedra eux-mêmes les théologiens ont soin de distinguer tout ce qui précède ou suit la définition, de la définition proprement dite ; les motifs et les considérants, les preuves scripturaires ou liistoriques, les raisonnements, les explications ne sont pas infaillibles ; seule la sentence est portée ex ratiu’dra, parce que seule elle tranche avec toute l’autorité du magistère de Pierre. — 4° Il faut qu’il veuille imposer sa décision à l'Église tout entière, (tb unioersa Ecclesia tenendam. Ceci encore est un « les privilèges spéciaux à l’autorité doctrinale du chef de l'Église ; seul, il peut imposer une croyance à tous les fidèles ; il n’agit donc vraiment comme chef universel, il ne parle ex calliedra que s’il veut obliger

l'Église entière à la foi en la vérité qu’il enseigne.

Les gallicans prétendaient exiger une autre condition pour que le pape portât une sentence doctrinale ex cathedra, à savoir, le consentement de l'Église. Bossuet explique en ce sens la formule dont il s’agit : « que l’on regarde comme certain, si l’on veut, que le pape est infailhble quand il enseigne pro calliedra ; mais s’il y a un doute qu’il ait parlé pro catfiedra, avec toutes les conditions requises, la dernière marque et garantie sera le consentement de l'Église catholique. » Corollarium defensionis, viii. Le concile du Vatican a repoussé cette exigence qui ruinerait l’autorité de la chaire de Pierre ; quand le pape a parlé ex cathedra, l'Église n’a ni à juger, ni à contrôler, ni à confirmer, mais à se soumettre et à croire.

En somme, pour tout résumer en une phrase, l’expression ex cathedra indique l’autorité doctrinale souveraine en vertu de laquelle, par une assistance divine, Pierre en tant que chef de l'Église, le pape en tant « que succotseur de Pierre et comme lui chef de l'Église, peut, sans crainte de se tromper, imposer à la croyance de tous les fidèles une doctrine religieuse ou morale. Cette notion ressort de la formule elle-même, de son emploi théologique et de son explication autorisée par le concile du Vatican. Voir Infaillibilité.

Acla et décréta sacrorum conciliornin recenliorum, collectio lacensis, Fiibourg-en-Brisgau, 1890, t. vu ; Palniieri, De romano ponlifice, Rome, 1877, p. 509 sq. ; Billot, De Ecclesia, Rome, 1898, t. ii, p. 28 sq. ; Choupin, Valeur des décisions doctrinales et disciplinaires du saint-siège. Paris, 1907 ; Pègiies, L’autorité des enciicliqiies pontificales d’après saint Tliomas, dans la Revue Ihoniiste, novembre-décembre 1904.

L. GODEFROY.

    1. EXCOMMUNICATION##


EXCOMMUNICATION. — L Notion et division. IL Elïets juridiques.

I. Notion et division.

Notion.

L’excommunication (du latin excommunicatio : ex, de, communicatio, l’action de communiquer, de communier, .

de s’unir avec) signifie l’exclusion totale de la communion de l'Église. C’est la plus grave de toutes les censures, et elle rejette hors de la société des fidèles celui qui en est frappé. Elle est fréquemment désignée, surtout dans les anciens canons, sous le nom d’anathème, analliema, malédiction, exécration, encore que, comme l’observe Berardi, Commentaria in jus ecclesiasticum universuni, Venise, 1789, t. iv, p. 187, entre l’excommunication et l’anathème, existe une différence assez marquée. L’excommunication, d’après Boniface VII I, Sexte, 1. V, lit. xxix, c. 1, a un caractère médicinal : medicinalem et disciplinarem non eradicantem ; au contraire, l’anathème, selon la remarque de saint Augustin, q. i, caus. II, can. 18, est mortel, et est interprété, dans le décret du concile de Meaux, an. 845, q. iii, caus. XI, can. 41, comme une condamnation à la mort éternelle. C’est pourquoi l’anathème est infligé aux contumaces, qui résistent obstinément à l'Église, n’offrant aucun espoir d’amendement, en sorte que cette peine s’applique au crime mortel, soit au crime où le délinquant s’obstine jusqu'à la mort : analliema nonnisi pro mortali imponi crimine et illi qui aliter non prolueril corrigi. Can. cit., caus. XI, q. m. Tel est spécialement le cas des hérétiques, contre lesquels, en effet, on voit les canons des conciles prononcer la sentence de l’anathème. Cf., par exemple, les canons des conciles de Trente et dU'^Vatican. Aussi bien l’anathème représente-t-il une peine plutôt qu’une censure, et, en raison de sa gravité exceptionnelle, le décret, déjà cité, du concile de Meaux dispose que les évêques ne peuvent y recourir sans en avoir réfère à l’archevêque ou à leurs co-évêques : ncmo episcoporam quemlibet sine cerla el manifesta peccali causa communione privel eccle-