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    1. ÉVÊQUES##


ÉVÊQUES. ORIGINE DE L'ÉPISCOPAT

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chef. Ce personnage, autour duquel se groupaient les membres de la famille, les esclaves et les clients, ainsi que les individus isoles admis à participer aux réunions familiales, présidait au culte et veillait au bon ordre. C'était le Tipîio’JTepoç ou éTtio-y.ouo, - primitif, supérieur d’une Église privée (è^y.Xïiffi’a xar' oV/.ov). Quand ces petites sociétés religieuses arrivèrent à fusionner, elles eurent ainsi à leur tête un collège de TipîoSjTspoi ou âTtitJv.ouoi. Cette pluralité ne pouvait pas durer longtemps : le plus habile ou le plus influent finit par s’imposer aux autres et ce fut l’origine de l'épiscopat. Uebcr den Urspning des Episkopals, Tubingue, 1838. L’arbitraire de cette théorie saute aux yeux ; et, comme elle n’est plus soutenue par personne, il semble inutile de la réfuter. — 2. Explication de Roihe, Die Anfânge dcr christl. Kirche und ihrer Verfassuny, 1837. — Jusqu’en 70, « il n’y avait pas d'ÉgUse chrétienne, il n’y avait que des groupes isolés de chrétiens, » p. 310. Cependant tout était prêt alors pour l’apparition de l'Église et tout la faisait présager : le besoin d’unir les deux principales fractions du christianisme, les Juifs et les Gentils ; la naissance des hérésies, contre lesquelles il fallait se prémunir et se défendre ; la destruction de Jérusalem, qui avait servi jusque-là de centre à la religion nouvelle, centre auquel il était désormais nécessaire de substituer un autre principe d’unité ; la mort des principaux apôtres, Jacques, Pierre, Paul, qui formaient un lien vivant entre les communautés chrétiennes. Rothe suppose que dans ces conjonctures urgentes les apôtres encore en vie, Jean, Philippe et peut-être André, s’assemblèrent à Jérusalem et y décrétèrent la création de l'épiscopat. Les preuves qu’il en donne sont extrêmement faibles, pour ne pas dire nulles, a) C’est d’abord le texte d’Eusèbe, H. E., 1. III, 11, qui raconte, vraisemblablement sur la foi d’Hégésippe, qu’après la chute de Jérusalem les apôtres survivants se réunirent là pour choisir un successeur à Jacques ; mais, sans parler de l’anachronisme commis par Eusébe — puisque Jacques souffrit le martyre en 62 ou 63 — le but de la réunion est un objet particulier et non la fondation de l'épiscopat, censé existant dans la personne de Jacques. — b) C’est un des fragments apocryphes publiés par Pfafï sous le nom de saint Irénée, fragment qui d’ailleurs ne concerne en rien la fondation de l'épiscopat. — c) C’est le passage connu où saint Clément Romain, / Cor., xlii, 4 ; xliv, 2, dit que les apôtres établirent des è-nÎT/jj-Koi et des diacres, mais sans spécifier ni le temps ni le lieu. — d) C’est enfm un texte de la Prædicatio Pauli cité dans le traité De baptismo hserciieorum qu’on trouve parmi les œuvres de saint Cyprien et qui mentionne simplement une rencontre à Rome de saint Pierre et de saint Paul. Sur ces bases fragiles, Rothe appuie sa conclusion : « Nous avons démontré que la fondation de l'épiscopat tombe au temps même où nous devons placer l’apparition de l'Église, c’est-à-dire peu après l’an 70. » Ibid., p. 397. — 3. Explication de Lightfool, The Christian ministnj, dans le commentaire sur l'Épître aux Philippiens, p. 181-269. — Sans adopter l’hypothèse de Rothe sur l’apparition soudaine de l'épiscopat et le coup de théâtre produit par le prétendu décret apostolique de l’an 70, Lightfoot accorde que l'épiscopat a dû, sinon surgir, au moins « se développer principalement dans la période obscure qui comprend les trente dernières années du i'^e siècle, » p. 205-206. Ce qui y contribua surtout, comme le veut Rothe, ce furent les dissensions entre les Juifs et les païens convertis, ainsi que les disputes soulevées par les gnostiques. Grâce à son ascendant personnel, Jacques s'était acquis à Jérusalem une situation spéciale. Tout collège d’anciens {-nptno’j’t poi) devait nécessairement avoir un président, soit à vie soit à tour de rôle : ce fut le germe de l'épiscopat. Il suffisait de consolider et de rendre uniforme cet office ; et pour cela l’intervention des apôtres n'était pas requise. « Le besoin pressant et l’utilité évidente de cette charge, qui pouvait s’autoriser du nom le plus vénérable de la chrétienté, pouvaient en assurer la diffusion graduelle, » p. 207. L'épiscopat naquit spontanément lorsque la chrétienté ne put plus s’en passer ; c’est le principe évolutionniste : le besoin crée l’organe. Lightfoot ne nie pas d’ailleurs que les apôtres, en particulier saint Jean, n’aient contribué à cette évolution.

2° La hiérarchie issue d’une fusion entre des éléments disparates. - — Ce système, qui a eu pendant quelque temps assez de vogue, revêt aussi plusieurs formes. — 1. Tliéorie de Hatch, The organization oj the earlij christicm Churches [Bampton Lectures de 1880], Londres, 1881. D’après Hatch, les TipeaS’jTepoi des Églises chrétiennes furent créés à l’image et ressemblance des cmciens dans les communautés juives. Or ces derniers n'étaient pas des ofiiciers de la synagogue, mais du sanhédrin ou tribunal local qui existait parallèlement à la synagogue. Ibid., p. 8. Ils étaient chargés de la discipline et de la police et réglaient les différends entre membres de la communauté. L’i-LT/.oTro ;, lui, était le trésorier des associations païennes, thiases, éranes, collèges funéraires ; comme ces petites associations étaient uniquement ou principalement des sociétés de secours mutuel, on comprend quelle était l’importance de celui qui en recueillait et en administrait les fonds. De même, dans les Églises primitives constituées à l’imitation des sociétés païennes, VÎTzlay.o-o ;, aidé des diacres, s’occupait des finances. Peu à peu les Tcpeso’jTspoi se donnèrent un président et souvent leur choix tomba sur le personnage influent qui gérait la caisse de la communauté. Ainsi se fit la fusion des deux éléments disparates, fusion que les controverses du iie siècle devaient accélérer et généraliser. On n’a pas eu de peine à renverser cette construction de pure fantaisie. Plusieurs ont fait remarquer combien il était arbitraire d’assimiler les communautés chrétiennes aux associations religieuses du paganisme. Mais il n’est pas besoin de cela. Il est prouvé maintenant que ViTil< ! -Aor^o ; n’a aucune relation ni avec ces associations ni surtout avec la gestion des finances. Waddington, Inscriptions de Syrie, n. 1890, assimilait les i-nidy.oT.oi aux agoranomes (fonctionnaires chargés de surveiller les marchés) ; C. Fossey, Dédicace de El-Burdj, dans le Bulletin de corresp. hellénique, 1895, t. xix, p. 306, combat cette assimilation en remarquant que, dans les inscriptions syriennes où le mot paraît le plus fréquemment, il est employé seulement dans des textes relatifs à la construction de monuments et qu’une fois même on lit ÈTtitT/oTroç ëpywv (inspecteur des travaux). Hatch a reconnu depuis, Exposilor, 1887, 3 « série, t. v, p. 99, qu’il n’y a point à insister sur le rôle financier des èniaxonoi..Mais alors tout son système croule par la base. — 2. Théorie de Harnack. — Dans la traduction allemande de l’ouvrage de Hatch, Die Gescltschaflsverfassung der christl. Kirchen im Alterthum, Giessen, 1883, Harnack adoptait en général les vues de son devancier ; mais depuis il les a tellement modifiées ou mêlées à tant d'éléments hétérogènes que l’exposition en est à peu près impossible. Autrefois Harnack identifiait l’iTiiV/.oTTo ; et le TipsfrgJTîpo ;. Maintenant il les distingue à la manière de Hatch, dont le mérite principal, selon lui, est d’avoir établi >i que la constitution ecclésiastique plus tard en usage fut un amalgame de deux organisations différentes : » les épiscopes et les