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ÉVÊQUES. ORIGINE DE L'ÉPISCOPAT


lui-même. — 1. Saint Clément de Rome. — En 96, du vivant de saint Jean et trente ans à peine après le martyre de Pierre et de Paul, saint Clément affirme expressément que les apôtres ont établi des ÈTrîav^'JTrcii et des diacres. / Cor., xiiv, 2-3. L’argument en faveur de l’origine apostolique de l'épiscopat est indépendant du sens à donner au mot ÈTTiV/.oTîoi. En effet, saint Clément nous apprend que les apôtres assurèrent la succession de la hiérarchie en réglant que les dignitaires constitués par eux en institueraient d’autres à leur tour. Or, des hommes capables d’en ordonner d’autres pour le même office sacré possédaient le pouvoir de l’ordre et étaient par conséquent, de quelque nom qu’on pût les appeler, de véritables évêques. — 2. Sain' Irénéc oppose ainsi aux hérétiques la tradition reçue des apôtres et conservée intacte dans toute l'Église, Cont. hær., 1. III, iii, 1 : Habemus annumerare eos qui ab apostolis institiili sunt episcopi et successores eorum usque ad nos, qui nihil taie docuerunt ncque eognovenint quale ab liis deliratur. Est-il croyable que les apôtres n’aient pas transmis leur vraie doctrine à leurs successeurs légitimes ? Valde enim pcrfecfos et irreprehensi biles in omnibus eos volebant esse quos et sueeessores relinquebant, suum ipsorum locum magisterii tradentes. En résumé, vers l’an 180, saint Irénée, qui avait vécu en Asie Mineure et visité Rome, qui avait entrepris de longues recherches historiques pour la composition de son grand ouvrage, affirme de la manière la plus explicite que les apôtres ont établi des évêques et cela en qualité de successeurs : or il n’y avait à cette époque aucune équivoque sur le sens du mot évêques. Ce qui suit est encore plus remarquable, Cont. Iiœr., 1. iii, III, 2 : Sed quoniam valde longum est in hoc tali voluminc omnium Ecclesiurum enumerare successiones, maximse et anliquissimæ et omnibus cognitæ, a gloriosissimis duobus aposlolis Petro et Paulo Ilomæ fundalæ et constitutæ Ecelesiæ, cam quam lutbet ab apostolis traditioncm et annuntialam liominibus fidem, per successiones episcoporum pervenientem usque ad nos indicantes, confundimus omnes [hæreticos]. L’auteur se contente de donner la liste des évêques romains, parce que l'Église de Rome est la plus ancienne et la plus illustre, mais il connaît plusieurs listes semblables et le nombre doit en être assez grand puisqu’il craindrait, en les transcrivant, d’allonger son ouvrage. — 3. Tertullien n’est pas moins formel quand il défie les hérétiques de remonter jusqu’aux apôtres, De præscript., 32 : Edanl ergo origines Ecclesiarum suarum ; evolvant ordincm episcoporum suorum, ita per successiones ab initio decarrentem, ut primas ille episcopus aliquem ex apostolis, vel apostolicis viris, qui lamen cum apostolis perseveraverit, habueril cmciorem et antecessoram. Hoc enim modo Ecelesiæ aposlolicæ sensus suos deferunt : sicut Smyrnœorum Ecclesia Pohjcarpum a Joanne collocatum refert ; sicut Romanorum, Clementem a Petro ordinaium edit ; proinde utique et ceteræ exliibent quos ab apostolis in episcopalum conslilulos apostolici seminis traduces habecmt. Ce texte se passe de commentaire.

2° Existence de listes épiscopedes remonleml jusqu’aux apôtres. — Sans parler de Smyrne dont le premier évêque Polycarpe fut — nous le verrons plus loin — établi par saint Jean, nous possédons quatre listes épiscopales complètes pour Idiome, Alexandrie, Antioche et Jérusalem. Ces listes sont données par Eusèbe dans son Histoire et dans sa Clironique. Elles présentent quelque diversité : celles de Rome et d’Alexandrie indiquent : 1. le numéro d’ordre de chaque évêque ; 2. le synchronisme de son entrée en charge ; 3. la durée de son pontificat ; celle d’Antioche omet le dernier renseignement et celle de Jérusalem, les deux derniers. Harnack Die Zeit des Ignatius uud

die Clironologic der antiocli. Bisctiofe, etc., Leipzig, 1878 ; Die Clironologic der altcliristl. Littercdur, Leipzig, 1897, t. I, p. 70-230, a longuement étudié ces hstes et essayé de prouver qu’elles dérivent dans leur ensemble et leurs détails de la Clironographie publiée en 222 par Jules Africain. Hilgenfeld, dans Zeilsclirift fiir wissensch. Théologie, 1878, t. xxi, p. 409413, a vivement critiqué cette thèse comme exagérée et trop absolue. Il est très vraisemblable, en effet, cju’Eusèbe a fait usage de la Clironographie de Jules Africain ; mais il ne faudrait pas laisser croire ni surtout donner l’impression qu’Eusèbe et Jules Africain lui-même n’avaient pas à leur disposition des ouvrages analogues. Avant eux, des listes épiscopales avaient été dressées par Irénée et par Hégésippe et l’un et l’autre en avaient certainement eu connaissance. Bien que saint Irénée se borne à transcrire la liste romaine, il affirme expressément qu’il en connaît plusieurs autres remontant jusqu’aux apôtres. Cont. hser., . III, iii, 1. Voici maintenant les paroles d’Hégésippe dans Eusèbe, H. E., 1. IV, xxii, 3 :

Kai iv : ép.zvvi rj Èy.y.>, ïiTi’a L'Église des Corinthiens

Yi KopcvÔîwv VI T(j) 6p6ù) persévéra dans l’orthodoxie Xo’Y’o piy.pï np' ; [j.ou ÈTtcrrxojusqu'à ce que Primus lût TTEJovTo ; Èv Kopt’vSfool ; évêque de Corinthe. Pendant iTuvc'[j.t|a 7r).s(.)v s’t ; 'P(ô[j.v-, v mon voyageàRome.je fus en xal iTUv8tÉTpi’j/a Toîç Kop : vrapport avec eux et je séjour8Î01Ç rii.épai t/.avâç, âv ac ; nai longtemps parmi eux, truvave7tâ/]u.£vTâ)opOw>()Y(.)- jouissant de leur saine docYïvo’y.svoç ôHv 'Pa)( ;.ï), 51atrine. Arrivé à Rome, je fis la 60/.T|V âTros/]Tâtj, Y]v [JÉ^pt ; [liste de] succession jusqu'à 'Av'.-/.r|TO’j" oS ôtixovoç r, v Anicet, dont Éleuthére était 'EÀsjÔspoç, y.ai Ttapà 'Avidiacre. Soter succéda à Ani/.riTou 8ta53-/ôTai Swrcip, cet et Éleuthére à Soter. Or [xe9' ov 'EXîjQeîo ;. 'Ev dans chaque succession [épisï-Aâirrq Se Siacox » ) xal èv copale] et dans chaque cité, £xdt(TTT5 Trô), st oÛtwi ; ïyti mç la foi est conforme à l’enseiô vô(j.rjî xï)pJo- ! 7ît -/.où oi gnement de la Loi et des proirpoyr, Tat xoù ô Kjpio ;. phètes et du Seigneur.

C ? passage est parfaitement clair, pourvu qu’on ne l’obscurcisse point par des commentaires tendancieux. Hégésippe arrive à Rcme sous Anicet ( 55-166 et y dresse une liste des papes jusqu'à cette époque, liste qu’il met plus tard au courant en y : joutant les deux successeurs d’Aiiicet, lorsqu’il compose ses Mémoires sous Éleuthére. Harnack prétend. Die Chronologie, etc., t. I, p. 180-187, que otxSoyriV inovriaci.ii.ri’J ne peut pas signifier : « Je dressai une lis’e de succession » et qu’il faut lire par conséquent oiarpcSriv ÈTroiria-à(i, r|v : « Je fis un séjour » . Mais sa correction du texte, contraire à tous les manuscrits, est avec raison repoussée comme arbitraire par les nouveaux éditeurs de Berlin et Funk a démontré, Zur Frage nach dem Papslkatedog Hegesipps, dans Kirschengesch. Abhandlungen, Paderborn, 1897, t. i, p. 381-390, que le texte d’Hégésippe n’offre aucune ambiguïté, car dans ce même texte Hégésippe emploie ôtaSs/cirfJxt au sens de « succéder » et oiaSo/r, au sens de « succession » ou « ordre de succession » . Lightfoot, St. Clément of Rome, Londres, 1890, t. i, p. 327-333, donne de très bonnes raisons pour admettre que la liste épiscopale de Rome composée par Hégésippe nous a été transmise par saint Épiphane, Hær., xxviii. G, quoique cette thèse ne soit peut-être pas prouvée avec une rigueur absolue. Cf. Funk, op. cit., p. 373-381. Mais il y a dans le passage d’Hégésippe cité plus haut d’autres remarques à faire. Hégésippe s'était livré à Corinthe à un travail analogue et il avait constaté que la saine doctrine s'était conservée dans cette Église jusqu'à l'épiscopat de Primus alors en charge. II était donc remonté jusqu’aux origines et l’on voit par la manière dont il s’exprime c u’il n’a aucun