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EVANGILE — EVANGILES APOCRYPHES

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iiile personnel, Rom., ii, 16 ; xvi, 25 ; II Tim., ii, 8, qu’il répandait dans les Églises de la gentilité. H Cor.,

IV, 3 ; Gal., i, 11. Il l’avait soumis aux autres apôtres, qui l’avaient trouvé conforme au leur, Gal., ii, 2, quoique la manière de l’envisager et de le présenter fût propre à l’apôtre des gentils. Cet Évangile représente, en effet, la forme spéciale que saint Paul donnait au message du salut. C'était, par opposition à la loi juive, le salut et la liberté apportés au monde par la religion chrétienne. Rom., i, 16 ; Gal., ii, 4, 5, 14. La prédication des judaïsants, qui voulaient maintenir la loi ancienne, était un « autre Évangile » . Gal., i, 6 ; II Cor., XI, 4. En souhaitant aux Romains d'être confirmés dans son Évangile, Rom., xvi, 25, l’apôtre identifie cet Évangile avec le mystère de Dieu, autrefois caché et maintenant révélé aux hommes par l’avènement de Jésus-Christ et par la prédication de sa doctrine. Eph., vi, 19. Or, ce mystère ou secret dessein de Dieu consiste dans la rédemption de tous les hommes, dans l’admission des gentils aux biens messianiques par l’abolition de la loi mosaïque, comme seul moyen de justification et de salut. Cf. F. Prat, La théologie de saint Paul, Paris, 1908, 1. 1, p. 52-55, 429-433.

La signification d’ija-j-yi/iov pour désigner la prédication orale de la doctrine de Jésus-Christ a passé des écrits du Nouveau Testament dans les plus anciens monuments de la littérature chrétienne. Ainsi, S. Clément de Rome, / Cor., xlvii, 2, Funk, Patres apostoliei, t. i, p. 100 ;.S. Ignace, Ad Philad.,

V, 1, ibid., p. 268 ; S. Justin, Dial. ciini Tryphone, 10, P. G., t. VI, col. 496. Elle a persévéré jusqu'à nos jours dans le langage chrétien, et les prêtres et les missionnaires sont toujours nommés les prédicateurs de l'Évangile. On a aussi conservé l’opposition établie par saint Paul entre la loi et l'Évangile, et le nom d'Évangile, pris en ce sens, désigne la révélation chrétienne et la nouvelle alliance en opposition avec la révélation juive et l’ancienne alliance.

2° L'Évangile écrit. — Par l’emploi d’une métaphore bien connue qui passe du contenu au contenant, on a donné, dans la littérature ecclésiastique, une signification nouvelle au mot îJavi'éÀtov. Ce mot, qui désignait la bonne nouvelle du salut et la doctrine de Jésus-Christ, a servi à désigner aussi les écrits dans lesquels cette bonne nouvelle et cette doctrine étaient consignées. Cette nouvelle acception fut introduite au cours du ii<e siècle de notre ère. En visant une recommandation évangélique, Matth., xviii, 15-17, l’auteur de la Didaché, xi, 3 ; xv, 3, 4, Funk, t. i, p. 26, 34, considère le contenu du livre plutôt que le livre lui-même. Il en est de même, // Cor., viii, 5, p. 194. Mais la Didachè, viii, 2, Funk, t. i, p. 18, vise un Évangile écrit qui contient l’oraison dominicale. Cf. E. Jacquier, Le Nouveau Testament dans l'Église clirélienne, Paris, 1911, t. i, p. 69. Saint Justin parait avoir été le premier à donner le nom d'Évangile aux livres eux-mêmes. Si l’on peut discuter la signification précise de ce nom dans quelques passages des écrits de ce Père, par exemple, Dial. cwn Tryphone, 10, P. G., t. VI, col. 496, on ne peut avoir aucune hésitation, quand il nomme expressément vjtxy'(ù : 3. les ouvrages qu’il appelle plusieurs fois « les mémoires des apôtres » . Apol., i, 66, ibid., col. 429. L'Épître à Diognète, xi, 6, Funk, op. cit., t. i, p. 410, oppose la foi des Évangiles à la crainte de la loi, à la grâce des prophètes et à la tradition des apôtres. Saint Irénée indique bien quelle a été la formation de ce nom. Il déclare, d’une part, que les évangélistes ont mis par écrit l'Évangile ou la prédication évangélique, et il appelle, d’autre part, leurs écrits des Évangiles. Les deux notions d'Évangile oral et d'Évangile écrit reviennent constamment sous sa plume. Cl'.Th. Zahn,

Geschichle des Neutestamentliclwn Kanons, Erlangen, 1888, t. i, p. 161-103.

Ce nom a d’abord été donné aux écrits apostoliques, qui racontaient la vie de Jésus et exposaient sa doctrine, telles que la prédication orale les avait consacrées et transmises. Quand les hérétiques composèrent d’autres récits sur la vie de Jésus, ils leur donnèrent le nom d'Évangile, qui était usuel. Il y eut donc dès lors à distinguer entre les Évangiles apostoliques que l'Église reçut conune témoignages authentiques de la prédication apostolique et qu’elle inséra dans son canon, ou sa liste olTicielle des Livres saints, et des Évangiles, qu’elle rejeta parce qu’ils n'étaient pas d’origine ou d’autorité apostolique et qui furent nommés apocryphes. Voir les deux articles suivants.

Fillion, Introduction générale aux Évangiles, Paris, 1889, p. 1-3 ; Th. Zahn, Einleilung in dasNeue Testament, 2e édit., Leipzig, 1900, t. ii, p. 159-173 ; J. Wei ss, Z)as dlteste Evangelium, Gœttingue, 1903, p. 25-42 ; A. Loisy, Les Évangiles synoptiques, Ccffonds, 1907, t. i, p. 3-5 ; A. Harnack, Enistcluing und Entwickebing der Kinhenuerfassung und des KirchenreclUs in den zwei erstenJahrInmderten, Leipzig, 1910, p. 199-239 ; F. Prat, La tliéologie de saint Paul, Paris, 1912, t. ii, p. 57-60.

E. M.VXGENOT.

    1. ÉVANGILES APOCRYPHES##


2. ÉVANGILES APOCRYPHES. Sous l’appellation générique d'Évangiles apocryphes, on range tous les écrits extracanoniques qui retracent la vie du Sauveur ou de sa famille, en prétendant à une autorité analogue à celle des Évangiles canoniques. Ces écrits peuvent, d’ailleurs, ou bien se poser en rivaux des récits authentiques, qu’ils aspirent à remplacer, ou bien, plus modestement, prétendre à les compléter. De là, une distinction très importante entre les Évangiles apocryphes au point de vue de leur contenu. En ce qui concerne les influences qui leur ont donné naissance, il convient également de distinguer, d’une part, des Évangiles comme celui des Hébreux ou celui des Égyptiens, assez semblables aux Évangiles canoniques par leurs origines et, d’autre part, la grande majorité des Évangiles apocryphes. Publiés à une époque plus récente, ces derniers n’ont plus l’unique préoccupation de relater les traditions courantes concernant le Sauveur ; ils répondent à des désirs plus complexes, soit qu’ils veuillent simplement satisfaire la curiosité des contemporains sur les parties de la vie de Jésus laissées dans l’ombre par l'Évangile, soit qu’ils veuillent insinuer des doctrines parfois tendancieuses, parfois nettement hérétiques sous le couvert d’enseignements évangéliques.

Le problème que soulèvent les Évangiles apocryphes est donc : 1° de préciser leur rapport avec les Évangiles canoniques (quels Évangiles ont-ils connus, et comment les ont-ils utilisés ?) ; 2° de déterminer jusqu'à quel point leurs additions aux récits de l'Évangile provieiment de sources indépendantes et authentiques ; 3° de décider, enfin, si les fictions surajoutées sont dues simplement à une pieuse fraude, ou manifestent, au contraire, des tendances hérétiques. Ce problème est singulièrement compliqué par l'état fragmentaire de la plupart des textes, comme aussi par l’indécision du texte des Évangiles conservés en entier. On s’accorde pourtant à déclarer que, sauf des exceptions à signaler ultérieurement, lesÉvangiles apocryphes dépendent des Évangiles canoniques ; que, sauf des cas particuliers où il n’est pas interdit de supposer l’emploi de sources orales, l’on n"a affaire, pour ce qui concerne les additions à la matière évangélique, qu'à d’audacieuses fictions ; bref, que la valeur documentaire des Évangiles apocryphes est extrêmement minime, sinon tout à fait nulle. Ce qui ne veut pas dire que l'étude de ces apocryphes soit sans importance. Elle permet d’abord de se rendre un compte plus exact des difficultés